De Nicola v EIB (Judgment) French Text [2014] EUECJ F-55/08 (11 November 2014)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2014/F5508.html
Cite as: ECLI:EU:F:2014:244, [2014] EUECJ F-55/08, [2014] EUECJ F-55/8, EU:F:2014:244

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (première chambre)

11 novembre 2014 (*)

« Fonction publique – Renvoi au Tribunal après annulation – Personnel de la BEI – Évaluation – Illégalité de la décision du comité de recours – Non-lieu à statuer sur la demande indemnitaire »

Dans l’affaire F‑55/08 RENV,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE,

Carlo De Nicola, membre du personnel de la Banque européenne d’investissement, demeurant à Strassen (Luxembourg), représenté par Me L. Isola, avocat,

partie requérante,

contre

Banque européenne d’investissement (BEI), représentée par M. G. Nuvoli et Mme F. Martin, en qualité d’agents, assistés de Me A. Dal Ferro, avocat,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(première chambre),

composé de M. E. Perillo (rapporteur), faisant fonction de président, Mme M. I. Rofes i Pujol et M. R. Barents, juges,

greffier : M. J. Tomac, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 5 novembre 2013,

rend le présent

Arrêt

1        La présente affaire a été renvoyée au Tribunal par arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 27 avril 2012, De Nicola/BEI (T‑37/10 P, EU:T:2012:205, ci-après l’« arrêt de renvoi »), annulant partiellement l’arrêt du Tribunal du 30 novembre 2009, De Nicola/BEI (F‑55/08, EU:F:2009:159, ci-après l’« arrêt initial »), qui avait statué sur le recours, parvenu au greffe du Tribunal le 5 juin 2008, par lequel M. De Nicola demandait, en substance, premièrement, l’annulation de la décision du comité de recours de la Banque européenne d’investissement (BEI) du 14 décembre 2007, deuxièmement, l’annulation de la décision du 13 juillet 2007 de ne pas le promouvoir, troisièmement, l’annulation de son rapport d’appréciation pour l’année 2006 et, quatrièmement, la condamnation de la BEI à lui payer des dommages et intérêts en réparation du harcèlement moral dont il s’estimait victime.

 Cadre juridique

2        Le 20 avril 1960, le conseil d’administration de la BEI a arrêté le règlement du personnel de la BEI. Dans sa version applicable au litige, l’article 22 du règlement du personnel prévoit que « [c]haque membre du personnel fait l’objet d’une appréciation annuelle qui lui est communiquée. La procédure à suivre pour cette appréciation est fixée par une décision intérieure. […] »

3        La communication au personnel du 13 juillet 2007 relative à l’exercice d’évaluation des performances au titre de l’année 2006, à la procédure de recours et au calendrier de l’exercice d’évaluation prévoit, au point 1, qu’en cas d’« objection grave » d’un membre du personnel sur son évaluation annuelle « un second entretien a lieu avec le [ou] les notateur(s) » et que « [s]i le différend ne peut être réglé au cours de cet entretien, le membre du personnel doit solliciter […] une entrevue avec le [d]irecteur ou le [d]irecteur général ». Ce même point 1 prévoit en outre que « [s]i le désaccord subsiste, le membre du personnel peut demander que son cas soit examiné par le [c]omité de recours ».

4        Par décision du 27 juin 2006, annexée à la communication au personnel du 13 juillet 2007 relative à l’exercice d’évaluation des performances au titre de l’année 2006, à la procédure de recours et au calendrier de l’exercice d’évaluation (ci-après la « décision du 27 juin 2006 »), la BEI a prévu les règles de la procédure devant le comité de recours.

5        Le point 6 de la décision du 27 juin 2006 prévoit :

« Concernant l’exercice d’appréciation, le [comité de recours] a compétence pour :

i)       invalider la procédure d’appréciation ou toute affirmation contenue dans le formulaire d’évaluation et/ou

ii)       modifier […] la note de mérite résultant de l’évaluation globale de la performance de l’appelant. »

6        Le point 7 de la décision du 27 juin 2006 précise :

« Si le [comité de recours] invalide la procédure d’appréciation annuelle selon [le point 6, sous i),] et demande un nouvel exercice d’appréciation, le membre du personnel a le droit de faire appel du résultat de cette deuxième appréciation devant le [comité de recours], selon les termes [du point] 6 […]. »

7        Aux termes du point 10 de la décision du 27 juin 2006, l’appel devant le comité de recours contre une décision de la BEI concernant la procédure d’appréciation annuelle doit être introduit dans un délai de quinze jours calendaires à compter de la publication des décisions de promotions adoptées à la suite de l’exercice d’appréciation.

8        Aux termes du point 11 de la décision du 27 juin 2006, le comité de recours rend des « conclusion[s] » ou une « recommandation ». Selon le point 20 de la décision du 27 juin 2006, « [l]es conclusions du [comité de recours] obligent toutes les parties et doivent être exécutées sans délai par la ou les parties auxquelles une telle obligation incombe, sans préjudice du droit de recours devant le Tribunal de la fonction publique [de l’Union] européenne. » Aux termes du point 21 de la décision du 27 juin 2006, « [l]es décisions du président de la [BEI] suite aux recommandations du [comité de recours] doivent être exécutées sans délai, sans préjudice du droit au recours devant le Tribunal de la fonction publique [de l’Union] européenne. »

9        Par ailleurs, par note de service du 16 décembre 2003, la BEI a adopté une réglementation interne, intitulée « Politique en matière de respect de la dignité de la personne au travail » (ci-après la « réglementation interne sur le respect de la dignité de la personne au travail »), qui vise à traiter notamment les cas de harcèlement moral et qui comprend une phase informelle de résolution amiable du litige et une procédure d’enquête confiée à un comité de trois membres indépendants (ci-après le « comité d’enquête »).

 Faits à l’origine du litige

10      Pour un exposé complet des faits à l’origine du litige, il y a lieu de se reporter aux points 20 à 77 de l’arrêt initial (EU:F:2009:159), auxquels renvoie expressément le point 2 de l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205).

11      Dans le cadre du présent arrêt, il convient uniquement de rappeler que le rapport d’appréciation au titre de l’année 2006, signé par le notateur le 30 mars 2007, par le directeur général le 21 mai 2007 et par le requérant le 13 juin 2007, a attribué la note B au requérant, signifiant que sa « [p]erformance [était] en conformité avec l’ensemble des attentes » (ci-après le « rapport litigieux »).

12      Par communication au personnel du 13 juillet 2007, la BEI a publié la liste des promotions décidées dans le cadre de l’exercice d’évaluation portant sur l’année 2006. Le nom du requérant ne figurait pas sur cette liste (ci-après la « décision de refus de promotion »).

13      Le 13 juillet 2007, le requérant a saisi le comité de recours aux fins d’obtenir une note plus élevée que la note B ainsi qu’une promotion. Par décision du 14 décembre 2007, le comité de recours a rejeté le recours aux motifs, d’une part, que le requérant n’avait pas établi que la BEI avait commis une erreur manifeste d’appréciation en lui attribuant la note B et, d’autre part, que, n’ayant pas obtenu la note A ou la note B+, il ne pouvait, en vertu de la réglementation applicable, bénéficier d’une promotion (ci-après la « décision du comité de recours »).

 Procédure devant le Tribunal et le Tribunal de l’Union européenne

14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 juin 2008, le requérant a demandé, en substance, premièrement, l’annulation de la décision du comité de recours ; deuxièmement, l’annulation de la décision de refus de promotion ; troisièmement, l’annulation de « tous les actes connexes, consécutifs et préalables, parmi lesquels [le rapport litigieux] » ; quatrièmement, la constatation du harcèlement moral dont il s’estimait victime afin que la BEI soit condamnée, d’une part, à cesser ledit harcèlement et, d’autre part, à réparer le préjudice qui en résultait pour lui, et, cinquièmement, le remboursement de certains frais médicaux.

15      Par l’arrêt initial (EU:F:2009:159), le Tribunal a rejeté le recours et condamné le requérant aux dépens.

16      Par l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205), le Tribunal de l’Union européenne a partiellement annulé l’arrêt initial (EU:F:2009:159). Au point 102 de l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205), le Tribunal de l’Union européenne a précisé qu’« il y a[vait] lieu d’annuler l’arrêt [initial (EU:F:2009:159)], sauf en ce qui concerne l’appréciation [du] [T]ribunal exposée aux points 103 à 140, 149 à 167, 170 à 176, 179 à 185, 206 à 215, 252 à 269 et 270 à 272 de l’arrêt [initial (EU:F:2009:159)] ».

17      Dans le dispositif de l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205), le Tribunal de l’Union européenne a jugé ce qui suit :

« 1)       L’arrêt [initial (EU:F:2009:159)] est annulé, en ce qu’il rejette, premièrement, les conclusions [du requérant] tendant à l’annulation de la décision du comité de recours […], deuxièmement, ses conclusions tendant à l’annulation de la décision de refus de […] promotion […], ainsi que de tous les actes connexes, consécutifs et préalables à cette décision, et, troisièmement, ses conclusions tendant à la reconnaissance de la responsabilité de la BEI en raison du harcèlement qu’elle aurait exercé à son égard et tendant à la réparation des préjudices allégués à ce titre.

2)       Le pourvoi est rejeté pour le surplus.

3)       L’affaire est renvoyée devant le Tribunal […].

4)       Les dépens sont réservés. »

 Procédure et conclusions des parties dans l’instance après renvoi

18      Les mémoires d’observations écrites du requérant et de la BEI sont parvenus au greffe du Tribunal respectivement le 18 juin 2012 et le 26 juillet 2012.

19      Par lettre du 12 août 2012, le requérant a demandé la « suppression » du mémoire d’observations écrites de la BEI et l’autorisation de déposer un mémoire complémentaire. Par lettre du 3 octobre 2012, le greffe du Tribunal a informé les parties que le Tribunal avait rejeté la demande de suppression du mémoire d’observations écrites de la BEI et décidé d’autoriser le dépôt de mémoires d’observations complémentaires. Ces derniers sont parvenus au greffe du Tribunal, pour le requérant, le 21 octobre 2012 et, pour la BEI, le 8 février 2013.

20      Par lettre du 18 mars 2013, le Tribunal a interrogé les parties quant à la possibilité de tenter un règlement amiable des sept affaires qui les opposaient et qui, à cette date, étaient pendantes devant lui, à savoir les affaires enregistrées sous les références F‑55/08 RENV, F‑45/11, F‑52/11, F‑128/11, F‑37/12, F‑63/12 et F‑82/12. Par lettres des 19 et 21 mars 2013, les parties ont, en substance, décliné cette proposition.

21      Le 16 septembre 2013, le Tribunal de l’Union européenne a prononcé trois arrêts dans des affaires opposant le requérant à la BEI, à savoir les arrêts De Nicola/BEI (T‑264/11 P, EU:T:2013:461), De Nicola/BEI (T‑418/11 P, EU:T:2013:478) et De Nicola/BEI (T‑618/11 P, EU:T:2013:479).

22      Par lettre du 14 octobre 2013, le requérant a présenté une demande de récusation du président de la première chambre du Tribunal. Par décision du 23 octobre 2013, le président du Tribunal a rejeté cette demande. Le requérant a déposé une nouvelle demande de récusation du président de la première chambre du Tribunal le 24 octobre suivant.

23      L’audience de plaidoiries dans la présente affaire a eu lieu le 5 novembre 2013.

24      Le 25 février 2014, à l’issue de l’audience de plaidoiries dans l’affaire F‑52/11, De Nicola/BEI, les parties ont donné leur accord pour que le Tribunal procède, à la lumière notamment des trois arrêts du Tribunal de l’Union européenne rendus le 16 septembre 2013, visés au point 21 du présent arrêt, à une tentative de règlement amiable de l’ensemble des neuf affaires qui les opposaient et qui, à cette date, étaient pendantes devant lui, à savoir les affaires enregistrées sous les références F‑55/08 RENV, F‑59/09 RENV, F‑45/11, F‑52/11, F‑128/11, F‑37/12, F‑82/12, F‑55/13 et F‑104/13.

25      La tentative de règlement amiable s’est déroulée du 25 février 2014 au 18 juin 2014. Le Tribunal en a constaté l’échec par compte rendu du 4 juillet 2014.

26      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision du comité de recours ;

–        par voie de conséquence, annuler la décision de refus de promotion, ainsi que « tous les actes connexes, consécutifs et préalables, parmi lesquels [le rapport litigieux] » ;

–        constater le harcèlement moral ;

–        condamner la BEI à cesser le harcèlement moral à son encontre et à réparer les préjudices qu’il a subis ;

–        ordonner une expertise afin d’évaluer le travail du requérant et une expertise visant à constater l’atteinte à sa santé ;

–        condamner la BEI aux dépens.

27      La BEI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du comité de recours

 Arguments des parties

28      Le requérant soutient, en premier lieu, que le comité de recours avait le pouvoir de procéder à une nouvelle appréciation de ses compétences et de modifier les évaluations figurant dans le rapport litigieux, son appréciation remplaçant l’évaluation contestée. Or, le comité de recours se serait limité à un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation.

29      La BEI admet que le comité de recours dispose d’un pouvoir de contrôle entier sur les appréciations des mérites figurant dans le rapport litigieux et que l’annulation par le Tribunal de la décision du comité de recours entraînerait une « réappréciation », par le comité de recours, de la procédure d’évaluation et des mérites du requérant. La BEI considère néanmoins qu’en l’espèce le comité de recours a effectivement exercé un contrôle entier sur le rapport litigieux, puisqu’il a conclu à l’absence d’erreur manifeste d’appréciation après avoir examiné l’ensemble de la documentation et des arguments avancés par le requérant. En outre, le comité de recours n’aurait pas pu confirmer le jugement favorable des évaluateurs sans avoir exercé un tel contrôle.

30      En second lieu, le requérant soutient que le comité de recours a considéré à tort qu’il aurait, d’une part, renoncé à invoquer devant lui les vices de la procédure d’évaluation et, d’autre part, acquiescé aux accusations infondées concernant ses habitudes de travail.

31      Pour sa part, la BEI estime que les affirmations du comité de recours sont exactes et étayées. En toute hypothèse, le Tribunal se serait prononcé, dans l’arrêt initial (EU:F:2009:159), sur les vices de la procédure d’évaluation allégués. Les motifs de l’arrêt initial (EU:F:2009:159) y relatifs auraient été expressément maintenus par le point 102 de l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205).

 Appréciation du Tribunal

32      Dans l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205), il a été jugé que le comité de recours doit exercer un contrôle entier sur le rapport d’appréciation dont il est saisi, portant sur le bien-fondé de chacune des évaluations contenues dans ce rapport, et non pas un contrôle restreint limité à l’erreur manifeste d’appréciation.

33      Le Tribunal de l’Union européenne a, en effet, ainsi statué :

« 41.       […] [L]a possibilité [prévue par le point 6 de la décision du 27 juin 2006] d’invalider […] toute affirmation contenue dans le […] rapport d’appréciation implique que le comité de recours est habilité à réapprécier le bien-fondé de chacune de ces affirmations avant de la censurer. La portée de cette compétence dépasse ainsi clairement celle du seul pouvoir de contrôle de légalité et d’annulation du dispositif d’un acte, dans la mesure où elle englobe la possibilité d’invalider même les motifs justifiant l’adoption de son dispositif, quelle que soit leur importance dans l’économie de la motivation dudit acte. Ce pouvoir de contrôle entier du comité de recours est confirmé par la compétence qui lui est expressément reconnue pour ‘modifier les notes individuelles […] et la note de mérite résultant de l’évaluation globale de la performance de l’appelant’. En effet, une modification de la note de mérite de l’intéressé implique que ce comité contrôle de manière détaillée l’ensemble des appréciations des mérites figurant dans le rapport contesté quant à l’existence d’éventuelles erreurs d’appréciation, de fait ou de droit, et qu’il puisse, le cas échéant, se substituer à l’évaluateur pour procéder à une nouvelle appréciation de ces mérites.

42.       […] [L]es règles procédurales prévues aux points 11 et 13 de la décision du 27 juin 2006 […] permettent […] une réappréciation complète des faits pertinents à l’origine de l’évaluation des mérites de l’appelant, notamment à la suite d’une audience et à l’aide de témoins. Enfin, si le point 7 de la décision du 27 juin 2006 autorise le comité de recours à invalider la ‘procédure d’appréciation annuelle’ et à demander un ‘nouvel exercice d’appréciation’ de la part de l’évaluateur, […] il ne s’agit que d’une faculté complétant le pouvoir de ce comité de procéder lui-même à une telle appréciation des mérites de l’intéressé. »

34      En l’espèce, dans la décision du comité de recours, il est expressément précisé que, en règle générale, « une note peut être modifiée en cas d’erreur manifeste dans l’évaluation des prestations d’un noté » et que, dans le cas du requérant, « bien que [celui-ci] ait procédé à un exposé relativement détaillé des divers éléments et aspects techniques de ses travaux, il n’a pas mis le [c]omité [de recours] à même de constater une erreur d’appréciation, en soi ou en comparaison avec l’appréciation du travail de ses collègues. Il en résulte que la motivation par la [BEI] de la note [du requérant], ayant tenu compte de ses habitudes de travail, telles qu’admises par lui-même […], ne peut être considérée comme étant entachée d’une erreur manifeste et ne peut donc pas être infirmée ».

35      Comme l’a indiqué le Tribunal de l’Union européenne aux points 48 et 55 de l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205), il ressort des termes mêmes de la décision du comité de recours que celui-ci a estimé que, par principe, son contrôle ne pouvait pas aller au-delà de la recherche d’une erreur manifeste d’appréciation. La décision du comité de recours ne respecte donc pas le point 6 de la décision du 27 juin 2006, tel qu’interprété d’ailleurs par les points 38 à 50 de l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205).

36      Il ressort également de la décision du comité de recours que ce dernier n’a effectivement exercé, sur le rapport litigieux, qu’un contrôle restreint, d’ailleurs très succinct, et ne répondant pas à chacun des griefs soulevés par le requérant.

37      Il découle de l’ensemble de ce qui précède qu’il y a lieu, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le second argument du requérant, d’annuler la décision du comité de recours.

 Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision de refus de promotion ainsi que de l’ensemble des « actes connexes, consécutifs et préalables, parmi lesquels le [rapport litigieux] »

 Arguments des parties

38      Le requérant soutient que le Tribunal ne doit examiner ce chef de conclusions qu’en cas de rejet de la demande d’annulation de la décision du comité de recours. En effet, l’annulation de la décision du comité de recours entraînerait soit l’annulation « implicit[e] » du rapport litigieux, de la décision de refus de promotion et de « tous les actes connexes, consécutifs et préalables », soit la constatation par le Tribunal qu’il n’y a plus lieu de statuer sur le présent chef de conclusions.

39      Le requérant considère également que si, dans l’arrêt initial (EU:F:2009:159), le Tribunal avait fait droit à sa demande d’annulation de la décision du comité de recours, il n’aurait pas examiné la demande subsidiaire portant sur la légalité du rapport litigieux. Dès lors, les appréciations figurant aux points 103 à 140 et 149 à 167 de l’arrêt initial (EU:F:2009:159) doivent, en substance, être considérées comme non avenues.

40      La BEI considère, au contraire, que la légalité du rapport litigieux doit être appréciée en tenant compte des appréciations figurant aux points 103 à 140 et 149 à 167 de l’arrêt initial (EU:F:2009:159), lesquels n’ont pas été annulés par le Tribunal de l’Union européenne, comme l’indique le point 102 de l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205).

 Appréciation du Tribunal

41      En premier lieu, il convient de constater que, si le requérant demande au Tribunal d’annuler, par voie de conséquence, « tous les actes connexes, consécutifs et préalables », il ne précise nullement quels actes sont ainsi visés, à l’exception du rapport litigieux et de la décision de refus de promotion.

42      Les conclusions du requérant, en tant qu’elles visent les « actes connexes, consécutifs et préalables », ne répondent donc pas aux exigences de clarté et de précision requises par l’article 35, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure en vigueur à la date du dépôt du recours et doivent, dès lors, être rejetées comme irrecevables.

43      En deuxième lieu, quant à la légalité du rapport litigieux, il découle du point 53 de l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205), que, compte tenu de la portée des dispositions du point 6 de la décision du 27 juin 2006, relatives à la compétence du comité de recours, l’annulation de la décision du comité de recours impose à la BEI de saisir de nouveau ce comité de la contestation formée à l’encontre dudit rapport par le requérant.

44      En outre, le Tribunal de l’Union européenne a précisé, au point 60 de l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205), que le comité de recours s’était illégalement abstenu d’exercer un contrôle entier sur le rapport litigieux en application du point 6 de la décision du 27 juin 2006 et que, dès lors, sa décision avait été viciée et devait être annulée. Il en a conclu que le rapport litigieux n’était pas devenu définitif et que ledit comité était tenu de procéder à un nouveau contrôle dudit rapport impliquant une réappréciation des mérites du requérant. Le Tribunal de l’Union européenne a, dans ces conditions, considéré, au point 61 de l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205), qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur le deuxième moyen du pourvoi, tiré d’erreurs et d’omissions dans l’appréciation par le Tribunal de la légalité du rapport litigieux.

45      Pour les mêmes motifs, le Tribunal estime que, la décision du comité de recours ayant été annulée, il n’y a plus lieu de statuer sur la légalité du rapport litigieux et de la décision de refus de promotion.

46      Quant aux appréciations figurant aux points 103 à 140 et 149 à 167 de l’arrêt initial (EU:F:2009:159), elles sont sans incidence sur la solution du litige ; il suffit, en effet, de constater que, au point 60 de l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205), le Tribunal de l’Union européenne a expressément précisé que non seulement le rapport litigieux n’était pas devenu définitif, mais que le comité de recours « [était] tenu de procéder à un nouveau contrôle dudit rapport impliquant une réappréciation des mérites du requérant ». Il appartient donc désormais au comité de recours de procéder à ladite réappréciation.

 Sur les conclusions tendant à la constatation du harcèlement moral et à la condamnation de la BEI à cesser ledit harcèlement

47      Dans ses troisième et quatrième chefs de conclusions, le requérant sollicite du Tribunal qu’il constate le harcèlement moral et qu’il enjoigne à la BEI de cesser ce harcèlement.

48      Or, il est de jurisprudence constante qu’il n’appartient au juge de l’Union ni de faire des constatations de principe (arrêts De Nicola/BEI, T‑120/01 et T‑300/01, EU:T:2004:367, point 136, et De Nicola/BEI, EU:T:2013:461, point 63) ni d’adresser des injonctions à l’administration (arrêts Psarras/ENISA, F‑118/10, EU:F:2012:138, point 31, et Cerafogli/BCE, F‑43/10, EU:F:2012:184, point 43).

49      Il s’ensuit que les conclusions aux fins de constatation du harcèlement moral et aux fins d’injonction sont irrecevables et doivent être rejetées.

 Sur les conclusions indemnitaires

 Arguments des parties

50      Le requérant demande tout d’abord réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral dont il s’estime victime.

51      Dans son mémoire d’observations écrites, le requérant ajoute que, indépendamment de la qualification de harcèlement, le comportement de la BEI est illégal et le préjudice ainsi causé doit être réparé.

52      La BEI fait notamment valoir que le requérant a demandé, le 27 mars et le 15 avril 2009, l’ouverture d’une enquête sur la base de la réglementation interne sur le respect de la dignité de la personne au travail, laquelle a donné lieu à une décision du président de la BEI du 1er septembre 2010 que le requérant conteste dans le cadre de l’affaire F‑52/11, De Nicola/BEI (ci-après l’« affaire F‑52/11 »). La BEI indique que les faits dénoncés dans l’affaire F‑52/11 incluent l’intégralité des faits à l’origine de la présente affaire. La BEI considère que le Tribunal doit donc tenir compte des résultats de l’enquête interne ou surseoir à statuer sur le présent recours jusqu’au prononcé de la décision mettant fin à l’instance dans l’affaire F‑52/11.

 Appréciation du Tribunal

53      Par recours introduit le 24 avril 2011 et enregistré sous la référence F‑52/11, le requérant a demandé au Tribunal, notamment, l’annulation de la lettre du 1er septembre 2010 par laquelle le président de la BEI a déclaré que, à la suite de la décision du 30 juin 2010 du comité d’enquête de rejeter la plainte pour harcèlement introduite par le requérant conformément à la réglementation interne sur le respect de la dignité de la personne au travail, aucune action n’était nécessaire (ci-après la « décision du 1er septembre 2010 »). Dans son recours, le requérant a demandé, en outre, au Tribunal de constater le harcèlement dont il s’estime victime et, enfin, de condamner la BEI à réparer les dommages physique, moral et matériel qui en résultent.

54      Par arrêt du 11 novembre 2014, De Nicola/BEI (F‑52/11), le Tribunal a, notamment, annulé la décision du président de la BEI du 1er septembre 2010 au motif que le comité d’enquête avait appliqué une définition incorrecte du harcèlement moral au cas qui lui était soumis et ne s’était pas prononcé sur certains faits dénoncés par le requérant et a rejeté comme prématurées les conclusions indemnitaires pour harcèlement, le Tribunal ne pouvant pas préjuger des mesures d’exécution qu’il incombe à la BEI d’adopter à la suite de l’annulation de la décision du 1er septembre 2010.

55      Or, au cours de l’audience de plaidoiries dans la présente affaire et en réponse à une question posée par le Tribunal, les parties ont confirmé que l’intégralité des faits à l’origine de la demande indemnitaire dans la présente affaire avait été également invoquée par le requérant au soutien de la demande indemnitaire dans l’affaire F‑52/11.

56      La question se pose donc de savoir s’il est encore nécessaire de statuer sur la présente demande indemnitaire, à la lumière également du principe d’une bonne administration de la justice (voir, par analogie, ordonnance Chassagne/Commission, F‑11/05 RENV, EU:F:2009:154, point 28, et la jurisprudence citée).

57      À cet égard, il y a lieu, tout d’abord, de rappeler que, en toute hypothèse, à supposer réunies les conditions d’engagement de la responsabilité de la BEI, cette dernière ne saurait être condamnée deux fois à réparer le même préjudice.

58      En outre, il y a lieu de constater que les demandes de réparation du préjudice résultant du harcèlement dans l’affaire F‑52/11 et dans la présente affaire ont le même objet et la même cause.

59      Toutefois, les allégations en fait et les argumentations en droit présentées, de part et d’autre, dans le cadre de la demande indemnitaire dans l’affaire F‑52/11 sont plus circonstanciées et approfondies.

60      En effet, les faits à l’origine de la demande indemnitaire dans l’affaire F‑52/11 incluent non seulement ceux à l’origine de la demande dans le cadre de la présente affaire, mais également des faits supplémentaires, allégués par le requérant aux fins d’étayer l’existence d’un harcèlement à son encontre.

61      En outre, il convient de rappeler que le requérant a saisi, le 27 mars puis le 15 avril 2009, les autorités compétentes de la BEI d’une plainte pour harcèlement moral sur la base de la réglementation interne sur le respect de la dignité de la personne au travail. À la suite du dépôt de cette plainte, les autorités compétentes de la BEI ont décidé d’ouvrir une enquête qui, conformément à la réglementation interne précitée, a été confiée à un comité d’enquête. Sur la base de ce mandat, ledit comité a procédé à l’examen des différents faits et incidents, en décidant de se concentrer exclusivement et précisément sur les faits à l’origine de la présente affaire, et a conclu à l’absence de harcèlement moral à l’encontre du requérant.

62      En raison donc de la spécificité de cette procédure d’enquête, activée par le requérant lui-même, ainsi que des éléments de preuve mis en lumière au cours de l’enquête et figurant dans le rapport d’enquête établi à l’issue de cette procédure, les éléments et allégations de fait et de droit relatifs aux mêmes faits à l’origine des deux demandes indemnitaires sont plus circonstanciés et argumentés dans le cadre de l’affaire F‑52/11 que dans la présente affaire, et ce tant de la part du requérant que de la part de la BEI. Il en découle que le Tribunal est mieux à même de connaître et d’évaluer les faits à l’origine de la demande indemnitaire dans le cadre de l’affaire F‑52/11 et, par conséquent, de mieux administrer la justice et d’assurer une protection juridictionnelle effective.

63      Pour ces motifs, le Tribunal décide, après avoir entendu les parties à ce sujet au cours de l’audience, qu’il n’y a plus lieu de statuer sur la demande de réparation du préjudice subi du fait du harcèlement, laquelle a déjà été traitée dans le cadre de l’affaire F‑52/11 dont l’arrêt a été prononcé le 11 novembre 2014.

64      Enfin, pour autant que les conclusions indemnitaires du requérant puissent être interprétées comme tendant à la réparation de préjudices subis pour d’autres faits que le harcèlement moral, il y a lieu de les déclarer irrecevables, une telle demande ayant déjà été rejetée sur le fond par les points 259 à 268 de l’arrêt initial (EU:F:2009:159), confirmés par les points 93 à 96 de l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205).

Sur les conclusions relatives aux demandes d’expertise

65      Dans l’arrêt de renvoi (EU:T:2012:205), le Tribunal de l’Union européenne a rejeté comme manifestement irrecevable le moyen du pourvoi tiré d’une erreur de droit en ce que le Tribunal avait rejeté dans l’arrêt initial (EU:F:2009:159) la demande de mesures d’instruction, en ce inclus la demande d’« ordonner une expertise médicale afin de constater l’atteinte à la santé subie par le requérant à la suite des vexations commises par la BEI et de son comportement illégal ». L’arrêt initial (EU:F:2009:159) est, à cet égard, devenu définitif.

66      En toute hypothèse, il convient de constater, eu égard, d’une part, aux éléments du dossier et, d’autre part, aux motifs du présent arrêt, que les expertises demandées ne présentent pas d’utilité pour la solution du litige. Par conséquent, la demande visant à ce que le Tribunal ordonne ces mesures d’instruction doit être rejetée.

 Sur les dépens

67      Il appartient au Tribunal de statuer dans le présent arrêt sur les dépens relatifs, d’une part, aux procédures engagées devant lui et, d’autre part, à la procédure de pourvoi devant le Tribunal de l’Union européenne, conformément à l’article 131 du règlement de procédure.

68      Aux termes de l’article 101, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe supporte ses propres dépens et est condamnée aux dépens exposés par l’autre partie, s’il est conclu en ce sens. En vertu de l’article 102, paragraphe 1, du même règlement, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe supporte ses propres dépens mais n’est condamnée que partiellement aux dépens exposés par l’autre partie, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

69      En l’espèce, il résulte des motifs énoncés dans le présent arrêt que la BEI est, pour l’essentiel, la partie qui succombe. En outre, le requérant a, dans ses conclusions, expressément demandé que la BEI soit condamnée aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 102, paragraphe 1, du règlement de procédure, la BEI doit supporter ses propres dépens et est condamnée à supporter l’ensemble des dépens exposés par le requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(première chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision du comité de recours de la Banque européenne d’investissement du 14 décembre 2007 est annulée.

2)      Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision du 13 juillet 2007 de ne pas promouvoir le requérant, sur les conclusions tendant à l’annulation du rapport d’appréciation pour l’année 2006 et sur les conclusions tendant à la réparation des préjudices allégués au titre du harcèlement moral.

3)      Le recours est rejeté pour le surplus.

4)      La Banque européenne d’investissement supporte ses propres dépens et est condamnée à supporter les dépens exposés par M. De Nicola dans les affaires F‑55/08, T‑37/10 P et F‑55/08 RENV.

Perillo

Rofes i Pujol

Barents

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 novembre 2014.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

      R. Barents


* Langue de procédure : l’italien.

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