Eulex Kosovo v Elitaliana (European Union public contracts - Order) French Text [2020] EUECJ C-439/13P-DEP_CO (16 January 2020)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2020/C43913PDEP_CO.html
Cite as: [2020] EUECJ C-439/13P-DEP_CO, EU:C:2020:14, ECLI:EU:C:2020:14

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ORDONNANCE DE LA COUR (dixième chambre)

16 janvier 2020 (*)

« Taxation des dépens »

Dans l’affaire C‑439/13 P-DEP,

ayant pour objet une demande de taxation des dépens récupérables au titre de l’article 145 du règlement de procédure de la Cour, introduite le 23 août 2019,

Eulex Kosovo, établie à Pristina (Kosovo), représentée par Me E. Raoult, avocate,

partie requérante,

contre

Elitaliana Srl, établie à Rome (Italie), représentée par Me R. Colagrande, avvocato,

partie défenderesse,

LA COUR (dixième chambre),

composée de M. I. Jarukaitis, président de chambre, MM. E. Juhász (rapporteur) et C. Lycourgos, juges,

avocat général : M. P. Pikamäe

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

l’avocat général entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        La présente affaire a pour objet la taxation des dépens exposés par Eulex Kosovo (ci-après « Eulex ») dans le cadre de l’affaire C‑439/13 P.

2        Par un pourvoi introduit le 2 août 2013, Elitaliana SpA a, au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, demandé l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 4 juin 2013, Elitaliana/Eulex Kosovo (T‑213/12, EU:T:2013:292), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant, d’une part, à l’annulation des mesures prises par la mission entreprise sur la base de l’action commune 2008/124/PESC du Conseil, du 4 février 2008, relative à la mission « État de droit » menée par l’Union européenne au Kosovo, Eulex Kosovo (JO 2008, L 42, p. 92), telle que modifiée par la décision 2011/752/PESC du Conseil, du 24 novembre 2011 (JO 2011, L 310, p. 10), dans le cadre de l’adjudication à un autre soumissionnaire du marché public intitulé « EuropeAide/131516/D/SER/XK – Soutien par hélicoptère à la mission Eulex au Kosovo (PROC/272/11) » et, d’autre part, à la condamnation de la mission « État de droit » au Kosovo, dénommée « Eulex Kosovo », visée à l’article 1er de l’action commune 2008/124 à la réparation du dommage subi en raison de la non-adjudication dudit marché à Elitaliana.

3        Par arrêt du 12 novembre 2015, Elitaliana/Eulex Kosovo (C‑439/13 P, EU:C:2015:753), la Cour a rejeté le pourvoi et condamné Elitaliana aux dépens.

4        Aucun accord n’étant intervenu entre Eulex et Elitaliana sur le montant des dépens récupérables afférents à la procédure de pourvoi, Eulex a, en application de l’article 145 du règlement de procédure de la Cour, introduit la présente demande.

 Les conclusions des parties

5        Eulex demande à la Cour de fixer le montant des dépens récupérables à la somme de 25 000 euros.

6        Elitaliana n’a pas déposé de conclusions.

 Argumentation des parties

7        Eulex fait valoir que le montant des frais récupérables sollicité est pleinement justifié au regard de la spécificité de l’affaire et de son importance pour le droit de l’Union.

8        À cet égard, elle souligne notamment que les questions juridiques abordées dans le cadre du pourvoi, en ce qu’elles concernaient notamment, d’une part, la compétence des juridictions de l’Union pour connaître de l’affaire, intervenue à l’occasion de l’exécution d’une mission relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), d’autre part, la répartition des rôles et responsabilités assumés par le Conseil de l’Union européenne, la Commission européenne et Eulex dans le cadre de la passation d’un marché public intervenant dans le cadre d’une telle mission et, enfin, la détermination du point de savoir si Eulex disposait ou non de la personnalité juridique revêtaient, outre leur caractère inédit et complexe, une véritable importance pour le droit de l’Union.

9        Elle fait, enfin, valoir que l’enjeu du litige était conséquent, en ce qu’il portait sur la validité de l’attribution d’un marché d’une valeur de 7,5 millions d’euros.

10      Elle en conclut que, au regard de ces éléments, la facturation d’une somme forfaitaire de 8 000 euros, au terme d’un premier contrat relatif aux honoraires, aux fins de la rédaction du mémoire en réponse, et celle d’une somme supplémentaire de 15 000 euros, correspondant à 50 heures de travail au tarif horaire de 300 euros, en vue de l’élaboration de la réponse aux questions de la Cour ainsi que de la préparation de l’audience devant la Cour et de la comparution à celle-ci, auxquelles il convient d’ajouter une somme de 2 000 euros au titre des frais de transport et d’hébergement, constituent, au regard de la spécificité de l’affaire, des frais très raisonnables qui doivent être retenus au titre de la fixation des dépens.

 Appréciation de la Cour

11      Aux termes de l’article 144, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme étant des dépens récupérables « les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, conseil ou avocat ».

12      Il ressort ainsi du libellé de cette disposition que la rémunération d’un avocat relève des frais « indispensables », au sens de celle-ci. Il en découle également que les dépens récupérables sont limités, d’une part, aux frais exposés aux fins de la procédure devant la Cour et, d’autre part, à ceux qui ont été indispensables à ces fins [ordonnance du 10 avril 2019, Giant (China)/EBMA, C‑61/16 P‑DEP, non publiée, EU:C:2019:298, point 19].

13      Le droit de l’Union ne contenant pas de dispositions de nature tarifaire, la Cour doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union ainsi que des difficultés de celui-ci, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu nécessiter pour les agents ou les conseils qui sont intervenus et des intérêts économiques que le litige a présentés pour les parties [ordonnance du 10 avril 2019, Giant (China)/EBMA, C‑61/16 P‑DEP, non publiée, EU:C:2019:298, point 21].

14      C’est à la lumière de l’ensemble de ces éléments qu’il y a lieu d’évaluer le montant des dépens récupérables en l’espèce.

15      Concernant l’objet et la nature du litige, ainsi que son importance au regard du droit de l’Union, il convient de relever qu’il s’agissait d’une procédure de pourvoi au cours de laquelle se sont notamment posées les questions portant sur le point de savoir si les juridictions de l’Union étaient compétentes pour connaître ou non de contestations relatives à la passation de marchés publics par des missions relevant de la PESC et, dans l’affirmative, quelle était l’institution ou la personne à attraire devant ces juridictions dans le cadre d’une telle procédure.

16      La réponse à ces questions, qui n’avaient jusque-là jamais été traitées par lesdites juridictions, nécessitait de se référer tant au droit primaire de l’Union qu’aux règles prévues par le règlement (CE, Euratom) no 1605/2002, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE, Euratom) no 1081/2010 du Parlement européen et du Conseil, du 24 novembre 2010 (JO L 311, p. 9).

17      À cet égard, il y a lieu de relever que la complexité du litige a amené la Cour, par ordonnance du 10 février 2015, Elitaliana/Eulex Kosovo (C‑439/13 P, non publiée, EU:C:2015:106), d’abord, à ordonner la réouverture de la procédure orale, ensuite, à inviter les parties à répondre par écrit à la question spécifique portant sur la compétence des juridictions de l’Union pour connaître du litige, en prenant en considération les dispositions concernant la PESC contenues sous le titre V, chapitre 2, section 1, TUE et celles de l’article 275 TFUE, et, enfin, à inviter le Conseil ainsi que la Commission à présenter leur point de vue sur cette question.

18      La réouverture de la procédure orale devant la Cour ainsi que le traitement de ladite question, qui, bien que soulevée par Eulex devant le Tribunal, n’avait pas été analysée dans l’ordonnance du 4 juin 2013, Elitaliana/Eulex Kosovo (T‑213/12, EU:T:2013:292), a, outre le traitement normal du pourvoi dans cette affaire, inévitablement généré une étude supplémentaire de la part de l’avocat d’Eulex, lequel a également dû préparer l’audience devant la Cour et comparaître devant celle-ci, ce qui doit être pris en compte dans la fixation des dépens.

19      Pour autant, un tel supplément de travail ne saurait excéder plus de 30 heures de travail. Les frais afférents aux heures de travail excédant cette quantité ne sauraient donc être considérés comme étant « indispensables [...] aux fins de la procédure », au sens de l’article 144, sous b), du règlement de procédure.

20      Il en résulte que, au regard de l’ensemble de ces éléments et de l’enjeu économique du litige, la facturation d’une somme forfaitaire de 8 000 euros, au terme d’un premier contrat relatif aux honoraires, aux fins de la rédaction du mémoire en réponse apparaît justifiée. Le supplément de travail mentionné aux points 17 et 18 de la présente ordonnance apparaît quant à lui justifié à hauteur d’une somme de 9 000 euros, correspondant à 30 heures de travail au tarif horaire de 300 euros.

21      Enfin, s’agissant des débours, il y a lieu de fixer les frais de voyage et d’hébergement relatifs à l’audience devant la Cour à la somme de 1 000 euros.

22      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il sera fait une juste appréciation des dépens récupérables par Eulex auprès d’Elitaliana à 18 000 euros.

Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) ordonne :

Le montant total des dépens qu’Elitaliana Srl doit rembourser à Eulex Kosovo, dans l’affaire C439/13 P, est fixé à 18 000 euros.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.

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