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European Court of Human Rights


You are here: BAILII >> Databases >> European Court of Human Rights >> ESKICI v. TURKEY - 23123/06 - HEJUD (French text) [2013] ECHR 161 (19 February 2013)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2013/161.html
Cite as: [2013] ECHR 161

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    DEUXIÈME SECTION

     

     

     

     

     

     

    AFFAIRE ESKİCİ c. TURQUIE

     

    (Requête no 23123/06)

     

     

     

     

     

     

     

     

    ARRÊT

     

     

     

    STRASBOURG

     

    19 février 2013

     

     

     

     

    Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.

     


    En l’affaire Eskici c. Turquie,

    La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant en un Comité composé de :

              Dragoljub Popović, président,
              Paulo Pinto de Albuquerque,
              Helen Keller, juges,
    et de Françoise Elens-Passos, greffière adjointe de section,

    Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 29 janvier 2013,

    Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

    PROCÉDURE


  1. .  A l’origine de l’affaire se trouve une Requête (no 23123/06) dirigée contre la République de Turquie et dont une ressortissante de cet Etat, Mme Buşra Eskici (« la requérante »), a saisi la Cour le 5 juin 2006 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

  2. .  La requérante est représentée par Me E. Efe Göksel, avocate à Istanbul. Le gouvernement turc (« le Gouvernement ») est représenté par son agent.
  3. 3.  Le 1er septembre 2009, la Requête a été communiquée au Gouvernement.

    EN FAIT

    LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE


  4. .  La requérante est née en 1929 et réside à Kızıltepe.

  5. .  Le 9 septembre 1997, la requérante demanda la levée de la curatelle sur les biens qui appartenaient à sa mère défunte devant le tribunal de grande instance d’Üsküdar.

  6. .  Le 31 octobre 2000, le tribunal rejeta la demande de la requérante.

  7. .  Le 27 juin 2001, la Cour de cassation infirma ce jugement.

  8. .  Le 7 mars 2002, le tribunal de grande instance se déclara incompétent et renvoya l’affaire devant le tribunal d’instance d’Üsküdar.

  9. .  Le 24 juin 2003, le tribunal d’instance débouta la requérante de sa demande.

  10. .  Le 18 mars 2004, la Cour de cassation confirma ce jugement.

  11. .  Le 15 mai 2006, la Cour de cassation rejeta le recours en rectification de l’arrêt.
  12. EN DROIT

    I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION


  13. .  La requérante allègue que la durée de la procédure a méconnu le principe du « délai raisonnable » tel que prévu par l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :
  14. « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »


  15. .  Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.

  16. .  La période à considérer a débuté le 9 septembre 1997 et s’est terminée le 15 mai 2006. Elle a donc duré près de huit ans et huit mois, pour deux instances.
  17. A.  Sur la recevabilité


  18. .  La Cour constate que la Requête n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 (a) de la Convention. Elle relève en outre qu’elle ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de la déclarer recevable.
  19. B.  Sur le fond


  20. .  La Cour rappelle que le caractère raisonnable de la durée d’une procédure s’apprécie suivant les circonstances de la cause et eu égard aux critères consacrés par sa jurisprudence, en particulier la complexité de l’affaire, le comportement de la requérante et celui des autorités compétentes ainsi que l’enjeu du litige pour les intéressés (voir, parmi beaucoup d’autres, Frydlender c. France [GC], no 30979/96, § 43, CEDH 2000-VII, Kaplan c. Turquie, no 24240/07, § 48, 20 mars 2012).

  21. .  Après avoir examiné tous les éléments qui lui ont été soumis, la Cour considère que le Gouvernement n’a exposé aucun fait ni argument pouvant mener à une conclusion différente dans le cas présent. Compte tenu de sa jurisprudence en la matière, la Cour estime qu’en l’espèce la durée de la procédure litigieuse est excessive et ne répond pas à l’exigence du « délai raisonnable ».
  22. Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1.

    II.  SUR LES AUTRES VIOLATIONS ALLÉGUÉES


  23. .  Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, la requérante se plaint du rejet de sa demande et de l’issue de la procédure. Invoquant l’article 13 de la Convention, elle se plaint de l’absence d’un recours effectif contre la décision de mise sous curatelle. Sur la base de l’article 1 du protocole no 1 de la Convention, elle se plaint d’avoir été privée des biens dont elle serait héritière et, sous l’angle de l’article 14, du fait que le rejet de sa demande serait fondé sur son origine libanaise.

  24. .  La Cour a examiné ces griefs. Compte tenu de l’ensemble des éléments en sa possession, et dans la mesure où elle est compétente pour connaître des allégations formulées, elle n’a relevé aucune apparence de violation des droits et libertés garantis par la Convention. Il s’ensuit que cette partie de la Requête doit être rejetée, en application de l’article 35 § 4 de la Convention.
  25. III.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION


  26. .  Aux termes de l’article 41 de la Convention,
  27. « Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »


  28. .  La requérante réclame 10 000 euros (EUR) au titre du préjudice matériel qu’elle aurait subi du fait de la violation de l’article 1 du protocole no 1. Cependant, la Cour relève qu’elle n’a présenté aucune demande de satisfaction équitable concernant la durée de la procédure ni n’a communiqué ses prétentions au titre des frais et dépens conformément à l’article 60 § 2 du règlement. Partant, la Cour estime qu’il n’y a pas lieu de lui octroyer de somme à ces titres.
  29. PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

    1.  Déclare la Requête recevable quant au grief tiré de la durée excessive de la procédure et irrecevable pour le surplus ;

     

    2.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention  en raison de la durée de la procédure ;

     

    3.  Rejette la demande de satisfaction équitable.

     

    Fait en français, puis communiqué par écrit le 19 février 2013, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

    Françoise Elens-Passos                                                      Dragoljub Popović
         Greffière adjointe                                                                 
    Président


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