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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Strintzis Lines Shipping SA v Commission of the European Communities [2006] EUECJ C-110/04 (30 March 2006)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2006/C11004.html
Cite as: [2006] EUECJ C-110/4, [2006] EUECJ C-110/04, [2006] ECR I-44

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AVIS JURIDIQUE IMPORTANT: IMPORTANT LEGAL NOTICE - The source of this judgment is the web site of the Court of Justice of the European Communities. The information in this database has been provided free of charge and is subject to a Court of Justice of the European Communities disclaimer and a copyright notice. This electronic version is not authentic and is subject to amendment.


ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)
30 mars 2006 (*)

«Pourvoi - Article 85, paragraphe 1, du traité CE (devenu article 81, paragraphe 1, CE) - Concurrence - Ententes - Accord entre entreprises - Pouvoirs de vérification de la Commission»

Dans l'affaire C-110/04 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l'article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 1er mars 2004,
Strintzis Lines Shipping SA, établie au Pirée (Grèce), représentée par Mes A. Kalogeropoulos, K. Adamantopoulos et E. Petritsi, dikigoroi, ainsi que par Me M. Nissen, advokat,

partie requérante,

l'autre partie à la procédure étant:
Commission des Communautés européennes, représentée par MM. R. Lyal et T. Christoforou, en qualité d'agents, assistés de Me G. Athanassiou, dikigoros, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (sixième chambre),
composée de M. J. Malenovský, président de chambre, MM. J.-P. Puissochet (rapporteur) et U. Lõhmus, juges,
avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,
greffier: M. R. Grass,
l'avocat général entendu,
rend la présente
Ordonnance
  1. Par son pourvoi, la société Strintzis Lines Shipping SA demande l'annulation de l'arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 11 décembre 2003, Strintzis Lines Shipping/Commission (T-65/99, Rec. p. II-5433, ci-après l'«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l'annulation de la décision 1999/271/CE de la Commission, du 9 décembre 1998, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CE (IV/34.466 - Transbordeurs grecs) (JO 1999, L 109, p. 24, ci-après la «décision litigieuse»), condamnant la requérante à une amende de 1,5 million d'euros pour avoir enfreint l'article 85, paragraphe 1, du traité CE (devenu article 81, paragraphe 1, CE).
  2. Les faits à l'origine du litige

  3. La requérante est une société d'exploitation de transbordeurs qui assure des services de transport de passagers et de véhicules entre le port de Patras (Grèce) et ceux d'Ancône (Italie), Brindisi (Italie) et Bari (Italie).
  4. à la suite d'une plainte d'un usager, selon laquelle les tarifs des transbordeurs étaient très semblables sur les lignes maritimes entre la Grèce et l'Italie, la Commission des Communautés européennes, agissant en vertu de l'article 18, paragraphe 3, du règlement (CEE) n° 4056/86 du Conseil, du 22 décembre 1986, déterminant les modalités d'application des articles 85 et 86 du traité aux transports maritimes (JO L 378, p. 4), a procédé à des vérifications dans les bureaux de six exploitants de transbordeurs, à raison de cinq en Grèce et d'un en Italie.
  5. Le 4 juillet 1994, la Commission a adopté la décision (94) 1790/5 imposant à Minoikes Grammes ANE (Minoan Lines SA) (ci-après «Minoan Lines») de se soumettre à une vérification. Les 5 et 6 juillet suivants, les agents de la Commission ont procédé à une vérification de documents dans les locaux de la société European Trust Agency (ci-après «ETA»), agent de Minoan Lines. La vérification effectuée a permis de recueillir de nombreuses pièces concernant ces deux sociétés et leur participation, avec d'autres entreprises visées par l'enquête, notamment la requérante, à des consultations tarifaires pour les transports maritimes entre la Grèce et l'Italie.
  6. Par décision du 21 février 1997, la Commission a ouvert une procédure formelle en envoyant une communication des griefs à neuf sociétés desservant les lignes maritimes entre la Grèce et l'Italie, dont la requérante.
  7. Le 9 décembre 1998, la Commission a adopté la décision litigieuse par laquelle elle condamne ladite société à une amende de 1,5 million d'euros pour avoir enfreint l'article 85, paragraphe 1, du traité en s'accordant, d'une part, avec les sociétés Minoan Lines, Anek Lines, Karageorgis Lines et Marlines SA sur les prix à appliquer aux services de transbordeurs rouliers entre les ports de Patras et d'Ancône entre le 18 juillet 1987 et le mois de juillet 1994 et, d'autre part, avec les sociétés Minoan Lines, Anek Lines, Karageorgis Lines, Adriatica di Navigazione SpA et Ventouris Group Enterprises SA sur les niveaux de prix devant être appliqués aux véhicules utilitaires sur les lignes Patras-Bari et Patras-Brindisi.
  8. La procédure devant le Tribunal et l'arrêt attaqué

  9. Le 3 mars 1999, la requérante a introduit devant le Tribunal un recours en annulation de la décision litigieuse, invoquant notamment l'illégalité du contrôle effectué dans les locaux d'ETA ainsi qu'une application erronée de l'article 85 du traité.
  10. Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal a analysé l'étendue du pouvoir de vérification de la Commission et a considéré que la vérification effectuée dans les locaux d'ETA était régulière compte tenu des liens existant entre cette société et Minoan Lines dont elle était l'agent.
  11. Le Tribunal a en particulier constaté que les locaux appartenant à ETA devaient être considérés comme les locaux utilisés par Minoan Lines pour développer ses activités commerciales et, par conséquent, qu'ils pouvaient être assimilés aux locaux commerciaux de l'entreprise destinataire de la décision de vérification.
  12. Le Tribunal a ensuite estimé que la décision et les mandats de vérification contenaient tous les éléments pertinents pour permettre aux employés d'ETA de juger s'ils étaient obligés de permettre ou non la vérification envisagée par la Commission dans leurs locaux.
  13. Il a également constaté que la vérification en cause, malgré quelques réticences initiales, s'était déroulée avec la coopération de l'entreprise concernée.
  14. S'agissant de l'application de l'article 85 du traité, après avoir étudié le cadre législatif national et la politique du ministère de la Marine marchande grec, le Tribunal a considéré que, contrairement à ce que soutenait la requérante, chacune des sociétés maritimes exploitant des lignes maritimes entre la Grèce et l'Italie jouissait de la nécessaire autonomie dans la détermination de sa politique des prix et que, dès lors, ces sociétés ont toujours été soumises aux règles de la concurrence, et notamment à celles contenues dans l'article 85 du traité.
  15. Enfin, le Tribunal a rejeté la demande incidente de la Commission tendant à réviser à la hausse le montant de l'amende infligée à la requérante et à priver cette société de la réduction antérieurement accordée pour la non-contestation des faits. Le Tribunal a jugé que le seul fait que l'entreprise ait exercé une action contentieuse ne saurait justifier une nouvelle appréciation de la réduction qui lui avait été accordée pour avoir coopéré avec la Commission.
  16. Les conclusions des parties

  17. La requérante demande à la Cour:
  18. - d'annuler l'arrêt attaqué;
    - d'annuler la décision litigieuse;
    - à titre subsidiaire, d'annuler ou de réduire le montant de l'amende imposée par la Commission et confirmée par le Tribunal, et
    - de condamner la Commission aux dépens.
  19. Cette dernière conclut au rejet du pourvoi comme irrecevable et non fondé et demande la condamnation de la requérante aux dépens. Par la voie du pourvoi incident, elle demande à la Cour de majorer le montant de l'amende.
  20. Sur le pourvoi

  21. En vertu de l'article 119 du règlement de procédure, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur rapport du juge rapporteur, l'avocat général entendu, rejeter le pourvoi par voie d'ordonnance motivée.
  22. Sur le premier moyen tiré de l'illégalité des actes pris en vue et lors de la vérification

    Argumentation des parties

  23. La requérante, dont la participation à l'entente a été découverte et confirmée à l'occasion de la vérification concernant Minoan Lines, fait valoir qu'ayant pour seul destinataire Minoan Lines, la décision de vérification ne permettait pas à ETA d'apprécier la portée de son devoir de collaboration avec la Commission. En conséquence, l'intervention des agents de la Commission dans la sphère d'activité privée d'ETA n'avait pas de fondement légal et n'était pas justifiée.
  24. La requérante estime, pour les mêmes raisons, qu'ETA n'était même pas tenue de coopérer avec la Commission et de se soumettre au contrôle.
  25. La vérification effectuée par les agents de la Commission dans les locaux d'ETA serait en outre illégale, car ils auraient procédé à la vérification en faisant pression sur les employés de cette société et en les menaçant de sanctions, alors que le mandat de vérification accordé par la Commission n'autorisait la vérification que des bureaux de Minoan Lines. La Commission et le Tribunal auraient à tort assimilé ETA à Minoan Lines en considérant que ces deux sociétés formaient une seule unité économique.
  26. La requérante estime que l'exercice par la Commission de son pouvoir de vérification dans les locaux d'ETA, notamment après avoir compris que cette dernière était une personne morale indépendante, constitue un abus de pouvoir en violation de l'article 14 du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (JO 1962, 13, p. 204), ainsi que de l'article 18 du règlement n° 4056/86 et des principes généraux du droit, dont le respect des droits de la défense.
  27. La Commission observe que, dans la mesure où, durant la procédure administrative, la requérante a expressément reconnu les faits concernant sa participation à la fixation illégale des prix sur le marché des transports maritimes entre la Grèce et l'Italie, ces faits sont désormais établis et l'entreprise n'est pas fondée à les contester en justice.
  28. La Commission considère également irrecevable le premier moyen du pourvoi au motif que la requérante ne saurait invoquer, pour s'en prévaloir, la violation des droits de la défense d'un tiers.
  29. Elle soutient être restée dans les limites de ses pouvoirs en respectant les principes régissant l'ouverture et le déroulement de la procédure de vérification et, en particulier, les droits de la défense.
  30. Elle fait valoir que, Minoan Lines étant le commettant d'ETA, ces deux sociétés forment une unité économique. Ainsi les locaux de la seconde, lieu d'exercice d'activités commerciales de la première, dès lors qu'ils contiennent des documents relatifs aux activités de celle-ci, doivent être considérés, au même titre que ceux de Minoan Lines, visés par la décision de la Commission relative à la vérification des documents.
  31. L'assimilation d'ETA à Minoan Lines résulterait du comportement des deux entreprises en question qui, par leurs seuls agissements, adoptant un même comportement sur le marché, ont occulté leurs personnalités juridiques différentes.
  32. La Commission estime que, ETA étant chargée de la gestion des activités commerciales de Minoan Lines sur le marché objet de vérification, ses employés étaient non seulement en mesure de comprendre l'objet et le but de la vérification effectuée dans le cadre de l'enquête menée par la Commission, mais étaient de fait, en tant que gestionnaires directs des affaires de Minoan Lines, les mieux informés sur son fonctionnement et sur les relations entre les deux sociétés.
  33. Par ailleurs, la Commission conteste les allégations de menace de sanctions et de pression qui auraient été exercées à l'encontre des employés d'ETA, ces derniers ne s'étant pas opposés au contrôle.
  34. Appréciation de la Cour

  35. à titre liminaire, ainsi que l'a, à bon droit, jugé le Tribunal, la seule circonstance que la requérante ait admis certains faits ne signifie pas qu'elle a renoncé à contester la légalité des vérifications effectuées par la Commission au cours desquelles cette dernière a obtenu des documents susceptibles de constituer des éléments de preuve d'une infraction. En effet, même si elle a admis explicitement les faits concernant les consultations relatives à la fixation des tarifs, elle est recevable à critiquer la manière dont la Commission a obtenu les documents sur lesquels se fonde la décision litigieuse.
  36. Il y a ensuite lieu d'observer que les dispositions de l'article 18 du règlement n° 4056/86 sont, pour le domaine des transports, les mêmes que celles de l'article 14 du règlement n° 17.
  37. Le fondement légal des pouvoirs de la Commission dans le cadre d'une procédure de vérification ouverte à l'encontre d'une entreprise visée par la procédure d'application de l'article 85 du traité ainsi que de l'article 86 du traité CE (devenu article 82 CE) reposait, à la date de la décision litigieuse, sur le règlement n° 17. L'article 14 de ce règlement limite lesdits pouvoirs à une liste énumérative de tches conférées à la Commission. Il y est notamment prévu que cette institution peut recueillir les preuves d'une entente entre plusieurs entreprises. Ces dispositions, interprétées par la Cour, signifient que les procédures administratives nécessaires à la recherche des preuves doivent être conduites dans l'exigence du respect de garanties procédurales.
  38. Dans le cadre de la procédure d'enquête préalable relative à la recherche des preuves de la violation, par une entreprise, des articles 85 et 86 du traité, l'article 14, paragraphe 3, du règlement n° 17 impose à la Commission de motiver la décision ordonnant une vérification en indiquant l'objet et le but de cette dernière. C'est une exigence fondamentale en vue de faire apparaître le caractère justifié de l'intervention envisagée à l'intérieur des entreprises concernées (voir arrêts du 21 septembre 1989, Hoechst/Commission, 46/87 et 227/88, Rec. p. 2859, point 29, et du 22 octobre 2002, Roquette Frères, C-94/00, Rec. p. I-9011, point 47).
  39. En outre, l'exigence d'une protection contre des interventions de la puissance publique dans la sphère privée d'une personne, qu'elle soit physique ou morale, qui seraient arbitraires ou disproportionnées constitue un principe général du droit communautaire (arrêts précités Hoechst/Commission, point 19, et Roquette Frères, point 27).
  40. Enfin, la protection de la vie privée prévue à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la «CEDH»), doit être respectée et la protection du domicile est étendue aux locaux commerciaux des sociétés (voir, en ce sens, Cour eur. D. H., arrêt Colas Est e.a.c/France du 16 avril 2002, Recueil des arrêts et décisions 2002-III, � 41, et arrêt Roquette Frères, précité, point 29).
  41. En l'espèce, la Commission a adopté le 4 juillet 1994 une décision de vérification. Elle a également pris, le même jour, les mandats permettant une telle vérification. Lors de l'enquête dans les locaux susceptibles de contenir les preuves recherchées, les agents de la Commission ont présenté lesdits décision et mandats ainsi qu'une lettre d'information sur les droits et obligations des employés de la société concernée, dont ressortaient clairement, entre autre, l'objet et le but de la vérification.
  42. Il convient toutefois d'examiner si l'équilibre entre les principes fondamentaux dont ladite société peut se prévaloir et l'efficacité du pouvoir de vérification de la Commission a été respecté.
  43. Le règlement n° 17 confère à la Commission des pouvoirs ayant pour but de permettre à celle-ci d'accomplir la mission qui lui est confiée par le traité de veiller au respect des règles de concurrence dans le marché commun (voir arrêt du 26 juin 1980, National Panasonic/Commission, 136/79, Rec. p. 2033, point 20).
  44. Tant la finalité du règlement n° 17 que l'énumération, à son article 14, des pouvoirs dont sont investis les agents de la Commission, dispositions reprises, dans le domaine des transports, à l'article 18 du règlement n° 4056/86, font apparaître que les vérifications peuvent avoir une portée très large. à cet égard, le droit d'accéder à tous les locaux, terrains et moyens de transport des entreprises présente une importance particulière dans la mesure où il doit permettre à la Commission de recueillir les preuves des infractions aux règles de concurrence dans les lieux où elles se trouvent normalement, c'est-à-dire dans les locaux commerciaux des entreprises (arrêt Hoechst/Commission, précité, point 26).
  45. Il est en outre important de sauvegarder l'effet utile des vérifications comme instrument nécessaire pour permettre à la Commission d'exercer ses fonctions de gardienne du traité en matière de concurrence. Ainsi, afin de sauvegarder l'utilité du droit d'accès de la Commission aux locaux commerciaux de l'entreprise visée par une procédure d'application des articles 85 et 86 du traité, ce droit implique la faculté de rechercher des éléments d'information divers qui ne sont pas encore connus ou pleinement identifiés (voir arrêt Hoechst/Commission, précité, point 27).
  46. Il s'ensuit que la Commission peut exercer son pouvoir de vérification dans tous les locaux commerciaux de l'entreprise visée par la décision prise par elle tout en respectant les droits de la défense (voir, en ce sens, arrêt Hoechst/Commission, précité, points 14 et 15) ainsi que les droits attachés à la protection de la propriété (voir arrêts précités Colas Est e.a. c/France, � 40 et 41, et Roquette Frères, point 29).
  47. Le Tribunal a constaté à juste titre que la Commission, lors de l'échange de courriers avec Minoan Lines, avait reçu deux lettres avec le logo commercial de Minoan Lines, dont une avec la signature de M. Sfinias, administrateur d'ETA, et avec l'indication de l'adresse suivante: «International Lines Head Offices: 64 B Kifissias Ave., GR, 151 25, Maroussi, Athens», suivie de: «Passenger Office: 2 Vassileos Konstantinou Ave., GR 116 35 Athens». Les agents de la Commission se sont rendus aux adresses ainsi indiquées afin de vérifier les documents de Minoan Lines. En arrivant sur les lieux, ils ont constaté que les employés qui les ont reçus étaient ceux d'ETA.
  48. Compte tenu desdits éléments de preuve, le Tribunal a pu déduire que, aux yeux du public, Minoan Lines avait une activité commerciale à l'adresse des locaux d'ETA et que, au regard de l'activité économique concernée, les deux sociétés pouvaient être assimilées (ordonnance du 17 novembre 2005, Minoan Lines/Commission, C-121/04 P, non publiée au Recueil, point 39).
  49. Il s'ensuit que le moyen tiré d'une prétendue erreur de droit qu'aurait commise le Tribunal en assimilant ETA à Minoan Lines est manifestement non fondé.
  50. En outre, la requérante conteste globalement l'appréciation des faits opérée par le Tribunal, en vertu desquels ce dernier aurait dû aboutir à la conclusion qu'ETA et Minoan Lines étaient indépendantes juridiquement et économiquement compte tenu des faits de l'espèce, sans toutefois invoquer des arguments sérieux au soutien d'une dénaturation des éléments de preuve, d'où il suit que le moyen est irrecevable.
  51. En effet, en vertu de l'article 225 CE et de l'article 58 du statut de la Cour de justice, le pourvoi ne peut se fonder que sur des moyens portant sur la violation de règles de droit, à l'exclusion de toute appréciation de faits.
  52. La Commission étant autorisée à exercer son pouvoir de vérification dans tous les locaux commerciaux de la société concernée, ses agents pouvaient procéder à une vérification dans les locaux d'ETA, lieu d'activités commerciales de Minoan Lines, afin de rassembler les preuves du comportement anticoncurrentiel de la société soumise à la procédure de vérification (ordonnance Minoan Lines/Commission, précitée, point 40).
  53. Le respect de l'effet utile de la vérification ne doit toutefois pas permettre une intervention arbitraire ou disproportionnée des agents de la Commission, qui serait contraire aux principes contenus à l'article 8 de la CEDH (voir, en ce sens, arrêts précités Hoechst/Commission, points 33 à 35, et Roquette Frères, points 35 et 36).
  54. La Cour a déjà jugé que les garanties procédurales ont été respectées et que les agents de la Commission n'ont pas procédé à une intervention de manière arbitraire ou disproportionnée dans les locaux d'ETA (ordonnance Minoan Lines/Commission, précitée, point 45).
  55. Par conséquent, le Tribunal n'a pas commis d'erreur de droit en considérant que la Commission n'avait pas exercé de manière illégale son pouvoir de vérification.
  56. Il résulte de ce qui précède que le premier moyen, tiré de l'erreur de droit que le Tribunal aurait commise en ne sanctionnant pas les actes pris en vue et lors de la vérification dans les locaux d'ETA, doit être rejeté comme étant en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé.
  57. Sur le second moyen tiré de l'application erronée de l'article 85, paragraphe 1, du traité

    Argumentation des parties

  58. La requérante soutient que le Tribunal aurait violé le droit communautaire en jugeant que l'article 85 du traité était applicable en l'espèce, alors que les entreprises impliquées, dont la requérante, n'auraient pas disposé de l'autonomie requise en ce qui concerne la politique tarifaire sur la partie internationale des liaisons maritimes entre la Grèce et l'Italie.
  59. Elle justifie son comportement avec les autres compagnies maritimes de transport entre l'Italie et la Grèce en alléguant les influences du cadre législatif national grec lui étant applicable ainsi que la politique du ministère de la Marine marchande grec. Le comportement de la requérante serait conforme à la législation grecque en matière de concurrence déloyale. Les obligations législatives et les pressions irrésistibles des autorités nationales auraient privé les entreprises concernées, dont la requérante, de toute possibilité de comportement concurrentiel.
  60. La Commission, pour sa part, observe que les arguments invoqués par la requérante à l'appui de sa thèse ont tous été examinés par le Tribunal. Elle rappelle que la compétence de la Cour lors d'un pourvoi se limite à l'appréciation du droit et non des faits. Or, la requérante n'allègue que des considérations de fait, de sorte que son moyen doit être considéré comme irrecevable.
  61. Sur le fond, la Commission estime que les allégations de la requérante sont dénuées de tout fondement et doivent être rejetées puisque ni le cadre législatif et réglementaire ni le comportement des autorités n'ont obligé les compagnies maritimes à conclure des accords tarifaires applicables à la partie internationale des lignes maritimes entre la Grèce et l'Italie.
  62. Appréciation de la Cour

  63. Ainsi qu'il a déjà été vu aux points 43 et 44 de la présente ordonnance, le Tribunal est seul compétent, d'une part, pour constater les faits, sauf dans le cas où l'inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d'autre part, pour apprécier ces faits (voir, notamment, ordonnance du 17 septembre 1996, San Marco/Commission, C-19/95 P, Rec. p. I-4435, point 39).
  64. La Cour n'est donc pas compétente pour constater les faits ni, en principe, pour examiner les preuves que le Tribunal a retenues à l'appui de ces faits. En effet, dès lors que ces preuves ont été obtenues régulièrement, que les principes généraux du droit et les règles de procédure applicables en matière de charge et d'administration de la preuve ont été respectés, il appartient au seul Tribunal d'apprécier la valeur qu'il convient d'attribuer aux éléments qui lui ont été soumis (voir, notamment, ordonnance San Marco/Commission, précitée, point 40). Cette appréciation ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation de ces éléments, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (arrêt du 2 mars 1994, Hilti/Commission, C-53/92 P, Rec. p. I-667, point 42).
  65. Or, les prétendues obligations et incitations émanant des autorités grecques se rapportent à des constatations de faits. Leur appréciation échappe à la compétence de la Cour, sauf dénaturation des éléments de faits par le Tribunal.
  66. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'application erronée de l'article 85, paragraphe 1, du traité est manifestement irrecevable et qu'il doit être rejeté.
  67. Sur les conclusions visant, à titre subsidiaire, à l'annulation ou à la réduction du montant de l'amende

  68. à titre subsidiaire, la requérante conclut à l'annulation ou, à tout le moins, à la réduction significative du montant de l'amende.
  69. Il résulte des articles 225 CE, 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice et 112, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure qu'un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l'arrêt dont l'annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande (voir, notamment, arrêts du 4 juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C-352/98 P, Rec. p. I-5291, point 34; du 8 janvier 2002, France/Monsanto et Commission, C-248/99 P, Rec. p. I-1, point 68, et ordonnance du 11 novembre 2003, Martinez/Parlement, C-488/01 P, Rec. p. I-13355, point 40).
  70. Or, dans la mesure où la requérante se borne à demander une annulation ou une réduction du montant de l'amende, sans expliquer les raisons qui justifieraient que la Cour prenne une telle décision et sans spécifier l'erreur qu'auraient commise la Commission et le Tribunal lors de la fixation dudit montant, le moyen ne répond manifestement pas à cette exigence de motivation et doit être considéré comme irrecevable.
  71. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter le pourvoi comme étant en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé.
  72. Sur le pourvoi incident

  73. Par son pourvoi incident, la Commission reproche au Tribunal de n'avoir pas fait usage de la compétence de pleine juridiction dont il dispose en vertu de l'article 229 CE afin de majorer le montant de l'amende infligée à la requérante et, par suite, de priver cette dernière de la réduction dont elle a bénéficié au titre de la coopération lors de la phase de l'enquête sur l'entente en reconnaissant les faits.
  74. à cet égard, il suffit de constater que le Tribunal a jugé à juste titre que le seul fait que l'entreprise ayant coopéré avec la Commission en ne contestant pas la matérialité des faits et ayant bénéficié d'une réduction du montant de son amende à ce titre ait saisi le Tribunal afin d'obtenir gain de cause ne saurait justifier une nouvelle appréciation de l'ampleur de la réduction qui lui a été accordée, car une telle contestation n'est qu'une conséquence normale de l'exercice des voies de recours garantis par le traité CE et par le statut de la Cour de justice (ordonnance Minoan Lines/Commission, précitée, point 66).
  75. Il s'ensuit que le pourvoi incident doit être rejeté comme manifestement non fondé.
  76. Sur les dépens

  77. Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l'article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la requérante et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens relatifs au pourvoi. La requérante ayant conclu à la condamnation de la Commission dans le cadre du pourvoi incident et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens relatifs au pourvoi incident. Il sera fait une juste appréciation du partage de l'ensemble des dépens exposés devant la Cour en condamnant la requérante à supporter 90 % de leur montant et la Commission à en supporter 10 %.
  78. Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) ordonne:

    1) Le pourvoi est rejeté.

    2) Le pourvoi incident de la Commission des Communautés européennes est rejeté.

    3) Strintzis Lines Shipping SA est condamnée à supporter 90 % des dépens.

    4) La Commission des Communautés européennes est condamnée à supporter 10 % des dépens.

    Signatures


    * Langue de procédure: le grec.


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