Stanleyparma and Stanleybet Malta (Judgment) French Text [2020] EUECJ C-788/18 (26 February 2020)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2020/C78818.html
Cite as: ECLI:EU:C:2020:110, [2020] EUECJ C-788/18, EU:C:2020:110

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ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

26 février 2020 (*)

« Renvoi préjudiciel – Libre prestation des services – Article 56 TFUE – Jeux de hasard – Fiscalité – Principe de non-discrimination – Impôt unique sur les paris  »

Dans l’affaire C‑788/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Commissione tributaria provinciale di Parma (commission fiscale provinciale de Parme, Italie), par décision du 15 octobre 2018, parvenue à la Cour le 14 décembre 2018, dans la procédure

Stanleyparma Sas di Cantarelli Pietro & C.,

Stanleybet Malta Ltd

contre

Agenzia delle Dogane e dei Monopoli UM Emilia Romagna – SOT Parma,

LA COUR (première chambre),

composée de M. J.‑C. Bonichot, président de chambre, MM. M. Safjan, L. Bay Larsen, Mme C. Toader (rapporteure) et M. N. Jääskinen, juges,

avocat général : M. E. Tanchev,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

–        pour Stanleyparma Sas di Cantarelli Pietro & C., par Mes D. Agnello, V. Varzi et M. Mura, avvocati,

–        pour Stanleybet Malta Ltd, par Mes R. A. Jacchia, F. Ferraro, A. Terranova et D. Agnello, avvocati,

–        pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de MM. P. G. Marrone et S. Fiorentino, avvocati dello Stato,

–        pour le gouvernement belge, par Mmes L. Van den Broeck et M. Jacobs, en qualité d’agents, assistées de Mes P. Vlaemminck et R. Verbeke, advocaten,

–        pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek, O. Serdula et J. Vláčil, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par M. P. Rossi et Mme N. Gossement, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 52, 56 et 57 TFUE ainsi que des principes de non-discrimination en matière fiscale et d’égalité de traitement.

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Stanleyparma Sas di Cantarelli Pietro & C. et Stanleybet Malta Ltd à l’Agenzia delle Dogane e dei Monopoli UM Emilia Romagna – SOT Parma (Agence des douanes et des monopoles, bureau des monopoles, Émilie Romagne, siège opérationnel de Parme, Italie) (ci-après l’« ADM »), au sujet de la légalité de la décision de cette dernière relative à l’obligation de payer, en Italie, un impôt unique sur les paris (ci-après l’« impôt unique ») incombant, à titre principal, aux Centri Trasmissione Dati (centres de transmission des données, ci-après les « CTD »), tels que Stanleyparma, ainsi que, à titre subsidiaire, à Stanleybet Malta, en qualité de coobligé solidaire.

 Le cadre juridique

3        Conformément à l’article 1er du decreto legislativo n. 504 – Riordino dell’imposta unica sui concorsi pronostici e sulle scommesse, a norma dell’articolo 1, comma 2, della legge 3 agosto 1998, n. 288 (décret législatif no 504 – Réaménagement de l’impôt unique sur les concours de pronostics et sur les paris, conformément à l’article 1er, paragraphe 2, de la loi du 3 août 1998, no 288), du 23 décembre 1998 (GURI no 27, du 3 février 1999, ci-après le « décret législatif no 504/1998 »), l’impôt unique est dû sur les concours de pronostics et les paris de tous types, relatifs à quelque évènement que ce soit, y compris s’ils se déroulent à l’étranger.

4        L’article 3 de ce décret législatif, intitulé « Redevables », est libellé comme suit :

« Les redevables de l’impôt unique sont ceux qui gèrent, y compris dans le cadre de concessions, les concours de pronostics et les paris. »

5        Aux termes de l’article 1er, paragraphe 66, de la legge n. 220 – Disposizioni per la formazione del bilancio annuale e pluriennale dello Stato (legge di stabilità 2011) (loi no 220 – Dispositions relatives à la formation du budget annuel et pluriannuel de l’État (loi de stabilité 2011), du 13 décembre 2010 (GURI no 297, du 21 décembre 2010, ci-après la « loi de stabilité 2011 ») :

« [...]

a)       [...] l’impôt unique [...] est dû en tout état de cause, y compris dans le cas où la collecte du jeu est effectuée, même à distance, en l’absence ou en cas d’inefficacité de la concession octroyée par le ministère de l’Économie et des Finances – administration autonome des monopoles d’État;

b)       l’article 3 du décret législatif [no 504/1998] doit être interprété en ce sens que le redevable de l’impôt est celui qui, même en l’absence ou en cas d’inefficacité de la concession octroyée par le ministère de l’Économie et des Finances – administration autonome des monopoles d’État, gère par tout moyen, y compris par voie télématique, pour son propre compte ou celui de tiers, même situés à l’étranger, des concours de pronostics ou de paris en tous genre. Si l’activité est exercée pour le compte de tiers, celui pour le compte duquel l’activité est exercée est tenu solidairement au paiement de l’impôt et des sanctions qui s’y rattachent. »

6        Le decreto del Ministero dell’Economia e delle Finanze n. 111 – Norme concernenti la disciplina delle scommesse a quota fissa su eventi sportivi diversi dalle corse dei cavalli e su eventi non sportivi da adottare ai sensi dell’articolo 1, comma 286, della legge 30 dicembre 2004, n. 311 (décret du ministère de l’Économie et des Finances – Régime applicable aux paris à cote fixe sur les évènements sportifs autres que les courses de chevaux et sur les évènements non sportifs au sens de l’article 1er, paragraphe 286, de la loi du 30 décembre 2004, no 311 ), du 1er mars 2006 (GURI no 67, du 21 mars 2006), prévoit, à son article 16, que le concessionnaire s’acquitte du paiement des sommes dues au titre de l’impôt unique.

7        En vertu de l’article 1er, paragraphe 644, sous g), de la legge no 190 – Disposizioni per la formazione del bilancio annuale e pluriennale dello Stato (legge di stabilità 2015) (loi no 190 – Dispositions relatives à la formation du budget annuel et pluriannuel de l’État (loi de stabilité 2015), du 23 décembre 2014 (supplément ordinaire à la GURI no 300, du 29 décembre 2014), l’impôt unique s’applique « sur la base d’une assiette forfaitaire coïncidant avec le triple de la moyenne des collectes effectuées dans la province où est situé l’exercice ou le point de collecte, obtenue grâce aux données enregistrées dans le totalisateur national pour la période d’imposition antérieure à la période de référence ».

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

8        Stanleybet Malta est active en Italie dans le domaine de la collecte de paris, au moyen de CTD, tels que Stanleyparma, sur la base d’une relation relevant de la forme contractuelle du mandat. Les CTD sont situés dans des locaux ouverts au public, mettent à disposition des joueurs une connexion télématique et transmettent les données de chaque mise à leur mandant. Stanleybet Malta, qui exerce son activité en Italie depuis environ vingt ans, n’est titulaire ni d’une concession ni d’une autorisation de police.

9        Par une décision de redressement fiscal du 21 septembre 2016, l’ADM a adressé à Stanleyparma et, à titre subsidiaire, à Stanleybet Malta, en qualité de coobligé solidaire, un avis de recouvrement, en application de l’article 3 du décret législatif no 504/1998, tel qu’interprété à l’article 1er, paragraphe 66, de la loi de stabilité 2011, pour le paiement de l’impôt unique sur les paris collectés en Italie pendant l’année d’imposition 2011, s’élevant à 8 422, 60 euros. L’ADM a considéré que cet impôt était dû en raison du fait que Stanleyparma exerçait, « pour compte de tiers », une activité de gestion de paris.

10      Stanleyparma et Stanleybet Malta ont saisi la juridiction de renvoi, la Commissione tributaria provinciale di Parma (commission fiscale provinciale de Parme, Italie), d’une demande tendant à l’annulation de cette décision, en faisant valoir que la réglementation nationale en cause au principal introduit, à leur égard, une restriction à la libre prestation des services.

11      La juridiction de renvoi, qui éprouve les mêmes doutes que les parties requérantes, s’interroge, en particulier, sur la compatibilité de la réglementation nationale avec le droit de l’Union, notamment avec les articles 52, 56 et 57 TFUE ainsi qu’avec les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination.

12      Cette juridiction considère que le fait que les CTD soient redevables de l’impôt unique constitue une restriction illégale à la libre prestation des services, au sens de l’article 56 TFUE, d’un double point de vue. D’une part, l’assujettissement à cet impôt des CTD qui opèrent pour le compte des concessionnaires nationaux, bien que leur activité soit comparable à celle de Stanleyparma, ne serait pas prévu. D’autre part, Stanleyparma, appelée à verser ledit impôt, serait assimilée à ces concessionnaires, dont l’activité est pourtant différente.

13      Selon la juridiction de renvoi, il n’existe aucune justification à une éventuelle restriction à la libre prestation des services, étant donné que la réglementation nationale en cause au principal poursuivrait un objectif de nature purement économique. Au soutien de son point de vue, cette juridiction fait référence à un arrêt de la Corte costituzionale (Cour constitutionnelle, Italie) du 23 janvier 2018, dans lequel cette dernière a déclaré contraire à la Constitution cette réglementation nationale pour les exercices antérieurs à l’année 2011, en ce qu’elle prévoyait que les CTD opérant pour le compte de tiers, qui, comme Stanleybet Malta, n’étaient pas titulaires d’une concession, étaient assujettis à l’impôt unique.

14      Dans ces conditions, la Commissione tributaria provinciale di Parma (commission fiscale provinciale de Parma) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Les articles 56, 57 et 52 [TFUE], la jurisprudence de la [Cour] relative aux services de jeux et de paris et notamment les arrêts [du 6 novembre 2003, Gambelli e.a. (C‑243/01, EU:C:2003:597), du 6 mars 2007, Placanica e.a. (C‑338/04, C‑359/04 et C‑360/04, EU:C:2007:133), du 16 février 2012, Costa et Cifone (C‑72/10 et C‑77/10, EU:C:2012:80), ainsi que du 28 janvier 2016, Laezza (C‑375/14, EU:C:2016:60),] en matière de discrimination fiscale, en particulier les arrêts [du 13 novembre 2003, Lindman (C‑42/02, EU:C:2003:613), du 6 octobre 2009, Commission/Espagne (C‑153/08, EU:C:2009:618), et du 22 octobre 2014, Blanco et Fabretti (C‑344/13 et C‑367/13, EU:C:2014:2311)], et les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination dans le droit de l’Union, à la lumière également de l’arrêt de la Corte costituzionale (Cour constitutionnelle) du 23 janvier 2018, doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale, telle que la législation italienne en cause, prévoyant l’assujettissement à l’impôt unique [...], des intermédiaires nationaux transmettant des données de jeu pour le compte d’opérateurs de paris établis dans un autre État membre de l’Union européenne ayant notamment les caractéristiques de [Stanleybet Malta] et subsidiairement de ces mêmes opérateurs de paris à titre solidaire de leurs intermédiaires nationaux ?

2)      Les articles 56, 57 et 52 [TFUE], la jurisprudence de la [Cour] relative aux services de jeux et de paris et notamment les arrêts [du 6 novembre 2003, Gambelli e.a. (C‑243/01, EU:C:2003:597), du 6 mars 2007, Placanica e.a. (C‑338/04, C‑359/04 et C‑360/04, EU:C:2007:133), du 16 février 2012, Costa et Cifone (C‑72/10 et C‑77/10, EU:C:2012:80), ainsi que du 28 janvier 2016, Laezza (C‑375/14, EU:C:2016:60),] en matière de discrimination fiscale, en particulier les arrêts [du 13 novembre 2003, Lindman (C‑42/02, EU:C:2003:613), du 6 octobre 2009, Commission/Espagne (C‑153/08, EU:C:2009:618), et du 22 octobre 2014, Blanco et Fabretti (C‑344/13 et C‑367/13, EU:C:2014:2311)], et les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination dans le droit de l’Union, à la lumière également de l’arrêt de la Corte costituzionale (Cour constitutionnelle) du 23 janvier 2018, doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale telle que la législation italienne en cause prévoyant l’assujettissement à l’impôt unique[...], uniquement pour les intermédiaires nationaux transmettant des données de jeu pour le compte d’opérateurs de paris établis dans un autre État membre de l’Union [...], ayant notamment les caractéristiques de [Stanleybet Malta], et non pour les intermédiaires nationaux transmettant des données de jeu pour le compte d’opérateurs de paris concessionnaires de l’État, qui exercent pourtant la même activité ?

3)      Les articles 52, 56 [TFUE] et suivants, la jurisprudence de la [Cour] en matière de services de jeux et de paris et les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination, à la lumière également de l’arrêt de la Corte Costituzionale (Cour constitutionnelle) du 23 janvier 2018, s’opposent-ils à une réglementation nationale telle que la législation italienne en cause, qui, avec l’article 1er, paragraphe 644, sous g), de la loi no 190/2014, impose aux intermédiaires nationaux transmettant des données de jeu pour le compte d’opérateurs de paris établis dans un autre État membre de l’Union européenne, ayant notamment les caractéristiques de [Stanleybet Malta], et à titre subsidiaire aux opérateurs de paris eux-mêmes à titre solidaire de leurs intermédiaires nationaux, d’acquitter l’impôt unique [...] sur la base d’une assiette forfaitaire coïncidant avec le triple de la moyenne des collectes effectuées dans la province où est situé l’exercice ou le point de collecte, obtenue grâce aux données enregistrées par le totalisateur national pour la période d’imposition antérieure à l’exercice de référence ? »

 Sur les questions préjudicielles

 Sur les première et deuxième questions

15      Par ses première et deuxième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 56 TFUE s’oppose à une réglementation d’un État membre, qui soumet à un impôt sur les paris les CTD établis dans cet État membre et à titre solidaire et subsidiaire les opérateurs de paris, leurs mandants, établis dans un autre État membre.

16      Il convient de relever, en premier lieu, que, selon une jurisprudence constante de la Cour, les jeux de hasard sont soumis aux règles relatives à la prestation des services et, en conséquence, relèvent du champ d’application de l’article 56 TFUE, dès lors que l’un au moins des prestataires est établi dans un État membre autre que celui dans lequel le service est offert (voir, en ce sens, arrêts du 13 novembre 2003, Lindman, C‑42/02, EU:C:2003:613, point 19, ainsi que du 22 octobre 2014, Blanco et Fabretti, C‑344/13 et C‑367/13, EU:C:2014:2311, point 27). Il y a donc lieu d’examiner la présente affaire au regard de la libre prestation des services.

17      Il importe de rappeler que la libre prestation des services, prévue à l’article 56 TFUE, exige non seulement l’élimination de toute discrimination à l’égard du prestataire de services établi dans un autre État membre en raison de sa nationalité, mais également la suppression de toute restriction, même si elle s’applique indistinctement aux prestataires nationaux et à ceux des autres États membres, lorsqu’elle est de nature à prohiber, à gêner ou à rendre moins attrayantes les activités du prestataire établi dans un autre État membre où il fournit légalement des services analogues (arrêt du 22 octobre 2014, Blanco et Fabretti, C‑344/13 et C‑367/13, EU:C:2014:2311, point 26).

18      En outre, il y a lieu de faire observer que la Cour a validé, dans le secteur des jeux de hasard, le recours à un système de concessions, estimant que celui-ci peut constituer un mécanisme efficace permettant de contrôler les opérateurs actifs dans ce secteur, dans le but de prévenir l’exploitation de ces activités à des fins criminelles ou frauduleuses (arrêt du 19 décembre 2018, Stanley International Betting et Stanleybet Malta, C‑375/17, EU:C:2018:1026, point 66).

19      Afin de déterminer s’il existe une discrimination, il y a lieu de vérifier que des situations comparables ne sont pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne sont pas traitées de manière égale, à moins qu’une différenciation ne soit objectivement justifiée (arrêt du 6 juin 2019, P. M. e.a., C‑264/18, EU:C:2019:472, point 28).

20      En l’occurrence, ainsi qu’il ressort des pièces du dossier dont dispose la Cour, l’impôt unique s’attache à l’activité de collecte des paris en Italie. En vertu de l’article 1er, paragraphe 66, sous a) et b), de la loi de stabilité 2011, les redevables de cet impôt sont tous les opérateurs, pour autant qu’ils gèrent des concours de paris, indépendamment du fait qu’ils opèrent pour leur propre compte ou pour celui d’un tiers, de la circonstance qu’ils sont ou non titulaires d’une concession ou du lieu de leur siège, même situé à l’étranger.

21      Au vu de ces éléments fournis par la juridiction de renvoi, il apparaît que l’impôt unique s’applique à tous les opérateurs qui gèrent des paris qui sont collectés sur le territoire italien, sans établir de distinction en fonction du lieu d’établissement de ces opérateurs, de sorte que l’application de cet impôt à Stanleybet Malta ne saurait être considérée comme étant discriminatoire.

22      En effet, il y a lieu de relever que la législation nationale en cause au principal ne prévoit pas un régime fiscal différent selon que la prestation de services est exécutée en Italie ou dans d’autres États membres.

23      En outre, s’agissant de l’argumentation de Stanleybet Malta tirée de ce que, en application de la réglementation italienne en cause au principal, elle est soumise à une double imposition, à Malte et en Italie, il convient de relever que, en l’état actuel du développement du droit de l’Union, les États membres bénéficient, sous réserve du respect de ce droit, d’une certaine autonomie en la matière et que, partant, ils n’ont pas l’obligation d’adapter leur propre système fiscal aux différents systèmes de taxation des autres États membres, en vue, notamment, d’éliminer la double imposition découlant de l’exercice parallèle par lesdits États de leurs compétences fiscales (voir, par analogie, arrêt du 1er décembre 2011, Commission/Hongrie, C‑253/09, EU:C:2011:795, point 83).

24      Il s’ensuit que Stanleybet Malta ne subit, par rapport à un opérateur national exerçant ses activités dans les mêmes conditions que cette société, aucune restriction discriminatoire en raison de l’application qui lui est faite d’une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal. De même, ladite réglementation n’apparaît pas de nature à prohiber, à gêner ou à rendre moins attrayantes les activités d’une société telle que Stanleybet Malta dans l’État membre concerné.

25      S’agissant de Stanleyparma, celle-ci exerce, en qualité d’intermédiaire de Stanleybet Malta et en contrepartie d’une rémunération, une activité d’offre et de collecte de paris.

26      Cette société exerce notamment, au même titre que les opérateurs de paris nationaux, une activité de gestion de paris, laquelle constitue une condition requise aux fins de l’assujettissement à l’impôt unique. De ce fait, en vertu de l’article 1er, paragraphe 66, sous b), de la loi de stabilité 2011, Stanleyparma est soumise, solidairement avec Stanleybet Malta, au paiement de cet impôt.

27      En outre, il ressort de l’article 16 du décret du ministère de l’Économie et des Finances no 111, du 1er mars 2006, que les opérateurs qui disposent d’une concession pour l’organisation des paris en Italie s’acquittent aussi de l’impôt unique. Selon la juridiction de renvoi, leurs CTD ne sont toutefois pas soumis au paiement solidaire de cet impôt, contrairement à Stanleyparma.

28      À cet égard, il convient, néanmoins, de constater que, à la différence des CTD qui transmettent les données de jeux pour le compte des opérateurs de paris nationaux, Stanleyparma collecte des paris pour le compte de Stanleybet Malta, qui est établie dans un autre État membre. Elle ne se trouve pas, dès lors, au regard des objectifs de la loi de stabilité 2011, dans une situation comparable à celle des opérateurs nationaux.

29      Par conséquent, la réglementation nationale en cause au principal n’entraîne aucune restriction discriminatoire à l’égard de Stanleybet Malta et de Stanleyparma et ne porte pas atteinte, en ce qui les concerne, à la libre prestation des services.

30      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux première et deuxième questions que l’article 56 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation d’un État membre, qui soumet à un impôt sur les paris les CTD établis dans cet État membre et à titre solidaire et subsidiaire les opérateurs de paris, leurs mandants, établis dans un autre État membre, cela indépendamment du lieu du siège de ces opérateurs et de l’absence de concession pour l’organisation des paris.

 Sur la troisième question

31      Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 56 TFUE s’oppose à une réglementation nationale qui prévoit la majoration d’un impôt sur les paris, sur la base d’une assiette forfaitaire correspondant au triple de la moyenne des collectes effectuées au point de collecte situé dans un État membre, pour les CTD agissant pour compte d’opérateurs de paris établis dans un autre État membre et qui ne sont pas titulaires d’une concession, ainsi que pour les opérateurs de paris eux-mêmes.

32      Le gouvernement italien et la Commission contestent la recevabilité de troisième question, dès lors que la réponse à celle-ci n’est pas, selon eux, nécessaire à la solution du litige au principal.

33      À cet égard, selon une jurisprudence constante, le refus de la Cour de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation d’une règle de l’Union sollicitée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de manière utile aux questions qui lui sont posées (voir, en ce sens, arrêts du 9 octobre 1997, Grado et Bashir, C‑291/96, EU:C:1997:479, point 12, ainsi que du 19 novembre 2019, A. K. e.a. (Indépendance de la chambre disciplinaire de la Cour suprême), C‑585/18, C‑624/18 et C‑625/18, EU:C:2019:982, point 98).

34      En l’occurrence, il y a lieu de constater que la réglementation nationale qui résulte de la loi no 190, du 23 décembre 2014, n’est pas applicable au litige au principal, étant donné que la décision de redressement fiscal contestée dans l’affaire au principal se rapporte à l’année d’imposition 2011. Par conséquent, la troisième question, qui est dépourvue de pertinence pour la solution du litige dont la juridiction de renvoi est saisie, est irrecevable.

 Sur les dépens

35      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :

L’article 56 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation d’un État membre, qui soumet à un impôt sur les paris les centres de transmission des données établis dans cet État membre et à titre solidaire et subsidiaire les opérateurs de paris, leurs mandants, établis dans un autre État membre, cela indépendamment du lieu du siège de ces opérateurs et de l’absence de concession pour l’organisation des paris.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.

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