Arrigoni v EUIPO - Arrigoni Battista (Arrigoni Valtaleggio) (Judgment) French Text [2017] EUECJ T-454/16 (22 September 2017)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2017/T45416.html
Cite as: ECLI:EU:T:2017:646, [2017] EUECJ T-454/16, EU:T:2017:646

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

22 septembre 2017 (*)

« Marque de l’Union européenne - Procédure de nullité - Enregistrement international désignant l’Union européenne - Marque figurative Arrigoni Valtaleggio - Marque nationale figurative antérieure ARRIGONI - Motif relatif de refus - Absence de risque de confusion - Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 - Usage sérieux de la marque antérieure - Article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T-454/16,

Arrigoni SpA, établie à Rome (Italie), représentée par Me P. Di Gravio, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. L. Rampini, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Arrigoni Battista SpA, établie à Bergame (Italie), représentée par Mes S. Verea, M. Balestriero et K. Muraro, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 19 mai 2016 (affaire R 2922/2014-1), relative à une procédure de nullité entre Arrigoni et Arrigoni Formaggi SpA,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mmes V. Tomljenović, président, A. Marcoulli et M. A. Kornezov (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 5 août 2016,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 30 novembre 2016,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 24 novembre 2016,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée, en bonne et due forme, par les parties  dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 10 décembre 2009, Arrigoni Formaggi SpA a obtenu l’enregistrement international désignant, notamment, l’Union européenne  n° 1028737, fondé sur une demande de marque italienne qu’elle avait déposée le 3 août 2009 auprès de l’Ufficio italiano brevetti e marchi (office italien des brevets et marques, Italie).

2        La marque dont l’enregistrement international désignant l’Union européenne avait été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 29 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Fromages, lait, laitages et produits laitiers ».

4        L’enregistrement contesté a été publié, conformément à l’article 152, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), au Bulletin des marques communautaires n° 1/2011, du 3 janvier 2011.

5        Le 7 novembre 2011, la requérante, Arrigoni SpA, a présenté auprès de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) une demande en nullité des effets de l’enregistrement contesté, au titre de l’article 158, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, lu en combinaison avec, notamment, l’article 53, paragraphe 2, sous a), et l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce même règlement.

6        La demande en nullité était fondée, notamment, sur la marque italienne figurative antérieure enregistrée le 15 septembre 1969 sous le numéro 240186 et renouvelée, en dernier lieu, le 15 mars 2010 sous le numéro 1260101, reproduite ci-après :

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7        Les produits pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée relèvent, notamment, de la classe 29 au sens de l’arrangement de Nice et correspondent à la description suivante : « Viande, poisson, volaille et gibier ; extraits de viande, fruits et légumes conservés, séchés et cuits ; gelées, confitures, œufs, lait et autres produits laitiers, graisses et huiles comestibles ; conserves, aliments au saumure ».

8        Par décision du 17 avril 2013 (ci-après la « première décision de la division d’annulation »), la division d’annulation a déclaré nul dans son ensemble l’enregistrement contesté en ce qui concerne ses effets dans l’Union européenne.

9        Par lettres du 30 avril 2013, la division d’annulation a informé la requérante et Arrigoni Formaggi de son intention de révoquer sa première décision, conformément à l’article 80 du règlement n° 207/2009, en raison d’une erreur de procédure manifeste qui était imputable à l’EUIPO. En effet, toutes les communications et significations destinées à Arrigoni Formaggi avaient été envoyées à un représentant erroné. La division d’annulation a invité la requérante et Arrigoni Formaggi à présenter leurs observations à cet égard. Étant donné que ni la requérante ni Arrigoni Formaggi n’ont présenté de telles observations dans le délai imparti, soit le 18 septembre 2013, l’EUIPO a révoqué sa première décision pour le motif indiqué ci-dessus.

10      L’instruction de la demande en nullité rouverte, le 17 décembre 2013, Arrigoni Formaggi a demandé, conformément à l’article 158, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, lu conjointement avec l’article 57, paragraphes 2 et 3, de ce même règlement, que la requérante apporte la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure. La requérante a déféré à cette demande dans le délai imparti par l’EUIPO et a produit un nombre de documents visant à prouver l’usage sérieux de la marque antérieure.

11      Le 7 octobre 2014, la division d’annulation a déclaré nul l’enregistrement contesté en ce qui concerne ses effets dans l’Union pour les « laitages et produits laitiers », compris dans la classe 29, et rejeté la demande en nullité pour le surplus, à savoir pour les « fromages [et le] lait », compris dans la classe 29 (ci-après la « seconde décision de la division d’annulation »).

12      Le 17 novembre 2014, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la seconde décision de la division d’annulation et demandé l’annulation de cette décision dans la mesure où cette dernière a rejeté la demande en nullité pour les « fromages [et le] lait », compris dans la classe 29.

13      Le 14 avril 2015, Arrigoni Formaggi a soumis ses observations en réponse au recours et demandé, au titre de l’article 8, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 216/96 de la Commission, du 5 février 1996, portant règlement de procédure des chambres de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (JO 1996, L 28, p. 11), la réformation de la décision de la division d’annulation de sorte que la demande en nullité soit rejetée également s’agissant des « laitages et produits laitiers », compris dans la classe 29.

14      La requérante, en dépit du fait qu’elle y avait été invitée par lettre du 6 avril 2016, n’a pas déposé d’observations sur les observations en réponse au recours déposées par Arrigoni Formaggi dans le délai imparti par la chambre de recours.

15      Par décision du 19 mai 2016 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours formé par la requérante, accueilli la demande de réformation présentée par Arrigoni Formaggi et rejeté la demande en nullité pour l’ensemble des produits. En particulier, la chambre de recours a considéré que, premièrement, par son recours, la requérante ne poursuivait plus que le motif de nullité tiré de l’article 158, paragraphe 2, et de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, lus conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce même règlement, pour cause de risque de confusion de l’enregistrement contesté avec la marque antérieure (points 25 et 26 de la décision attaquée), deuxièmement, le public pertinent était composé du consommateur italien moyen de produits alimentaires ayant un niveau d’attention moyen (point 37 de la décision attaquée), troisièmement, la requérante n’avait démontré l’usage sérieux de la marque antérieure pendant la période pertinente s’étendant de septembre 2005 à novembre 2011 qu’en ce qui concerne des « conserves alimentaires ; confitures ; huiles alimentaires », relevant de la classe 29 (points 27 à 35 de la décision attaquée), quatrièmement, c’était à juste titre que la division d’annulation avait affirmé que les « fromages [et le] lait » étaient différents des produits pour lesquels la marque antérieure avait été sérieusement utilisée (points 41 à 45 de la décision attaquée), cinquièmement, contrairement aux affirmations de la division d’annulation, il n’existait pas non plus de similitude entre les « laitages et produits laitiers » et les produits pour lesquels la marque antérieure avait été sérieusement utilisée, notamment les « huiles alimentaires » (points 46 à 49 de la décision attaquée) et sixièmement et par conséquent, eu égard à l’absence de similitude des produits désignés par l’enregistrement contesté et de ceux pour lesquels la marque antérieure avait été sérieusement utilisée, une des conditions nécessaires pour constater l’existence d’un risque de confusion faisait défaut, de sorte que la demande en nullité fondée sur l’existence d’un tel risque devait être rejetée dans son ensemble (points 51 à 55 de la décision attaquée).

16      Le 28 juillet 2016, l’intervenante, Arrigoni Battista SpA, s’est substituée aux droits d’Arrigoni Formaggi à la suite d’une fusion par incorporation.

 Procédure et conclusions des parties

17      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 août 2016, la requérante a introduit le présent recours.

18      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

-        faire droit au recours et, partant, déclarer inexistante et/ou nulle la décision attaquée et renvoyer l’affaire devant la chambre de recours ou déclarer valide et définitive la décision de la division d’annulation du 17 avril 2013 ;

-        déclarer la nullité de l’enregistrement contesté ;

-        adopter « toute décision, également en ce qui concerne les dépens ».

19      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

-        rejeter le recours ;

-        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

20      Dans la mesure où la première partie du premier chef de conclusions, en ce qu’elle vise une déclaration d’inexistence et/ou de nullité de la décision attaquée, peut être interprétée comme visant l’annulation de la décision attaquée, les griefs de la requérante peuvent, en substance, être regroupés en quatre moyens. Les premier et deuxième moyens concernent les deux décisions de la division d’annulation et sont tirés, respectivement, d’une violation de l’article 80 du règlement n° 207/2009 et du fait que le même membre de la division d’annulation aurait participé à l’adoption desdites décisions. Le troisième moyen consiste à déterminer la catégorie de produits par rapport à laquelle le risque de confusion doit être apprécié. Par son quatrième moyen, la requérante fait valoir, en substance, que, en vertu du droit au nom, une marque comportant un nom patronymique qui fait partie d’un signe d’une marque antérieure ne peut pas être enregistrée.

 Sur la recevabilité des premier, deuxième et quatrième moyens et de certains griefs

21      Par son premier moyen, tiré d’une violation de l’article 80 du règlement n° 207/2009, la requérante fait valoir, en substance, que la première décision de la division d’annulation aurait dû être révoquée par une autre décision de la division d’annulation. Dans le cadre de son deuxième moyen, la requérante considère que la seconde décision de la division d’annulation est entachée d’une erreur en ce qu’un de ses signataires avait également signé la première décision de la division d’annulation.

22      D’une part, en vertu de l’article 65, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, le recours devant le juge de l’Union n’est ouvert qu’à l’encontre des décisions  des chambres de recours, de sorte que, dans le cadre d’un tel recours, ne sont recevables que des moyens dirigés contre la décision de la chambre de recours elle-même [arrêts du 7 juin 2005, Lidl Stiftung/OHMI - REWE-Zentral (Salvita), T-303/03, EU:T:2005:200, point 59, et du 24 novembre 2010, Nike International/OHMI - Muñoz Molina (R10), T-137/09, EU:T:2010:478, point 13]. Or, par ses premier et deuxième moyens, la requérante ne vise pas une décision de la chambre de recours, mais uniquement des décisions adoptées par la division d’annulation.

23      D’autre part, et en toute hypothèse, il importe de souligner que la requérante n’a pas demandé l’annulation de la décision de révocation devant la chambre de recours et que l’erreur dont serait entachée la seconde décision de la division d’annulation n’a pas été soulevée dans le recours devant la chambre de recours.

24      Par son quatrième moyen, la requérante fait valoir, en substance, que, en vertu du droit au nom, une marque comportant un nom patronymique qui fait partie d’un signe d’une marque antérieure ne peut pas être enregistrée.

25      L’intervenante conteste la recevabilité de ce moyen, parce qu’il n’a pas été soulevé devant la chambre de recours.

26      En l’espèce, la chambre de recours a constaté, au point 25 de la décision attaquée, que, dans le mémoire exposant les motifs du recours, la requérante ne contestait pas l’appréciation de la division d’annulation selon laquelle l’enregistrement international contesté ne pouvait pas être déclaré nul en application de l’article 53, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 207/2009, concernant le droit au nom, et que la décision de la division d’annulation du 7 octobre 2014 était, dès lors, devenue définitive à cet égard.

27      Dans ces circonstances, il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 188 du règlement de procédure du Tribunal, les mémoires des parties devant le Tribunal ne peuvent modifier l’objet du litige devant la chambre de recours. En effet, il appartient au Tribunal de contrôler la légalité des décisions des chambres de recours. Par conséquent, le contrôle exercé par le Tribunal ne peut aller au-delà du cadre factuel et juridique du litige tel qu’il a été porté devant la chambre de recours [arrêt du 22 juin 2004, « Drie Mollen sinds 1818 »/OHMI - Nabeiro Silveria (Galáxia), T-66/03, EU:T:2004:190, point 45].

28      Partant, pour les motifs relevés aux points 22 et 27 ci-dessus, il y a lieu de déclarer irrecevables les premier, deuxième et quatrième moyens.

29      Par ailleurs, la requérante mentionne, aux points 57 à 59 et 61 de sa requête, certaines dispositions du droit de l’Union, à savoir l’article 4, paragraphe 1, sous a), de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2008, L 299, p. 25), l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009, le règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), et la « charte constitutionnelle européenne », sans pour autant avancer un quelconque argument basé sur ces dispositions visant à infirmer le raisonnement sur lequel repose la décision attaquée.

30      Or, à cet égard, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, dudit statut, et de l’article 177, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure, toute requête introductive d’instance doit indiquer, notamment, l’exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours. Il en va de même pour toute conclusion, qui doit être assortie de moyens et d’arguments permettant tant à la partie défenderesse qu’au juge d’en apprécier le bien-fondé. Ainsi, les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels un recours est fondé doivent ressortir à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle-même. Des exigences analogues sont requises lorsqu’un grief ou un argument est invoqué au soutien d’un moyen [voir arrêt du 13 mars 2013, Biodes/OHMI - Manasul Internacional (FARMASUL), T-553/10, non publié, EU:T:2013:126, point 22 et jurisprudence citée].

31      Or, les griefs évoqués aux points 57 à 59 et 61 de la requête ne satisfont pas ces exigences et doivent, par conséquent, être rejetés comme irrecevables.

 Sur le fond

32      Par son troisième moyen, la requérante fait valoir, en substance, que la chambre de recours aurait dû apprécier l’existence d’un risque de confusion entre l’enregistrement contesté et la marque antérieure non seulement par rapport aux « conserves alimentaires ; confitures ; huiles alimentaires », relevant de la classe 29, pour lesquelles la chambre de recours a reconnu que la requérante avait fait un usage sérieux de la marque antérieure, mais par rapport à l’ensemble des produits pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée.

33      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

34      En vertu de l’article 158, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, la demande en nullité des effets d’un enregistrement international désignant l’Union européenne tient lieu, notamment, de demande en nullité en vertu des articles 52 ou 53 de ce même règlement.

35      Aux termes de l’article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009, une demande en nullité est rejetée à défaut de la preuve, à apporter sur requête du titulaire de la marque de l’Union européenne dont la nullité est demandée, que, au cours des cinq années qui précèdent la date de la demande en nullité, la marque nationale antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans l’État membre où la marque nationale antérieure est protégée pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels la demande en nullité est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage, pour autant que la marque nationale antérieure était enregistrée depuis cinq ans. Si la marque nationale antérieure n’a été utilisée que pour une partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée, elle n’est réputée enregistrée que pour cette partie des produits et services, aux fins de l’examen de la demande en nullité.

36      Ainsi qu’il résulte du considérant 10 du règlement n° 207/2009, le législateur a considéré que la protection d’une marque antérieure n’est justifiée que dans la mesure où celle-ci est effectivement utilisée. Par ailleurs, aux termes du considérant 9 de la directive 2008/95, le législateur a considéré qu’il est nécessaire de prévoir que la nullité d’une marque ne peut être prononcée en raison de l’existence d’une marque antérieure non utilisée.

37      Dans ce contexte, selon une jurisprudence constante, il ressort de l’article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009, lu à lalumièreduconsidérant10 dudit règlement, que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux consiste à limiter les conflits entre deux marques, à moins qu’il n’existe un juste motif économique pour l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure découlant d’une fonction effective de celle-ci sur le marché [voir, en ce sens, arrêts du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI - Espadafor Caba (VITAFRUIT), T-203/02, EU:T:2004:225, point 38 ; du 19 avril 2013, Luna/OHMI - Asteris (Al bustan), T-454/11, non publié, EU:T:2013:206, point 23, et du 17 décembre 2015, Bice International/OHMI - Bice (bice), T-624/14, non publié, EU:T:2015:998, point 35].

38      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, aux points 31 à 35 de la décision attaquée, que les preuves soumises par la requérante et examinées dans leur ensemble, eu égard, notamment, aux quantités vendues sur le marché italien ou exportées à l’étranger et aux investissements en publicité, étaient aptes à démontrer l’usage sérieux de la marque antérieure pour les conserves de tomates (pelées, pulpe et purée), pois chiches, petits pois, maïs, haricots et lentilles en conserves, thon en conserves, confitures et huile d’olive. Selon la chambre de recours, ces produits appartiennent aux « sous-catégories » suivantes : « conserves alimentaires ; confitures ; huiles alimentaires ». Par suite, la chambre de recours a considéré, au point 36 de la décision attaquée, que l’existence d’un risque de confusion devait être vérifiée par rapport à ces seuls produits.

39      La requérante ne conteste pas cette appréciation de la chambre de recours selon laquelle, pendant la période pertinente, elle n’a fait un usage sérieux de la marque antérieure que s’agissant de produits appartenant aux « sous-catégories » de la classe 29 mentionnées au point précédent. Cette appréciation n’est par ailleurs pas non plus remise en cause par l’EUIPO et l’intervenante.

40      Ce que la requérante conteste est le fait que la chambre de recours n’a apprécié l’existence d’un risque de confusion entre l’enregistrement contesté et la marque antérieure que par rapport aux produits appartenant auxdites sous-catégories.

41      Or, force est de constater, à l’instar de l’intervenante, que cette approche correspond exactement à ce que prévoit l’article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009, tel que cela est relevé aux points 35 à 37 ci-dessus.

42      C’est dès lors sans commettre d’erreurs de droit que la chambre de recours a considéré, au point 36 de la décision attaquée, que l’existence d’un risque de confusion devait être vérifiée par rapport aux « conserves alimentaires ; confitures ; huiles alimentaires », comprises dans la classe 29, pour lesquelles la requérante avait démontré avoir fait un usage sérieux de la marque antérieure.

43      Les arguments avancés par la requérante ne sauraient remettre en cause cette conclusion.

44      En premier lieu, dans la mesure où la requérante semble suggérer que la chambre de recours n’était pas compétente pour réviser la liste des produits pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée, il suffit de constater que, dans la décision attaquée, la chambre de recours n’a nullement procédé à une telle révision des produits désignés par la marque antérieure. Conformément à ce qui est prévu à la quatrième phrase de l’article 57, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, lue conjointement avec le paragraphe 3 dudit article, elle a examiné l’existence d’un risque de confusion entre l’enregistrement contesté et la marque antérieure par rapport aux seuls produits pour lesquels elle avait constaté que la requérante avait fait un usage sérieux de la marque antérieure. Ce faisant, la chambre de recours n’a nullement mis en cause l’enregistrement de la marque antérieure pour l’ensemble des produits pour lesquels elle avait initialement été enregistrée, mais a uniquement limité, pour les besoins de la demande en nullité, les effets de la marque antérieure aux produits pour lesquels la requérante avait fait un usage sérieux de la marque antérieure. Cet argument de la requérante part donc d’une lecture erronée de la décision attaquée et est dès lors inopérant.

45      En deuxième lieu, la requérante se réfère à l’arrêt du 19 juin 2012, Chartered Institute of Patent Attorneys (C-307/10, EU:C:2012:361), et à la communication commune sur l’application dudit arrêt, élaborée par le réseau européen des marques, dessins ou modèles. (1)

46      À cet égard, il convient de rappeler que, dans l’arrêt du 19 juin 2012, Chartered Institute of Patent Attorneys (C-307/10, EU:C:2012:361), la Cour a, notamment, jugé que, en vue de respecter les exigences de clarté et de précision imposées par la directive 2008/95, le demandeur d’une marque nationale qui utilise toutes les indications générales de l’intitulé d’une classe particulière de la classification de Nice pour identifier les produits ou les services pour lesquels la protection de la marque est demandée doit préciser si sa demande d’enregistrement vise l’ensemble des produits ou des services répertoriés dans la liste alphabétique de la classe particulière concernée ou seulement certains desdits produits ou services. Au cas où la demande porterait uniquement sur certains desdits produits ou services, le demandeur est obligé de préciser quels produits ou services relevant de cette classe sont visés (arrêts du 19 juin 2012, Chartered Institute of Patent Attorneys, C-307/10, EU:C:2012:361, point 61, et du 16 février 2017, Brandconcern/EUIPO et Scooters India, C-577/14 P, EU:C:2017:122, point 28).

47      Toutefois, il ne saurait être considéré que la Cour, par l’arrêt du 19 juin 2012, Chartered Institute of Patent Attorneys (C-307/10, EU:C:2012:361), aurait entendu remettre en cause les appréciations de l’EUIPO s’agissant de marques de l’Union européenne et celles des offices des marques des États membres s’agissant de marques nationales enregistrées avant le prononcé de cet arrêt. Par conséquent, la règle énoncée au point 61 dudit arrêt et rappelée au point 46 ci-dessus n’est pas applicable à l’enregistrement de la marque antérieure, intervenu avant le prononcé de celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 16 février 2017, Brandconcern/EUIPO et Scooters India, C-577/14 P, EU:C:2017:122, points 29 à 31).

48      Il ressort par ailleurs du tableau 1 figurant dans la communication commune visée au point 45 ci-dessus que, s’agissant de marques nationales déposées avant le prononcé de l’arrêt du 19 juin 2012, Chartered Institute of Patent Attorneys (C-307/10, EU:C:2012:361), l’office italien des brevets et marques considère que l’utilisation de toutes les indications générales de l’intitulé d’une classe particulière de la classification de Nice pour identifier les produits ou les services pour lesquels la protection de la marque est demandée vise l’ensemble des produits ou des services répertoriés dans la liste alphabétique de la classe particulière concernée.

49      S’il est donc vrai que la marque antérieure désigne, notamment, toutes les indications générales de l’intitulé de la classe 29, à savoir les « viande, poisson, volaille et gibier ; extraits de viande ; fruits et légumes conservés, congelés, séchés et cuits ; gelées, confitures, compotes ; œufs ; lait et produits laitiers ; huiles et graisses comestibles », la chambre de recours n’a nullement mis en cause l’enregistrement de la marque antérieure pour l’ensemble des produits pour lesquels elle a initialement été enregistrée, comme cela a été constaté au point 44 ci-dessus. Cet argument de la requérante part donc également d’une lecture erronée de la décision attaquée et est dès lors inopérant.

50      En troisième lieu, dans la mesure où la requérante mentionne l’article 2 de l’arrangement de Nice concernant la « [p]ortée juridique et [l’]application de la classification », force est de constater qu’elle se limite à en citer le libellé sans pour autant développer un quelconque argument à son appui. Or, à cet égard, il y a lieu de rappeler la jurisprudence citée au point 30 ci-dessus. Il s’ensuit que le grief tiré de l’article 2 de l’arrangement de Nice doit être écarté.

51      Au vu de ce qui précède, il convient de rejeter également le troisième moyen.

52      Par ailleurs, il convient de rejeter en tant qu’inopérants les griefs avancés par la requérante, fondés, d’une part, sur une jurisprudence nationale, à savoir un arrêt de la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation, Italie) et, d’autre part, sur diverses dispositions du droit italien.

53      Il suffit de rappeler, à cet égard, que le régime des marques de l’Union européenne est autonome et que la légalité des décisions des chambres de recours s’apprécie uniquement sur la base du règlement n° 207/2009, de sorte que l’EUIPO ou, sur recours, le Tribunal ne sont pas tenus de parvenir à des résultats identiques à ceux atteints par les administrations ou les juridictions nationales dans une situation similaire [voir, en ce sens, arrêts du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi-Werke/OHMI, C-173/04 P, EU:C:2006:20, point 49, et du 23 janvier 2014, Coppenrath-Verlag/OHMI - Sembella (Rebella), T-551/12, non publié, EU:T:2014:30, point 61 et jurisprudence citée].

54      Il s’ensuit que le recours dans son ensemble doit être rejeté, sans qu’il soit besoin d’examiner la recevabilité de la deuxième partie du premier chef de conclusions, visant à ce que le Tribunal déclare valide et définitive la décision de la division d’annulation du 17 avril 2013, et celle des deuxième et troisième chefs de conclusions de la requérante demandant, respectivement, que le Tribunal déclare la nullité de l’enregistrement contesté et qu’il adopte « toute décision, également en ce qui concerne les dépens ».

 Sur les dépens

55      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Arrigoni SpA est condamnée aux dépens.

Tomljenović

Marcoulli

Kornezov

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 22 septembre 2017.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.


1      Disponible sous : https://euipo.europa.eu/tunnel-web/secure/webdav/guest/document_library/contentPdfs/about_ohim/who_we_are/common_communication/common_communication1_fr.pdf

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