«Article 104, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure -" Directive 91/439/CEE -" Reconnaissance mutuelle des permis de conduire -" Retrait du permis dans un premier État membre assorti d'une interdiction temporaire d'obtenir un nouveau permis -" Permis délivré dans un second État membre après la fin de la période d'interdiction temporaire -" Reconnaissance et transcription de ce permis dans le premier État membre -" Présentation d'un rapport sur l'aptitude à la conduite requis par la réglementation nationale»
- La demande de décision préjudicielle porte sur l'interprétation des articles 1er, paragraphe 2, et 8, paragraphes 2 et 4, de la directive 91/439/CEE du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au permis de conduire (JO L 237, p. 1), telle que modifiée par la directive 97/26/CE du Conseil, du 2 juin 1997 (JO L 150, p. 41, ci-après la «directive 91/439»).
- Cette demande a été présentée dans le cadre d'un litige opposant M. Halbritter, ressortissant allemand résidant en Allemagne, au Freistaat Bayern à propos d'une décision du Landratsamt München refusant de reconnaître la validité de son permis de conduire autrichien et de le transcrire en un permis allemand.
Le cadre juridique
La réglementation communautaire
- L'article 1er, paragraphes 1 et 2, de la directive 91/439 dispose:
«1. Les États membres établissent le permis de conduire national d'après le modèle communautaire tel que décrit à l'annexe I ou I bis conformément aux dispositions de la présente directive. [...]
2. Les permis de conduire délivrés par les États membres sont mutuellement reconnus.»
- En vertu de l'article 7, paragraphe 1, sous a) et b), de la directive 91/439, la délivrance du permis de conduire est subordonnée à «la réussite d'une épreuve de contrôle des aptitudes et des comportements, d'une épreuve de contrôle des connaissances ainsi qu'à la satisfaction des normes médicales, conformément aux dispositions des annexes II et III», et «Ã l'existence de la résidence normale ou la preuve de la qualité d'étudiant pendant une période d'au moins six mois sur le territoire de l'État membre délivrant le permis de conduire».
- Aux termes de l'article 7, paragraphe 5, de la même directive, «[t]oute personne ne peut être titulaire que d'un seul permis de conduire délivré par un État membre».
- L'article 8, paragraphes 1, 2 et 4, de la directive 91/439 prévoit:
«1. Dans le cas où le titulaire d'un permis de conduire en cours de validité délivré par un État membre a établi sa résidence normale dans un autre État membre, il peut demander l'échange de son permis contre un permis équivalent; il appartient à l'État membre qui procède à l'échange de vérifier, le cas échéant, si le permis présenté est effectivement en cours de validité.
2. Sous réserve du respect du principe de territorialité des lois pénales et de police, l'État membre de résidence normale peut appliquer au titulaire d'un permis de conduire délivré par un autre État membre ses dispositions nationales concernant la restriction, la suspension, le retrait ou l'annulation du droit de conduire et, si nécessaire, procéder à ces fins à l'échange de ce permis.
[...]
4. Un État membre peut refuser de reconnaître, à une personne faisant l'objet sur son territoire d'une des mesures visées au paragraphe 2, la validité de tout permis de conduire établi par un autre État membre.
Un État membre peut de même refuser de délivrer un permis de conduire à un candidat qui fait l'objet d'une telle mesure dans un autre État membre.»
La réglementation nationale
- En Allemagne, la réglementation pertinente au regard du litige au principal est le règlement relatif à l'accès des personnes à la circulation routière (Verordnung über die Zulassung von Personen zum Straßenverkehr), ou règlement relatif à l'autorisation de conduire (Fahrerlaubnisverordnung), du 18 aoÃ't 1998 (BGBl. 1998 I, p 2214), dans sa version résultant du règlement du 25 février 2000 (BGBl. 2000 I, p. 141, ci-après la «FeV»).
- Aux termes de l'article 11, paragraphes 2, 3 et 8, de la FeV:
«(2) S'il existe des faits aptes à susciter des doutes sur les capacités physiques ou mentales du demandeur d'un permis de conduire, les autorités compétentes peuvent ordonner la présentation par l'intéressé d'un rapport d'expertise médicale en vue de préparer des décisions sur l'octroi ou la prolongation du permis de conduire ou sur la fixation de restrictions ou de conditions. [...]
[...]
(3) La présentation d'un rapport d'un centre de contrôle de l'aptitude à conduire officiellement reconnu (rapport d'expertise médico-psychologique) peut être ordonnée pour lever les doutes quant aux aptitudes aux fins visées au paragraphe 2,
[...]
4. en cas d'infractions graves ou répétées au code de la route ou de délits ayant un rapport avec la circulation routière ou avec l'aptitude à conduire [...]
ou
5. lors de la réattribution du permis de conduire,
[...]
b. lorsque le retrait du permis de conduire repose sur l'un des motifs visés au point 4.
[...]
(8) Si la personne concernée refuse de subir un tel examen ou ne communique pas dans les délais à l'autorité compétente le rapport d'expertise exigé par cette autorité, cette instance peut en conclure, au moment où elle est amenée à prendre sa décision, que la personne concernée n'est pas apte à conduire. [...]»
- L'article 14 de la FeV, qui contient des dispositions relatives aux doutes concernant l'aptitude à conduire d'une personne eu égard à sa consommation de stupéfiants et de médicaments, est libellé comme suit:
«(1) En vue de préparer des décisions sur la délivrance ou la prorogation d'un permis de conduire ou sur l'imposition de restrictions ou d'obligations, l'autorité compétente ordonne la présentation d'un rapport d'expertise médicale (article 11, paragraphe 2, troisième phrase) lorsqu'il existe des faits permettant de penser que:
1. il y a une dépendance aux stupéfiants au sens de la loi sur les stupéfiants [...] ou d'autres substances psychoactives;
2. il y a consommation de stupéfiants au sens de la loi sur les stupéfiants ou
3. il y a consommation abusive de médicaments psychoactifs ou d'autres substances ayant des effets psychoactifs.
La présentation d'un rapport d'expertise médicale peut être exigée, lorsque l'intéressé possède ou a possédé illégalement des stupéfiants au sens de la loi sur les stupéfiants. [...]
(2) Il y a lieu d'ordonner la présentation d'un rapport d'expertise médico-psychologique aux fins du paragraphe 1 dès lors que:
1. le permis de conduire a été retiré pour une des raisons visées au paragraphe 1 ou
2. il y a lieu de vérifier si la personne concernée est encore en état de dépendance aux stupéfiants ou -" sans en être dépendante -" continue à prendre les substances mentionnées au paragraphe 1.»
- L'article 20 de la FeV dispose:
«(1) En cas de délivrance d'un nouveau permis après un retrait [...], ce sont les dispositions relatives à la première délivrance qui s'appliquent.
(2) L'autorité en charge du permis de conduire peut renoncer à faire repasser le permis s'il n'existe aucun fait de nature à donner à penser que le demandeur n'est plus en possession des connaissances et aptitudes prévues [...]
(3) L'exigence de la présentation d'un rapport d'expertise médico-psychologique tel que prévu à l'article 11, paragraphe 3, premier alinéa, point 5, n'en est pas affectée.»
- Dans le chapitre 5 de la FeV, intitulé «Dispositions spéciales applicables aux détenteurs de permis de conduire étrangers», l'article 28 de celle-ci, qui figure sous le titre «Reconnaissance de permis de conduire délivrés par d'autres États membres de l'[Union européenne] ou d'un autre État, signataire de l'accord sur l'[Espace économique européen]», énonce:
«(1) Les titulaires d'un permis de conduire valide de l'UE ou de l'EEE qui ont leur résidence normale au sens de l'article 7, paragraphe 1 ou 2, en République fédérale d'Allemagne, sont autorisés -" sous réserve de la restriction prévue aux paragraphes 2 à 4 -" à conduire des véhicules en Allemagne dans la mesure permise par la loi. Les obligations attachées aux permis de conduire étrangers doivent également être respectées en Allemagne. Les dispositions du présent règlement s'appliquent à ces permis de conduire, sauf dispositions contraires.
[...]
(4) L'autorisation visée au paragraphe 1 ne s'applique pas aux titulaires d'un permis de conduire de l'UE ou de l'EEE,
[...]
3. dont le permis de conduire a fait l'objet en Allemagne d'une mesure de retrait provisoire ou définitif prise par un tribunal, ou d'une mesure de retrait immédiatement exécutoire ou définitive prise par une autorité administrative [...]
[...]
(5) Le droit d'utiliser en Allemagne un permis de conduire de l'UE ou de l'EEE en vertu de l'une des décisions visées au paragraphe 4, points 3 et 4, est octroyé sur demande, lorsque les motifs fondant le retrait ou l'interdiction n'existent plus. L'article 20, paragraphes 1 et 3, s'applique par analogie. [...]»
Le litige au principal et les questions préjudicielles
- Au cours des années 90, M. Halbritter a été condamné à des peines d'emprisonnement pour violation de la législation sur les stupéfiants. Il a fait l'objet, en vertu d'un jugement définitif de l'Amtsgericht Ansbach -" Schöffengericht du 13 juin 1996, d'une mesure de retrait de son permis de conduire, assortie d'une interdiction d'obtenir un nouveau permis pour une durée de 18 mois, dite «période de blocage», qui a expiré le 20 décembre 1997.
- M. Halbritter a par la suite, pour des raisons professionnelles, transféré sa résidence en Autriche. Il y a obtenu, le 18 juin 2002, un permis de conduire autrichien pour les catégories A et B, après avoir été soumis dans cet État membre à un examen médical et à un examen psychologique visant à établir son aptitude à la conduite.
- Au cours du mois de juillet 2003, M. Halbritter, qui résidait de nouveau en Allemagne, a demandé au Landratsamt München, en tant qu'autorité du Freistaat Bayern chargée de la délivrance des permis de conduire, la transcription de son permis autrichien en un permis allemand. Sa demande a été interprétée comme visant à obtenir le droit d'utiliser son permis de conduire autrichien sur le territoire allemand, conformément à l'article 28, paragraphe 5, de la FeV. Il a été considéré que, en application du paragraphe 4, point 3, du même article, le permis de conduire autrichien détenu par M. Halbritter ne pouvait être reconnu en Allemagne puisque ce dernier avait fait l'objet, dans cet État membre, d'une mesure de retrait de son permis de conduire. Au cours de la procédure administrative, le Landratsamt München a exigé que M. Halbritter présente un rapport médico-psychologique démontrant son aptitude à la conduite, en faisant notamment référence à l'article 11, paragraphes 2 et 3, point 5, sous b, de la FeV.
- Les autorités autrichiennes compétentes ont, le 9 septembre 2003, présenté au Landratsamt München le rapport d'expertise médico-psychologique, établi le 3 avril 2002 par le Kuratorium für Verkehrssicherheit Tirol (comité pour la sécurité routière du Tyrol), attestant que M. Halbritter était, sur le plan psychologique, apte à la conduite.
- Par décision du 16 octobre 2003, le Landratsamt München a rejeté la demande de M. Halbritter au motif que les doutes quant à l'aptitude de ce dernier à conduire existant depuis le retrait de son permis de conduire allemand ne pouvaient être levés que par un rapport d'expertise médico-psychologique positif, établi en conformité avec les normes applicables en Allemagne. Les autorités compétentes ont considéré, pour diverses raisons, que le rapport d'expertise autrichien n'équivalait pas à un rapport d'expertise conforme aux normes nationales.
- Le 2 janvier 2004, M. Halbritter a introduit un recours devant le Bayerisches Verwaltungsgericht München visant, à titre principal, à l'annulation de ladite décision du Landratsamt München ainsi qu'à voir imposer à l'autorité allemande chargée de la délivrance des permis de conduire de transcrire le permis de conduire qu'il a obtenu en Autriche en un permis de conduire allemand et, à titre subsidiaire, à ce que lui soit accordé le droit d'utiliser son permis autrichien sur le territoire allemand.
- M. Halbritter invoque notamment l'arrêt du 29 avril 2004, Kapper (C-476/01, Rec. p. I-5205), dans lequel la Cour a dit pour droit que les dispositions combinées des articles 1er, paragraphe 2, ainsi que 8, paragraphe 4, de la directive 91/439 doivent être interprétées en ce sens qu'elles s'opposent à ce qu'un État membre refuse de reconnaître la validité d'un permis de conduire établi par un autre État membre au motif que son titulaire a fait l'objet, sur le territoire du premier État membre, d'une mesure de retrait ou d'annulation d'un permis de conduire délivré par cet État membre, lorsque la période d'interdiction temporaire d'y obtenir un nouveau permis, dont cette mesure était assortie, est écoulée avant la date de délivrance du permis de conduire établi par l'autre État membre. M. Halbritter estime que, puisque la période de blocage prévue à titre de sanction accessoire à la condamnation pénale a expiré, les autorités allemandes devaient reconnaître le permis de conduire qui lui a été délivré dans un autre État membre sans qu'il y ait lieu de procéder à une nouvelle vérification de ses aptitudes.
- Le Bayerisches Verwaltungsgericht München se demande si l'arrêt Kapper, précité, doit être compris de manière telle qu'un État membre n'a pas la faculté de procéder, selon ses propres dispositions nationales, à une nouvelle vérification de l'aptitude à la conduite d'une personne qui a obtenu un permis de conduire dans un autre État membre, alors même que le titulaire du permis s'était vu retirer celui-ci dans le premier État membre et infliger une période de blocage. Selon ladite juridiction, le fait de vérifier et d'évaluer l'aptitude à la conduite en application des règles du droit national ne semble pas contraire au principe de la primauté du droit communautaire, car, dans le cadre de la dérogation au principe fondamental de reconnaissance mutuelle énoncée à l'article 8, paragraphe 2, de la directive 91/439, chaque État membre doit pouvoir appliquer, sur son territoire, ses dispositions nationales en matière de retrait du permis de conduire. Par ailleurs, à la différence de l'appréciation de la condition de résidence, pour laquelle l'État membre de délivrance du permis dispose d'une compétence exclusive (arrêt Kapper, précité, point 48), ladite directive fixerait tout au plus des conditions minimales pour la délivrance du permis de conduire dans l'Union, en sorte que l'État membre ayant délivré le permis ne disposerait pas d'une compétence exclusive pour vérifier que toutes les conditions sont remplies.
- Toutefois, la juridiction de renvoi considère qu'il est également possible d'interpréter l'arrêt Kapper, précité, voire le droit dérivé, en ce sens que l'État membre auquel la reconnaissance du permis de conduire est demandée n'est pas en droit d'effectuer un examen plus détaillé des conditions d'aptitude que celui auquel a procédé l'État membre de délivrance, dès lors que M. Halbritter a obtenu dans un autre État membre -" en l'espèce la République d'Autriche -" un permis de conduire conforme à la réglementation communautaire à l'expiration de la période de blocage qui lui était imposée, au motif soit que l'autorité compétente s'est fondée pour délivrer le permis sur le fait que M. Halbritter remplissait les conditions d'aptitude applicables dans ce dernier État membre, soit qu'il n'est pas nécessaire que l'intéressé satisfasse à de nouvelles conditions de fond après l'expiration de cette période de blocage. Si tel était le cas, il conviendrait, selon ladite juridiction, de considérer que M. Halbritter est apte à la conduite, puisqu'il n'existerait pas en l'espèce d'éléments de nature à démontrer qu'il y a lieu de mettre en doute cette aptitude sur la base de circonstances qui se seraient produites après la délivrance du permis de conduire autrichien.
- Dans ces circonstances, le Bayerisches Verwaltungsgericht München a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:
«1) Les dispositions combinées de l'article 1er, paragraphe 2, et de l'article 8, paragraphes 2 et 4, de la directive 91/439/CEE doivent-elles être interprétées en ce sens qu'un État membre ne saurait refuser de reconnaître sur son territoire national l'aptitude à la conduite telle qu'elle résulte d'un permis de conduire délivré dans un autre État membre, même lorsqu'une mesure visant au retrait ou à l'annulation d'un permis de conduire délivré dans le premier État membre est appliquée sur le territoire dudit État membre, dès lors que la période de blocage avant l'obtention d'un nouveau permis de conduire dont a été assortie cette suspension avait expiré en même temps que la mesure précédemment citée avant la délivrance du permis de conduire dans l'autre État membre, et
a) que la législation applicable dans le premier État membre subordonne la preuve de l'aptitude à la conduite, en tant que condition de fond pour le rétablissement du permis de conduire, à la présentation, sur demande de l'administration, d'un rapport médico-psychologique dont les modalités sont réglementées par le droit national (ce qui n'a pas été le cas jusqu'à présent),
et/ou
b) lorsque la législation nationale prévoit qu'une personne est en droit de se faire reconnaître le droit de faire usage d'un permis de conduire délivré après expiration de la période de blocage sur le territoire du premier État membre dès lors que les motifs ayant conduit en droit national au retrait ou à la suspension n'existent plus?
2) Les dispositions combinées de l'article 1er, paragraphe 2, et de l'article 8, paragraphes 2 et 4, de la directive 91/439/CEE doivent-elles être interprétées de manière telle que, dans l'hypothèse où un État membre est saisi d'une demande de délivrance d'un permis de conduire par le titulaire d'un permis de conduire d'un autre État membre contre remise dudit permis de conduire (dite «transcription»), il lui est interdit, au seul motif qu'un autre État membre a déjà délivré à l'intéressé un permis de conduire valide dans l'[Union européenne], de procéder à un nouvel examen de l'aptitude à la conduite de la personne en cause eu égard à des circonstances qui existaient déjà lors de la délivrance du permis de conduire CE, alors que, selon le droit de cet État membre, un tel examen est une condition très précisément réglementée à laquelle est subordonnée la délivrance du permis de conduire?»
Sur les questions préjudicielles
- Conformément à l'article 104, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsque la réponse à une question posée à titre préjudiciel peut être clairement déduite de la jurisprudence, la Cour peut, après avoir entendu l'avocat général, à tout moment, statuer par voie d'ordonnance motivée comportant référence à la jurisprudence en cause.
Sur la première question
- Par sa première question, la juridiction de renvoi demande en substance si les dispositions combinées des articles 1er, paragraphe 2, et 8, paragraphes 2 et 4, de la directive 91/439 s'opposent à ce qu'un État membre refuse de reconnaître, sur son territoire, le droit de conduire résultant d'un permis de conduire délivré dans un autre État membre et, partant, la validité dudit permis, au motif que le titulaire de ce permis, qui a fait l'objet sur le territoire du premier État d'une mesure de retrait d'un permis obtenu antérieurement, ne s'est pas soumis à l'examen d'aptitude à la conduite requis par la réglementation de cet État pour la délivrance d'un nouveau permis à la suite dudit retrait, dès lors que l'interdiction temporaire d'obtenir un nouveau permis dont était assorti ce retrait avait expiré lors de la délivrance du permis de conduire dans l'autre État membre.
- à titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, dans son arrêt Kapper, précité, la Cour a déjà été conduite à examiner les dispositions de la FeV en liaison avec les articles 1er, paragraphe 2, et 8, paragraphe 4, de la directive 91/439.
- Selon une jurisprudence bien établie, l'article 1er, paragraphe 2, de la directive 91/439 prévoit la reconnaissance mutuelle, sans aucune formalité, des permis de conduire délivrés par les États membres et impose ainsi à ces derniers une obligation claire et précise, qui ne laisse aucune marge d'appréciation quant aux mesures à adopter pour s'y conformer (arrêts du 29 octobre 1998, Awoyemi, C-230/97, Rec. p. I-6781, points 41 et 42; du 10 juillet 2003, Commission/Pays-Bas, C-246/00, Rec. p. I-7485, points 60 et 61, ainsi que du 9 septembre 2004, Commission/Espagne, C-195/02, Rec. p. I-7857, points 53 et 54; voir également ordonnances du 11 décembre 2003, Da Silva Carvalho, C-408/02, non publiée au Recueil, point 20, et du 29 janvier 2004, Krüger, C 253/01, Rec. p. I-1191, point 25).
- Aux points 70 et 72 de l'arrêt Kapper, précité, la Cour a constaté que l'article 8, paragraphe 4, premier alinéa, de la directive 91/439, en ce qu'il permet à un État membre de refuser de reconnaître la validité de tout permis de conduire établi par un autre État membre si le titulaire fait l'objet, sur le territoire du premier État membre, d'une mesure de restriction, de suspension, de retrait ou d'annulation du droit de conduire, constitue une dérogation au principe général de reconnaissance mutuelle des permis de conduire délivrés par les États membres, énoncé à l'article 1er , paragraphe 2, de la même directive, et doit, par conséquent, faire l'objet d'une interprétation stricte.
- Il résulte en outre du point 76 de l'arrêt Kapper, précité, que, lorsque la période d'interdiction temporaire d'obtenir un nouveau permis dont était assortie la mesure de retrait d'un permis antérieur délivré dans un État membre est déjà écoulée, les dispositions combinées des articles 1er, paragraphe 2, et 8, paragraphe 4, de la directive 91/439 s'opposent à ce que, après l'expiration de cette période d'interdiction, ledit État membre continue à refuser de reconnaître la validité de tout permis de conduire ultérieurement délivré à l'intéressé par un autre État membre.
- En effet, admettre qu'un État membre est en droit de se fonder sur ses dispositions nationales pour s'opposer indéfiniment à la reconnaissance d'un permis délivré par un autre État membre serait la négation même du principe de reconnaissance mutuelle des permis de conduire, qui constitue la clé de voÃ'te du système mis en place par la directive 91/439 (arrêt Kapper, précité, point 77).
- Il s'ensuit que la possibilité reconnue aux États membres, en vertu de l'article 8, paragraphe 2, de la directive 91/439, d'appliquer aux titulaires d'un permis de conduire délivré par un autre État membre leurs dispositions nationales concernant la restriction, la suspension, le retrait ou l'annulation du droit de conduire ainsi que, selon le paragraphe 4 du même article, de refuser de reconnaître, à une personne faisant l'objet sur leur territoire de l'une des mesures visées au paragraphe 2 dudit article, la validité d'un tel permis ne saurait être invoquée pour permettre auxdits États membres de refuser de reconnaître la validité d'un permis obtenu dans un autre État membre postérieurement à l'expiration de la période de blocage. Lesdits États membres ne sauraient exiger du titulaire d'un permis délivré par un autre État membre qu'il remplisse les conditions imposées par leur droit national pour le rétablissement d'un permis de conduire à la suite d'une mesure de retrait de celui-ci.
- Par ailleurs, dans l'affaire au principal, il est constant que, lorsqu'il a obtenu son permis de conduire en Autriche, M. Halbritter avait sa résidence habituelle dans cet État membre, en sorte que seul celui-ci pouvait lui délivrer un permis de conduire, conformément aux exigences de l'article 7, paragraphes 1, sous b), et 5, de la directive 91/439, et il ne saurait donc lui être reproché d'avoir obtenu un nouveau permis sans avoir respecté les conditions requises en Allemagne pour obtenir un permis à la suite du retrait de son précédent permis.
- Enfin, il convient de relever que, pour délivrer un permis à M. Halbritter, les autorités autrichiennes ont, conformément à l'article 7, paragraphe 1, sous a), de la directive 91/439, vérifié que celui-ci satisfaisait aux normes minimales concernant l'aptitude physique et mentale à la conduite, telles qu'elles résultent des dispositions de l'annexe III de ladite directive. Parmi les examens médicaux mentionnés à cette annexe, figurent des dispositions spécifiques concernant l'usage de drogues et de médicaments (points 15 et 15.1 de la même annexe).
- Eu égard à l'ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la première question que les dispositions combinées des articles 1er, paragraphe 2, et 8, paragraphes 2 et 4, de la directive 91/439 s'opposent à ce qu'un État membre refuse de reconnaître, sur son territoire, le droit de conduire résultant d'un permis de conduire délivré dans un autre État membre et, partant, la validité dudit permis, au motif que le titulaire de ce permis, qui a fait l'objet sur le territoire du premier État d'une mesure de retrait d'un permis obtenu antérieurement, ne s'est pas soumis à l'examen d'aptitude à la conduite requis par la réglementation de cet État pour la délivrance d'un nouveau permis à la suite dudit retrait, dès lors que l'interdiction temporaire d'obtenir un nouveau permis dont était assorti ce retrait avait expiré lors de la délivrance du permis de conduire dans l'autre État membre.
Sur la seconde question
- Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande en substance si les dispositions combinées des articles 1er, paragraphe 2, et 8, paragraphes 2 et 4, de la directive 91/439 s'opposent à ce que, dans des circonstances telles que celles au principal, un État membre, saisi d'une demande de transcription d'un permis de conduire valide, délivré dans un autre État membre, en un permis national, puisse subordonner cette transcription à la condition qu'il soit procédé à un nouvel examen de l'aptitude à la conduite du demandeur, exigé par la réglementation du premier État membre afin de lever les doutes existant à cet égard en raison de circonstances antérieures à l'obtention du permis dans l'autre État membre.
- à cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, visée au point 25 de la présente ordonnance, l'article 1er, paragraphe 2, de la directive 91/439 impose aux États membres l'obligation claire et précise de reconnaître, sans aucune formalité, les permis de conduire délivrés par les autres États membres, cette obligation ne laissant aucune marge d'appréciation quant aux mesures à adopter pour s'y conformer. Par conséquent, dès lors que, conformément au paragraphe 1 dudit article, les autorités d'un État membre ont délivré un permis de conduire, les autres États membres ne sont pas en droit de vérifier une nouvelle fois le respect des conditions de délivrance.
- Il résulte, en outre, d'une jurisprudence bien établie que les dispositions d'une directive qui dérogent à un principe général établi par cette même directive doivent faire l'objet d'une interprétation stricte (arrêt Kapper, précité, point 72 et jurisprudence citée). Tel est le cas de l'article 8, paragraphes 2 et 4, de la directive 91/439, dispositions qui permettent, notamment, aux États membres d'appliquer aux titulaires d'un permis de conduire obtenu dans un autre État membre qui résident sur leur territoire leurs dispositions nationales en matière de restriction, de suspension, de retrait ou d'annulation du droit de conduire et de refuser de reconnaître la validité de tout permis délivré par un autre État membre si le titulaire fait l'objet de l'une de ces mesures sur leur territoire.
- Lorsque, comme dans le cas de M. Halbritter, une personne a fait l'objet dans un État membre d'une mesure de retrait du permis de conduire, assortie d'une période d'interdiction temporaire d'y obtenir un nouveau permis, la Cour a jugé que l'article 8, paragraphe 4, de la directive 91/439 ne permet pas à cet État membre, dès lors que ladite période d'interdiction est venue à expiration, de refuser de reconnaître la validité du permis de conduire délivré par un autre État membre à la même personne postérieurement à ladite expiration (voir, en ce sens, arrêt Kapper, précité, point 76).
- Partant, lorsque le titulaire d'un permis de conduire valide, délivré dans un autre État membre après l'expiration de la période d'interdiction d'obtenir un nouveau permis, demande à l'État membre dans lequel il réside, alors que la mesure d'interdiction temporaire a cessé de produire des effets, la transcription de son permis de conduire en un permis de conduire national, ledit État membre ne saurait exiger une nouvelle vérification de l'aptitude à la conduite du demandeur, même si un tel examen est exigé par la réglementation nationale en raison des circonstances qui avaient conduit au retrait d'un permis obtenu antérieurement, dès lors que ces circonstances sont antérieures à la délivrance du nouveau permis.
- Étant donné que la mesure d'interdiction temporaire d'obtenir un nouveau permis de conduire en Allemagne, édictée lors du retrait de son permis allemand, n'était plus en vigueur au moment où M. Halbritter a obtenu un nouveau permis de conduire en Autriche, la possibilité pour la République fédérale d'Allemagne d'appliquer à ce dernier, en vertu de l'article 8, paragraphe 2, de la directive 91/439, ses dispositions nationales concernant la restriction, la suspension, le retrait ou l'annulation du droit de conduire au titulaire du permis de conduire délivré en Autriche ayant établi sa résidence normale en Allemagne ne pourrait s'exercer qu'en raison d'un comportement de l'intéressé postérieur à l'obtention du permis de conduire autrichien. à cet égard, la juridiction de renvoi a indiqué qu'aucun élément ne permet de mettre en doute l'aptitude à la conduite de M. Halbritter sur la base de circonstances qui se seraient produites après l'obtention de son permis de conduire autrichien.
- Par conséquent, il convient de répondre à la seconde question que les dispositions combinées des articles 1er, paragraphe 2, et 8, paragraphes 2 et 4, de la directive 91/439 s'opposent à ce que, dans des circonstances telles que celles au principal, un État membre, saisi d'une demande de transcription d'un permis de conduire valide, délivré dans un autre État membre, en un permis national, puisse subordonner cette transcription à la condition qu'il soit procédé à un nouvel examen de l'aptitude à la conduite du demandeur, exigé par la réglementation du premier État membre afin de lever les doutes existant à cet égard en raison de circonstances antérieures à l'obtention du permis dans l'autre État membre.
Sur les dépens
- La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) ordonne:
1) Les dispositions combinées des articles 1er, paragraphe 2, et 8, paragraphes 2 et 4, de la directive 91/439/CEE du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au permis de conduire, telle que modifiée par la directive 97/26/CE du Conseil, du 2 juin 1997, s'opposent à ce qu'un État membre refuse de reconnaître, sur son territoire, le droit de conduire résultant d'un permis de conduire délivré dans un autre État membre et, partant, la validité dudit permis, au motif que le titulaire de ce permis, qui a fait l'objet sur le territoire du premier État d'une mesure de retrait d'un permis obtenu antérieurement, ne s'est pas soumis à l'examen d'aptitude à la conduite requis par la réglementation de cet État pour la délivrance d'un nouveau permis à la suite dudit retrait, dès lors que l'interdiction temporaire d'obtenir un nouveau permis dont était assorti ce retrait avait expiré lors de la délivrance du permis de conduire dans l'autre État membre.
2) Les dispositions combinées des articles 1er, paragraphe 2, et 8, paragraphes 2 et 4, de la directive 91/439, telle que modifiée par la directive 97/26, s'opposent à ce que, dans des circonstances telles que celles au principal, un État membre, saisi d'une demande de transcription d'un permis de conduire valide, délivré dans un autre État membre, en un permis national, puisse subordonner cette transcription à la condition qu'il soit procédé à un nouvel examen de l'aptitude à la conduite du demandeur, exigé par la réglementation du premier État membre afin de lever les doutes existant à cet égard en raison de circonstances antérieures à l'obtention du permis dans l'autre État membre.
Signatures
* Langue de procédure: l'allemand.