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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Land Hessen v Pollmeier Massivholz (Judgment) French Text [2016] EUECJ C-242/15 (12 October 2016) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2016/C24215.html Cite as: ECLI:EU:C:2016:765, EU:C:2016:765, [2016] EUECJ C-242/15 |
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ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)
12 octobre 2016 (*)
« Pourvoi – Aides d’État – Mesures étatiques concernant l’établissement d’une scierie dans le Land de Hesse – Décision constatant l’absence d’aide d’État – Absence d’ouverture de la procédure formelle d’examen – Difficultés sérieuses – Calcul de l’élément d’aide des garanties publiques – Communication de la Commission sur les aides d’État sous forme de garanties »
Dans l’affaire C‑242/15 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 26 mai 2015,
Land Hessen, représenté par Mes U. Soltész et A. Richter, Rechtsanwälte,
partie requérante,
les autres parties à la procédure étant :
Pollmeier Massivholz GmbH & Co. KG, établie à Creuzburg (Allemagne), représentée par Mes J. Heithecker et J. Ylinen, Rechtsanwälte,
partie demanderesse en première instance,
Commission européenne, représentée par MM. F. Erlbacher et C. Urraca Caviedes, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie défenderesse en première instance,
LA COUR (sixième chambre),
composée de M. E. Regan, président de chambre, MM. J.-C. Bonichot et A. Arabadjiev (rapporteur), juges,
avocat général : M. M. Wathelet,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi, le Land Hessen (Land de Hesse, Allemagne) demande l’annulation partielle de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 17 mars 2015, Pollmeier Massivholz/Commission (T‑89/09, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2015:153), par lequel celui-ci, d’une part, a annulé la décision C(2008) 6017 final de la Commission, du 21 octobre 2008, Aides d’État N 512/2007 – Allemagne, Abalon Hardwood Hessen GmbH (ci-après la « décision litigieuse »), en ce qu’elle conclut que les garanties publiques octroyées par le Land de Hesse ne constituent pas des aides d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE et, d’autre part, a rejeté, pour le surplus, le recours de Pollmeier Massivholz GmbH & Co. KG tendant à l’annulation de ladite décision dans son ensemble et de la décision prétendument contenue dans la lettre D/55056 de la Commission, du 15 décembre 2008, relative à la procédure d’aides d’État CP 195/2007 – Abalon Hardwood Hessen GmbH (ci-après la « lettre D/55056 »).
Le cadre juridique
2 Aux termes de l’article 2, intitulé « Aides de minimis », du règlement (CE) n° 69/2001 de la Commission, du 12 janvier 2001, concernant l’application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de minimis (JO 2001, L 10, p. 30), qui était en vigueur à la date d’octroi des mesures litigieuses et sur lequel cette institution s’est fondée pour adopter la décision litigieuse :
« 1. Sont considérées comme ne remplissant pas tous les critères de l’article 87, paragraphe 1, du traité et comme non soumises, de ce fait, à l’obligation de notification prévue à l’article 88, paragraphe 3, du traité les aides qui satisfont aux conditions énoncées aux paragraphes 2 et 3.
2. Le montant total des aides de minimis octroyées à une même entreprise ne peut excéder 100 000 euros sur une période de trois ans. Ce plafond s’applique quels que soient la forme et l’objectif des aides.
3. Le plafond fixé au paragraphe 2 est exprimé sous la forme d’une subvention. Tous les chiffres utilisés sont des montants bruts, c’est-à-dire avant impôts directs. Lorsqu’une aide est accordée sous une forme autre qu’une subvention, le montant de l’aide est son équivalent-subvention brut.
[...] »
Les antécédents du litige
3 Aux fins du présent pourvoi, les antécédents du litige tels qu’ils ressortent de l’arrêt attaqué peuvent se résumer comme suit.
4 Pollmeier Massivholz est une société de droit allemand active dans le secteur de la scierie de feuillus qui exploite plusieurs scieries de bois de hêtre proches de la frontière du Land de Hesse.
5 Au cours de l’année 2007, la Commission des Communautés européennes a reçu deux plaintes, dont l’une émanait de Pollmeier Massivholz, qui dénonçaient un prétendu octroi d’aides illégales en faveur d’Abalon Hardwood Hessen GmbH (ci-après la « bénéficiaire ») visant à soutenir l’établissement d’une nouvelle scierie de bois de hêtre dans le Land de Hesse.
6 Par lettre du 6 septembre 2007, les autorités allemandes, en réponse à une demande d’informations de la Commission, ont notifié, à des fins de sécurité juridique, d’une part, une subvention à l’investissement régional d’un montant total de 4 500 000 euros octroyée par le Land de Hesse sur la base d’un régime d’aides existant et, d’autre part, deux garanties publiques octroyées sur la base des lignes directrices dudit Land sur l’octroi des garanties dans le secteur industriel (ci-après les « lignes directrices du Land de Hesse »). Ces autorités ont, en outre, déclaré avoir suspendu les paiements prévus par les mesures notifiées dans l’attente d’une décision positive de la Commission dans la procédure déclenchée par la notification.
7 Lors de la procédure administrative, les plaignants ont dénoncé non seulement les mesures d’aide notifiées, mais également trois autres mesures.
8 Dans la décision litigieuse, la Commission a abordé tant les mesures notifiées que les autres mesures. Sur la base des informations fournies par les autorités allemandes, la Commission a relevé que la subvention à l’investissement avait été accordée par deux décisions du 20 décembre 2006 et les garanties publiques octroyées par une décision du 28 décembre 2006.
9 Dans le cadre de l’appréciation des mesures examinées dans la décision litigieuse, la Commission a abordé la question de savoir si les mesures notifiées constituaient des aides nouvelles au sens de l’article 1er, sous c), du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [88 CE] (JO 1999, L 83, p. 1).
10 À cet égard, après avoir conclu que la bénéficiaire était une entreprise saine, la Commission a considéré, d’une part, que la subvention à l’investissement constituait non pas une aide nouvelle, mais une aide existante, au sens de l’article 1er, sous b), ii), de ce règlement, compatible avec le marché commun.
11 S’agissant, d’autre part, des garanties publiques, la Commission a considéré qu’elles avaient été octroyées sur la base de la règle de minimis applicable au moment de l’octroi, à savoir au cours de l’année 2006. La Commission a noté que le calcul de l’élément d’aide de ces garanties avait été effectué sur la base des lignes directrices du Land de Hesse, lesquelles prévoient que l’élément d’aide des garanties octroyées par les autorités de ce Land à des entreprises qui ne sont pas en difficulté s’élève à 0,5 % du montant garanti (ci-après la « méthode 0,5 % »). La Commission a considéré que cette méthode était conforme à une pratique acceptée par elle et confirmée dans plusieurs décisions et que, en l’espèce, le montant d’aide résultant de l’application de ladite méthode, à savoir 93 250 euros, n’excédait pas le plafond de 100 000 euros prévu à l’article 2, paragraphe 2, du règlement n° 69/2001 et relevait dès lors du champ d’application de celui-ci. Par conséquent, la Commission a conclu que les garanties publiques accordées à la bénéficiaire ne constituaient pas des aides d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE et, de ce fait, n’étaient pas soumises à l’obligation de notification prévue à l’article 88, paragraphe 3, CE.
12 Par ailleurs, la Commission a examiné les autres mesures dénoncées dans les plaintes et a conclu qu’elles ne constituaient pas des aides d’État.
13 Sur le fondement des considérations qui précèdent et sans ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE, la Commission a décidé de ne pas soulever d’objections s’agissant des mesures notifiées et des autres mesures dénoncées dans les plaintes. Par la lettre D/55056, la Commission a, en substance, indiqué à Pollmeier Massivholz que sa plainte avait été examinée dans le cadre de la procédure déclenchée par la notification et lui a transmis une copie de la décision litigieuse. La Commission a par ailleurs informé cette société que la procédure déclenchée par les plaintes était désormais considérée par ses services comme étant terminée.
La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
14 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 25 février 2009, Pollmeier Massivholz a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse ainsi que de la décision prétendument contenue dans la lettre D/55056.
15 Par ordonnance du président de la troisième chambre du Tribunal du 22 septembre 2009, le Land de Hesse a été admis à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.
16 À l’appui de son recours, Pollmeier Massivholz invoquait sept moyens, dont les troisième et septième étaient tirés, respectivement, de la violation de l’article 88, paragraphes 2 et 3, CE, dans la mesure où la Commission n’avait pas ouvert la procédure formelle d’examen malgré la présence de difficultés sérieuses dont l’existence ressortait, notamment, d’un examen insuffisant et incomplet de l’utilisation de la méthode 0,5 % pour déterminer l’élément d’aide des garanties publiques, ainsi que de la violation de l’article 87, paragraphe 1, CE et de l’article 88, paragraphe 3, CE, dans la mesure où la Commission avait considéré que les garanties publiques octroyées devaient être qualifiées d’aides de minimis.
17 Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a annulé la décision litigieuse en ce que, par celle-ci, la Commission avait conclu que les garanties publiques octroyées par le Land de Hesse ne constituaient pas des aides d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE et a rejeté le recours pour le surplus.
18 Pour ce faire, le Tribunal a, d’une part, rejeté comme irrecevable le recours en tant qu’il était dirigé contre la décision prétendument contenue dans la lettre D/55056 et, d’autre part, accueilli les griefs formulés dans le cadre du troisième moyen relatifs à la qualification des garanties publiques d’aides de minimis tout en écartant les autres griefs et moyens.
Les conclusions des parties
19 Par son pourvoi, le Land de Hesse demande à la Cour :
– d’annuler l’arrêt attaqué en ce qu’il annule la décision litigieuse ;
– de rejeter le recours de première instance dans son intégralité, et
– de condamner Pollmeier Massivholz à supporter les dépens du Land de Hesse pour les procédures devant le Tribunal et devant la Cour.
20 Pollmeier Massivholz et la Commission demandent à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner le Land de Hesse aux dépens.
Sur le pourvoi
21 Au soutien de son pourvoi, le Land de Hesse soulève quatre moyens.
Sur le premier moyen, tiré de la méconnaissance du pouvoir d’appréciation dont dispose la Commission pour déterminer l’élément d’aide des garanties
Argumentation des parties
22 Le premier moyen se divise en trois branches.
23 Par la première branche, le Land de Hesse reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en considérant, au point 150 de l’arrêt attaqué, qu’il doit exercer un entier contrôle en ce qui concerne la question de savoir si une mesure entre dans le champ d’application de l’article 87, paragraphe 1, CE. En effet, lorsqu’elle détermine le montant exact d’une aide, la Commission disposerait d’un pouvoir d’appréciation qui échappe au contrôle juridictionnel. En l’espèce, la Commission aurait exercé son pouvoir d’appréciation en calculant l’élément d’aide d’État des garanties en cause selon la méthode 0,5 % et sa décision serait soustraite au contrôle du juge de l’Union.
24 Dans le cadre d’une deuxième branche, le Land de Hesse fait valoir que le Tribunal a considéré à tort que la publication de la communication de la Commission sur l’application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides d’État sous forme de garanties (JO 2000, C 71, p. 14, ci-après la « communication sur les garanties ») s’opposait à l’application en l’espèce de la méthode 0,5 %. Le fait que la Commission s’est à nouveau exprimée, cette fois sous forme de communication, sur la question du calcul de l’élément d’aide des garanties ne priverait pas d’effets sa pratique constante d’utilisation de cette méthode. Il résulterait de la lettre de la Commission du 11 novembre 1998, mentionnée au point 172 de l’arrêt attaqué, qu’il s’agit d’une pratique spéciale par rapport aux règles de la communication sur les garanties. En outre, le Tribunal aurait estimé à tort que la pratique décisionnelle de la Commission, mentionnée au point 176 de cet arrêt, n’était pas pertinente. En effet, les garanties en cause dans les décisions mentionnées à ce point de l’arrêt attaqué auraient toutes été autorisées après l’entrée en vigueur de cette communication.
25 Par la troisième branche du premier moyen, le Land de Hesse reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur en jugeant, aux points 158 et suivants de l’arrêt attaqué, que la communication sur les garanties s’opposait, sur le fond, à l’application de la méthode 0,5 % en l’espèce. En effet, cette communication permettrait l’utilisation de « toute autre méthode objectivement justifiable et généralement admise ». Or, la méthode 0,5 % répondrait à cette définition. Le Tribunal aurait donc conclu à tort, au point 186 de l’arrêt attaqué, que la Commission n’avait pas examiné la légalité de l’utilisation de cette méthode à l’aune de ladite communication. Par ailleurs, l’absence d’un tel examen signifierait que l’affaire était claire, non que la Commission avait été confrontée à des difficultés sérieuses.
26 La Commission conteste le bien-fondé de la première branche du premier moyen. Pollmeier Massivholz conteste le bien-fondé de ce moyen dans son intégralité.
Appréciation de la Cour
27 S’agissant de la première branche du premier moyen, il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour que la notion d’« aide d’État », telle qu’elle est définie dans le traité FUE, présente un caractère juridique et doit être interprétée sur la base d’éléments objectifs. Pour cette raison, le juge de l’Union doit, en principe et compte tenu tant des éléments concrets du litige qui lui est soumis que du caractère technique ou complexe des appréciations portées par la Commission, exercer un entier contrôle en ce qui concerne la question de savoir si une mesure entre dans le champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (arrêts du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C‑487/06 P, EU:C:2008:757, point 111, ainsi que du 4 septembre 2014, SNCM et France/Corsica Ferries France, C‑533/12 P et C‑536/12 P, EU:C:2014:2142, point 15 et jurisprudence citée).
28 Certes, la Cour a également jugé qu’il n’appartient pas au juge de l’Union, dans le cadre de ce contrôle, de substituer son appréciation économique à celle de la Commission et que le contrôle que les juridictions de l’Union exercent sur les appréciations économiques complexes faites par la Commission est un contrôle restreint qui se limite nécessairement à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (arrêt du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C‑290/07 P, EU:C:2010:480, point 66).
29 En l’espèce, il ressort de l’arrêt attaqué, en particulier du point 169 de celui-ci, que le Tribunal n’a point contrôlé des appréciations économiques complexes faites par la Commission, mais a recherché, conformément à la jurisprudence citée au point 27 du présent arrêt, si la Commission avait effectué un examen de la conformité de l’utilisation de la méthode 0,5 % avec la communication sur les garanties, afin d’assurer une bonne application de l’article 107 TFUE.
30 Il convient donc de rejeter la première branche du premier moyen.
31 S’agissant de la deuxième branche de celui-ci, il importe de relever, premièrement, que ne saurait être retenu, parce que reposant sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué, l’argument du Land de Hesse selon lequel le Tribunal a commis une erreur en considérant que la publication de la communication sur les garanties s’opposait à l’application de la méthode 0,5 %. En effet, le Tribunal n’a nullement procédé, dans cet arrêt, à l’examen de la compatibilité de cette méthode avec les règles prévues à cette communication. Il ressort au contraire des points 158, 167 et 169 dudit arrêt que, après avoir constaté que la communication sur les garanties était applicable en l’espèce, ce qui n’est pas contesté dans le cadre du pourvoi, le Tribunal s’est borné à relever que la Commission n’avait pas effectué un examen de la compatibilité de l’utilisation de la méthode 0,5 % avec les règles prévues par cette communication, alors qu’elle était tenue de le faire.
32 Pour ce qui est, deuxièmement, de l’argument du Land de Hesse selon lequel il résulte de la lettre de la Commission du 11 novembre 1998, mentionnée au point 172 de l’arrêt attaqué, que la méthode 0,5 % constitue une règle spéciale qui déroge aux règles de la communication sur les garanties, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE, et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le pourvoi est limité aux questions de droit et que l’appréciation des faits et des éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (ordonnance du 5 février 2015, Grèce/Commission, C‑296/14 P, non publiée, EU:C:2015:72, point 32 et jurisprudence citée).
33 Or, par cet argument, le Land de Hesse, sans invoquer une dénaturation, vise en réalité à contester l’appréciation faite par le Tribunal, aux points 174 et 175 de l’arrêt attaqué, selon laquelle il résulte de la lettre de la Commission du 11 novembre 1998 que l’acceptation par cette institution de l’utilisation de la méthode 0,5 % revêtait un caractère provisoire et n’avait ni pour objectif ni pour effet de limiter l’appréciation de la Commission en ce qui concerne les garanties publiques octroyées postérieurement à la communication sur les garanties. Ledit argument doit donc être rejeté comme étant manifestement irrecevable.
34 Il en va de même, troisièmement, de l’argument du Land de Hesse selon lequel le Tribunal a considéré à tort que la pratique décisionnelle de la Commission, mentionnée au point 176 de l’arrêt attaqué, n’était pas pertinente. En effet, par un tel argument, le Land de Hesse vise, en réalité, à contester l’appréciation faite par le Tribunal audit point 176, selon laquelle cette pratique ne remettait pas en cause la conclusion selon laquelle les garanties publiques accordées à la bénéficiaire devaient être examinées à l’aune de la communication sur les garanties parce que les garanties publiques concernées par ladite pratique relevaient toutes de régimes d’aides approuvés antérieurement à l’adoption de cette communication.
35 Au regard de ce qui précède, la deuxième branche du premier moyen ne saurait non plus être accueillie.
36 Quant à la troisième branche de ce moyen, il convient de relever que, contrairement à ce que fait valoir le Land de Hesse, le Tribunal n’a pas considéré, aux points 158 et suivants de l’arrêt attaqué, que la communication sur les garanties s’oppose, sur le fond, à l’application de la méthode 0,5 %.
37 En effet, ainsi qu’il a été précisé au point 31 du présent arrêt, l’examen du Tribunal a porté non sur la compatibilité de l’utilisation de cette méthode avec les règles prévues par ladite communication, mais sur l’existence de difficultés sérieuses concernant la question de savoir si les garanties litigieuses pouvaient être qualifiées d’aides de minimis.
38 À cet égard, le Tribunal a relevé, à bon droit, aux points 49 et 50 de l’arrêt attaqué, que la notion de « difficultés sérieuses », dont la présence oblige la Commission à ouvrir la procédure formelle d’examen, revêt un caractère objectif et que le caractère insuffisant ou incomplet de l’examen mené par cette institution lors de la procédure d’examen préliminaire constitue un indice de l’existence de difficultés sérieuses.
39 Le Tribunal a donc pu conclure, au point 186 de l’arrêt attaqué, sans commettre d’erreur de droit, que l’absence d’examen par la Commission de la légalité de l’utilisation de la méthode 0,5 % pour déterminer l’élément d’aide des garanties accordées à la bénéficiaire à l’aune de la communication sur les garanties constituait une indication de l’existence de difficultés sérieuses concernant la question de savoir si les garanties litigieuses pouvaient être qualifiées d’aides de minimis.
40 Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter également la troisième branche et, partant, le premier moyen dans son ensemble comme étant en partie non fondé et en partie manifestement irrecevable.
Sur le deuxième moyen, tiré de la méconnaissance du caractère objectif de la notion d’« aide d’État »
Argumentation des parties
41 Par son deuxième moyen, le Land de Hesse reproche au Tribunal d’avoir erronément considéré, aux points 154, 171 et 173 de l’arrêt attaqué, que la méthode 0,5 % n’est applicable que dans le cadre des régimes d’aides autorisés. En effet, la détermination de l’élément d’aide impliquant une interprétation de la notion objective d’« aide », au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, il ne serait pas possible de calculer différemment le montant d’une aide selon qu’elle est accordée ou non dans le cadre d’un régime autorisé. Le fait qu’une garantie a été notifiée et autorisée par la Commission ne pourrait pas modifier l’élément d’aide de cette garantie. Par ailleurs, la méthode 0,5 % serait un moyen raisonnable d’approximer l’équivalent-subvention brut d’une garantie, au sens de l’article 2, paragraphe 3, du règlement n° 69/2001, en l’absence de données empiriques relatives aux taux de défaut pour les garanties accordées à des entreprises saines. Des règlements de minimis subséquents prévoiraient également des méthodes d’approximation.
42 Pollmeier Massivholz conclut au rejet du deuxième moyen comme étant inopérant. Cette société fait valoir, en outre, que le Land de Hesse a implicitement soutenu qu’aucune donnée empirique relative aux taux de défaut pour les garanties accordées à des entreprises saines n’était disponible jusqu’à l’année 2006. Cet argument dudit Land constituerait un élément nouveau, irrecevable dans le cadre d’un pourvoi.
Appréciation de la Cour
43 Sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par Pollmeier Massivholz, il y a lieu de constater d’emblée que le deuxième moyen ne saurait prospérer.
44 En effet, il convient de noter, d’une part, que, au point 154 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que les garanties accordées à la bénéficiaire ne relevaient pas d’un régime d’aides autorisé par la Commission, puisque, à la date où ces garanties ont été accordées, les lignes directrices du Land de Hesse, qui prévoient l’utilisation de la méthode 0,5 %, n’avaient pas été notifiées à la Commission et n’avaient, dès lors, pas fait l’objet d’une décision d’autorisation de celle-ci.
45 Au point 171 de cet arrêt, le Tribunal a relevé que la pratique de la Commission consistant à admettre l’utilisation du taux de 0,5 % avait pris naissance entre l’année 1991 et l’année 1998, dans le cadre de l’examen permanent par cette institution, en vertu de l’article 88, paragraphe 1, CE, des lignes directrices des différents Länder et de l’État fédéral allemand concernant les garanties publiques et que cet examen permanent n’avait jamais concerné des lignes directrices adoptées par le Land de Hesse.
46 Au point 173 dudit arrêt, le Tribunal a constaté que cette pratique avait pris naissance antérieurement à l’adoption de la communication sur les garanties, dans le cadre d’une procédure spécifique relative au contrôle permanent d’aides existantes et qui, à aucun moment, n’avait concerné des lignes directrices adoptées par le Land de Hesse.
47 Contrairement à ce que soutient ce Land, il ne ressort pas des points 154, 171 et 173 de l’arrêt attaqué que le Tribunal aurait considéré que la méthode 0,5 % n’était applicable que dans le cadre des régimes d’aides autorisés. En effet, le Tribunal s’est borné à relever, au point 154 de cet arrêt, que les garanties accordées à la bénéficiaire ne relevaient pas de l’un des régimes d’aide dans le cadre desquels la Commission avait admis l’utilisation de la méthode 0,5 %. Dans cette lignée, le Tribunal a simplement rappelé, aux points 171 et 173 dudit arrêt, en substance, que la procédure d’examen permanent des lignes directrices des différents Länder, qui avait donné naissance à la pratique d’acceptation de l’utilisation de cette méthode, n’avait jamais concerné les lignes directrices du Land de Hesse.
48 D’autre part, en tout état de cause, est inopérant l’argument du Land de Hesse selon lequel la méthode 0,5 % est un moyen raisonnable d’approximer l’équivalent-subvention brut d’une garantie, au sens de l’article 2, paragraphe 3, du règlement n° 69/2001, en l’absence de données empiriques relatives aux taux de défaut pour les garanties accordées à des entreprises saines. En effet, ainsi qu’il a été exposé au point 37 du présent arrêt, l’examen du Tribunal a porté non sur la question de l’admissibilité de l’utilisation de cette méthode, mais sur l’existence de difficultés sérieuses concernant la question de savoir si les garanties litigieuses pouvaient être qualifiées d’aides de minimis.
49 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen comme étant en partie non fondé et en partie inopérant.
Sur le troisième moyen, tiré de la violation du principe général d’égalité de traitement
Argumentation des parties
50 Le troisième moyen est divisé en deux branches.
51 Par la première branche, le Land de Hesse reproche au Tribunal d’avoir violé le principe général d’égalité de traitement, consacré à l’article 20 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, en distinguant, aux points 171, 173, 175 et 176 de l’arrêt attaqué, entre les aides accordées dans le cadre de régimes approuvés et celles ne relevant pas de tels régimes, aux fins du calcul de l’élément d’aide des garanties en cause. En effet, ces deux catégories de garanties se trouveraient dans des situations comparables et devraient être considérées de la même manière. La valeur économique d’une garantie ne pourrait pas dépendre du point de savoir si les mesures l’instaurant ont été notifiées ou non à la Commission. Par ailleurs, en méconnaissant ainsi le principe d’égalité de traitement, le Tribunal aurait violé également les principes généraux du droit en matière d’aides d’État. En effet, une aide qui remplit les conditions pour être qualifiée d’aide de minimis ne relèverait pas de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et ne pourrait donc pas faire l’objet d’une décision en vertu de l’article 107, paragraphe 3, TFUE. Pour cette raison, la Commission ne pourrait pas privilégier les aides notifiées à la Commission par rapport à celles qui ne le sont pas.
52 Par la seconde branche, le Land de Hesse reproche au Tribunal d’avoir violé le principe général d’égalité de traitement en distinguant, au point 185 de l’arrêt attaqué, entre les garanties accordées avant la publication de la communication sur les garanties et celles accordées après une telle publication. L’utilisation de la méthode 0,5 % résultant de la pratique décisionnelle de la Commission constituerait une règle spéciale par rapport à cette communication. En outre, l’utilisation de cette méthode serait autorisée même à l’aune des critères prévus dans ladite communication et ladite méthode aurait continué à être utilisée de manière intensive après l’adoption de cette même communication.
53 Pollmeier Massivholz conteste le bien-fondé du troisième moyen.
Appréciation de la Cour
54 Le principe d’égalité de traitement s’oppose, notamment, à ce que des situations comparables soient traitées de manière différente, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (ordonnance du 22 mars 2012, Italie/Commission, C‑200/11 P, non publiée, EU:C:2012:165, point 74 et jurisprudence citée).
55 Pour ce qui est, d’une part, de la première branche du troisième moyen, force est de constater qu’elle ne saurait prospérer dans la mesure où elle repose sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué. En effet, il résulte des considérations exposées aux points 44 à 47 du présent arrêt que, aux points 171 et 173 de l’arrêt attaqué, le Tribunal n’a pas considéré que la méthode 0,5 % n’était applicable que dans le cadre des régimes d’aides autorisés. Dès lors, il ne saurait être soutenu qu’il a établi, aux fins du calcul de l’élément d’aide des garanties, une distinction entre les aides accordées dans le cadre de régimes approuvés et celles ne relevant pas de tels régimes.
56 Par ailleurs, il convient de constater que le Tribunal s’est borné, aux points 175 et 176 de cet arrêt, en substance, à rappeler que des garanties telles que celles accordées à la bénéficiaire, qui n’étaient pas concernées par la pratique de la Commission consistant à admettre l’utilisation du taux de 0,5 % et qui tombaient dans le champ d’application ratione temporis de la communication sur les garanties, devaient être appréciées à l’aune de cette communication. Dans ces conditions, la différence de traitement soulevée par le Land de Hesse correspond à une différence de situation objective.
57 S’agissant, d’autre part, de la seconde branche du troisième moyen, force est de constater que, au soutien de celle-ci, le Land de Hesse n’étaye aucunement sa thèse relative à une violation du principe d’égalité de traitement et se borne à invoquer, en substance, des arguments qui ont déjà été rejetés aux points 33 et 48 du présent arrêt. Dès lors, cette branche ne saurait non plus prospérer.
58 Il résulte de ce qui précède que le troisième moyen ne saurait être accueilli.
Sur le quatrième moyen, tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime
Argumentation des parties
59 Le quatrième moyen se divise en deux branches.
60 Dans le cadre de la première branche, le Land de Hesse fait valoir que le Tribunal a méconnu le principe de protection de la confiance légitime en considérant que la lettre de la Commission du 11 novembre 1998 ne pouvait faire naître aucune espérance fondée en l’utilisation par la Commission de la méthode 0,5 %. Le Tribunal se serait appuyé à tort, au point 183 de l’arrêt attaqué, sur la circonstance que la lettre du 11 novembre 1998 a précédé la publication de la communication sur les garanties. En effet, cette circonstance ne serait pas pertinente parce que les critères que ladite communication prévoit n’excluraient pas l’utilisation de la méthode 0,5 % et que l’utilisation de cette méthode constituerait, en tout état de cause, une règle spéciale.
61 Par la seconde branche, le Land de Hesse soutient qu’une confiance légitime en l’utilisation par la Commission de la méthode 0,5 % résultait de la circonstance que la Commission n’avait pas contesté la légalité des lignes directrices du Land de Hesse, alors même que ces lignes directrices, qui prévoient l’utilisation de cette méthode, avaient été portées à la connaissance de cette institution dans le cadre de la procédure ayant donné lieu à la décision litigieuse.
62 Pollmeier Massivholz conteste la recevabilité de la seconde branche du quatrième moyen, au motif que celle-ci constitue une répétition d’arguments présentés en première instance, ainsi que le bien-fondé de celui-ci dans son ensemble.
Appréciation de la Cour
63 S’agissant de la première branche du quatrième moyen, il convient de constater que le Tribunal a relevé à bon droit, au point 181 de l’arrêt attaqué, que le droit de se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime appartient à tout justiciable à l’égard duquel une institution de l’Union, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître des espérances fondées. Constituent de telles assurances, quelle que soit la forme sous laquelle ils sont communiqués, des renseignements précis, inconditionnels et concordants.
64 Or, le Tribunal a constaté, au point 183 de cet arrêt, dans l’exercice de la compétence exclusive qui lui appartient pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que les éléments de preuve qui lui sont soumis, que la lettre de la Commission du 11 novembre 1998 s’inscrivait dans un contexte particulier et que les limitations temporelles de l’acceptation de l’utilisation de la méthode 0,5 %, prévues dans cette lettre, étaient rédigées en des termes imprécis.
65 Dès lors, le Land de Hesse n’est pas fondé à prétendre que le Tribunal a méconnu le principe de protection de la confiance légitime.
66 S’agissant de l’argumentation du Land de Hesse relative à la pertinence de la circonstance que la lettre de la Commission du 11 novembre 1998 est antérieure à la publication de la communication sur les garanties, cette argumentation doit être rejetée pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 33 et 48 du présent arrêt.
67 Pour ce qui est de la seconde branche du quatrième moyen, il y a lieu de relever que, contrairement à ce que soutient Pollmeier Massivholz, celle-ci est recevable. En effet, dans la mesure où ce Land conteste l’application du droit de l’Union, en l’occurrence, du principe de protection de la confiance légitime, faite par le Tribunal, il ne saurait lui être interdit de discuter de nouveau au cours du pourvoi ce point de droit au motif que celui-ci a été examiné en première instance (voir, en ce sens, arrêt du 3 octobre 2013, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, C‑583/11 P, EU:C:2013:625, point 47).
68 Quant au bien-fondé de cette seconde branche, la Commission ne saurait, par le seul fait qu’elle n’a pas contesté, pendant la procédure administrative, la méthode 0,5 %, être regardée comme ayant fourni des assurances précises de nature à faire naître des espérances fondées en ce qui concerne l’utilisation de cette méthode, dès lors que l’absence de contestation ne saurait être assimilée à des renseignements précis, inconditionnels et concordants, au sens du point 63 du présent arrêt.
69 Eu égard à ces considérations, il y a lieu de rejeter le quatrième moyen comme étant non fondé.
70 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le pourvoi doit être rejeté.
Sur les dépens
71 En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Pollmeier Massivholz et la Commission ayant conclu à la condamnation du Land de Hesse et ce dernier ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner aux dépens.
Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) déclare et arrête :
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Le Land Hessen est condamné aux dépens.
Signatures
* Langue de procédure : l’allemand.
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