Sofina and Others (Opinion) French Text [2018] EUECJ C-575/17_O (07 August 2018)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2018/C57517_O.html
Cite as: EU:C:2018:650, [2018] EUECJ C-575/17_O, ECLI:EU:C:2018:650

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CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MELCHIOR WATHELET

présentées le 7 août 2018 (1)

Affaire C‑575/17

Sofina SA,

Rebelco SA,

Sidro SA

contre

Ministre de l’Action et des Comptes publics

[demande de décision préjudicielle formée par le Conseil d’État (France)]

« Renvoi préjudiciel – Libre circulation des capitaux – Retenue à la source sur le montant brut des dividendes d’origine nationale versés à des sociétés non-résidentes – Imposition différente, fondée sur le résultat net, des dividendes versés à des sociétés résidentes »






I.      Introduction

1.        La présente demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 63 et 65 TFUE au regard des dispositions de la législation française qui prévoient une retenue à la source, calculée sur le montant brut, pour les dividendes versés par une société résidente à des sociétés non-résidentes déficitaires, alors que les dividendes versés à une société résidente déficitaire ne seront soumis à une imposition au titre du régime de droit commun, sur leur montant net, qu’ultérieurement, si son résultat devient bénéficiaire.

II.    Le cadre juridique

A.      Le droit français

2.        En vertu de l’article 38 du code général des impôts (ci-après le « CGI ») :

« […] le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d’après les résultats d’ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d’éléments quelconques de l’actif, soit en cours, soit en fin d’exploitation. »

3.        L’article 39-1 du CGI ajoute :

« Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges […] »

4.        L’article 119 bis, paragraphe 2, du CGI, prévoit que les produits visés aux articles 108 à 117 bis du CGI, dont les dividendes, donnent lieu à l’application d’une retenue à la source dont le taux est fixé à l’article 187-1 lorsqu’ils bénéficient à des personnes qui n’ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France.

5.        Dans sa version applicable aux faits de l’espèce, l’article 187-1 du CGI fixe le taux de la retenue à la source à 25 %.

6.        Dans sa version applicable jusqu’au 21 septembre 2011, l’article 209-1 du CGI précisait :

« […] [E]n cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l’exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice. Si ce bénéfice n’est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l’excédent du déficit est reporté sur les exercices suivants. »

7.        Depuis le 21 septembre 2011, l’article 209-1 du CGI est rédigé comme suit :

« […] [E]n cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l’exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice dans la limite d’un montant de 1 000 000 [euros] majoré de 60 % du montant correspondant au bénéfice imposable dudit exercice excédant ce premier montant. Si ce bénéfice n’est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l’excédent du déficit est reporté dans les mêmes conditions sur les exercices suivants. Il en est de même de la fraction de déficit non admise en déduction en application de la première phrase du présent alinéa. »

B.      La convention fiscale du 10 mars 1964 conclue entre la France et la Belgique

8.        L’article 15 de la convention fiscale conclue le 10 mars 1964 entre la France et la Belgique, telle que modifiée par la suite, (ci-après, la « convention franco-belge ») stipule ce qui suit :

« 1.      Les dividendes ayant leur source dans un État contractant qui sont payés à un résident de l’autre État contractant sont imposables dans cet autre État.

2.      Toutefois, sous réserve des dispositions du paragraphe 3, ces dividendes peuvent être imposés dans l’État contractant dont la société qui paie les dividendes est un résident, et selon la législation de cet État, mais l’impôt ainsi établi ne peut excéder :

a)      10 p. cent du montant brut des dividendes si le bénéficiaire est une société qui a la propriété exclusive d’au moins 10 p. cent du capital de la société distributrice des dividendes depuis le début du dernier exercice social de celle-ci clos avant la distribution ;

b)      15 p. cent du montant brut des dividendes dans les autres cas.

Ce paragraphe ne concerne pas l’imposition de la société pour les bénéfices qui servent au paiement des dividendes.

[…] »

III. Le cadre factuel

9.        Sofina SA, Rebelco SA et Sidro SA, sociétés de droit belge et résidentes en Belgique, ont perçu, de 2008 à 2011, des dividendes à raison de leurs participations dans des sociétés françaises, dans lesquelles elles détenaient des participations minoritaires n’ouvrant pas droit au bénéfice du régime des sociétés mères prévu par le CGI et la directive 2011/96/UE du Conseil, du 30 novembre 2011, concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents (2) (ci-après la « directive mères-filiales »).

10.      En application de l’article 119 bis du CGI, combiné à l’article 15, paragraphe 2, de la convention franco-belge, ces dividendes ont fait l’objet de retenues à la source au taux de 15 %.

11.      Les sociétés belges concernées ayant clôturé les exercices 2008 à 2011 avec un résultat négatif, elles ont adressé des réclamations à l’administration fiscale française, visant la restitution des retenues prélevées. Dans la mesure où une société déficitaire ayant son siège en France n’est effectivement imposée sur les dividendes de source française que lorsque son résultat imposable redevient bénéficiaire, les sociétés belges concernées ont considéré qu’elles étaient moins bien traitées que leurs homologues français.

12.      Ces réclamations ayant été rejetées, les sociétés belges concernées ont saisi les juridictions compétentes qui, tant en première instance qu’en appel, n’ont pas fait droit à leurs demandes de restitution.

13.      Partant, elles se sont pourvues en cassation devant le Conseil d’État (France).

14.      Cette juridiction a constaté, premièrement, que l’application d’une retenue à la source dans le seul chef des sociétés non-résidentes déficitaires, lorsqu’elles reçoivent des dividendes à raison de leurs participations dans des sociétés françaises, peut engendrer pour elles un désavantage de trésorerie par rapport aux sociétés résidentes déficitaires percevant des dividendes de leurs participations dans des sociétés françaises. Ladite juridiction souhaite toutefois savoir si une telle circonstance constituerait par elle-même une différence de traitement caractérisant une restriction à l’article 63 TFUE.

15.      À supposer que la législation en cause soit constitutive d’une telle restriction, le Conseil d’État se demande, deuxièmement, si, eu égard à l’objectif de ces dispositions, à savoir garantir l’efficacité du recouvrement de l’impôt, ladite restriction ne pourrait être justifiée.

16.      Troisièmement, le Conseil d’État relève que les différences de modalités de calcul de la base d’imposition des dividendes selon que la société les percevant est résidente ou non pourrait également être constitutive d’une restriction. En effet, dès lors que la retenue à la source prévue à l’article 119 bis du CGI est liquidée sur le montant brut des dividendes, les frais liés à la perception elle-même des dividendes sont déduits de la base d’imposition pour le calcul de l’impôt grevant les dividendes versés à une société résidente, alors que pareille déduction n’est pas possible si les dividendes sont versés à une société non-résidente.

17.      Dans ces circonstances, le Conseil d’État a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Les articles […] 63 et 65 [TFUE], doivent-ils être interprétés en ce sens que le désavantage de trésorerie résultant de l’application d’une retenue à la source aux dividendes versés aux sociétés non-résidentes déficitaires, alors que les sociétés résidentes déficitaires ne sont imposées sur le montant des dividendes qu’elles perçoivent que lors de l’exercice au titre duquel elles redeviennent le cas échéant bénéficiaires, constitue par lui-même une différence de traitement caractérisant une restriction à la liberté de circulation des capitaux ?

2)      L’éventuelle restriction à la liberté de circulation des capitaux mentionnée à la question précédente peut-elle être, au regard des exigences résultant des articles […] 63 et 65 [TFUE], regardée comme justifiée par la nécessité de garantir l’efficacité du recouvrement de l’impôt, dès lors que les sociétés non-résidentes ne sont pas soumises au contrôle de l’administration fiscale française, ou encore par la nécessité de préserver la répartition du pouvoir d’imposition entre les États membres ?

3)      Dans l’hypothèse où l’application de la retenue à la source contestée peut dans son principe être admise au regard de la liberté de circulation des capitaux :

–        Ces stipulations s’opposent-elles à la perception d’une retenue à la source sur les dividendes versés par une société résidente à une société déficitaire non-résidente d’un autre État membre lorsque cette dernière cesse son activité sans redevenir bénéficiaire, alors qu’une société résidente placée dans cette situation n’est pas effectivement imposée sur le montant de ces dividendes ?

–        Ces stipulations doivent-elles être interprétées en ce sens qu’en présence de règles d’imposition traitant différemment les dividendes selon qu’ils sont versés aux résidents ou aux non-résidents, il convient de comparer la charge fiscale effective supportée par chacun d’eux au titre de ces dividendes, si bien qu’une restriction apportée à la liberté de circulation des capitaux, résultant de ce que ces règles excluent pour les seuls non-résidents la déduction des frais qui sont directement liés à la perception, en elle-même, des dividendes, pourrait être regardée comme justifiée par l’écart de taux entre l’imposition de droit commun mise, au titre d’un exercice ultérieur, à la charge de résidents et la retenue à la source prélevée sur les dividendes versés aux non-résidents, lorsque cet écart compense, au regard du montant de l’impôt acquitté, la différence d’assiette de l’impôt ? »

IV.    La procédure devant la Cour

18.      La présente demande de décision préjudicielle a été déposée à la Cour le 28 septembre 2017. Sofina, les gouvernements français, belge, allemand, néerlandais, suédois et du Royaume-Uni ainsi que la Commission européenne ont déposé des observations écrites.

19.      Une audience s’est tenue le 25 juin 2018 au cours de laquelle Sofina, les gouvernements français, allemand et suédois ainsi que la Commission ont présenté leurs observations orales.

V.      Analyse

A.      Observations liminaires

20.      La juridiction de renvoi place d’emblée ses questions sous l’angle de la libre circulation des capitaux et des articles 63 et 65 TFUE, puisque les sociétés belges Sofina, Rebelco et Sidro ont perçu des dividendes à raison de participations minoritaires dans des sociétés françaises qui ne leur donnaient pas le pouvoir d’exercer une influence décisive dans l’entreprise. Toutefois, le raisonnement qui suivra serait exactement le même si la liberté d’établissement était en cause, puisque tous les versements de dividendes concernés n’ont lieu qu’entre des sociétés établies dans des États membres.

21.      Les questions préjudicielles posées par la juridiction de renvoi révèlent deux différences faites par la législation française dans le traitement fiscal des dividendes, selon qu’ils sont versés par des sociétés résidentes à d’autres sociétés résidentes ou au contraire à des sociétés non-résidentes :

–        les dividendes versés à des sociétés résidentes déficitaires ne seront imposés que si et lorsque leur résultat devient ou redevient bénéficiaire alors que la législation française prévoit une retenue à la source sur les dividendes versés par les sociétés résidentes à des sociétés non-résidentes, même si ces dernières sont déficitaires. Les premières peuvent dès lors ne jamais être imposées et, en cas d’imposition, auront en tout cas le bénéfice d’un avantage de trésorerie puisque la retenue à la source sur les dividendes versés à des sociétés non-résidentes interviendra nécessairement, que ce soit au cours du même exercice fiscal ou non, avant l’imposition des dividendes versés à des sociétés résidentes. Cette première différence de traitement fera l’objet des première et deuxième questions préjudicielles ainsi que de la première branche de la troisième question préjudicielle ;

–        la base de calcul de l’imposition des dividendes est différente, puisque la retenue à la source perçue sur les dividendes versés à des sociétés non-résidentes est liquidée sur le montant brut des dividendes alors que les dividendes versés à des sociétés résidentes sont taxés sur leurs montants nets, les frais de perception de ces dividendes faisant l’objet d’une déduction, non prévue pour les dividendes versés à des sociétés non-résidentes. Cette différence de traitement fait l’objet de la deuxième branche de la troisième question préjudicielle.

22.      J’aborderai donc d’abord les première et deuxième questions préjudicielles ainsi que la première branche de la troisième question préjudicielle et ensuite le reste de cette dernière question.

B.      Sur les première et deuxième questions préjudicielles et sur la première branche de la troisième question préjudicielle

1.      La jurisprudence de la Cour concernant l’imposition des dividendes, dits « sortants »

23.      La jurisprudence de la Cour est riche d’arrêts qui ont abordé la problématique de l’imposition différente des dividendes selon que la société résidente distributrice (par exemple une filiale) les versait à un actionnaire résident (par exemple sa société mère) ou au contraire à un actionnaire non-résident. Dans ce dernier cas, on parle alors de « dividendes sortants » (outgoing dividends).

24.      Selon la Cour, « un traitement désavantageux par un État membre des dividendes versés aux [contribuables] non-résidents, par rapport au traitement réservé aux dividendes versés à des [contribuables] résidents, est susceptible de dissuader les sociétés établies dans un État membre autre que ce premier État membre de procéder à des investissements dans ce même premier État membre et constitue, par conséquent, une restriction à la libre circulation des capitaux prohibée, en principe, par l’article 63 TFUE » (3).

25.      Dès qu’un État membre, de manière unilatérale ou conventionnelle, taxe non seulement les actionnaires résidents mais également les actionnaires non-résidents pour les dividendes reçus d’une société résidente, la situation des actionnaires non-résidents est comparable à celle des actionnaires résidents (4).

26.      Dans la mesure où les situations respectives des actionnaires sont donc comparables, une législation nationale « constitue une mesure discriminatoire incompatible avec le traité [FUE] en ce qu’elle prévoit une imposition des dividendes versés par des filiales résidentes à des sociétés mères [non-résidentes] plus lourde que celle des mêmes dividendes versés à des sociétés mères [résidentes] » (5).

27.      Il en est a fortiori ainsi si les dividendes qui ne sortent pas de l’État membre sont imposables plus tard que les dividendes sortants, ou sont totalement exonérés alors que les dividendes sortants sont, eux, imposés (6).

28.      Très souvent, l’État de résidence de la société distributrice impose une retenue à la source sur les dividendes sortants. Ce n’est cependant pas cette retenue à la source imposée uniquement aux dividendes versés à des actionnaires non-résidents qui constitue en tant que telle une restriction à la libre circulation des capitaux, parce qu’il ne s’agit que d’une modalité de perception de l’impôt (7). Ce qui importe, c’est la différence dans le traitement fiscal global imposé aux deux catégories de dividendes.

29.      Dans plusieurs affaires, la Cour a conclu à une restriction à la libre circulation des capitaux alors que l’État membre de la société distributrice imposait une retenue à la source tant aux dividendes qui sortaient qu’aux dividendes qui ne sortaient pas de son territoire. C’était le cas dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 20 octobre 2011, Commission/Allemagne (C‑284/09, EU:C:2011:670), où la retenue à la source était imposée à tous les dividendes distribués par une société établie en Allemagne, mais où seules les sociétés résidentes bénéficiaient d’un crédit d’impôt, qui était même remboursé si l’impôt définitif sur le revenu était inférieur à ce crédit d’impôt alors que, pour les sociétés non-résidentes, la retenue à la source était prélevée à titre définitif.

30.      C’était aussi le cas dans l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance du 12 juillet 2012, Tate & Lyle Investments (C‑384/11, non publiée, EU:C:2012:463), où le bénéficiaire résident de dividendes payait une retenue à la source imputable et remboursable alors que, pour le non-résident, la retenue à la source était définitive.

31.      C’était encore le cas dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 17 septembre 2015, Miljoen e.a. (C‑10/14, C‑14/14 et C‑17/14, EU:C:2015:608), où les contribuables résidents bénéficiaient d’un remboursement de la retenue à la source ou d’un mécanisme de déduction alors que, pour les contribuables non-résidents, la retenue constituait un impôt définitif.

32.      Autrement dit, comme la Cour l’a jugé dans l’arrêt du 10 mai 2012, Santander Asset Management SGIIC e.a. (C‑338/11 à C‑347/11, EU:C:2012:286), « les articles 63 TFUE et 65 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation d’un État membre qui prévoit l’imposition, au moyen d’une retenue à la source, des dividendes d’origine nationale lorsqu’ils sont perçus par des [contribuables] résidents dans un autre État, alors que de tels dividendes sont exonérés d’impôts dans le chef des [contribuables] résidents dans le premier État » (8).

2.      Application de cette jurisprudence à l’affaire au principal

a)      Sur l’existence d’une restriction à la libre circulation des capitaux

33.      La réglementation française en cause dans l’affaire au principal soumet les dividendes versés à des sociétés non-résidentes déficitaires à une imposition à travers une retenue à la source, alors que les dividendes versés à des sociétés résidentes ne seront qu’éventuellement, et en tout cas ultérieurement, soumis à l’impôt à travers l’impôt sur les sociétés, lors de l’exercice au titre duquel ces sociétés deviendront bénéficiaires.

34.      Même s’il n’y a pas formellement d’exonération des dividendes versés à des sociétés résidentes déficitaires, l’imposition des dividendes qui leur sont versés n’interviendra qu’éventuellement, en tout cas plus tard et peut-être jamais, puisque la société résidente qui reçoit ces dividendes pourrait ne jamais devenir bénéficiaire, voire même cesser son activité (9).

35.      Par conséquent, il y a, en l’occurrence, une imposition manifestement moins favorable des dividendes versés à des sociétés non-résidentes déficitaires, puisque l’imposition des dividendes versés à des sociétés résidentes peut ne jamais intervenir et, si elle intervient, n’intervient que plus tard, ce qui entraîne un désavantage de trésorerie pour les sociétés déficitaires non-résidentes, cette dernière hypothèse étant expressément citée par la juridiction de renvoi dans sa première question.

36.      En conclusion sur ce point, j’estime que le système établi par une règlementation d’un État membre telle que celle en cause dans l’affaire au principal constitue une restriction à la libre circulation des capitaux prohibée en principe par l’article 63 TFUE.

b)      Sur la comparabilité des situations et l’existence d’une raison impérieuse d’intérêt général susceptible de justifier la libre circulation des capitaux

37.      Conformément à l’article 65, paragraphe 1, sous a), TFUE, l’article 63 TFUE ne porte pas atteinte au droit qu’ont les États membres d’appliquer les dispositions pertinentes de leur législation fiscale qui établissent une distinction entre les contribuables qui ne se trouvent pas dans la même situation en ce qui concerne leur résidence ou le lieu où leurs capitaux sont investis.

38.      Comme je l’ai indiqué au point 26 des présentes conclusions, la jurisprudence de la Cour est claire : dès qu’un État membre taxe non seulement les actionnaires résidents, mais également les actionnaires non-résidents pour les dividendes reçus d’une société résidente, la situation des actionnaires non-résidents est comparable à celle des actionnaires résidents.

39.      La différence de traitement créée par la règlementation française en cause dans l’affaire au principal « ne peut [donc] être justifiée par une différence de situation pertinente » (10).

c)      Sur la justification

40.      Deux motifs de justification ont été invoqués devant la Cour par le gouvernement français, à savoir la nécessité de sauvegarder la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres et la nécessité de garantir l’efficacité du recouvrement de l’impôt.

41.      Si la nécessité de sauvegarder la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres peut être admise dès lors, notamment, que le régime en cause vise à prévenir des comportements de nature à compromettre le droit d’un État membre d’exercer sa compétence fiscale en relation avec les activités réalisées sur son territoire (11), je constate tout d’abord que, dans la mesure où la règlementation française en cause dans l’affaire au principal conduit à une imposition des dividendes sortants moins favorable par rapport aux dividendes versés à des résidents (au moins un désavantage de trésorerie), il convient de souligner que le gouvernement français n’explique pas en quoi pareille imposition est nécessaire afin d’assurer une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres, alors que ce but peut être atteint par des mesures non discriminatoires comme, par exemple, l’imposition d’une retenue à la source tant aux dividendes versés aux résidents qu’à ceux versés à des non-résidents.

42.      En outre, dans la mesure où la règlementation française en cause dans l’affaire au principal peut mener à l’exonération des dividendes versés à des sociétés résidentes, il convient de rappeler que, dès lors qu’un État membre a choisi de ne pas imposer les résidents bénéficiaires de dividendes d’origine nationale, il ne saurait invoquer la nécessité d’assurer une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres afin de justifier l’imposition des non-résidents bénéficiaires de tels revenus (12).

43.      Enfin, je relève que la République française a bien exercé son pouvoir d’imposition sur les dividendes versés à des sociétés non-résidentes, qui n’avaient d’ailleurs aucune possibilité d’opter pour un autre système fiscal national, qui leur aurait octroyé un régime fiscal plus favorable sur ces mêmes dividendes.

44.      La réglementation française en cause dans l’affaire au principal ne peut pas non plus être justifiée par la nécessité de garantir l’efficacité du recouvrement de l’impôt, puisque ce motif de justification ne peut justifier une imposition qui ne frappe, pour l’essentiel, que les non-résidents (13).

45.      Pour ces raisons, je propose à la Cour de répondre aux première et deuxième questions préjudicielles ainsi qu’à la première branche de la troisième question préjudicielle que les articles 63 et 65 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une règlementation d’un État membre qui soumet les dividendes versés à une société non-résidente déficitaire à l’impôt par une retenue à la source, alors que pareilles sociétés résidentes ne sont pas imposées sur le montant des dividendes d’origine nationale pour autant qu’elles demeurent déficitaires.

C.      Sur la seconde branche de la troisième question préjudicielle

46.      Par la seconde branche de la troisième question préjudicielle, la juridiction de renvoi souhaite savoir si, en tenant compte de la charge fiscale effective grevant les dividendes versés à des résidents et celle grevant les dividendes versés à des non-résidents, une restriction à la libre circulation des capitaux résultant d’une règlementation nationale excluant pour les seuls non-résidents la déduction des frais directement liés à la perception des dividendes pourrait être justifiée par l’écart entre le taux d’imposition de droit commun (33,33 %) mis à la charge de résidents au titre d’un exercice ultérieur (14) et la retenue à la source (15 %) prélevée sur les dividendes versés aux non-résidents, lorsque cet écart compense, au regard du montant de l’impôt acquitté, la différence d’assiette de l’impôt.

1.      Sur la recevabilité

47.      Il est de jurisprudence constante que les questions préjudicielles posées par une juridiction d’un État membre et portant sur le droit de l’Union, bénéficient d’une présomption de pertinence de sorte que le refus de la Cour d’y répondre n’est possible que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation ou l’appréciation de validité d’une règle de l’Union sollicitée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (15).

48.      Selon le gouvernement du Royaume-Uni, cette question est hypothétique puisque les sociétés belges en cause dans l’affaire au principal n’ont identifié aucuns frais directement liés à la perception des dividendes qu’elles n’ont pas été autorisées à déduire dans le cadre du calcul du montant de la retenue à la source. La seconde branche de la troisième question serait ainsi dépourvue de pertinence pour la solution du litige pendant devant la juridiction de renvoi.

49.      Lors de l’audience, Sofina a soutenu qu’elle-même, Rebelco et Sidro ont effectivement demandé la déduction de l’assiette d’imposition de dividendes de l’ensemble des frais liés à leurs activités de gestion de portefeuille, à savoir la déduction de tous les frais nécessaires à l’acquisition, à la conservation et à la gestion de leurs participations dans des sociétés françaises, ainsi que celle de toutes les charges qui résultent nécessairement de la détention de ces participations.

50.      Étant donné qu’il y a eu une demande de déduction, je considère que la seconde branche de la troisième question préjudicielle n’est pas dépourvue de pertinence.

51.      En revanche, il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier si les frais, dont la déduction a été demandée, sont des frais qui sont déductibles pour les sociétés résidentes percevant des dividendes d’origine nationale (16) et sont des frais directement liés à la perception elle-même du revenu en cause dans l’affaire au principal (17).

2.      Sur le fond

a)      Sur l’existence d’une restriction à la libre circulation des capitaux

52.      Comme l’observe la Commission, la juridiction de renvoi part correctement du postulat selon lequel le refus d’admettre la déduction des frais directement liés à la perception des dividendes sortants, alors que pareille déduction est possible pour les dividendes versés à des sociétés résidentes, constitue une restriction à la libre circulation des capitaux (18). En effet, pareille différence de traitement est susceptible de dissuader des sociétés établies dans d’autres États membres d’investir dans des sociétés françaises.

b)      Sur la justification

1)      Sur la comparabilité des situations

53.      Il importe de relever que « la Cour a déjà jugé que, en ce qui concerne les frais professionnels directement liés à une activité ayant généré des revenus imposables dans un État membre, les résidents et les non-résidents de ce dernier sont placés dans une situation comparable » (19).

54.      En ce sens, elle a jugé que si la méthode d’imposition appliquée aux résidents permettait la déduction des frais directement liés à la perception des dividendes, « la prise en compte de tels frais devrait également être admise pour les […] non-résidents » (20).

55.      Dans ce contexte, pareille restriction à la libre circulation des capitaux « ne saurait être justifiée par la circonstance que les [non-résidents] sont [soumis] à un taux d’imposition moins élevé que les [résidents] » (21). Il est donc inutile de comparer la charge fiscale effective grevant les dividendes versés à des résidents à celle grevant les dividendes versés à des non-résidents, puisque, même si le taux d’imposition pour les non-résidents est inférieur à celui imposé aux résidents, le montant des frais déductibles auquel ont droit les résidents est incertain et rien n’indique qu’il serait égal à la différence résultant de l’imposition des résidents à l’égard de celle des non-résidents.

2)      Sur les raisons impérieuses d’intérêt général

56.      Le gouvernement français soutient que l’imposition sur leur montant brut des dividendes versés à une société non-résidente sans possibilité de déduction des frais liés directement à leur perception (contrairement au cas des dividendes versés à une société résidente) qui sont imposés sur leur montant net serait justifiée par la nécessité de garantir l’efficacité du recouvrement de l’impôt (22).

57.      D’emblée, il y a lieu de rappeler que, si la Cour a jugé qu’un tel objectif constitue une raison impérieuse d’intérêt général susceptible de justifier une restriction à la libre prestation des services créée par une règlementation fiscale d’un État membre (23), encore faut-il que l’application de cette restriction soit propre à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi et qu’elle n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre (24). Ces principes sont évidemment transposables à la présente affaire qui concerne la libre circulation des capitaux.

58.      En l’occurrence, en s’appuyant sur les points 46 et 47 de l’arrêt du 19 novembre 2015, Hirvonen (C‑632/13, EU:C:2015:765), le gouvernement français soutient que le refus de reconnaître la déduction des frais doit être accepté comme un élément inhérent au régime d’imposition à la source, puisque celui-ci vise tant à simplifier la tâche de l’administration fiscale de l’État membre de la source qu’à soulager le contribuable non-résident. Ainsi, relève le gouvernement français, l’administration fiscale est dispensée de la tâche de prélever l’impôt auprès du non-résident et ce dernier est déchargé de toute obligation de coopération, en ce sens qu’il n’est pas tenu de se familiariser avec le système fiscal français afin de pouvoir remettre une déclaration fiscale à l’administration fiscale française pour les revenus qu’il perçoit en France. Enfin, selon le gouvernement français, la déduction des frais liés à la perception des dividendes irait à l’encontre de la simplification recherchée par le régime d’imposition à la source puisque la retenue à la source est prélevée auprès de la société distributrice qui ne peut connaître les frais subis par le non-résident et qui sont liés à la perception des dividendes.

59.      À mon avis, cette argumentation ne saurait prospérer.

60.      En premier lieu, en dehors du fait que l’arrêt du 19 novembre 2015, Hirvonen (C‑632/13, EU:C:2015:765), s’écartait des arrêts du 18 mars 2010, Gielen (C‑440/08, EU:C:2010:148), et du 28 février 2013, Beker et Beker (C‑168/11, EU:C:2013:117), qui refusaient d’accepter comme justification d’une discrimination, le fait qu’une règlementation nationale offrait sur demande aux contribuables non-résidents un système d’imposition alternatif et compatible avec le droit de l’Union, l’affaire qu’il a tranchée concernait une tout autre situation que celle en cause (25).

61.      Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 19 novembre 2015, Hirvonen (C‑632/13, EU:C:2015:765), était en cause une loi suédoise qui avait pour objectif de supprimer la restriction à l’encontre des assujettis non-résidents constatée dans l’arrêt du 1er juillet 2004, Wallentin (C‑169/03, EU:C:2004:403), en leur permettant d’opter en faveur soit du régime d’imposition ordinaire créé pour les résidents, soit du régime d’imposition à la source destiné aux non-résidents.

62.      Après avoir jugé que ce dernier système était finalement globalement plus favorable pour les non-résidents (26), la Cour a alors jugé que « le refus, dans le cadre de l’imposition sur les revenus, d’accorder aux contribuables non-résidents, qui tirent la plus grande partie de leurs revenus de l’État source et qui ont opté pour le régime d’imposition à la source, les mêmes déductions personnelles que celles qui sont accordées aux contribuables résidents dans le cadre du régime d’imposition ordinaire ne constitue pas une discrimination contraire à l’article 21 TFUE lorsque les contribuables non-résidents ne sont pas soumis à une charge fiscale globalement supérieure à celle qui pèse sur les contribuables résidents et sur les personnes qui leur sont assimilées, dont la situation est comparable à la leur » (27).

63.      À mon avis, la jurisprudence découlant des arrêts du 18 mars 2010, Gielen (C‑440/08, EU:C:2010:148), et du 28 février 2013, Beker et Beker (C‑168/11, EU:C:2013:117), devrait être maintenue. Par ailleurs, le raisonnement de la Cour dans l’arrêt du 19 novembre 2015, Hirvonen (C‑632/13, EU:C:2015:765), me paraît contestable dans la mesure où l’existence ou non d’une discrimination ne dépend pas du résultat global pour le contribuable et qu’« une différence de traitement entre ces deux catégories de contribuables peut être qualifiée de discrimination au sens du traité FUE dès lors qu’il n’existe aucune différence de situation objective de nature à fonder une différence de traitement sur ce point entre lesdites catégories » (28).

64.      Cela dit, je suppose que la position adoptée par la Cour dans son arrêt du 19 novembre 2015, Hirvonen (C‑632/13, EU:C:2015:765), a été probablement dictée par le souci de ne pas permettre à un assujetti non-résident de faire du « cherry picking », c’est-à-dire de revendiquer à son bénéfice les éléments les plus favorables de deux régimes d’imposition distincts. Si donc la Cour s’est appuyée sur le fait que le régime d’imposition applicable aux non-résidents était globalement plus favorable que le régime réservé en principe aux résidents, c’était parce que le droit suédois permettait au contribuable non-résident d’opter intégralement pour le régime d’imposition applicable aux résidents (29).

65.      Toutefois, la règlementation française en cause dans l’affaire au principal n’offre aucun choix aux non-résidents. Par conséquent, en demandant la déduction des frais directement liés à la perception des dividendes offerte aux résidents, les non-résidents ne font pas du « cherry-picking », mais au contraire cherchent à obtenir l’égalité de traitement.

66.      En deuxième lieu, si la déduction par les non-résidents de frais directement liés à la perception des dividendes occasionne une charge administrative pour l’administration fiscale française, cela vaut également, mutatis mutandis, pour les résidents (30).

67.      En troisième lieu, comme la Cour l’a rappelé au point 43 de son arrêt du 13 juillet 2016, Brisal et KBC Finance Ireland (C‑18/15, EU:C:2016:549), il incombe au contribuable non-résident qui perçoit les dividendes « de décider s’il estime opportun d’investir des ressources dans l’établissement et la traduction de documents destinés à démontrer la réalité et le montant effectif des frais professionnels dont il demande la déduction ».

68.      En quatrième et dernier lieu, même si je reconnais qu’il ne serait pas très efficace de demander à la société distributrice des dividendes de déduire des frais directement liés à la perception des dividendes par le contribuable non-résident, la Cour a déjà jugé que le droit à la déduction peut également se matérialiser après le prélèvement de la retenue à la source par le remboursement d’une fraction de l’impôt retenu (31).

69.      Pour ces raisons, je propose à la Cour de répondre à la seconde branche de la troisième question préjudicielle qu’une restriction à la libre circulation des capitaux résultant d’une règlementation nationale telle que celle en cause dans la présente affaire, qui exclut pour les seuls non-résidents la déduction des frais directement liés à la perception des dividendes, ne peut être justifiée ni par l’écart entre le taux d’imposition de droit commun mis à la charge de résidents, au titre d’un exercice ultérieur et la retenue à la source prélevée sur les dividendes versés aux non-résidents, ni par la nécessité de garantir l’efficacité du recouvrement de l’impôt.

VI.    Conclusion

70.      Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre de la manière suivante aux questions préjudicielles posées par le Conseil d’État (France) :

1)      Les articles 63 et 65 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une règlementation d’un État membre qui soumet les dividendes versés à une société non-résidente déficitaire à l’impôt à travers une retenue à la source, alors que pareilles sociétés résidentes ne sont pas imposées sur le montant des dividendes d’origine nationale pour autant qu’elles demeurent déficitaires.

2)      Une restriction à la libre circulation des capitaux résultant d’une règlementation nationale, qui exclut pour les seuls non-résidents la déduction des frais directement liés à la perception des dividendes, ne peut être justifiée ni par l’écart entre le taux d’imposition de droit commun mis à la charge de résidents au titre d’un exercice ultérieur et la retenue à la source prélevée sur les dividendes versés aux non-résidents, ni par la nécessité de garantir l’efficacité du recouvrement de l’impôt.


1      Langue originale : le français.


2      JO 2011, L 345, p. 8.


3      Arrêt du 2 juin 2016, Pensioenfonds Metaal en Techniek (C‑252/14, EU:C:2016:402, point 28 et jurisprudence citée).


4      Voir arrêts du 12 décembre 2006, Test Claimants in Class IV of the ACT Group Litigation (C‑374/04, EU:C:2006:773, point 68) ; du 14 décembre 2006, Denkavit Internationaal et Denkavit France (C‑170/05, EU:C:2006:783, point 35) ; du 8 novembre 2007, Amurta (C‑379/05, EU:C:2007:655, point 38) ; du 20 mai 2008, Orange European Smallcap Fund (C‑194/06, EU:C:2008:289, points 78 et 79), et du 10 mai 2012, Santander Asset Management SGIIC e.a. (C‑338/11 à C‑347/11, EU:C:2012:286, point 44).


5      Arrêt du 14 décembre 2006, Denkavit Internationaal et Denkavit France (C‑170/05, EU:C:2006:783, point 39).


6      Voir arrêts du 8 novembre 2007, Amurta (C‑379/05, EU:C:2007:655, point 61) et du 18 juin 2009, Aberdeen Property Fininvest Alpha (C‑303/07, EU:C:2009:377, point 76).


7      Voir arrêts du 22 décembre 2008, Truck Center (C‑282/07, EU:C:2008:762, point 38 à 50), et du 10 mai 2012, Santander Asset Management SGIIC e.a. (C‑338/11 à C‑347/11, EU:C:2012:286, point 43).


8      Point 55 de cet arrêt et c’est moi qui souligne.


9      Certes, la Cour a jugé que, même si les dividendes perçus par la société mère ne sont pas soumis à l’impôt au titre de l’exercice fiscal au cours duquel ils ont été distribués, « [la] réduction des pertes de la société mère [à hauteur des dividendes perçus] est susceptible d’avoir pour effet que cette dernière subit indirectement une imposition sur ces dividendes lors des exercices fiscaux ultérieurs, lorsque son résultat est positif » (voir arrêt du 12 février 2009, Cobelfret, C‑138/07, EU:C:2009:82, point 40). Toutefois, en admettant l’existence de la possibilité d’imposition lors d’un exercice fiscal ultérieur, la Cour a traité une problématique tout à fait différente, à savoir celle de la possibilité d’une double imposition économique dans le cas des dividendes distribués par une société non-résidente et perçus par une société résidente qui ont déjà fait l’objet d’une imposition lors de leur distribution (voir arrêt du 10 février 2011, Haribo Lakritzen Hans Riegel et Österreichische Salinen, C‑436/08 et C‑437/08, EU:C:2011:61, point 158). Pareille possibilité a été jugée contraire à la directive mères-filiales.


10      Arrêt du 10 mai 2012, Santander Asset Management SGIIC e.a. (C‑338/11 à C‑347/11, EU:C:2012:286, point 44).


11      Voir arrêt du 10 mai 2012, Santander Asset Management SGIIC e.a. (C‑338/11 à C‑347/11, EU:C:2012:286, point 47 et jurisprudence citée).


12      Voir arrêt du 10 mai 2012, Santander Asset Management SGIIC e.a. (C‑338/11 à C‑347/11, EU:C:2012:286, point 48 et jurisprudence citée).


13      Voir, par analogie, arrêt du 10 mai 2012, Santander Asset Management SGIIC e.a. (C‑338/11 à C‑347/11, EU:C:2012:286, point 49).


14      Je rappelle qu’il est possible que l’imposition n’intervienne jamais.


15      Voir arrêts du 26 février 2013, Melloni (C‑399/11, EU:C:2013:107, point 29 et jurisprudence citée) et du 16 juin 2015, Gauweiler e.a. (C‑62/14, EU:C:2015:400, point 25).


16      Voir arrêts du 31 mars 2011, Schröder (C‑450/09, EU:C:2011:198, point 40) ; du 17 septembre 2015, Miljoen e.a. (C‑10/14, C‑14/14 et C‑17/14, EU:C:2015:608, point 57), et du 13 juillet 2016, Brisal et KBC Finance Ireland (C‑18/15, EU:C:2016:549, points 44 et 45).


17      Voir arrêts du 22 novembre 2012, Commission/Allemagne (C‑600/10, non publié, EU:C:2012:737, point 20) ; du 17 septembre 2015, Miljoen e.a. (C‑10/14, C‑14/14 et C‑17/14, EU:C:2015:608, points 58 et 59), et du 13 juillet 2016, Brisal et KBC Finance Ireland (C‑18/15, EU:C:2016:549, point 46).


18      Voir arrêts du 31 mars 2011, Schröder (C‑450/09, EU:C:2011:198, point 40) et du 17 septembre 2015, Miljoen e.a. (C‑10/14, C‑14/14 et C‑17/14, EU:C:2015:608, point 57).


19      Arrêt du 2 juin 2016, Pensioenfonds Metaal en Techniek (C‑252/14, EU:C:2016:402, point 64 et jurisprudence citée).


20      Arrêt du 2 juin 2016, Pensioenfonds Metaal en Techniek (C‑252/14, EU:C:2016:402, point 65). Voir, également, en ce sens, arrêts du 12 juin 2003, Gerritse (C‑234/01, EU:C:2003:340, points 27 et 28) ; du 15 février 2007, Centro Equestre da Lezíria Grande (C‑345/04, EU:C:2007:96, point 23) ; du 8 novembre 2012, Commission/Finlande [C‑342/10, EU:C:2012:688, point 37 (cet arrêt vise des dividendes)], et du 13 juillet 2016, Brisal et KBC Finance Ireland (C‑18/15, EU:C:2016:549, point 45).


21      Voir arrêt du 13 juillet 2016, Brisal et KBC Finance Ireland (C‑18/15, EU:C:2016:549, point 33).


22      Cette justification est proche de celle liée à la nécessité de garantir l’efficacité des contrôles fiscaux, raison impérieuse d’intérêt général qui a souvent fait l’objet d’une analyse par la Cour dans des affaires mettant en cause la libre circulation des capitaux. À propos de transferts de capitaux entre États membres, cette justification a toujours été refusée dès que la directive 77/799/CEE du Conseil, du 19 décembre 1977, concernant l’assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs (JO 1977, L 336, p. 15) était applicable (voir, en ce sens, arrêts du 23 janvier 2014, Commission/Belgique, C‑296/12, EU:C:2014:24, points 42 à 45, et du 6 juin 2013, Commission/Belgique, C‑383/10, EU:C:2013:364, points 50 à 60). Il en va de même à présent pour la directive 2011/16/UE du Conseil, du 15 février 2011, relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE (JO 2011, L 64, p. 1).


23      Voir, notamment, arrêts du 3 octobre 2006, FKP Scorpio Konzertproduktionen (C‑290/04, EU:C:2006:630, points 35 et 36), et du 13 juillet 2016, Brisal et KBC Finance Ireland (C‑18/15, EU:C:2016:549, point 39).


24      Voir arrêt du 18 octobre 2012, X (C‑498/10, EU:C:2012:635, point 36 et jurisprudence citée).


25      Voir arrêt du 19 novembre 2015, Hirvonen (C‑632/13, EU:C:2015:765, points 37 à 40).


26      Voir arrêt du 19 novembre 2015, Hirvonen (C‑632/13, EU:C:2015:765, point 43).


27      Arrêt du 19 novembre 2015, Hirvonen (C‑632/13, EU:C:2015:765, point 49).


28      Voir arrêt du 18 mars 2010, Gielen (C‑440/08, EU:C:2010:148, point 44 et jurisprudence citée).


29      Voir, en ce sens, points 40 à 43 de mes conclusions dans l’affaire Hünnebeck (C‑479/14, EU:C:2016:100).


30      Voir, en ce sens, arrêt du 13 juillet 2016, Brisal et KBC Finance Ireland (C‑18/15, EU:C:2016:549, point 41).


31      Voir arrêt du 13 juillet 2016, Brisal et KBC Finance Ireland (C‑18/15, EU:C:2016:549, point 42).

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