Landesbank Baden-Wurttemberg v CRU (Economic and Monetary Union - Banking Union - Single Resolution Mechanism for credit institutions and certain investment firms (SRM) - Judgment) French Text [2024] EUECJ T-142/22 (17 July 2024)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2024/T14222.html
Cite as: [2024] EUECJ T-142/22

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre élargie)

17 juillet 2024 (*) (1)

« Union économique et monétaire – Union bancaire – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement (MRU) – Fonds de résolution unique (FRU) – Décision du CRU sur le calcul des contributions ex ante pour 2017 – Obligation de motivation – Protection juridictionnelle effective – Égalité de traitement – Principe de proportionnalité – Marge d’appréciation du CRU – Exception d’illégalité – Marge d’appréciation de la Commission – Limitation des effets de l’arrêt dans le temps »

Dans l’affaire T‑142/22,

Landesbank Baden-Württemberg, établie à Stuttgart (Allemagne), représentée par Mes H. Berger, M. Weber et D. Schoo, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de résolution unique (CRU), représenté par MM. J. Kerlin, T. Wittenberg et D. Ceran, en qualité d’agents, assistés de Mes H.‑G. Kamann et P. Gey, avocats,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie),

composé de MM. A. Kornezov, président, G. De Baere, D. Petrlík (rapporteur), K. Kecsmár et Mme S. Kingston, juges,

greffier : Mme S. Jund, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 7 mars 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Landesbank Baden-Württemberg, demande l’annulation de la décision SRB/ES/2021/82 du Conseil de résolution unique (CRU), du 15 décembre 2021, sur le calcul des contributions ex ante pour 2017 au Fonds de résolution unique concernant Landesbank Baden-Württemberg (ci-après la « décision attaquée »).

I.      Antécédents du litige

2        La requérante est un établissement de crédit de droit public établi en Allemagne. Elle est rattachée au système de protection institutionnel (ci-après le « SPI ») de la Sparkassen-Finanzgruppe (groupe financier des caisses d’épargne, Allemagne).

3        Par l’arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU (C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601), la Cour a annulé la décision SRB/ES/2017/05 du CRU, du 11 avril 2017, sur le calcul des contributions ex ante pour 2017 au Fonds de résolution unique (FRU) (ci-après la « décision initiale »), en ce qu’elle concernait la requérante.

4        Aux fins de remédier à des vices formels identifiés dans l’arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU (C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601), le CRU a adopté la décision attaquée. Par le biais de celle-ci et conformément à l’article 70, paragraphe 2, du règlement (UE) no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2014, établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 225, p. 1), le CRU a fixé la contribution ex ante au FRU (ci-après la « contribution ex ante ») pour l’année 2017 (ci-après la « période de contribution 2017 ») de la requérante.

5        Par lettre du 5 janvier 2022, la Bundesanstalt für Finanzdienstleistungsaufsicht (BaFin, Autorité fédérale de surveillance des services financiers, Allemagne), en sa qualité d’autorité de résolution nationale (ci-après l’« ARN ») au sens de l’article 3, paragraphe 1, point 3, du règlement no 806/2014, a informé la requérante de l’adoption de la décision attaquée par le CRU et du fait que l’avis de perception émis par la Bundesanstalt für Finanzmarktstabilisierung (FMSA, Autorité fédérale de stabilisation des marchés financiers, Allemagne) le 21 avril 2017 sur le fondement de la décision initiale était maintenu dans ses effets et désormais fondé sur la décision attaquée.

II.    Décision attaquée

6        La décision attaquée comprend un corps qui est accompagné de trois annexes.

7        Le corps de la décision attaquée décrit le processus de détermination de la contribution ex ante pour la période de contribution 2017.

8        Plus particulièrement, dans la section 6 de ladite décision, le CRU a déterminé le niveau cible annuel, mentionné à l’article 4 du règlement d’exécution (UE) 2015/81 du Conseil, du 19 décembre 2014, définissant des conditions uniformes d’application du règlement no 806/2014 en ce qui concerne les contributions ex ante au Fonds de résolution unique (JO 2015, L 15, p. 1), pour la période de contribution 2017 (ci-après le « niveau cible annuel »).

9        Le CRU a expliqué qu’il avait fixé ce niveau cible annuel à un huitième de 1,05 % du montant moyen des dépôts couverts, calculé trimestriellement, de l’ensemble des établissements en 2016 (ci-après le « montant moyen des dépôts couverts en 2016 »), tel qu’il avait été obtenu à partir des données communiquées par les systèmes de garantie des dépôts conformément à l’article 16 du règlement délégué (UE) 2015/63 de la Commission, du 21 octobre 2014, complétant la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les contributions ex ante aux dispositifs de financement pour la résolution (JO 2015, L 11, p. 44).

10      Dans la section 7 de la décision attaquée, le CRU a décrit la méthode à suivre pour le calcul des contributions ex ante pour la période de contribution 2017. À cet égard, il a précisé, au considérant 74 de ladite décision, que, pour cette période, 40 % des contributions ex ante avaient été calculées sur la « base nationale », c’est-à-dire sur la base des données communiquées par des établissements agréés sur le territoire de l’État membre participant concerné (ci-après la « base nationale »), conformément à l’article 103 de la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 190), et à l’article 4 du règlement délégué 2015/63. Le reste des contributions ex ante (à savoir 60 %) a été calculé sur la « base de l’union bancaire », c’est-à-dire sur la base des données communiquées par l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participant au mécanisme de résolution unique (MRU) (ci-après la « base de l’union » et les « États membres participants »), conformément aux articles 69 et 70 du règlement no 806/2014 et à l’article 4 du règlement d’exécution 2015/81.

11      Dans cette même section 7 de la décision attaquée, le CRU a également expliqué qu’il existait, en substance, deux catégories d’établissements assujettis aux contributions ex ante. La première catégorie comprend les établissements qui doivent verser une contribution forfaitaire eu égard à leurs caractéristiques particulières, telles que leur taille ou la nature de leurs activités. Le calcul de la contribution ex ante de ces établissements est régi par les articles 10 et 11 du règlement délégué 2015/63.

12      Les établissements relevant de la seconde catégorie doivent verser une contribution ex ante ajustée à leur profil de risque, que le CRU a fixée en suivant les phases principales suivantes.

13      Dans la première phase, le CRU a calculé, conformément à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, sous a), du règlement no 806/2014, la contribution annuelle de base de chaque établissement, qui est proportionnelle au montant du passif de l’établissement concerné, hors fonds propres et dépôts couverts (ci-après le « passif net »), rapporté au passif net de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants. Conformément à l’article 5, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, le CRU a déduit certains types de passifs du passif net de l’établissement à prendre en compte pour la détermination de cette contribution.

14      Dans la seconde phase du calcul de la contribution ex ante, le CRU a procédé à un ajustement de la contribution annuelle de base en fonction du profil de risque de l’établissement concerné, conformément à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, sous b), du règlement no 806/2014. Il a évalué ce profil de risque sur la base des quatre piliers de risque mentionnés à l’article 6 du règlement délégué 2015/63, qui sont composés d’indicateurs de risque. Afin de classer les établissements selon leur niveau de risque, tout d’abord, le CRU a établi – pour chaque indicateur de risque appliqué pour la période de contribution 2017 – des bins (paniers) dans lesquels ont été regroupés les établissements, conformément à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 3, de ce règlement délégué. Les établissements appartenant au même bin se sont vu attribuer une valeur commune pour l’indicateur de risque donné, dite « valeur discrétisée ». En combinant les valeurs discrétisées pour chaque indicateur de risque, le CRU a calculé le « multiplicateur d’ajustement en fonction du profil de risque » de l’établissement concerné (ci-après le « multiplicateur d’ajustement »). En multipliant la contribution annuelle de base de cet établissement par le multiplicateur d’ajustement de celui-ci, le CRU a obtenu la « contribution annuelle de base ajustée en fonction du profil de risque » dudit établissement.

15      Ensuite, le CRU a additionné toutes les contributions annuelles de base ajustées en fonction des profils de risque pour obtenir un « dénominateur commun » utilisé pour calculer la part du niveau cible annuel que chaque établissement devait verser.

16      Enfin, le CRU a calculé la contribution ex ante de chaque établissement en répartissant le niveau cible annuel entre tous les établissements sur la base du ratio existant entre la contribution annuelle de base ajustée en fonction du profil de risque, d’une part, et le dénominateur commun, d’autre part.

17      L’annexe I de la décision attaquée contient la fiche individuelle de la requérante, qui comporte les résultats du calcul de sa contribution ex ante (ci-après la « fiche individuelle »). Cette fiche expose le montant de la contribution annuelle de base de la requérante ainsi que la valeur de son multiplicateur d’ajustement, tant sur la base de l’union que sur la base nationale, en mentionnant, pour chaque indicateur de risque, le numéro du bin auquel la requérante a été assignée. En outre, la fiche individuelle expose des données qui sont utilisées pour le calcul de la contribution ex ante de la requérante et que le CRU a déterminées en additionnant ou en combinant les données individuelles de tous les établissements qui sont soumis au versement des contributions ex ante. Enfin, cette fiche comporte les données déclarées par la requérante dans le formulaire de déclaration et utilisées dans le calcul de sa contribution ex ante.

18      L’annexe II de la décision attaquée comprend des données statistiques relatives au calcul des contributions ex ante pour chaque État membre participant, sous une forme résumée et agrégée. Cette annexe précise, notamment, le montant global des contributions ex ante à verser par les établissements concernés pour chacun de ces États membres. Par ailleurs, ladite annexe énumère, pour chaque indicateur de risque, le nombre de bins, le nombre d’établissements appartenant à chacun des bins ainsi que les valeurs minimales et maximales de ces bins. Dans le cas des bins relatifs à la base nationale, ces valeurs sont, pour des raisons de confidentialité, diminuées ou augmentées d’un montant aléatoire, la répartition originale des établissements étant maintenue.

19      L’annexe III de la décision attaquée, intitulée « Évaluation des commentaires soumis lors de la consultation sur la décision provisoire portant sur les contributions ex ante au Fonds de résolution unique pour 2017 de Landesbank Baden-Württemberg », examine les observations présentées par la requérante lors de la procédure de consultation menée par le CRU entre les 28 octobre et 26 novembre 2021 en vue de l’adoption de la décision attaquée.

III. Conclusions des parties

20      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, y compris ses annexes ;

–        à titre subsidiaire, constater que la décision attaquée est juridiquement inexistante, en ce qu’elle la concerne ;

–        condamner le CRU aux dépens.

21      Le CRU conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens ;

–        à titre subsidiaire, en cas d’annulation de la décision attaquée, maintenir les effets de la décision attaquée jusqu’à son remplacement ou, à tout le moins, pendant une période de six mois à compter de la date à laquelle le jugement sera définitif.

IV.    En droit

22      À l’appui de son recours, la requérante soulevait initialement neuf moyens, tirés :

–        le premier, d’une violation de l’article 81, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, lu conjointement avec l’article 3 du règlement no 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté Économique Européenne (JO 1958, 17, p. 385), ainsi que du principe d’égalité de traitement, garanti par l’article 20 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») ;

–        le deuxième, d’une violation de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE et de l’article 41, paragraphe 1 et paragraphe 2, sous c), de la Charte, en raison de l’insuffisance de motivation de la décision attaquée ;

–        le troisième, d’une violation du droit à une protection juridictionnelle effective garanti par l’article 47, paragraphe 1, de la Charte ;

–        le quatrième, d’une exception d’illégalité de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63, fondée sur une violation de l’article 103, paragraphe 7, sous h), de la directive 2014/59, de l’article 113, paragraphe 7, du règlement (UE) no 575/2013 du Parlement et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement et modifiant le règlement (UE) no 648/2012 (JO 2013, L 176, p. 1), du « principe du calcul des contributions adapté au risque », du principe de précision des normes fondé sur l’État de droit ainsi que de l’obligation de prise en compte intégrale des faits, au motif que cette disposition ne saurait pondérer l’indicateur de risque « appartenance à un SPI » (ci-après l’« indicateur de risque SPI »), en prenant en compte l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » ,

–        le cinquième, d’une violation de l’article 113, paragraphe 7, du règlement no 575/2013, de l’article 103, paragraphe 7, sous h), de la directive 2014/59, des articles 16 et 20 de la Charte, du principe de proportionnalité et du principe de bonne administration ;

–        le sixième, d’une exception d’illégalité des articles 6, 7 et 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63, fondée sur une violation du « principe du calcul des contributions adapté au risque », des articles 16 et 20 de la Charte, du principe de proportionnalité et de l’obligation de prise en compte de l’ensemble des faits ;

–        le septième, d’une violation des articles 16 et 52 de la Charte, en raison du caractère inapproprié de l’adaptation de la contribution ex ante de la requérante à son profil de risque ;

–        le huitième, d’une violation des articles 16, 20, 41 et 52 de la Charte, au motif que la décision attaquée serait entachée de nombreuses erreurs manifestes d’appréciation ;

–        le neuvième, d’une exception d’illégalité de l’article 20, paragraphe 1, première et deuxième phrases, du règlement délégué 2015/63, fondée sur une violation de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 et du « principe du calcul des contributions adapté au risque ».

23      En outre, la requérante a soulevé, dans son mémoire en réplique, un dixième moyen, tiré, d’une part, d’une violation de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 ainsi que des articles 16 et 17 de la Charte et, d’autre part, d’une exception d’illégalité des articles 69 et 70 du règlement no 806/2014, fondée sur une violation du « principe du calcul des contributions adapté au risque », du principe de proportionnalité, des articles 16 et 17 de la Charte, des exigences de l’État de droit et des principes issus de l’arrêt du 13 juin 1958, Meroni/Haute Autorité (10/56, EU:C:1958:8).

24      Il convient d’examiner d’abord les moyens par lesquels la requérante excipe de l’illégalité des articles 6, 7, 9 et 20 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63, puis les moyens portant directement sur la légalité de la décision attaquée.

A.      Sur les exceptions d’illégalité des articles 6, 7, 9 et 20 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63

1.      Sur le quatrième moyen, tiré d’une exception d’illégalité de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63, en ce qu’il violerait plusieurs normes supérieures 

25      Le quatrième moyen s’articule autour de quatre branches.

a)      Sur la première branche, portant sur l’incompatibilité de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 avec l’article 103, paragraphe 7, sous h), de la directive 2014/59 et l’article 113, paragraphe 7, du règlement no 575/2013

26      La requérante soutient que l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 est incompatible avec l’article 103, paragraphe 7, sous h), de la directive 2014/59 et l’article 113, paragraphe 7, du règlement no 575/2013 dans la mesure où il prévoit une pondération relative à l’indicateur de risque SPI qui différencie les établissements appartenant au même SPI, puisque, lors de l’application de cette pondération, le CRU doit tenir compte de la pondération relative à l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité ».

27      En particulier, l’effet de protection d’un SPI existerait, conformément à l’article 113, paragraphe 7, du règlement no 575/2013, de manière étendue et égale pour tous les établissements membres de ce système. De plus, il existerait une garantie que les fonds du SPI seront employés dans leur totalité avant qu’un soutien financier exceptionnel à partir de ressources publiques puisse être sollicité, conformément à l’article 113, paragraphe 7, sous b), du règlement no 575/2013.

28      Dans ces conditions, une différenciation des établissements appartenant au même SPI sur la base de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité », en vertu de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63, serait en contradiction avec le traitement homogène et cohérent de tous les membres d’un tel SPI qui serait imposé par l’article 103, paragraphe 7, sous h), de la directive 2014/59 et l’article 113, paragraphe 7, du règlement no 575/2013.

29      Le CRU conteste cette argumentation.

30      Aux termes de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63, lorsque le CRU applique l’indicateur de risque SPI, il tient compte de la pondération relative de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité ».

31      Il s’ensuit que, lorsque plusieurs établissements font partie du même SPI, les établissements qui se voient attribuer une meilleure pondération relative à l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » par rapport à d’autres membres de ce SPI peuvent se voir attribuer une pondération plus favorable dans le cadre de l’indicateur de risque SPI par rapport à ces autres membres.

32      Dans ce contexte, il ressort de l’article 103, paragraphe 7, sous h), de la directive 2014/59 que la Commission est habilitée à adopter des actes délégués pour préciser la notion d’« adaptation des contributions [annuelles de base] en fonction du profil de risque des établissements », « en tenant compte » du fait que l’établissement appartient à un SPI.

33      Or, rien dans l’article 103, paragraphe 7, sous h), de la directive 2014/59 ou dans le surplus de cet article ne précise de quelle manière la Commission doit tenir compte de cette appartenance à un SPI. Ainsi, il n’est pas prévu que la Commission doit attribuer la même pondération à tous les établissements qui font partie du même SPI.

34      En outre, il convient de rappeler que, dans le contexte d’un pouvoir délégué au sens de l’article 290 TFUE, la Commission dispose, dans le cadre de l’exercice des compétences qui lui sont conférées, d’un large pouvoir d’appréciation lorsqu’elle est appelée, notamment, à effectuer des appréciations et des évaluations complexes (voir, en ce sens, arrêt du 11 mai 2017, Dyson/Commission, C‑44/16 P, EU:C:2017:357, point 53 et jurisprudence citée).

35      Tel est le cas en ce qui concerne la fixation des critères d’adaptation des contributions ex ante au profil de risque en vertu de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, y compris la fixation du critère qui concerne l’appartenance des établissements à un SPI sur le fondement du paragraphe 7, sous h), de l’article 103 de cette même directive.

36      À cet égard, il convient de rappeler que la nature spécifique des contributions ex ante consiste, ainsi qu’il ressort des considérants 105 à 107 de la directive 2014/59 et du considérant 41 du règlement no 806/2014, à garantir, dans une logique d’ordre assurantiel, que le secteur financier procure des ressources financières suffisantes au MRU pour que ce dernier puisse remplir ses fonctions, tout en encourageant l’adoption, par les établissements concernés, de modes de fonctionnement moins risqués (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 113).

37      Dans ce contexte, et ainsi qu’il ressort du considérant 114 de la directive 2014/59, le législateur de l’Union a chargé la Commission de préciser, par acte délégué, la façon d’ajuster les contributions des établissements aux dispositifs de financement pour la résolution en proportion de leur profil de risque.

38      Dans cette même optique, le considérant 107 de cette directive précise que, pour assurer un calcul équitable des contributions ex ante aux dispositifs de financement nationaux et encourager l’adoption de modes de fonctionnement moins risqués, il convient que ces contributions soient fonction du risque de crédit, de liquidité et de marché encouru par les établissements.

39      Il découle de ce qui précède que la Commission devait élaborer des règles d’ajustement des contributions ex ante en fonction du profil de risque des établissements en poursuivant deux objectifs liés, à savoir, d’une part, assurer la prise en compte des différents risques que génèrent les activités des établissements, bancaires ou plus largement financières, et, d’autre part, encourager ces mêmes établissements à suivre des modes de fonctionnement moins risqués.

40      Or, ainsi qu’il ressort des documents afférents à l’adoption du règlement délégué 2015/63, notamment les documents « JRC technical work supporting Commission second level legislation on risk based contributions to the (single) resolution fund » [Étude technique du JRC au soutien de la législation de deuxième niveau de la Commission sur les contributions fondées sur les risques au fonds de résolution (unique), ci-après l’« étude technique du JRC »] et « Commission Staff Working Document: estimates of the application of the proposed methodology for the calculation of contributions to resolution financing arrangements » (Document de travail des services de la Commission : estimations de l’application de la méthode proposée pour le calcul des contributions aux dispositifs de financement des résolutions), l’élaboration de telles règles impliquait des appréciations et des évaluations complexes de la part de la Commission dans la mesure où celle-ci devait examiner les différents éléments au vu desquels les divers types de risque étaient appréhendés dans les secteurs bancaire et financier.

41      Dans ces conditions, s’agissant de la méthode d’adaptation des contributions annuelles de base au titre de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 et, plus particulièrement, de la fixation du critère d’adaptation des contributions ex ante au profil de risque en vertu du paragraphe 7, sous h), de l’article 103 de cette même directive, le contrôle du juge de l’Union doit se limiter à examiner si l’exercice du pouvoir d’appréciation octroyé à la Commission n’est pas entaché d’une erreur manifeste ou d’un détournement de pouvoir ou encore si celle-ci n’a pas manifestement dépassé les limites de ce pouvoir (arrêt du 21 juillet 2011, Etimine, C‑15/10, EU:C:2011:504, point 60).

42      À cet égard, tout d’abord, le CRU a expliqué, sans être contredit sur ce point, que les membres d’un SPI, tel que celui auquel appartient la requérante, ne disposaient pas du droit inconditionnel de recevoir de la part d’un tel SPI un soutien qui couvrirait tous leurs engagements, mais que le SPI disposait d’une certaine marge d’appréciation pour décider s’il convenait ou non de soutenir l’un de ses membres.

43      Ensuite, le CRU a indiqué que la défaillance d’un établissement avec un large et complexe bilan pourrait entièrement épuiser les fonds d’un tel SPI. Or, la requérante n’a pas apporté d’éléments pour contester cette allégation.

44      En outre, la requérante n’a soumis au Tribunal aucun élément concret qui viserait à remettre en cause le fait que l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » permet d’apprécier si un établissement dispose d’un large et complexe bilan.

45      Dans ces conditions, la requérante n’a pas démontré que l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 était entaché d’une erreur manifeste ou d’un détournement de pouvoir ou qu’il allait manifestement au-delà des limites du pouvoir d’appréciation conféré à la Commission par l’article 103, paragraphe 7, sous h), de la directive 2014/59.

46      En ce qui concerne, enfin, l’exception d’illégalité tirée d’une incompatibilité de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 avec l’article 113, paragraphe 7, du règlement no 575/2013, il convient de constater, d’abord, que cette dernière disposition définit les conditions de l’agrément des SPI à des fins prudentielles, et non le calcul des contributions ex ante.

47      Certes, en vertu de l’article 2, paragraphe 1, point 8, de la directive 2014/59, le CRU peut uniquement tenir compte des SPI qui ont été agréés en conformité avec l’article 113, paragraphe 7, du règlement no 575/2013. Cependant, rien dans le libellé de l’article 113, paragraphe 7, de ce règlement n’interdit d’opérer une différenciation entre les établissements qui sont membres du même SPI aux fins du calcul des contributions ex ante.

48      En outre, bien que l’article 113, paragraphe 7, sous b), du règlement no 575/2013 prévoie que, pour être reconnu à des fins prudentielles, le SPI doit être à même d’accorder le soutien nécessaire à ses membres, conformément aux obligations lui incombant, à partir de fonds aisément accessibles, cette disposition ne va pas jusqu’à exiger qu’un SPI dispose des ressources suffisantes pour éviter la résolution de tous ses membres, y compris tous les grands établissements.

49      Cette conclusion n’est pas infirmée par l’article 5 de l’orientation (UE) 2016/1994 de la Banque centrale européenne (BCE), du 4 novembre 2016, concernant l’approche retenue pour la reconnaissance des [SPI] à des fins prudentielles par les autorités compétentes nationales conformément au règlement no 575/2013 (JO 2016, L 306, p. 37), invoqué par la requérante. Cette disposition, qui contient des orientations pour la mise en œuvre de l’article 113, paragraphe 7, sous b), du règlement no 575/2013, ne prévoit pas non plus qu’un SPI doit avoir des ressources suffisantes pour éviter la résolution de tous ses membres.

50      Eu égard à ce qui précède, la première branche du quatrième moyen doit être rejetée.

b)      Sur la deuxième branche, portant sur l’incompatibilité de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 avec « le principe du calcul des contributions adapté au risque » et le principe d’égalité de traitement

51      La deuxième branche du quatrième moyen s’articule, en substance, autour de deux griefs.

1)      Sur le premier grief, tiré d’une violation du « principe du calcul des contributions adapté au risque »

52      La requérante fait valoir que l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 viole le « principe du calcul des contributions adapté au risque » qui découlerait du principe de proportionnalité consacré aux articles 16, 17 et 52 de la Charte, de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 et de l’article 103, paragraphes 2 et 7, de la directive 2014/59.

53      Eu égard à ce principe, la manière dont l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » témoignerait du risque de résolution de la requérante conformément à l’article 6, paragraphe 5, deuxième alinéa, du règlement délégué 2015/63 n’apparaîtrait pas clairement et précisément.

54      En outre, il n’existerait pas de lien objectif suffisant entre l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité », figurant à l’article 7, paragraphe 4, premier alinéa, sous a), du règlement délégué 2015/63, et celui de l’appartenance à un SPI, prévu à l’article 7, paragraphe 4, premier alinéa, sous b), du même règlement délégué, pour justifier une pondération relative de ce dernier indicateur de risque.

55      Enfin, en mettant en corrélation ces deux indicateurs de risque, le règlement délégué 2015/63 instaurerait un double comptage du premier indicateur de risque, qui aurait déjà été pris en compte dans le calcul de la contribution ex ante en vertu de l’article 6, paragraphe 5, sous a), dudit règlement délégué.

56      Le CRU conteste cette argumentation.

57      Sans qu’il soit nécessaire d’examiner si la directive 2014/59 ou une autre règle du droit de l’Union consacre un « principe du calcul des contributions adapté au risque », le premier grief de la deuxième branche du quatrième moyen de la requérante doit être compris en ce sens qu’elle soutient, en substance, que l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation, puisqu’il empêche le CRU d’adapter, d’une manière appropriée, les contributions annuelles de base au profil de risque réel des établissements.

58      À cet égard, il ressort tout d’abord des points 36 à 40 ci-dessus que la Commission jouit d’une large marge d’appréciation en ce qui concerne la mise en œuvre de l’article 103, paragraphe 7, sous h), de la directive 2014/59.

59      Ensuite, la requérante n’a soumis au Tribunal aucun élément concret visant à contester l’affirmation du CRU selon laquelle l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » constituait un critère objectif qui permettait, dans le cadre de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63, d’évaluer la probabilité qu’un établissement sollicite d’un SPI un soutien que ce dernier ne pourrait pas octroyer, de sorte que cet établissement risquerait de faire l’objet d’une résolution. Ainsi, rien n’indique que l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 ne permet pas d’adapter la contribution ex ante au profil de risque réel de l’établissement concerné.

60      Enfin, contrairement à ce que soutient la requérante, la méthode prévue à l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 n’aboutit pas à un double comptage de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité ».

61      En effet, d’une part, l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » s’applique, au titre de l’article 6, paragraphe 5, sous a), du règlement délégué 2015/63, à tous les établissements dont la contribution ex ante est ajustée en fonction de leur profil de risque. En revanche, aux fins de l’application de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, de ce règlement délégué, ledit indicateur de risque s’applique uniquement à ceux parmi ces établissements qui appartiennent à un SPI. D’autre part, au titre de l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63, l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » a pour objet d’évaluer les risques de l’établissement en question, en raison, notamment, des actifs qu’il détient sur son bilan, de son modèle économique et de sa structure organisationnelle. En revanche, lorsque cet indicateur de risque est appliqué dans le cadre de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, de ce règlement délégué, il est utilisé pour pondérer l’indicateur de risque SPI et vise à évaluer les risques qu’un établissement appartenant à un SPI présente pour la capacité dudit SPI à intervenir au soutien de ses membres. En effet, ainsi qu’il découle des considérations énoncées aux points 71 et 72 ci-dessous, les risques évalués par l’application dudit indicateur de risque peuvent varier d’un établissement à l’autre et peuvent même être à tel point élevés qu’un SPI peut ne pas être en mesure d’absorber ces risques en cas de défaillance d’un établissement adhérant.

62      Dans ces conditions, l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 n’est pas entaché d’une erreur manifeste d’appréciation lorsqu’il prévoit que l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » est pris en compte dans le cadre du processus de détermination de l’indicateur de risque SPI.

63      Eu égard à ce qui précède, le premier grief de la deuxième branche du quatrième moyen doit être rejeté.

2)      Sur le second grief, portant sur une méconnaissance du principe d’égalité de traitement

64      La requérante fait valoir qu’il est dans la nature même d’un SPI de protéger tous ses membres, indépendamment de leur situation de risque concrète, de manière à ce qu’aucun établissement ne puisse être mis individuellement en résolution tant que le SPI existe et remplit sa fonction. L’affiliation à un SPI serait ainsi une circonstance qui rend tous les établissements concernés comparables.

65      Or, en permettant des distinctions entre ces établissements, l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 violerait le principe d’égalité de traitement tel qu’il est consacré par l’article 20 de la Charte. En effet, il n’existerait aucun critère objectif qui pourrait justifier cette différence de traitement. Le critère prévu à l’article 6, paragraphe 5, second alinéa, du règlement délégué 2015/63, à savoir « la probabilité que l’établissement concerné soit mis en résolution », n’aurait pas de lien objectif avec le critère effectivement appliqué par l’article 7, paragraphe 4, de ce règlement délégué pour pondérer l’indicateur de risque SPI, à savoir l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité ».

66      Le CRU conteste cette argumentation.

67      L’article 20 de la Charte consacre le principe d’égalité de traitement, lequel exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (arrêt du 3 février 2021, Fussl Modestraße Mayr, C‑555/19, EU:C:2021:89, point 95).

68      À cet égard, tout d’abord, il y a lieu d’examiner si un établissement appartenant à un SPI, tel que la requérante, se trouve dans une situation comparable à celle des autres établissements appartenant à ce même SPI.

69      Selon une jurisprudence constante, le caractère comparable de situations différentes s’apprécie eu égard à l’ensemble des éléments qui les caractérisent. Ces éléments doivent, notamment, être déterminés et appréciés à la lumière de l’objet et du but de l’acte qui institue la distinction en cause. Doivent, en outre, être pris en considération les principes et les objectifs du domaine dont relève cet acte (voir arrêt du 3 février 2021, Fussl Modestraße Mayr, C‑555/19, EU:C:2021:89, point 99 et jurisprudence citée).

70      Quant aux principes et aux objectifs du domaine dont relève le règlement délégué 2015/63, il convient de rappeler que la nature spécifique des contributions ex ante consiste, ainsi qu’il ressort des considérants 105 à 107 de la directive 2014/59 et du considérant 41 du règlement no 806/2014, à garantir, dans une logique d’ordre assurantiel, que le secteur financier procure des ressources financières suffisantes au MRU pour qu’il puisse remplir ses fonctions, tout en encourageant l’adoption, par les établissements concernés, de modes de fonctionnement moins risqués (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 113).

71      Eu égard à ces principes et à ces objectifs, il convient de relever que, contrairement à ce que soutient la requérante, tous les établissements appartenant à un SPI ne se trouvent pas nécessairement et du seul fait de cette appartenance dans une situation comparable. En effet, ainsi que l’a fait observer le CRU, sans être contredit par la requérante, les membres d’un SPI, tel que celui auquel appartient la requérante, ne disposent pas du droit inconditionnel de recevoir un soutien de la part du SPI qui couvrirait tous leurs engagements, le SPI disposant d’une certaine marge d’appréciation pour décider s’il soutiendra un membre.

72      Ensuite, le CRU a indiqué que la défaillance d’un établissement avec un bilan large et complexe pourrait entièrement épuiser les fonds d’un SPI, à la différence de la défaillance d’établissements avec des bilans plus réduits et simples. Or, la requérante n’a pas non plus apporté d’éléments pour contester cette allégation.

73      Enfin, comme il ressort du point 59 ci-dessus, l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » constitue un critère objectif pour évaluer quels établissements appartenant à un SPI risquent de demander à ce dernier un soutien qu’il ne pourrait pas octroyer. Cet indicateur constitue donc un critère objectif pour évaluer quels établissements se trouvent, s’agissant d’un tel risque, dans une situation comparable. Il en va d’autant plus ainsi que ledit critère s’avère cohérent avec l’un des objectifs principaux du MRU, à savoir encourager les établissements à adopter des modes de fonctionnement moins risqués.

74      De ce fait, le second grief de la deuxième branche du quatrième moyen doit être rejeté, dès lors que la requérante n’est pas fondée à soutenir que tous les établissements d’un même SPI se trouvent dans une situation comparable.

c)      Sur la troisième branche, portant sur l’incompatibilité de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 avec le principe de sécurité juridique

75      La requérante soutient que l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 ne satisfait pas aux exigences imposées par le principe de sécurité juridique. En particulier, cette disposition n’expliquerait pas clairement comment le CRU doit tenir compte de la « pondération relative de l’indicateur [“activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité”] ». La norme serait à ce point indéterminée que le CRU aurait pu classer les établissements également dans deux bins ou dans plus de trois bins.

76      En outre, ladite disposition laisserait au CRU la liberté de choisir les facteurs qu’il juge appropriés pour répartir les établissements dans différents bins, de sorte qu’un comportement arbitraire ne pourrait pas être exclu.

77      Le CRU conteste cette argumentation.

78      En ce qui concerne, premièrement, l’examen du caractère clair et dépourvu d’ambiguïté de l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63, il convient de relever que, selon la jurisprudence, le principe de sécurité juridique exige, d’une part, que les règles de droit soient claires et précises et, d’autre part, que leur application soit prévisible pour les justiciables, en particulier lorsqu’elles peuvent avoir des conséquences défavorables. Ledit principe exige, notamment, qu’une réglementation permette aux intéressés de connaître avec exactitude l’étendue des obligations qu’elle leur impose et que ces derniers puissent connaître sans ambiguïté leurs droits et leurs obligations et prendre leurs dispositions en conséquence (arrêts du 29 avril 2021, Banco de Portugal e.a., C‑504/19, EU:C:2021:335, point 51, et du 16 février 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C‑157/21, EU:C:2022:98, point 319).

79      Pour autant, ces exigences ne sauraient être comprises comme s’opposant à ce qu’une institution de l’Union, dans le cadre d’une norme qu’elle adopte, emploie une notion juridique abstraite ni comme imposant qu’une telle norme abstraite mentionne les différentes hypothèses concrètes dans lesquelles elle est susceptible de s’appliquer, dans la mesure où toutes ces hypothèses ne peuvent pas être déterminées à l’avance par ladite institution (voir, par analogie, arrêts du 20 juillet 2017, Marco Tronchetti Provera e.a., C‑206/16, EU:C:2017:572, points 39 et 40, et du 16 février 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C‑157/21, EU:C:2022:98, point 320).

80      En conséquence, une disposition d’un acte de l’Union ne viole le principe de sécurité juridique, en raison de son manque de clarté, que si elle présente une ambiguïté telle qu’elle ferait obstacle à ce que les justiciables puissent lever avec une certitude suffisante d’éventuels doutes sur la portée ou le sens de cette disposition (voir, en ce sens, arrêts du 14 avril 2005, Belgique/Commission, C‑110/03, EU:C:2005:223, point 31, et du 22 mai 2007, Mebrom/Commission, T‑216/05, EU:T:2007:148, point 108).

81      Or, au regard de ces considérations, il ressort avec suffisamment de clarté de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 que, dans le cadre de l’indicateur de risque SPI, le CRU est tenu d’assigner les établissements à des bins en appliquant une pondération qui tient compte des sous-indicateurs de risque composant l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité ».

82      À cet égard, la requérante ne démontre pas que les notions utilisées par l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 sont d’une ambiguïté telle qu’elle ne peut pas lever avec une certitude suffisante d’éventuels doutes sur leur portée ou leur sens.

83      S’agissant, deuxièmement, des incidences qu’aurait l’octroi d’une marge d’appréciation au CRU par l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 sur le respect par cette disposition du principe de sécurité juridique, il y a lieu de relever ce qui suit.

84      Le fait qu’un acte de l’Union confère un pouvoir d’appréciation aux autorités chargées de sa mise en œuvre ne méconnaît pas en soi l’exigence de prévisibilité, à la condition que l’étendue et les modalités d’exercice d’un tel pouvoir soient définies avec une netteté suffisante, eu égard au but légitime en jeu, pour fournir une protection adéquate contre l’arbitraire (voir arrêt du 16 février 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C‑157/21, EU:C:2022:98, point 321 et jurisprudence citée).

85      À cet égard, l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 confère un pouvoir d’appréciation au CRU.

86      En effet, bien que cette disposition indique de façon claire que, lors de l’application de l’indicateur de risque SPI, le CRU doit tenir compte de la pondération relative de l’indicateur « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité », elle ne précise pas de quelle manière le CRU doit prendre en considération ce dernier indicateur.

87      Il en va de même en ce qui concerne l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63 qui, en ce qu’il porte sur la détermination de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité », est déterminant pour définir la portée de l’article 7, paragraphe 4, de ce même règlement délégué. En effet, si l’article 6, paragraphe 6, dudit règlement délégué expose les aspects que le CRU est tenu de prendre en considération pour déterminer cet indicateur de risque, il ne précise pas de quelle manière il doit en tenir compte.

88      Sur ce point, il convient de relever, d’emblée, que le pilier de risque mentionné à l’article 6, paragraphe 1, sous d), du règlement délégué 2015/63, dénommé « indicateurs de risque supplémentaires à déterminer par l’autorité de résolution » (ci-après le « pilier de risque IV »), se compose, conformément à l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, de ce même règlement délégué, de trois indicateurs de risque, dont le premier est intitulé « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité ».

89      Selon l’article 6, paragraphe 5, deuxième alinéa, du règlement délégué 2015/63, le CRU doit tenir compte, lorsqu’il détermine, notamment, l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité », « de la probabilité que l’établissement concerné soit mis en résolution et de la probabilité consécutive que le dispositif de financement pour la résolution soit utilisé à cette fin ».

90      Il ressort du libellé de l’article 6, paragraphe 5, deuxième alinéa, du règlement délégué 2015/63 que cette disposition octroie une marge d’appréciation au CRU s’agissant de la façon dont celui-ci doit « tenir compte », aux fins, notamment, de la détermination de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité », « de la probabilité que l’établissement concerné soit mis en résolution et de la probabilité consécutive que le dispositif de financement pour la résolution soit utilisé à cette fin », car les critères indiqués dans ladite disposition doivent être précisés par le CRU pour pouvoir être appliqués à un cas particulier.

91      Par ailleurs, l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63 prévoit plusieurs éléments que le CRU doit prendre en compte lors de la détermination de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité », dont certains peuvent conduire à augmenter le profil de risque de l’établissement concerné et d’autres à le diminuer.

92      Ainsi, les éléments pouvant entraîner une augmentation de ce profil de risque sont au nombre de quatre, à savoir, premièrement, « l’importance des activités de négociation par rapport à la taille du bilan, au niveau des fonds propres, au degré de risque des expositions et au modèle économique global de l’établissement », deuxièmement, « l’importance des expositions hors bilan par rapport à la taille du bilan, au niveau des fonds propres et au degré de risque des expositions », troisièmement, « l’importance du montant des instruments dérivés par rapport à la taille du bilan, au niveau des fonds propres, au degré de risque des expositions et au modèle économique global de l’établissement » et, quatrièmement, « la mesure dans laquelle […] le modèle économique et la structure organisationnelle de l’établissement sont jugés complexes ».

93      Les éléments pouvant entraîner une diminution dudit profil de risque sont au nombre de deux, à savoir « le montant relatif des instruments dérivés qui sont compensés par une contrepartie centrale » et « la mesure dans laquelle […] l’établissement peut faire l’objet d’une résolution rapide et sans obstacles juridiques ».

94      Il résulte du libellé de l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63 que cette disposition octroie au CRU une marge d’appréciation s’agissant de l’« importance » que le CRU doit attacher aux « activités de négociation », aux « expositions hors bilan » et au « montant des instruments dérivés » et de l’articulation entre les différents éléments mentionnés dans cette disposition.

95      Ainsi, s’il ressort de l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63 que, selon le premier sous-indicateur de risque mentionné par cette disposition, il convient de comparer l’importance des « activités de négociation » par rapport à la taille du bilan, au niveau des fonds propres, au degré de risque des expositions et au modèle économique global de l’établissement, ladite disposition ne contient pas de précisions concernant la mise en œuvre concrète de cette comparaison.

96      Il en va de même en ce qui concerne les deuxième et troisième sous-indicateurs de risque prévus à l’article 6, paragraphe 6, sous a), ii) et iii), du règlement délégué 2015/63.

97      Dans ces conditions, il convient d’examiner si l’article 7, paragraphe 4, et l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63 peuvent être considérés, conformément à la jurisprudence citée au point 84 ci-dessus, comme des dispositions qui définissent avec une netteté suffisante l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir d’appréciation conféré au CRU, eu égard au but légitime en jeu, de sorte qu’elles fournissent une protection adéquate contre l’arbitraire et que les justiciables peuvent lever avec une certitude suffisante d’éventuels doutes sur la portée ou le sens desdites dispositions.

98      Lorsqu’une disposition confère aux institutions ou aux organes de l’Union un pouvoir d’imposer des charges pécuniaires, il convient de déterminer au regard de tous les éléments pertinents si elle définit avec une netteté suffisante l’étendue et les modalités d’exercice d’un tel pouvoir, afin de permettre aux justiciables d’anticiper les conditions dans lesquelles une telle charge sera imposée (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 16 février 2022, Pologne/Parlement et Conseil, C‑157/21, EU:C:2022:98, points 319 à 321).

99      En particulier, il convient d’évaluer si un opérateur avisé peut, en recourant au besoin aux services d’un conseil juridique et économique, prévoir de manière suffisamment précise la méthode de calcul et l’ordre de grandeur de telles charges, étant entendu que le fait que cet opérateur ne puisse, à l’avance, connaître avec précision le niveau desdites charges que l’institution ou l’organe de l’Union imposera dans chaque espèce ne saurait constituer une violation du principe de sécurité juridique (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 17 juin 2010, Lafarge/Commission, C‑413/08 P, EU:C:2010:346, point 95, et du 18 juillet 2013, Schindler Holding e.a./Commission, C‑501/11 P, EU:C:2013:522, point 58 et jurisprudence citée).

100    À cet égard, il convient, notamment, d’apprécier si l’institution ou l’organe de l’Union sont guidés dans le cadre de l’exercice de leur pouvoir d’appréciation par certaines indications objectives qui permettent aux justiciables d’anticiper de manière suffisamment précise la méthode de calcul et l’ordre de grandeur des charges à imposer. Parmi ces indices figurent, notamment, les règles de conduite que l’institution ou l’organe de l’Union s’est lui-même imposées dans ce domaine et qui limitent son pouvoir d’appréciation (voir, en ce sens, arrêt du 17 juin 2010, Lafarge/Commission, C‑413/08 P, EU:C:2010:346, point 95). Cependant, de tels indices peuvent également découler de la pratique administrative constante, connue et accessible de cette institution ou de cet organe (voir, en ce sens, arrêt du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver/Commission, T‑400/09, non publié, EU:T:2012:675, point 31).

101    De même, une définition claire dans la réglementation applicable du résultat à atteindre peut constituer un indice pertinent pour les justiciables permettant d’anticiper la façon dont une institution ou un organe de l’Union exercera son pouvoir d’appréciation (voir, par analogie, arrêt du 4 mai 2016, Pillbox 38, C‑477/14, EU:C:2016:324, point 100). Il en va d’autant plus ainsi si la méthode ou le procédé concret aux fins de l’atteinte de ce résultat est prescrit par la réglementation en cause (voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2016, Pillbox 38, C‑477/14, EU:C:2016:324, point 101).

102    En l’espèce, il convient de relever, en premier lieu, que la réglementation applicable prévoit le résultat à atteindre, selon lequel les moyens financiers disponibles dans le FRU doivent atteindre le niveau cible final au terme de la période initiale de huit années à compter du 1er janvier 2016 (ci-après le « niveau cible final » et la « période initiale »), ainsi qu’une méthode pour atteindre ce résultat, ce qui réduit l’impact du pouvoir d’appréciation que le CRU exerce lors de la détermination des contributions ex ante. D’une part, le montant de la contribution ex ante de chaque établissement dépend du montant du niveau cible annuel qui est déterminé par le CRU sur la base de son estimation du montant qui correspond, au 31 décembre 2023, à au moins 1 % des dépôts couverts dans l’ensemble des États membres participants, en vertu de l’article 69, paragraphes 1 et 2, du règlement no 806/2014.

103    D’autre part, ainsi qu’il ressort du point 13 ci-dessus, la contribution ex ante de chaque établissement est déterminée, notamment, sur le fondement de la contribution annuelle de base qui est calculée à partir des montants des passifs nets des établissements concernés. Or, le CRU n’exerce aucun pouvoir d’appréciation concernant la détermination de ces montants. En outre, l’établissement concerné a connaissance du montant de ses passifs nets et il peut avoir accès au montant global des passifs nets des autres établissements, sans pouvoir exiger, en raison de la protection du secret des affaires, d’avoir accès aux données individuelles confidentielles d’autres établissements afin de vérifier le calcul desdits montants (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, points 114 à 125).

104    En second lieu, la contribution annuelle de base est ajustée au regard du profil de risque de l’établissement concerné, étant entendu que, conformément à l’article 9, paragraphe 3, du règlement délégué 2015/63, le multiplicateur d’ajustement est compris entre les valeurs 0,8 et 1,5.

105    Cet ajustement est calculé sur la base de l’appréciation des quatre piliers de risque prévus à l’article 6 du règlement délégué 2015/63. Or, la requérante n’a soumis aucun élément au Tribunal pour démontrer le manque de clarté des trois premiers piliers de risque, ces piliers déterminant 80 % du profil de risque de chaque établissement, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, dudit règlement délégué.

106    De même, la requérante n’a pas contesté un manque de clarté de l’indicateur de risque « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel », qui fait partie du pilier de risque IV et qui a, conformément à l’article 7, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), du règlement délégué 2015/63, une pondération de 10 % au sein de ce pilier.

107    Il s’ensuit que les indicateurs de risque dont le manque de clarté est contesté par la requérante et pour lesquels le CRU exerce un certain pouvoir d’appréciation n’influent sur le profil de risque de l’établissement qu’à une hauteur qui se situe au-dessous de 20 %. En outre, l’impact de ces indicateurs sur le montant final de la contribution ex ante est davantage réduit par le fait que le CRU n’exerce aucun pouvoir d’appréciation concernant la détermination du montant de la contribution annuelle de base et que l’ajustement de cette contribution au profil de risque d’un établissement est nettement encadré dans une fourchette préalablement définie allant de 0,8 à 1,5, ainsi qu’il a été rappelé au point 104 ci-dessus.

108    Dans ces conditions, l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir d’appréciation que l’article 7, paragraphe 4, et l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63 confèrent au CRU ne peuvent être considérées comme étant insuffisamment encadrées ou définies avec une netteté insuffisante, eu égard au but légitime en jeu, et ne peuvent donc être considérées comme ne fournissant pas une protection adéquate contre l’arbitraire.

109    Il en va d’autant plus ainsi que la requérante est un opérateur avisé qui peut, en recourant au besoin aux services d’un conseil juridique et économique, prévoir de manière suffisamment précise la méthode de calcul et l’ordre de grandeur de sa contribution ex ante.

110    De ce fait, la troisième branche du quatrième moyen doit être rejetée.

d)      Sur la quatrième branche, portant sur l’incompatibilité de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 avec le principe de prise en compte intégrale des faits

111    La requérante soutient que l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 viole le principe de prise en compte intégrale des faits. En effet, la probabilité qu’un établissement qui est membre d’un SPI fasse l’objet d’une résolution ne pourrait pas être déterminée sur la seule base de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité ». D’autres facteurs essentiels qui déterminent le profil de risque en ce qui concerne la probabilité de résolution devraient aussi être pris en compte.

112    Le CRU conteste cette argumentation.

113    Lorsque la requérante invoque la violation d’un « principe de prise en compte intégrale des faits », il convient de comprendre ce grief comme une référence au principe de bonne administration, tel que consacré à l’article 41 de la Charte, qui impose aux institutions et aux organes de l’Union l’obligation d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents du cas d’espèce (voir, en ce sens, arrêts du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, EU:C:1991:438, point 14, et du 23 septembre 2009, Estonie/Commission, T‑263/07, EU:T:2009:351, point 99 et jurisprudence citée).

114    À cet égard, la requérante se borne cependant à soutenir que la Commission a ignoré, lorsqu’elle a adopté l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63, certains « facteurs essentiels » qui pourraient influer sur la probabilité de résolution d’un établissement affilié à un SPI, sans pour autant préciser quels sont ces facteurs et pourquoi la Commission était tenue de les prendre en compte.

115    Partant, la quatrième branche du quatrième moyen doit être rejetée.

e)      Conclusion sur le quatrième moyen

116    Eu égard à ce qui précède, le quatrième moyen doit être rejeté.

2.      Sur le sixième moyen, tiré d’une exception d’illégalité des articles 6, 7 et 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63, en ce qu’ils violeraient plusieurs normes supérieures 

117    La requérante soutient que les articles 6, 7 et 9 ainsi que l’annexe I du règlement délégué 2015/63 violent le « principe du calcul des contributions adapté au risque » ainsi que les articles 16 et 20 de la Charte, le principe de proportionnalité et le « principe de prise en compte intégrale des faits », dans la mesure où ces dispositions définissent des piliers et des indicateurs de risque, ainsi qu’une procédure et des formules applicables à leur combinaison, sur la base d’une « image idéalisée qui ne correspond pas à l’expérience réelle et à la situation effective de l’ensemble des établissements [devant verser des contributions ex ante adaptées à leur profil de risque] ».

118    En effet, la pondération des indicateurs de risque et leur mise en œuvre à l’annexe I du règlement délégué 2015/63 conduiraient à la constitution de bins et à l’assignation de différents établissements à ces bins qui entraîneraient une charge objectivement injustifiée, disproportionnée et discriminatoire pour des établissements tels que la requérante.

119    En particulier, ainsi qu’il ressortirait de l’annexe II de la décision attaquée, l’application de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63 aurait pour résultat de créer une fourchette de valeurs excessivement large pour les premier et dernier bins. À titre d’exemple, en ce qui concerne l’indicateur de risque « actifs pondérés en fonction du risque du marché, divisés par le total de l’actif » – qui fait partie du pilier de risque IV –, pour la partie de la contribution ex ante calculée sur la base de l’union, la requérante relèverait avec sa valeur de [confidentiel](2)%  du bin [confidentiel], [confidentiel], et se verrait mise sur le même pied d’égalité qu’un établissement qui présente une valeur près de [confidentiel] fois plus élevée, à savoir de [confidentiel]%, alors que [confidentiel]. Il en irait de même pour la partie de cet indicateur de risque calculée sur la base nationale ainsi que pour d’autres indicateurs de risque, tels que l’indicateur « exposition aux instruments dérivés, divisée par le total de l’actif » ou l’indicateur « montant nominal hors bilan, divisé par l’exposition au risque totale ».

120    De plus, il ressortirait également de l’annexe II de la décision attaquée que, en ce qui concerne six des neuf indicateurs de risque du pilier de risque IV mentionnés à l’article 6, paragraphe 5, premier alinéa, sous a), du règlement délégué 2015/63, plusieurs bins n’ont pas été pourvus, tandis que les premiers bins comprendraient à chaque fois un très grand nombre d’établissements, ce qui ne serait pas conforme au libellé de l’annexe I de ce règlement délégué en vertu duquel le CRU doit assigner le même nombre d’établissements à chaque bin. Cela montrerait que la Commission a créé une réglementation dont l’application donne des résultats incohérents qui ne reflètent pas le profil de risque des établissements assujettis aux contributions ex ante.

121    Le CRU conteste cette argumentation.

122    En premier lieu, il convient d’examiner la compatibilité de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63 avec le principe d’égalité de traitement, tel qu’il est consacré par l’article 20 de la Charte.

123    Au regard de la jurisprudence citée au point 67 ci-dessus, il y a lieu, tout d’abord, d’apprécier si ces établissements se trouvent dans une situation comparable.

124    En application de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63, il appartient au CRU de calculer, dans un premier temps, un nombre de bins afin de comparer les établissements eu égard aux différents indicateurs et sous-indicateurs de risque. Dans un deuxième temps, il incombe au CRU d’assigner, en principe, le même nombre d’établissements à chaque bin, en commençant par assigner au premier bin les établissements pour lesquels les valeurs de l’indicateur brut sont les plus faibles. Dans un troisième temps, il appartient au CRU d’assigner à tous les établissements figurant dans un bin donné le même score, dénommé « indicateur discrétisé », dont il doit tenir compte pour le reste du calcul de leur multiplicateur d’ajustement.

125    Il n’est pas exclu que l’application de cette méthode, dite « de binning » (regroupement), telle qu’instaurée par l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63, puisse aboutir, dans les faits, à des situations dans lesquelles des établissements ayant des valeurs pour un indicateur de risque donné qui sont proches de celles des établissements assignés au bin précédent sont pourtant assignés au bin suivant, contenant des établissements ayant des valeurs pour ce même indicateur de risque qui pourraient parfois être considérablement plus élevées. Cette conséquence découle de l’application de la règle prévue à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 3, du règlement délégué 2015/63, selon laquelle le CRU assigne, en principe, le même nombre d’établissements à chaque bin.

126    Afin d’examiner si les établissements assignés au même bin, mais ayant des valeurs considérablement différentes les unes des autres pour le même indicateur de risque, se trouvent dans une situation comparable, il y a lieu de prendre en compte, au regard de la jurisprudence citée aux points 69 et 70 ci-dessus, les objectifs du MRU et, notamment, celui visant à encourager les établissements à adopter des modes de fonctionnement moins risqués.

127    Il convient de constater que, compte tenu du fait que l’un des objectifs principaux du MRU consiste à encourager les établissements concernés à suivre des modes de fonctionnement moins risqués, les établissements assignés au même bin, mais ayant des valeurs considérablement différentes les unes des autres pour le même indicateur de risque, ne se trouvent pas dans des situations comparables, puisqu’ils ont des caractéristiques différentes s’agissant du degré de risque mesuré par cet indicateur.

128    Pourtant, ainsi qu’il découle du point 124 ci-dessus, ces établissements sont traités de manière égale, puisqu’ils sont assignés au même bin relatif audit indicateur de risque et, partant, se voient attribuer le même indicateur discrétisé, dont le CRU tiendra compte pour le calcul du multiplicateur d’ajustement.

129    Cela étant, lorsque des personnes se trouvant dans des situations différentes sont traitées de manière égale, le principe d’égalité de traitement n’est pas violé, pour autant qu’un tel traitement soit dûment justifié (voir arrêt du 7 mars 2017, RPO, C‑390/15, EU:C:2017:174, point 52 et jurisprudence citée).

130    Tel est le cas lorsque ce traitement est en rapport avec un objectif légalement admissible poursuivi par la mesure ayant pour effet d’instaurer ledit traitement et qu’elle est proportionnée à cet objectif (voir arrêt du 7 mars 2017, RPO, C‑390/15, EU:C:2017:174, point 53 et jurisprudence citée).

131    À cet égard, la Cour a reconnu la légitimité de l’objectif consistant, pour une institution de l’Union, à établir des règles générales susceptibles d’être facilement appliquées et aisément contrôlées par les autorités compétentes (voir, en ce sens, arrêts du 24 février 2015, Sopora, C‑512/13, EU:C:2015:108, point 33, et du 7 mars 2017, RPO, C‑390/15, EU:C:2017:174, point 60).

132    En l’espèce, il convient de relever que le règlement délégué 2015/63 est conforme à cet objectif.

133    En effet, le règlement délégué 2015/63 a prévu une méthode d’ajustement des contributions ex ante au profil de risque des établissements consistant à comparer leurs profils de risque sur la base de valeurs que ces établissements obtiennent pour une série d’indicateurs de risque.

134    La méthode de binning, telle que décrite au point 124 ci-dessus, permet au CRU de gérer de manière efficace un grand nombre de données dont il doit tenir compte pour effectuer la comparaison mentionnée au point 133 ci-dessus, tout en évitant, dans la mesure du possible, que la présence de valeurs dites extrêmes, c’est-à-dire présentant un grand écart par rapport à la moyenne, mène à des comparaisons dénaturées.

135    En effet, ainsi qu’il ressort, notamment, de l’étude technique du JRC, relative au règlement délégué 2015/63, l’un des objectifs de la méthode de binning est de prévoir une méthode simple pour comparer le grand nombre de données déclarées par les établissements dont la contribution ex ante est ajustée à leur profil de risque. En outre, cette méthode permet d’éviter que des établissements ayant des valeurs particulièrement négatives pour certains indicateurs de risque reçoivent néanmoins un score qui indique un profil de risque peu élevé pour cet indicateur, puisqu’il existe certains établissements ayant des valeurs extrêmes.

136    Ensuite, en ce qui concerne la proportionnalité de la méthode de binning au regard de l’objectif poursuivi par la réglementation en cause, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort des points 36 à 40 ci-dessus, la Commission jouit d’une large marge d’appréciation en ce qui concerne la mise en œuvre de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59.

137    Dans ces conditions, et conformément à la jurisprudence (voir, en ce sens, arrêts du 16 juin 2015, Gauweiler e.a., C‑62/14, EU:C:2015:400, points 80, 81 et 91 ; du 30 novembre 2022, Trasta Komercbanka e.a./BCE, T‑698/16, non publié, sous pourvoi, EU:T:2022:737, points 221 et 222 et jurisprudence citée, et du 21 décembre 2022, Firearms United Network e.a./Commission, T‑187/21, non publié, sous pourvoi, EU:T:2022:848, points 122 et 123 et jurisprudence citée), le contrôle du Tribunal du respect du principe de proportionnalité doit se limiter à examiner si la méthode de binning est manifestement inappropriée au regard de l’objectif que la Commission entend poursuivre, si elle ne va pas manifestement au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif ou si elle n’entraîne pas d’inconvénients manifestement disproportionnés au regard de l’objectif poursuivi.

138    S’agissant de la question de savoir si la méthode de binning permet d’atteindre l’objectif poursuivi, tel que ce dernier a été précisé aux points 134 et 135 ci-dessus, il convient d’observer que cette méthode est une méthode statistique reconnue, ainsi qu’il ressort, notamment, de l’étude technique du JRC. De même, ladite méthode emploie des critères objectifs pour la détermination des contributions ex ante, à savoir, notamment, une formule mathématique prévue à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 2, du règlement délégué 2015/63.

139    En outre, la méthode de binning permet de comparer facilement les données d’un grand nombre d’établissements et de calculer d’une manière efficace et objective leurs contributions ex ante.

140    Dans ces conditions, cette méthode permet d’atteindre l’objectif poursuivi consistant à établir une méthode simple et aisément contrôlable pour comparer un grand nombre de données aux fins du calcul des contributions ex ante.

141    Par ailleurs, la requérante ne démontre pas que la méthode de binning dépasse manifestement les limites de ce qui est nécessaire à la réalisation de l’objectif poursuivi. En particulier, elle n’a pas démontré qu’une autre méthode de comparaison des profils de risque des établissements présenterait manifestement moins d’inconvénients pour ceux-ci que celle du binning, tout en permettant d’atteindre, d’une manière aussi efficace, ledit objectif.

142    Enfin, il est vrai que, comme cela est relevé au point 125 ci-dessus, cette méthode statistique pourrait avoir pour conséquence, dans les faits, que, dans certains cas, des établissements ayant des valeurs considérablement différentes pourraient néanmoins se retrouver dans le même bin, comme cela transparaît à l’annexe II de la décision attaquée. Cependant, une telle circonstance ne peut être considérée comme un inconvénient manifestement démesuré eu égard à l’objectif poursuivi par la réglementation en cause.

143    En effet, il convient de relever, premièrement, que l’ajustement des contributions ex ante ne peut se réaliser que dans la fourchette d’un coefficient compris entre 0,8 et 1,5, en vertu de l’article 9, paragraphe 3, du règlement délégué 2015/63. La contribution annuelle de base demeure ainsi l’élément prépondérant pour la détermination de la contribution ex ante au regard du profil de risque des établissements.

144    Deuxièmement, ainsi qu’il découle de l’étude empirique conduite préalablement à l’adoption du règlement délégué 2015/63, dont les résultats ont été résumés dans l’étude technique du JRC, le phénomène statistique identifié aux points 125 et 142 ci-dessus est circonscrit en ce qu’il tend à se produire surtout dans les derniers bins, et non dans la grande majorité des bins.

145    Troisièmement, il demeure constant que les établissements se trouvant dans ces derniers bins ont des valeurs plus élevées pour l’indicateur de risque concerné que les établissements assignés aux bins inférieurs.

146    Quatrièmement, la méthode de l’ajustement des contributions ex ante au profil de risque tient compte d’une multitude d’indicateurs de risque, ainsi qu’il ressort de l’article 6 du règlement délégué 2015/63. Un établissement est dès lors assigné, au total, à une multitude de bins en fonction de ses valeurs et de celles des autres établissements pour chaque indicateur de risque.

147    Or, ainsi qu’il ressort de l’étude technique du JRC mentionnée au point 144 ci-dessus, les établissements ont tendance à se retrouver dans d’autres bins pour différents indicateurs de risque. De ce fait, si un établissement se retrouve dans le dernier bin pour un indicateur de risque donné, et se voit ainsi mis sur un pied d’égalité avec des établissements ayant des valeurs considérablement plus élevées, il en va différemment, en règle générale, pour d’autres indicateurs de risque, cela permettant de procéder à une comparaison globale des établissements concernés.

148    Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la requérante n’a pas démontré que l’article 20 de la Charte et le principe de proportionnalité s’opposaient à l’utilisation de la méthode de binning.

149    Au demeurant, le phénomène décrit aux points 146 et 147 ci-dessus est illustré par le calcul de la contribution ex ante de la requérante pour la période de contribution 2017, comme en atteste sa fiche individuelle. En effet, en ce qui concerne la partie de sa contribution ex ante calculée sur la base de l’union, la requérante se retrouve dans le [confidentiel] bin pour [confidentiel]. En revanche, pour aucun des indicateurs de risque faisant partie du pilier de risque [confidentiel] la requérante ne se retrouve dans le [confidentiel] bin, alors que [confidentiel].

150    La situation est d’ailleurs similaire pour la partie de la contribution ex ante de la requérante qui a été calculée sur la base nationale. Il ressort de sa fiche individuelle que la requérante se retrouve dans le [confidentiel] bin pour [confidentiel]. En revanche, elle ne se retrouve dans le [confidentiel] bin pour aucun des indicateurs de risque composant le pilier de risque [confidentiel].

151    En ce qui concerne, en deuxième lieu, le grief tiré de la violation d’un « principe du calcul des contributions adapté au risque », il n’est pas nécessaire de se prononcer sur la question de savoir s’il existe, en droit de l’Union, un tel principe. Ce grief peut être compris en ce sens que la requérante reproche à la Commission, en réalité, d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation lorsqu’elle a prévu la méthode de binning, puisque cette dernière empêcherait le CRU d’adapter, d’une manière appropriée, les contributions annuelles de base au profil de risque réel des établissements.

152    Or, au regard des considérations exposées aux points 138 à 148 ci-dessus, la requérante ne saurait prétendre que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation lorsqu’elle a instauré la méthode de binning.

153    S’agissant, en troisième lieu, de la compatibilité de la méthode de binning avec l’article 16 de la Charte et le principe de prise en compte intégrale des faits, la requérante ne développe aucune argumentation autonome et ciblée concernant la violation de cet article et de ce principe, en se bornant à invoquer la violation de ceux-ci.

154    À cet égard, il découle de la jurisprudence que, pour qu’un recours soit recevable, il est nécessaire que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même, et ce afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice. Ainsi, tout moyen qui n’est pas suffisamment articulé dans la requête introductive d’instance doit être considéré comme étant irrecevable. Des exigences analogues sont requises lorsqu’un grief est invoqué au soutien d’un moyen. Cette fin de non-recevoir d’ordre public doit être relevée d’office par le juge de l’Union (voir arrêts du 30 juin 2021, Italie/Commission, T‑265/19, non publié, EU:T:2021:392, point 33 et jurisprudence citée, et du 7 juillet 2021, Bateni/Conseil, T‑455/17, EU:T:2021:411, point 135 et jurisprudence citée).

155    Les griefs mentionnés au point 153 ci-dessus ne répondant pas à ces exigences, ils doivent être rejetés comme étant irrecevables.

156    En dernier lieu, la requérante ne développe, dans sa requête, aucune argumentation autonome et ciblée concernant la prétendue illégalité des articles 6, 7 et 9 du règlement délégué 2015/63 ou d’autres parties de l’annexe I de ce règlement délégué que celle figurant sous le titre « Étape 2 », qui irait au-delà de l’argumentation examinée ci-dessus.

157    De ce fait, l’exception d’illégalité concernant ces dernières dispositions doit être rejetée.

158    Eu égard à ce qui précède, le sixième moyen doit être rejeté.

3.      Sur le neuvième moyen, tiré d’une exception d’illégalité de l’article 20, paragraphe 1, première et deuxième phrases, du règlement délégué 2015/63, en ce qu’il violerait l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 et le « principe du calcul des contributions adapté au risque »

159    La requérante excipe de l’illégalité de l’article 20, paragraphe 1, premier et deuxième phrases, du règlement délégué 2015/63 au motif que, dans la mesure où cette disposition permet au CRU de ne pas appliquer, pour une période indéterminée, dans le cadre du calcul des contributions ex ante, un ou plusieurs indicateurs de risque si les données pour ces indicateurs ne sont pas disponibles, la Commission n’aurait pas respecté l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, qui aurait exigé d’elle qu’elle tienne compte de tous les éléments prévus par cette disposition lors de l’adoption du règlement délégué 2015/63.

160    Plus concrètement, l’article 20, paragraphe 1, première et deuxième phrases, du règlement délégué 2015/63 aurait pour effet que, pour la période de contribution 2017, le CRU n’aurait pas tenu compte, dans le cadre du pilier de risque « exposition au risque », de l’indicateur de risque « fonds propres et engagements ou passifs éligibles détenus par l’établissement au-delà de l’[exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles (EMEE)] », dans le cadre du pilier de risque « stabilité et la diversité des sources de financement », des indicateurs de risque « ratio de couverture des besoins de liquidité » et « ratio de financement net stable », dans le cadre du pilier de risque « importance de l’établissement pour la stabilité du système financier ou de l’économie », de l’indicateur de risque « part des prêts et dépôts interbancaires dans l’Union européenne » et, dans le cadre du pilier de risque IV, des indicateurs de risque « complexité » et « résolvabilité ».

161    Pour les mêmes raisons, l’article 20, paragraphe 1, premier et deuxième phrases, du règlement délégué 2015/63 serait également contraire au « principe du calcul des contributions adapté au risque ».

162    Enfin, la Commission aurait dû mettre en place des indicateurs de risque alternatifs qui auraient garanti que tous les aspects mentionnés à l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 aient été pris en compte dans l’ajustement en fonction du profil de risque des établissements et qui se seraient appliqués jusqu’à ce que les indicateurs de risque prévus à l’article 6 du règlement délégué 2015/63 aient été disponibles.

163    Le CRU  conteste cette argumentation.

164    À titre liminaire, il convient de préciser, d’une part, que, dans le cadre du neuvième moyen, la requérante se limite à soulever une exception d’illégalité à l’encontre de l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63.

165    D’autre part, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si la directive 2014/59 ou une autre règle du droit de l’Union consacre un « principe du calcul des contributions adapté au risque », le grief de la requérante tiré de la violation de ce principe doit être compris en ce sens qu’elle soutient, en substance, que l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation, au motif que cette disposition empêcherait le CRU d’adapter, d’une manière appropriée, les contributions annuelles de base au profil de risque réel des établissements.

166    Cela étant précisé, il convient de relever que, aux termes de l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, intitulé « Dispositions transitoires », un indicateur de risque ne s’applique pas tant que les informations requises au titre d’un indicateur de risque spécifique mentionné à l’annexe II de ce règlement délégué ne font pas partie des exigences d’information prudentielle mentionnées à l’article 14 dudit règlement délégué, à savoir les exigences d’information prudentielle établies par le règlement d’exécution no 680/2014 de la Commission, du 16 avril 2014, définissant des normes techniques d’exécution en ce qui concerne l’information prudentielle à fournir par les établissements, conformément au règlement no 575/2013 (JO 2014, L 191, p. 1), ou, le cas échéant, au niveau des États membres.

167    Il convient de rappeler, à cet égard, que le règlement délégué 2015/63 a été adopté sur le fondement de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59, lequel oblige la Commission à tenir compte de tous les éléments énumérés sous a) à h) de cette disposition aux fins de préciser la notion d’« adaptation des contributions en fonction du profil de risque des établissements ».

168    Malgré cela, l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 habilite le CRU, à titre transitoire, à ne pas appliquer certains de ces éléments, qui sont reflétés dans les indicateurs de risque prévus par ce règlement délégué.

169    À cet égard, il y a lieu de souligner que, si l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 oblige, certes, la Commission à « tenir compte » de l’ensemble des éléments énumérés à l’article 103, paragraphe 7, sous a) à h), de la directive 2014/59, cette disposition ne précise pas la manière dont elle doit les prendre en compte. À cette fin et comme il a été rappelé aux points 36 à 40 ci-dessus, la Commission jouit d’une large marge d’appréciation concernant la mise en œuvre de cette disposition.

170    Or, une telle marge d’appréciation peut impliquer, le cas échéant, la nécessité de prévoir des périodes transitoires en ce qui concerne l’application des éléments énumérés à l’article 103, paragraphe 7, sous a) à h), de la directive 2014/59, en raison, notamment, de l’indisponibilité des données nécessaires pour le calcul des indicateurs de risque fondés sur ces éléments.

171    L’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 introduit une telle période transitoire dès lors qu’il n’autorise pas le CRU à ne pas appliquer certains desdits éléments indéfiniment dans le temps, mais uniquement à titre transitoire, comme cela découle de l’intitulé de l’article 20 de ce règlement délégué, ainsi que des conditions d’application de son paragraphe 1.

172    En outre, il convient de relever, à l’instar du CRU, que la justification de la période transitoire prévue par cette disposition est étroitement liée au caractère progressif du processus de mise en place des exigences prudentielles et des exigences d’information correspondantes. En effet, ainsi qu’il découle, notamment, du considérant 6 de la directive 2014/59, le règlement délégué 2015/63 a été adopté à un moment où ces exigences n’étaient pas encore définitivement arrêtées ou faisaient encore l’objet d’ajustements. À cet égard, la requérante n’a pas sérieusement contesté l’affirmation du CRU selon laquelle les autorités compétentes détermineraient progressivement certaines desdites exigences qui, à leur tour, influenceraient les données qui devaient être disponibles pour calculer les indicateurs de risque prévus par le règlement délégué 2015/63. Il s’ensuit que de telles données nécessaires pour le calcul de certains de ces indicateurs de risque pouvaient ne pas être disponibles pour l’ensemble des établissements concernés ou, à tout le moins, pour l’ensemble des établissements ayant leur siège dans un État membre, pendant à tout le moins une partie de la période initiale, étant précisé que ces données pouvaient ne pas être déclarées à titre d’informations prudentielles selon le droit de l’Union ou, le cas échéant, le droit national.

173    Dans ce contexte, l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 vise à éviter que des charges disproportionnées ou discriminatoires soient, le cas échéant, imposées aux établissements lors du calcul des contributions ex ante en raison précisément de cette mise en œuvre progressive des exigences prudentielles et des exigences d’information qui y sont afférentes. En effet, ce calcul implique un exercice comparatif. À cet égard, le CRU a expliqué, en substance, sans être contredit, que, si les données indispensables pour le calcul de certains indicateurs de risque n’étaient pas déclarées au titre d’informations prudentielles par l’ensemble des établissements ou, à tout le moins, par l’ensemble des établissements ayant leur siège dans un État membre, le CRU serait obligé de prendre en compte des données relatives à de tels indicateurs qui ne sont pourtant pas comparables.

174    Enfin, il est vrai que l’exception prévue à l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 peut aboutir à une situation où certains indicateurs de risque prévus à l’article 6 de ce règlement délégué demeurent inappliqués pendant toute la période initiale. Cependant, d’une part, une telle conséquence est le résultat de la nature progressive de la mise en œuvre des exigences prudentielles, ainsi que cela a été relevé au point 172 ci-dessus. D’autre part, comme il ressort de l’article 71 du règlement no 806/2014, lesdits indicateurs de risque ont vocation à s’appliquer également au-delà de la période initiale.

175    Dans ces conditions, et compte tenu des considérations énoncées au point 169 ci-dessus, la requérante n’a pas démontré que l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation ou d’un détournement de pouvoir ou encore qu’il va manifestement au-delà des limites du large pouvoir d’appréciation octroyé à la Commission par l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59.

176    Cette constatation n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel la Commission aurait dû mettre en place des indicateurs de risque alternatifs qui se seraient appliqués tant que les indicateurs de risque prévus à l’article 6 du règlement délégué 2015/63 n’étaient pas disponibles. En effet, la requérante n’a ni précisé la nature qu’auraient dû revêtir de tels indicateurs de risque ni expliqué comment la conformité de ces derniers à l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 aurait été assurée.

177    Partant, le neuvième moyen doit être rejeté.

B.      Sur les moyens portant sur la légalité de la décision attaquée

1.      Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 81, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, lu conjointement avec l’article 3 du règlement no 1, et du principe général d’égalité de traitement

178    Il ressort du dossier que la lettre du 5 janvier 2022 de la BaFin était accompagnée de la version en anglais de la décision attaquée, y compris ses annexes, et de leur traduction en allemand. Ainsi qu’il découle de la référence figurant à la première page de cette décision ainsi que de son considérant 163, seule la version en anglais de ladite décision fait foi.

179    C’est dans ce contexte que la requérante a soulevé le premier moyen, qui s’articule autour de deux branches.

a)      Sur la première branche, portant sur la violation de l’article 81, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, lu conjointement avec l’article 3 du règlement no 1/58

180    La requérante allègue que la décision attaquée est contraire à l’article 81, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, lu conjointement avec l’article 3 du règlement no 1, en ce qu’elle spécifie que seule la version en anglais fait foi, alors qu’elle avait expressément choisi l’allemand comme langue officielle à appliquer pendant la procédure administrative. La requérante n’ayant pas expressément renoncé à son droit de communiquer avec le CRU en allemand, le fait que le CRU a aussi rédigé une version officieuse de la décision attaquée en allemand ne saurait corriger ce défaut, d’autant plus que cette dernière présente des divergences significatives par rapport à la décision attaquée dans sa version en anglais.

181    Le CRU conteste cette argumentation.

182    Aux termes de l’article 81, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, le règlement no 1 s’applique au CRU.

183    Il ressort de l’article 3 du règlement no 1 que les textes adressés par les institutions et organes de l’Union à un État membre ou à une personne relevant de la juridiction d’un État membre doivent être rédigés dans la langue de cet État.

184    Cependant, en vertu de l’article 81, paragraphe 4, du règlement no 806/2014, le CRU peut convenir avec les ARN de la langue dans laquelle sont rédigés les documents à leur transmettre ou transmis par elles, cette disposition constituant ainsi une réglementation spéciale par rapport à l’article 3 du règlement no 1.

185    Or, le CRU a mis en œuvre cet article 81, paragraphe 4, en concluant avec les ARN un accord concernant les modalités pratiques de la coopération au sein du MRU, qui a été entériné par la décision SRB/PS/2018/15 du CRU, du 17 décembre 2018, établissant le cadre des modalités pratiques de coopération au sein du MRU entre le CRU et les ARN (ci-après l’« accord CRU-ARN »).

186    Par conséquent, il y a lieu d’examiner si la décision attaquée a respecté les modalités prévues dans cet accord.

187    En vertu de l’article 4, paragraphe 6, de l’accord CRU-ARN, les actes juridiques du CRU adressés aux ARN, en vue de leur mise en œuvre en vertu du droit national, sont adoptés en anglais, la version desdits actes dans cette langue étant juridiquement contraignante.

188    À cet égard, conformément à l’article 2 du dispositif de la décision attaquée, cette dernière a été adressée à l’ARN allemande, en sa qualité de destinataire, au même titre qu’aux autres ARN.

189    Il s’ensuit que l’article 4, paragraphe 6, de l’accord CRU-ARN s’applique à la décision attaquée.

190    Conformément à l’article 81, paragraphe 4, du règlement no 806/2014, le CRU pouvait ainsi rédiger la décision attaquée en anglais. Dans ces conditions, la requérante ne peut lui reprocher d’avoir violé l’article 81, paragraphe 1, de ce règlement ou l’article 3 du règlement no 1.

191    Cette conclusion n’est pas infirmée par l’argumentation de la requérante.

192    D’abord, il y a lieu de rejeter l’argument de la requérante selon lequel elle a choisi de recevoir les documents du CRU pendant la phase administrative en allemand et, partant, le CRU devait lui communiquer la décision attaquée dans cette langue.

193    Bien qu’il ressorte du formulaire produit en annexe A.10 à la requête que la requérante a fait un tel choix, ce choix concerne uniquement l’échange de documents entre le CRU et elle et ne peut pas porter sur les décisions concernant les contributions ex ante, de telles décisions étant adressées par le CRU aux ARN.

194    Ensuite, l’argument de la requérante selon lequel elle est directement et individuellement concernée par la décision attaquée et a, dès lors, le droit d’en recevoir une copie officielle en allemand ne saurait prospérer lui non plus.

195    D’une part, cet argument méconnaît le libellé de l’article 81, paragraphe 4, du règlement no 806/2014, lu conjointement avec l’article 4, paragraphe 6, de l’accord CRU-ARN.

196    D’autre part, il ressort de la jurisprudence qu’il n’existe pas de principe général en droit de l’Union assurant à chaque personne un droit à ce que tout acte qui est susceptible d’affecter ses intérêts soit rédigé dans sa langue en toutes circonstances et selon lequel les organes de l’Union seraient tenus, sans qu’aucune dérogation soit autorisée, à utiliser l’ensemble des langues officielles dans toute situation (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2019, Espagne/Parlement, C‑377/16, EU:C:2019:249, point 37 et jurisprudence citée).

197    De ce fait, la première branche du premier moyen doit être rejetée.

b)      Sur la deuxième branche, portant sur la violation du principe d’égalité

198    La requérante soutient que le fait que seule la version en anglais de la décision attaquée fait foi constitue une violation de l’article 20 de la Charte et du principe général d’égalité de traitement entre elle et les autres établissements allemands soumis à l’obligation de verser des contributions ex ante pour 2017 qui n’ont pas introduit avec succès de recours en annulation contre la décision initiale. En effet, pour ces derniers établissements, le fondement de cette contribution resterait la décision initiale qui serait rédigée en allemand. En revanche, la décision attaquée, qui concerne spécifiquement la requérante, serait rédigée, dans sa version faisant foi, en anglais, contrairement au choix de cette dernière en faveur de l’allemand. Cette différence de traitement ne saurait être justifiée par le changement de pratique administrative du CRU depuis l’année 2020 portant sur le caractère contraignant de l’anglais dans les décisions relatives aux contributions ex ante.

199    Le CRU conteste cette argumentation.

200    Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 67 ci-dessus, l’article 20 de la Charte consacre le principe d’égalité de traitement, lequel exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié.

201    Selon la jurisprudence citée au point 69 ci-dessus, le caractère comparable de situations différentes s’apprécie eu égard à l’ensemble des éléments qui les caractérisent. Ces éléments doivent, notamment, être déterminés et appréciés à la lumière de l’objet et du but de l’acte qui institue la distinction en cause. Doivent, en outre, être pris en considération les principes et les objectifs du domaine dont relève cet acte.

202    En l’espèce, il ressort de l’article 4, paragraphe 6, de l’accord CRU-ARN que les actes juridiques du CRU adressés aux ARN en vue de leur mise en œuvre en vertu du droit national sont adoptés en anglais, cette version étant juridiquement contraignante.

203    En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 45, premier alinéa, de l’accord CRU-ARN, l’article 4, paragraphe 6, de ce même accord est entré en vigueur à la date d’adoption dudit accord par la session plénière du CRU, à savoir le 17 décembre 2018. Il s’applique, dès lors, à toute décision postérieure portant sur le calcul des contributions ex ante, y compris la décision attaquée qui, tout en portant sur la contribution ex ante de la requérante pour 2017, a été adoptée postérieurement à la date d’entrée en vigueur de ce même accord. Cette décision devait, dès lors, être rédigée en anglais.

204    Or, étant donné que ni l’article 4, paragraphe 6, de l’accord CRU-ARN ni aucune disposition équivalente n’était applicable au moment de l’adoption de la décision initiale, la situation de la requérante n’est pas comparable à celle des établissements allemands soumis à une contribution ex ante pour 2017 en vertu de la décision initiale.

205    Cette conclusion n’est pas infirmée par l’argument de la requérante selon lequel la BaFin n’a communiqué aux établissements relevant de sa compétence qu’une version en allemand de la décision initiale. En effet, à supposer que tel soit le cas, cette circonstance n’est pas de nature à démontrer que la situation des établissements soumis à une contribution ex ante pour 2017 en vertu de la décision initiale est comparable à celle de la requérante.

206    La deuxième branche du premier moyen doit ainsi être écartée.

c)      Conclusion sur le premier moyen

207    Eu égard à ce qui précède, le premier moyen doit être rejeté.

2.      Sur le deuxième moyen, tiré de défauts de motivation

208    Le deuxième moyen s’articule autour de sept branches.

a)      Observations préliminaires

209    L’article 296, deuxième alinéa, TFUE dispose que les actes juridiques sont motivés. De même, le droit à une bonne administration, consacré à l’article 41 de la Charte, prévoit l’obligation, pour les institutions, les organes et les organismes de l’Union, de motiver leurs décisions.

210    La motivation d’une décision d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union revêt une importance toute particulière, en tant qu’elle permet à l’intéressé de décider en pleine connaissance de cause s’il entend introduire un recours contre cette décision ainsi qu’à la juridiction compétente d’exercer son contrôle, et qu’elle constitue donc l’une des conditions de l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 103 et jurisprudence citée).

211    Une telle motivation doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et au contexte dans lequel il a été adopté. À cet égard, il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où le caractère suffisant d’une motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée et, en particulier, de l’intérêt que les personnes concernées par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Par conséquent, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 104 et jurisprudence citée).

212    Afin d’examiner si cette motivation est suffisante en ce qui concerne une décision fixant les contributions ex ante, il convient de rappeler, premièrement, qu’il ne saurait être déduit de la jurisprudence de la Cour que la motivation de toute décision d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union mettant à la charge d’un opérateur privé le paiement d’une somme d’argent doit nécessairement comprendre l’intégralité des éléments permettant à son destinataire de vérifier l’exactitude du calcul du montant de cette somme d’argent (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 105 et jurisprudence citée).

213    Deuxièmement, les institutions, les organes et les organismes de l’Union sont, en principe, tenus, en application du principe de protection du secret des affaires, qui constitue un principe général du droit de l’Union, lequel est, notamment, concrétisé à l’article 339 TFUE, de ne pas révéler aux concurrents d’un opérateur privé des informations confidentielles fournies par celui-ci (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 109 et jurisprudence citée).

214    Troisièmement, considérer que la motivation de la décision du CRU fixant des contributions ex ante doit nécessairement permettre aux établissements de vérifier l’exactitude du calcul de leur contribution ex ante impliquerait, nécessairement, d’interdire au législateur de l’Union d’instituer un mode de calcul de cette contribution intégrant des données dont le caractère confidentiel est protégé par le droit de l’Union et, partant, de réduire de manière excessive le large pouvoir d’appréciation dont doit disposer, à cette fin, ce législateur, en l’empêchant, notamment, d’opter pour une méthode susceptible d’assurer une adaptation dynamique du financement du FRU aux évolutions du secteur financier, par la prise en compte comparative, en particulier, de la situation financière de chaque établissement agréé sur le territoire d’un État membre participant au FRU (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 118).

215    Quatrièmement, s’il résulte de ce qui précède que l’obligation de motivation pesant sur le CRU doit être mise en balance, en raison de la logique du système de financement du FRU et du mode de calcul établi par le législateur de l’Union, avec l’obligation du CRU de respecter le secret des affaires des établissements concernés, il n’en demeure pas moins que cette dernière obligation ne doit pas être interprétée à ce point extensivement qu’elle vide l’obligation de motivation de sa substance (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 120).

216    Toutefois, il ne saurait être considéré, dans le cadre de la mise en balance de l’obligation de motivation avec le principe de protection du secret des affaires, que motiver une décision mettant à la charge d’un opérateur privé le paiement d’une somme d’argent sans lui fournir l’intégralité des éléments permettant de vérifier avec exactitude le calcul du montant de cette somme d’argent porte nécessairement, dans tous les cas, atteinte à la substance de l’obligation de motivation (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 121).

217    S’agissant de la décision du CRU fixant des contributions ex ante, l’obligation de motivation doit être considérée comme étant respectée lorsque les personnes concernées par cette décision, tout en ne se voyant pas transmettre de données couvertes par le secret des affaires, disposent de la méthode de calcul utilisée par le CRU et d’informations suffisantes pour comprendre, en substance, de quelle façon leur situation individuelle a été prise en compte, aux fins du calcul de leur contribution ex ante, au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements concernés (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 122).

218    Dans un tel cas, ces personnes sont, en effet, en mesure de vérifier si leur contribution ex ante a été fixée de manière arbitraire, en méconnaissant la réalité de leur situation économique ou en utilisant des données relatives au reste du secteur financier dépourvues de plausibilité. Lesdites personnes peuvent, dès lors, comprendre les justifications de la décision fixant leur contribution ex ante et évaluer s’il apparaît utile d’introduire un recours contre cette décision, de sorte qu’il serait excessif d’exiger du CRU qu’il communique chacun des éléments chiffrés sur lesquels s’appuie le calcul de la contribution de chaque établissement concerné (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 123).

219    Il résulte de ce qui précède que le CRU n’est pas, notamment, tenu de fournir à un établissement les données lui permettant de vérifier, de manière complète, l’exactitude de la valeur du multiplicateur d’ajustement, puisque cette vérification supposerait de disposer de données couvertes par le secret des affaires relatives à la situation économique de chacun des autres établissements concernés (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 135).

220    En revanche, il incombe au CRU de publier ou de transmettre aux établissements concernés, sous une forme agrégée et anonymisée, les informations relatives à ces établissements, utilisées pour calculer cette contribution, dans la mesure où ces informations peuvent être communiquées sans porter atteinte au secret des affaires (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 166).

221    Parmi les informations devant ainsi être mises à la disposition des établissements figurent, notamment, les valeurs limites de chaque bin et celles des indicateurs de risque s’y rapportant, sur la base desquelles la contribution ex ante des établissements a été adaptée au profil de risque de ceux-ci (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C584/20 P et C621/20 P, EU:C:2021:601, point 167).

222    C’est au regard de ces considérations qu’il convient d’examiner les arguments de la requérante développés dans le cadre du deuxième moyen.

b)      Sur la première branche, portant sur la langue de la version de la décision attaquée faisant foi

223    La requérante soutient que la décision attaquée n’existe pas dans une langue expressément choisie par elle en vertu de l’article 81, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, à savoir l’allemand. En outre, il y aurait des divergences sur des points essentiels entre la version en anglais de la décision attaquée, qui fait foi, et sa traduction en allemand.

224    Le CRU conteste cette argumentation.

225    En ce qui concerne, d’une part, le grief tiré de l’inexistence de la décision attaquée dans la langue choisie par la requérante, ce grief recoupe, en substance, le premier moyen, de sorte qu’il convient de le rejeter pour les motifs énoncés aux points 182 à 196 ci-dessus.

226    S’agissant, d’autre part, du grief tiré des divergences entre les versions linguistiques de la décision attaquée, la requérante identifie un point du corps de celle-ci pour lequel la version en anglais faisant foi divergerait de sa traduction en allemand, à savoir son considérant 127, relatif à la création de trois bins concernant l’indicateur de risque SPI. Il en irait de même de l’annexe II de cette décision, étant précisé que la page 1 de cette annexe se réfère, dans sa version en anglais, au dénominateur de la contribution annuelle de base, alors que, dans sa version en allemand, elle fait état du numérateur de cette contribution.

227    Or, à supposer qu’il existe de telles divergences linguistiques, la requérante n’explique pas en quoi elles l’auraient empêchée de comprendre les motifs pour lesquels le CRU avait créé trois bins concernant l’indicateur de risque SPI ou encore de vérifier si la page 1 de l’annexe II de la décision attaquée se référait au dénominateur de la contribution annuelle de base, à l’aide, le cas échéant, des données fournies à la page 2 de la fiche individuelle.

228    De ce fait, la première branche du deuxième moyen doit être rejetée.

c)      Sur la deuxième branche, portant sur la complexité de la motivation du calcul de la contribution ex ante

229    La requérante fait valoir, tout d’abord, que les explications fournies par le CRU dans la décision attaquée, réparties en quatre documents distincts, sont excessivement complexes et opaques.

230    Ensuite, l’outil de calcul utilisé par le CRU pour calculer les contributions ex ante ne serait accessible ni à la requérante ni au Tribunal.

231    Enfin, les vices de motivation de la décision attaquée seraient davantage confirmés par le fait que le CRU a approfondi la motivation de la décision fixant les contributions ex ante pour la période de contribution 2022.

232    Le CRU conteste cette argumentation.

233    Tout d’abord, la requérante n’explique pas à suffisance de droit en quoi le fait que la décision attaquée soit répartie en quatre documents rend cette décision incompréhensible et constitue donc un vice de motivation.

234    De même, bien que la requérante prétende que les documents composant la décision attaquée sont reliés entre eux par de nombreux renvois et des références croisées, de sorte qu’il serait impossible de comprendre pleinement chacun des éléments de calcul, elle ne fournit aucun exemple d’un tel élément qui deviendrait incompréhensible pour cette raison.

235    En ce qui concerne, ensuite, l’outil de calcul utilisé par le CRU pour calculer les contributions ex ante, il convient de relever que le grief de la requérante concerne, selon ses clarifications apportées lors de l’audience, l’outil de calcul sous la forme d’un logiciel utilisé en interne par le CRU pour calculer les contributions ex ante pour la période de contribution 2017 de tous les établissements.

236    Or, la requérante ne saurait reprocher au CRU de ne pas lui avoir donné accès à un tel outil, dès lors qu’elle n’a soumis au Tribunal aucun élément concret qui expliquerait les motifs pour lesquels cet accès était nécessaire pour se conformer aux exigences résultant de la jurisprudence citée aux points 217, 220 et 221 ci-dessus.

237    Enfin, le seul fait que le CRU ait prétendument approfondi la motivation de la décision fixant les contributions ex ante pour la période de contribution 2022 n’est pas pertinent pour apprécier si la décision attaquée est suffisamment motivée. En effet, la motivation de cette dernière décision ne saurait être examinée à la lumière de celle d’un acte adopté à peu près un an après la décision attaquée.

238    À la lumière de ce qui précède, la deuxième branche du deuxième moyen doit être rejetée.

d)      Sur la septième branche, portant sur la rétention des données des autres établissements

239    La requérante soutient pour la première fois, dans son mémoire en réplique, que les exigences posées par la Cour dans l’arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU (C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601), concernant la mise en balance de l’obligation de motivation pesant sur le CRU avec l’obligation de ce dernier de respecter le secret des affaires des établissements concernés ne sont pas applicables dans la présente affaire. En effet, conformément à l’arrêt du 19 juin 2018, Baumeister (C‑15/16, EU:C:2018:464, points 54 et 56), les données des autres établissements sur lesquelles est fondée la décision attaquée ne seraient plus couvertes par le secret des affaires, car, la date de référence pour la période de contribution 2017 étant le 31 décembre 2015, ces données dateraient de plus de cinq ans.

240    Le CRU conteste cette argumentation, sans pour autant remettre en question la recevabilité de cette branche.

241    Il convient de rappeler que le principe même de la méthode de calcul des contributions ex ante, tel qu’il ressort de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014, implique l’utilisation, par le CRU, de données couvertes par le secret des affaires ne pouvant pas être reprises dans la motivation de la décision de fixation des contributions ex ante (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 114).

242    À cet égard, le CRU a fourni, dans la décision attaquée, les raisons pour lesquelles les données des établissements qui avaient été prises en compte aux fins du calcul des contributions ex ante pour 2017 étaient couvertes par le secret des affaires.

243    En particulier, le CRU a observé, au considérant 100 de la décision attaquée, que les secrets d’affaires des établissements – c’est-à-dire toutes les informations concernant l’activité professionnelle des établissements qui, en cas de divulgation à un concurrent et/ou à un public plus large, pourraient porter gravement atteinte aux intérêts de l’établissement – étaient considérés comme des informations confidentielles. Dans le cadre du calcul des contributions ex ante, les informations fournies par les établissements par l’intermédiaire de leurs formulaires de déclaration des données, sur lesquelles le CRU s’appuie pour calculer leur contribution ex ante, étaient considérées comme des secrets d’affaires.

244    En outre, aux considérants 102 à 105 de la décision attaquée, le CRU a relevé qu’il lui était interdit de divulguer les données de chaque établissement qui constituaient la base des calculs dans ladite décision, alors qu’il était autorisé à divulguer les données agrégées et communes, dans la mesure où ces données étaient cumulées. Cela étant, les établissements bénéficiaient, selon ladite décision, d’une transparence totale sur le calcul de leur contribution annuelle de base et de leur multiplicateur d’ajustement pour les étapes de calcul de cette contribution, telles qu’elles étaient définies à l’annexe I du règlement délégué 2015/63, qui portaient sur le « calcul des indicateurs bruts » (étape 1), le « rééchelonnement des indicateurs » (étape 3) et le « calcul de l’indicateur composite » (étape 5). En outre, les établissements étaient en mesure d’obtenir les données communes utilisées indifféremment par le CRU pour tous les établissements ajustés en fonction de leur profil de risque pour les étapes de calcul portant sur la « discrétisation des indicateurs » (étape 2), l’« intégration du signe affecté » (étape 4) et le « calcul des contributions annuelles » (étape 6).

245    Or, la requérante conteste le caractère suffisant de ces explications, en ce que, à la date à laquelle la décision attaquée a été adoptée, les données des autres établissements dataient de six ans et, de ce fait, n’étaient plus couvertes par le secret des affaires et en ce que, en dépit de cela, le CRU n’a pas fourni les raisons pour lesquelles ces données n’ont pas été divulguées.

246    Pour apprécier cet argument, il y a lieu de rappeler que, lorsque les informations qui ont pu constituer des secrets d’affaires à une certaine époque datent de cinq ans ou plus, elles sont considérées, en principe, du fait de l’écoulement du temps, comme étant historiques et comme ayant perdu, de ce fait, leur caractère secret, à moins que, exceptionnellement, la partie qui se prévaut de ce caractère ne démontre que, en dépit de leur ancienneté, ces informations constituent encore des éléments essentiels de sa position commerciale ou de celles de tiers concernés (voir, en ce sens, arrêt du 19 juin 2018, Baumeister, C‑15/16, EU:C:2018:464, point 54 et jurisprudence citée).

247    À cet égard, il n’est pas contesté que les données individuelles des établissements sur lesquelles est fondée la décision attaquée pour le calcul de la contribution ex ante de la requérante dataient, au moment de l’adoption de cette décision, de plus de cinq ans.

248    Cependant, ainsi que le CRU l’a expliqué dans sa duplique et lors de l’audience, sans être contredit par la requérante, la position relative d’un établissement par rapport à celle de ses concurrents peut, dans la réalité économique du secteur bancaire, demeurer identique ou semblable pendant une période prolongée, allant au-delà de cinq ans. En effet, certains éléments, tels que le modèle commercial ou les activités d’un tel établissement, restent stables à court et à moyen terme, de sorte qu’un établissement présentant jadis un profil de risque élevé, au regard des données datant de plus que cinq ans, peut continuer à présenter un tel profil à la fin de la période initiale. Ainsi, en dépit de leur ancienneté, ces informations constituent encore des éléments essentiels de la position commerciale des établissements de crédit. Dans ces conditions, si de telles données essentielles étaient divulguées à travers la motivation de la décision attaquée, les opérateurs économiques actifs dans le secteur bancaire pourraient se fonder sur elles afin d’en déduire la position commerciale actuelle d’un établissement.

249    La requérante ne saurait ainsi prétendre que le CRU aurait dû divulguer dans la motivation de la décision attaquée les données individuelles des autres établissements permettant de vérifier le calcul de sa contribution ex ante, puisque, bien que celles-ci datent de six ans, elles constituent encore des éléments essentiels de la position commerciale de ces établissements.

250    Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel le CRU, pour s’acquitter de son obligation de motivation, doit lui fournir, sous une forme anonymisée, une liste de toutes les données des établissements qui se trouvent dans le même bin qu’elle.

251    D’une part, imposer au CRU une telle exigence irait au-delà des exigences imposées par la jurisprudence qui ont été rappelées aux points 217, 220 et 221 ci-dessus.

252    D’autre part, le CRU a soutenu, sans être sérieusement contredit sur ce point, que même une liste avec des données anonymisées pour un bin particulier risquait de permettre aux opérateurs économiques actifs dans le domaine bancaire, lesquels sont des opérateurs avisés, d’apprendre des secrets d’affaires de certains établissements. À cet égard, la requérante n’a pas, notamment, contesté que de tels opérateurs savaient quels établissements avaient tendance à avoir des valeurs élevées pour certains indicateurs de risque. Or, s’ils obtenaient des listes avec de telles données chaque année, ils pourraient suivre l’évolution des indicateurs de risque de ces établissements, quand bien même ceux-ci seraient composés de données commercialement sensibles. Un tel risque existe en particulier en ce qui concerne les grands établissements et ceux établis dans les États membres dans lesquels il n’existe qu’un nombre limité d’établissements redevables de la contribution ex ante. En effet, il n’est pas exclu que, dans ces hypothèses, un opérateur avisé soit en position de déduire l’identité de tels établissements, quand bien même ces derniers auraient été anonymisés. Ainsi, il ne saurait être reproché au CRU de ne pas avoir établi de liste de toutes les données anonymisées des établissements qui se trouvaient dans un même bin.

253    À la lumière de ce qui précède, la septième branche du deuxième moyen doit être rejetée.

e)      Sur la troisième branche, portant sur la motivation du niveau cible annuel

254    La requérante soutient qu’il est impossible de comprendre, sur la base de la décision attaquée, les raisons pour lesquelles le niveau cible annuel a été fixé à 1/8 de 1,05 % du montant total des dépôts couverts. Les explications supplémentaires fournies par le CRU aux points 17 et suivants de l’annexe III de cette décision ne suffiraient d’ailleurs pas pour éclairer la manière dont le niveau cible annuel a été effectivement déterminé. De plus, le CRU n’aurait pas communiqué le niveau cible final pronostiqué ni son interprétation du plafond mentionné à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement no 806/2014. Or, ainsi que la décision fixant les contributions ex ante pour la période de contribution 2022 le montrerait, le CRU s’estimerait être habilité à augmenter librement le niveau cible annuel en appliquant un coefficient qui n’est pas prévu par la réglementation applicable et à imposer ainsi aux établissements une charge disproportionnée.

255    Le CRU rétorque qu’il ressort des considérants 50 à 63 de la décision attaquée et des points 19 à 25 de l’annexe III de cette décision qu’il a fourni une motivation suffisante en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel pour la période de contribution 2017.

256    En particulier, le CRU aurait déterminé le niveau cible annuel en tenant compte de tous les éléments pertinents ainsi que des critères énoncés à l’article 69, paragraphe 2, du règlement no 806/2014. Par ailleurs, en ce qui concerne la croissance attendue des dépôts couverts, la décision attaquée aurait expliqué, d’une part, que, selon les données fournies par les systèmes de garantie des dépôts, la somme des dépôts couverts aurait augmenté de 2,2 % entre 2015 et 2016 et que, d’autre part, le taux prévisionnel de croissance de ces dépôts serait compris entre 1 % et 4 %. En outre, la manière dont les éventuels effets procycliques ont été pris en compte aurait été exposée au considérant 61 de la décision attaquée et aux points 23 et suivants de l’annexe III de cette décision.

257    Enfin, il aurait été possible pour la requérante de calculer le niveau cible final estimé en 2017 sur la base des données dont elle avait connaissance, tandis que l’absence de divulgation de l’interprétation du CRU concernant le plafond de 12,5 % prévu à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement no 806/2014 ne serait pas de nature à affecter la motivation de la décision attaquée.

258    À titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément à l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, au terme de la période initiale, les moyens financiers disponibles dans le FRU doivent atteindre le niveau cible final, qui correspond à au moins 1 % du montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants.

259    Selon l’article 69, paragraphe 2, du règlement no 806/2014, au cours de la période initiale, les contributions ex ante doivent être réparties aussi uniformément que possible dans le temps jusqu’à ce que le niveau cible final mentionné au point 258 ci-dessus soit atteint, mais en tenant dûment compte de la phase du cycle d’activité et de l’incidence que les contributions procycliques peuvent avoir sur la position financière des établissements.

260    L’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 précise que, chaque année, les contributions dues par l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants ne dépassent pas 12,5 % du niveau cible final.

261    En ce qui concerne le mode de calcul des contributions ex ante, l’article 4, paragraphe 2, du règlement délégué 2015/63 prévoit que le CRU détermine leur montant sur la base du niveau cible annuel, compte tenu du niveau cible final, et sur la base du montant moyen des dépôts couverts de l’année précédente, calculé trimestriellement, pour tous les établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants.

262    En l’espèce, ainsi qu’il ressort du considérant 63 de la décision attaquée, le CRU a fixé, pour la période de contribution 2017, le montant du niveau cible annuel à 7 161 808 441 euros.

263    Aux considérants 51 et 52 de la décision attaquée, le CRU a expliqué, en substance, que, en vue de déterminer le niveau cible annuel, il avait pris en compte le niveau cible final estimé pour 2023, la nécessité de répartir les contributions ex ante aussi uniformément que possible pendant la période initiale ainsi que la phase du cycle d’activité et les effets que ces contributions auraient sur la situation financière des établissements. Par la suite, le CRU a considéré approprié de fixer un coefficient qui était fondé sur ces paramètres et sur les moyens financiers déjà disponibles au sein du FRU (ci-après le « coefficient »). Le CRU a appliqué ce coefficient à un huitième du montant moyen des dépôts couverts en 2016, aux fins d’obtenir le niveau cible annuel.

264    Aux considérants 54 à 62 de la décision attaquée, le CRU a exposé la démarche suivie pour déterminer le niveau cible annuel.

265    Au considérant 54 de la décision attaquée, le CRU a expliqué qu’une attention particulière devait être portée à l’évolution attendue des dépôts couverts pendant la période initiale, puisque, si ces dépôts croissaient dans le temps, fixer le niveau cible annuel à 1 % du montant desdits dépôts ne suffirait pas pour atteindre le niveau cible final.

266    À cet égard, le CRU a constaté, au considérant 55 de la décision attaquée, que le montant moyen des dépôts couverts, calculé trimestriellement, s’élevait pour l’année 2016 à 5,546 billions d’euros.

267    Aux considérants 56 à 58 de la décision attaquée, le CRU a présenté l’évolution pronostiquée des dépôts couverts pour les six années restantes de la période initiale, à savoir de 2018 à 2023. Il a estimé que les taux annuels de croissance de ces dépôts jusqu’à la fin de la période initiale se situeraient entre 1 % et 4 %.

268    Aux considérants 59 à 61 de la décision attaquée, le CRU a présenté une évaluation de la phase du cycle d’activité et de l’effet procyclique potentiel que les contributions ex ante pourraient avoir sur la situation financière des établissements. Pour ce faire, il a indiqué avoir tenu compte de plusieurs éléments, tels que, notamment, la prévision de croissance du produit intérieur brut pour 2017 de la Commission ou encore des indicateurs clés pour le secteur bancaire de la zone euro, comme la solvabilité, la qualité des actifs et la rentabilité des établissements. À cet égard et en vue de ne pas aggraver les effets procycliques des contributions ex ante sur la solvabilité du secteur bancaire, le CRU a considéré qu’il serait pertinent de déterminer le niveau cible annuel au regard d’un taux d’évolution des dépôts couverts qui serait inférieur à celui préconisé, car étant le plus crédible.

269    Au considérant 62 de la décision attaquée, le CRU a conclu que, en raison des incertitudes entourant la relance économique, de leur impact négatif sur la croissance future des dépôts couverts et sur le cycle d’activité et du nombre limité de données susceptibles d’indiquer l’évolution future de ces dépôts, il était pertinent d’adopter une approche prudente en ce qui concernait les taux de croissance desdits dépôts pour les années à venir jusqu’à 2023.

270    Au regard de ces considérations, le CRU a calculé, au considérant 63 de la décision attaquée, le montant du niveau cible annuel en multipliant le montant moyen des dépôts couverts en 2016 par le coefficient de 1,05 % et en divisant le résultat de ce calcul par huit, conformément à la formule mathématique suivante, figurant au considérant 63 de ladite décision :

« Cible0 [montant du niveau cible annuel] = Total dépôts couverts2016 * 0,0105 * ⅛ = EUR 7 161 808 441. »

271    Lors de l’audience, le CRU a cependant indiqué qu’il avait déterminé le niveau cible annuel pour la période de contribution 2017 comme suit.

272    Premièrement, sur la base d’une analyse prospective, le CRU a fixé le montant des dépôts couverts de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants, pronostiqué pour la fin de la période initiale. Pour aboutir à ce montant, le CRU a pris en compte le montant moyen des dépôts couverts en 2016, le taux de croissance annuel de ces dépôts ainsi que le nombre de périodes de contribution restantes jusqu’à la fin de la période initiale.

273    Deuxièmement, conformément à l’article 69, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, le CRU a calculé 1 % du montant pronostiqué des dépôts couverts à la fin de la période initiale pour obtenir le montant estimé du niveau cible final devant être atteint le 31 décembre 2023.

274    Troisièmement, le CRU a déduit de ce dernier montant les ressources financières déjà disponibles dans le FRU en 2017, pour obtenir le montant qu’il restait à percevoir pendant les périodes de contribution restantes avant la fin de la période initiale.

275    Quatrièmement, le CRU a divisé ce dernier montant par le nombre de périodes de contribution restantes, pour le répartir uniformément entre ces périodes. Le niveau cible annuel pour la période de contribution 2017 a été ainsi fixé au montant mentionné au point 262 ci-dessus, à savoir environ 7,161 milliards d’euros.

276    Afin d’examiner si le CRU a respecté son obligation de motivation en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel, il convient tout d’abord de rappeler qu’un défaut ou une insuffisance de motivation constitue un moyen d’ordre public pouvant, voire devant, être soulevé d’office par le juge de l’Union (voir arrêt du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a., C‑89/08 P, EU:C:2009:742, point 34 et jurisprudence citée). Par conséquent, le Tribunal peut, voire doit, prendre en compte également d’autres défauts de motivation que ceux invoqués par la requérante, et ce, notamment, lorsque ceux-ci se révèlent au cours de la procédure.

277    À cette fin, les parties ont été entendues, au cours de la phase orale de la procédure, sur tous les éventuels défauts de motivation dont serait entachée la décision attaquée en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel. En particulier, interrogé expressément et à plusieurs reprises à cet égard, le CRU a décrit, étape par étape, la méthode qu’il avait réellement suivie pour déterminer le niveau cible annuel pour la période de contribution 2017, telle qu’elle est exposée aux points 274 à 277 ci-dessus.

278    En ce qui concerne, ensuite, le contenu de l’obligation de motivation, il ressort de la jurisprudence que la motivation d’une décision prise par une institution ou un organe de l’Union doit être, notamment, dépourvue de contradictions pour permettre aux intéressés de connaître les motifs réels de cette décision, en vue de défendre leurs droits devant la juridiction compétente, et à cette dernière d’exercer son contrôle (voir, en ce sens, arrêts du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 169 et jurisprudence citée ; du 22 septembre 2005, Suproco/Commission, T‑101/03, EU:T:2005:336, points 20 et 45 à 47, et du 16 décembre 2015, Grèce/Commission, T‑241/13, EU:T:2015:982, point 56).

279    De même, lorsque l’auteur de la décision attaquée fournit certaines explications concernant les motifs de celle-ci au cours de la procédure devant le juge de l’Union, ces explications doivent être cohérentes avec les considérations exposées dans cette décision (voir, en ce sens, arrêts du 22 septembre 2005, Suproco/Commission, T‑101/03, EU:T:2005:336, points 45 à 47, et du 13 décembre 2016, Printeos e.a./Commission, T‑95/15, EU:T:2016:722, points 54 et 55).

280    En effet, si les considérations exposées dans la décision attaquée ne sont pas cohérentes avec de telles explications fournies lors de la procédure juridictionnelle, la motivation de la décision concernée ne remplit pas les fonctions rappelées aux points 210 et 211 ci-dessus. En particulier, une telle incohérence empêche, d’une part, les intéressés de connaître les motifs réels de la décision attaquée, avant l’introduction du recours, et de préparer leur défense à leur égard et, d’autre part, le juge de l’Union d’identifier les motifs ayant servi de véritable support juridique à cette décision et d’examiner leur conformité aux règles applicables.

281    Enfin, il y a lieu de rappeler que, lorsque le CRU adopte une décision fixant les contributions ex ante, il doit porter à la connaissance des établissements concernés la méthode de calcul de ces contributions (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 122).

282    Il doit en aller de même pour la méthode de détermination du niveau cible annuel, ce montant revêtant une importance essentielle dans l’économie d’une telle décision. En effet, ainsi qu’il ressort du point 16 ci-dessus, le mode de calcul des contributions ex ante consiste en la répartition dudit montant entre tous les établissements concernés, de sorte qu’une augmentation ou une réduction de ce même montant entraîne une augmentation ou une réduction correspondante de la contribution ex ante de chacun de ces établissements.

283    Il ressort de ce qui précède que, si le CRU est tenu de fournir aux établissements, par le biais de la décision attaquée, des explications concernant la méthode de détermination du niveau cible annuel, ces explications doivent être cohérentes avec les explications fournies par le CRU pendant la procédure juridictionnelle et portant sur la méthode réellement appliquée.

284    Or, tel n’est pas le cas dans la présente affaire.

285    En effet, il convient tout d’abord de relever que la décision attaquée a exposé, au considérant 63, une formule mathématique qu’elle a présentée comme étant à la base de la détermination du niveau cible annuel. Or, il s’avère que cette formule n’intègre pas les éléments de la méthode réellement appliquée par le CRU, telle qu’explicitée lors de l’audience. En effet, ainsi qu’il ressort des points 272 à 275 ci-dessus, le CRU a obtenu le montant du niveau cible annuel, dans le cadre de cette méthode, en déduisant du niveau cible final les moyens financiers disponibles dans le FRU, en vue de calculer le montant qu’il restait à percevoir jusqu’à la fin de la période initiale et en divisant ce dernier montant par le nombre de périodes de contribution restantes. Or, ces deux étapes de calcul ne trouvent aucune expression dans ladite formule mathématique.

286    Des incohérences similaires affectent également la manière dont a été fixé le coefficient de 1,05 %, qui joue pourtant un rôle primordial dans la formule mathématique mentionnée au point 285 ci-dessus. En effet, ainsi qu’il ressort des considérants 51 et 52 de la décision attaquée, ce coefficient pourrait être compris en ce sens qu’il se base sur l’estimation du niveau cible final pour 2023, sur la nécessité de répartir les contributions ex ante aussi uniformément que possible pendant la période initiale ainsi que sur une analyse portant sur la phase du cycle d’activité et sur les effets que ces contributions auraient sur la situation financière des établissements. Or, comme le CRU l’a reconnu lors de l’audience, ce coefficient a été fixé de manière à pouvoir justifier le résultat du calcul du montant du niveau cible annuel, c’est-à-dire après que le CRU a calculé ce montant en application des quatre étapes exposées aux points 272 à 275 ci-dessus et, notamment, par la division par le nombre de périodes de contribution restantes du montant issu de la déduction des moyens financiers disponibles dans le FRU du niveau cible final. Or, cette démarche ne ressort aucunement de la décision attaquée.

287    Il s’ensuit que, en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel, la méthode réellement appliquée par le CRU, telle qu’explicitée lors de l’audience, ne correspond pas à celle décrite dans la décision attaquée, de sorte que les motifs réels, au regard desquels a été fixé ce niveau cible, ne pouvaient être identifiés sur la base de la décision attaquée ni par les établissements ni par le Tribunal.

288    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de constater que la décision attaquée est entachée de vices de motivation en ce qui concerne la détermination du niveau cible annuel.

289    La troisième branche du deuxième moyen doit ainsi être accueillie. Compte tenu des enjeux juridiques et économiques de la présente affaire, il est pourtant dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de poursuivre l’examen des autres moyens du recours.

f)      Sur la quatrième branche, portant sur la motivation insuffisante de la contribution annuelle de base

290    La requérante fait valoir que le CRU n’a pas précisé tous les éléments concrets du calcul de la contribution annuelle de base en ce qui concerne la requérante. La fiche individuelle ne contiendrait pas, notamment, le dénominateur qui doit être appliqué à cette contribution, à savoir la somme des passifs nets de tous les établissements concernés, adaptée conformément à l’article 5 du règlement délégué 2015/63, ni le « montant […] de la contribution de base de la requérante après application de la formule énoncée dans la décision [attaquée] ».

291    Le CRU conteste cette argumentation.

292    À titre liminaire, il convient de rappeler que, s’agissant des établissements qui doivent verser une contribution ex ante ajustée à leurs profils de risque, le calcul de cette contribution se fait, en substance, en deux étapes.

293    Dans la première étape, le CRU calcule une contribution annuelle de base en fonction du passif net de l’établissement concerné, conformément à l’article 70, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 et à l’article 103, paragraphe 2, de la directive 2014/59. En vertu de l’article 5 du règlement délégué 2015/63, certains passifs sont déduits de ce passif net.

294    Dans la seconde étape, le CRU adapte la contribution annuelle de base au profil de risque de l’établissement concerné, conformément à l’article 70, paragraphe 2, deuxième alinéa, sous b), du règlement no 806/2014 et à l’article 103, paragraphe 2, second alinéa, de la directive 2014/59.

295    La quatrième branche du deuxième moyen vise la première étape du calcul des contributions ex ante.

296    Aux considérants 78 à 80 de la décision attaquée, le CRU a expliqué la méthode de détermination du numérateur et du dénominateur servant de base pour ce calcul.

297    Par ailleurs, à la page 1 de la fiche individuelle, le CRU a exposé, sous le titre « Contribution annuelle de base (CAB) : numérateur », la valeur du numérateur qui avait été prise en compte pour calculer la contribution annuelle de base de la requérante ainsi que les données sur la base desquelles cette dernière avait été calculée.

298    En outre, à la page 2 de la fiche individuelle, sous le titre « Calcul de la contribution brute ([règlement délégué 2015/63], annexe 1, ‟étape 6”) », la décision attaquée a exposé la valeur du dénominateur qui avait été prise en compte pour ce calcul.

299    Il s’ensuit que la requérante disposait d’informations suffisantes pour comprendre, en substance, de quelle façon sa situation individuelle avait été prise en compte, conformément à la jurisprudence citée au point 217 ci-dessus.

300    Il est vrai que le CRU n’a pas décomposé, ni dans le corps de la décision attaquée ni dans les annexes de cette décision, le dénominateur de la contribution annuelle de base en fonction des éléments qui le constituaient, à savoir la somme des passifs nets de tous les établissements concernés, ajustée conformément à l’article 5 du règlement délégué 2015/63.

301    Cependant, ainsi que la requérante l’a admis à l’audience, ces éléments englobent les données individualisées de tous les établissements concernés.

302    Or, de tels éléments ne s’avèrent pas nécessaires pour permettre à la requérante de comprendre, en substance, de quelle façon sa situation individuelle a été prise en compte, aux fins du calcul de sa contribution ex ante, au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements concernés.

303    Par conséquent, imposer au CRU une exigence de communication desdits éléments irait au-delà des exigences prévues par la jurisprudence citée aux points 217, 220 et 221 ci-dessus.

304    La quatrième branche du deuxième moyen doit ainsi être rejetée.

g)      Sur la cinquième branche, portant sur la motivation insuffisante de l’ajustement de la contribution annuelle de base au risque

305    La cinquième branche du deuxième moyen s’articule, en substance, autour de trois griefs.

1)      Sur le premier grief, portant sur l’impossibilité de vérifier l’assujettissement de l’ensemble des établissements concernés à une contribution ajustée en fonction du profil de risque

306    Selon la requérante, il est impossible de vérifier si l’ensemble des établissements a effectivement été soumis à un ajustement au risque. En effet, si les statistiques publiées sur le site Internet du CRU indiquent le nombre d’établissements qui devraient payer une contribution ex ante ajustée en fonction de leur profil de risque, l’exactitude de ce nombre ne pourrait pas être contrôlée, puisque le CRU n’aurait pas encore publié, pour la période de contribution 2017, de « Fact Sheet » contenant de telles informations.

307    Le CRU  conteste cette argumentation.

308    Tout d’abord, il y a lieu de relever que, conformément à l’article 9, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, le CRU calcule le multiplicateur d’ajustement pour tous les établissements, hormis ceux qui sont éligibles au versement d’une contribution forfaitaire en vertu de l’article 10 de ce règlement délégué et ceux qui sont mentionnés à l’article 11 dudit règlement délégué, en combinant les indicateurs de risque mentionnés à l’article 6 du règlement délégué 2015/63 conformément à la formule mathématique et aux procédures exposées à l’annexe I de ce règlement délégué.

309    Ensuite, dans la mesure où l’argumentation de la requérante devrait être comprise en ce sens qu’elle reproche au CRU de ne pas avoir identifié dans la décision attaquée, par leur dénomination, tous les établissements participant au MRU dont la contribution ex ante avait été adaptée à leur profil de risque, il convient de relever que la requérante n’a pas présenté au Tribunal d’éléments de preuve sur la base desquels il serait possible de conclure que cette information était pertinente pour comprendre la manière dont sa situation individuelle avait été prise en compte aux fins du calcul de sa contribution ex ante, au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements concernés, en vertu de la jurisprudence citée au point 217 ci-dessus.

310    Enfin, dans la mesure où l’argumentation de la requérante devrait être comprise comme exigeant du CRU de communiquer le seul nombre d’établissements pour lesquels la contribution ex ante avait été ajustée en fonction de leur profil de risque pour la période de contribution 2017, force est de constater que l’annexe II de la décision attaquée permet d’identifier le nombre de tels établissements. En effet, en ce qui concerne la partie des contributions ex ante calculée sur la base nationale, ce nombre peut être vérifié, pour chaque État membre, dans la rubrique « N », aux pages 6 à 100 de l’annexe II de la décision attaquée. Il en va de même pour la partie des contributions ex ante calculée sur la base de l’union, dont les statistiques sont exposées aux pages 101 à 105 de l’annexe II de cette décision. Il ressort ainsi de ces statistiques que, pour la période de contribution 2017, un total de 1 643 établissements ont été soumis à une contribution ex ante ajustée à leur profil de risque.

311    Eu égard à ce qui précède, le premier grief de la cinquième branche du deuxième moyen doit être rejeté.

2)      Sur le deuxième grief, portant sur la prise en compte de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité »

312    La requérante  soutient que le CRU n’a pas fourni de motivation suffisante quant à la détermination de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité », en n’exposant pas, notamment, son analyse des éléments qui conduisaient à l’augmentation du profil de risque des établissements et qui étaient énoncés à l’article 6, paragraphe 6, sous a), i) à iv), du règlement délégué 2015/63. Or, le CRU aurait exposé une telle analyse pour les éléments qui conduisaient à la diminution du profil de risque des établissements et qui étaient définis à l’article 6, paragraphe 6, sous b), i) et ii), de ce règlement délégué.

313    Le CRU  conteste cette argumentation.

314    Il convient de relever, en premier lieu, que les sous-indicateurs relatifs à l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » sont déterminés par le CRU conformément aux conditions posées par l’article 6, paragraphe 6, du règlement délégué 2015/63.

315    En second lieu, aux considérants 111 à 113 de la décision attaquée, le CRU a expliqué de quelle manière il avait déterminé les sous-indicateurs de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité ». Le CRU y a, notamment, inclus une liste de ceux-ci, accompagnée de leurs définitions, et a expliqué, d’une part, les données précises qui constituaient ces sous-indicateurs et, d’autre part, la manière dont il avait pondéré lesdits sous-indicateurs aux fins du calcul de ce pilier de risque.

316    Une telle motivation permet à la requérante de comprendre la manière dont le CRU a appliqué l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » et répond ainsi aux exigences énoncées par la jurisprudence citée aux points 217, 220 et 221 ci-dessus.

317    Eu égard à ce qui précède, le deuxième grief de la cinquième branche du deuxième moyen doit être rejeté.

3)      Sur le troisième grief, portant sur la motivation des étapes 2 à 6 de l’adaptation de la contribution annuelle de base au profil de risque de la requérante

318    La requérante soutient que la motivation des étapes 2 à 6 de l’adaptation de la contribution annuelle de base à son profil de risque, telles que décrites dans la fiche individuelle, est insuffisante.

319    Le CRU conteste cette argumentation.

320    Afin d’apprécier le présent grief, il y a lieu d’examiner si la requérante disposait de la méthode de calcul utilisée par le CRU et d’informations suffisantes pour comprendre, en substance, de quelle façon sa situation individuelle avait été prise en compte, aux fins du calcul de sa contribution ex ante, au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements concernés, à travers les différentes étapes de ce calcul, telles qu’elles sont définies à l’annexe I du règlement délégué 2015/63.

i)      Étape 2

321    Il convient de relever que, aux fins d’appliquer l’annexe II, sous le titre « Étape 2 », du règlement délégué 2015/63, le CRU calcule, d’emblée, pour chaque indicateur et sous-indicateur de risque, l’« indicateur brut ». S’agissant des trois premiers piliers de risque, l’indicateur brut est calculé sur la base des définitions et des opérations énoncées au tableau reproduit à l’annexe I, sous le titre « Étape 1 », du règlement délégué 2015/63. Quant au pilier de risque IV, l’indicateur brut est calculé sur la base des définitions et des opérations énoncées aux considérants 111 à 113 de la décision attaquée. Tous les indicateurs bruts sont calculés en tenant compte des informations fournies par chaque établissement.

322    Pour chaque indicateur brut et pour chacun des indicateurs et des sous-indicateurs de risque et à l’exception de l’indicateur « mesure dans laquelle l’établissement a déjà bénéficié d’un soutien financier public exceptionnel », le CRU procède, lors de l’étape 2, aux opérations suivantes. Il calcule, dans un premier temps, un nombre de bins afin de comparer les indicateurs bruts des établissements. Dans un deuxième temps, le CRU assigne le même nombre d’établissements à chaque bin, en commençant par assigner au premier bin les établissements pour lesquels les valeurs de l’indicateur brut sont les plus faibles. De cette manière, chaque bin a des valeurs limites, qui sont déterminées par l’indicateur brut le plus faible et l’indicateur brut le plus élevé. Dans un troisième temps, le CRU assigne à tous les établissements figurant dans un bin donné l’« indicateur discrétisé » pour ce bin, dénommé , qui représente la valeur de l’ordre de ce bin, de la gauche vers la droite, de façon que l’indicateur discrétisé soit défini comme étant égal à 1, 2, 3 et jusqu’au chiffre du dernier bin.

323    En ce qui concerne, en premier lieu, le calcul du nombre des bins, celui-ci se fonde sur la formule mathématique prévue à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 2, du règlement délégué 2015/63. Cette formule est composée des trois éléments suivants :

–        le nombre d’établissements contribuant au FRU, dénommé N ;

–        la valeur , qui est calculée sur le fondement de ce nombre d’établissements N ;

–        la valeur , qui est calculée sur la base de ce même nombre d’établissements N, de la moyenne des indicateurs bruts en question, dénommé Image not found, et des indicateurs bruts de chaque établissement, dénommés .

324    Ainsi qu’il ressort du point 310 ci-dessus, la requérante pouvait prendre connaissance du nombre d’établissements N contribuant au FRU.

325    Par ailleurs, le CRU a communiqué, aux pages 21 à 25 et 101 à 105 de l’annexe II de la décision attaquée, les valeurs et ainsi que la moyenne des indicateurs bruts Image not found pour chaque indicateur et sous-indicateur de risque.

326    Enfin, il ressort des considérations exposées aux points 241 à 252 ci-dessus que le CRU n’était pas tenu de communiquer aux établissements les indicateurs bruts de tous les autres établissements concernés.

327    De ce fait, pour ce qui est du calcul du nombre de bins, le CRU a fourni aux établissements la transparence la plus étendue, dans les limites imposées par son obligation de respecter le secret des affaires de ces derniers, de sorte que la requérante disposait d’éléments suffisants pour comprendre, en substance, la manière dont le CRU avait effectué ce calcul.

328    En deuxième lieu, d’une part, la requérante avait accès aux valeurs minimales et maximales de chaque bin, pour chacun des indicateurs ou des sous-indicateurs de risque, puisque celles-ci figuraient aux pages 21 à 25 et 101 à 105 de l’annexe II de la décision attaquée. D’autre part, elle connaissait les indicateurs bruts qui avaient été retenus par le CRU pour le calcul de sa contribution ex ante, ces indicateurs figurant dans sa fiche individuelle. La requérante pouvait ainsi vérifier si les indicateurs bruts qui lui avaient été attribués étaient compris entre les valeurs minimales et maximales des bins auxquels elle avait été assignée.

329    En troisième lieu, les établissements peuvent vérifier, dans la fiche individuelle, l’indicateur discrétisé qui leur a été assigné pour un indicateur ou un sous-indicateur de risque donné.

330    Dans ces conditions, la requérante disposait d’informations suffisantes pour comprendre, en substance, les opérations effectuées lors de l’étape 2.

331    Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante.

332    La requérante soutient tout d’abord que, dans le cadre de l’application de l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 3, du règlement délégué 2015/63, il est impossible de vérifier si les établissements présentant le même indicateur brut ont bien été assignés au même bin. Ainsi, le CRU aurait dû fournir une liste de classement de tous les établissements, afin que la requérante soit en mesure de vérifier si leur répartition dans les différents bins était correcte. En outre, puisque la décision attaquée ne contient pas de détails concernant le troisième stade de l’étape 2, à savoir l’assignation aux établissements de l’indicateur discrétisé, la requérante n’aurait pas pu vérifier l’indicateur discrétisé qui lui a été attribué pour les différents indicateurs de risque.

333    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence citée au point 214 ci-dessus, l’obligation de motivation n’exige pas que la requérante ait accès à tous les éléments lui permettant de vérifier l’exactitude du calcul de sa contribution ex ante.

334    En particulier, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 219 ci-dessus, le CRU n’est pas tenu de fournir à la requérante des données couvertes par le secret des affaires relatives à la situation économique de chacun des autres établissements concernés.

335    Or, le CRU a pu légitimement considérer que l’indicateur discrétisé assigné à un établissement était couvert par le secret des affaires. En effet, le CRU pouvait estimer qu’une éventuelle divulgation de cette information risquerait de révéler la situation économique d’un tel établissement et, notamment, le niveau de risque encouru par ce dernier pour certaines activités financières, en permettant d’effectuer une comparaison directe de ce niveau de risque avec celui encouru par les autres établissements.

ii)    Étape 3

336    Lors de l’étape 3, le CRU rééchelonne, pour chaque indicateur et sous-indicateur de risque, les indicateurs discrétisés résultant de l’étape 2 sur une échelle de 1 à 1 000 afin d’obtenir un « indicateur rééchelonné », dénommé .

337    Pour calculer cet indicateur rééchelonné, le CRU applique une formule qui a recours aux trois éléments suivants :

–        l’indicateur discrétisé assigné à l’établissement concerné lors de l’étape 2 ;

–        l’argument de fonction maximum, dont la valeur correspond au chiffre du dernier bin pour l’indicateur ou le sous-indicateur de risque concerné ;

–        l’argument de fonction minimum, dont la valeur correspond au chiffre du premier bin pour l’indicateur ou le sous-indicateur de risque en question.

338    La requérante avait accès à ces éléments. D’une part, l’indicateur discrétisé est le résultat de l’opération de l’étape 2 qui est décrite au point 322 ci-dessus. D’autre part, les valeurs des arguments de fonction maximum et minimum mentionnées au point 337 ci-dessus figurent aux pages 21 à 25 et 101 à 105 de l’annexe II de la décision attaquée, aux lignes « Bin min. » et « Bin max. ».

339    Par conséquent, la requérante disposait d’informations suffisantes pour comprendre l’opération effectuée lors de l’étape 3 et obtenir ainsi l’indicateur rééchelonné.

iii) Étape 4

340    À l’étape 4, pour chaque indicateur et sous-indicateur de risque, le CRU calcule l’« indicateur rééchelonné transformé », dénommé .

341    À cet égard, l’annexe I, sous le titre « Étape 4 », point 1, du règlement délégué 2015/63, affecte à chaque indicateur de risque soit un signe positif, soit un signe négatif. Pour les indicateurs de risque affectés d’un signe positif, plus les valeurs sont élevées, plus le profil de risque de l’établissement est élevé. Pour les indicateurs de risque affectés d’un signe négatif, plus les valeurs sont élevées, plus le profil de risque de l’établissement est faible.

342    Une fois le signe appliqué, le CRU calcule les indicateurs rééchelonnés transformés, conformément à la formule prévue à cet effet à l’annexe I, sous le titre « Étape 4 », point 2, du règlement délégué 2015/63.

343    Le calcul de l’indicateur rééchelonné transformé est effectué en employant l’indicateur rééchelonné obtenu au cours de l’étape 3. Ainsi, si le signe appliqué à l’indicateur de risque concerné est négatif, l’indicateur rééchelonné transformé a la même valeur que l’indicateur rééchelonné. En revanche, si le signe appliqué à l’indicateur de risque en cause est positif, il convient de déduire l’indicateur rééchelonné du nombre 1 001, conformément à la formule .

344    Tout d’abord, compte tenu de la nature des opérations mentionnées au point 343 ci-dessus, qui soit n’impliquent aucun calcul, soit se limitent à des calculs simples sans utilisation de données supplémentaires, la requérante ne saurait prétendre qu’elle ne disposait pas d’informations suffisantes pour vérifier lesdites opérations effectuées par le CRU.

345    Ensuite, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel, dans le cadre de l’étape 4, le CRU n’a pas expliqué les raisons pour lesquelles il avait appliqué systématiquement un signe positif aux indicateurs de risque du pilier de risque IV.

346    Sur ce point, le CRU a précisé, au considérant 125 de la décision attaquée, que l’application d’un signe négatif ou positif dépendait du caractère de l’indicateur de risque donné. Ensuite, il a rappelé que, pour les indicateurs affectés d’un signe positif, plus les valeurs étaient élevées, plus le profil de risque de l’établissement était élevé. Ainsi, le CRU a appliqué à tous les indicateurs de risque qui composaient le pilier de risque IV, à l’exception de l’indicateur de risque SPI, un signe positif, puisque plus les valeurs pour ces indicateurs étaient élevées, plus le profil de risque de l’établissement était élevé.

347    En outre, la requérante a tort de soutenir qu’elle ne peut pas vérifier les opérations effectuées lors de l’étape 4, car celles-ci s’appuient sur les valeurs résultant de l’étape 3, qu’elle n’est pas en mesure de connaître.

348    En effet, comme cela a été exposé aux points 336 à 338 ci-dessus, la requérante peut calculer elle-même les indicateurs rééchelonnés qui lui ont été appliqués, de sorte qu’elle peut également vérifier si le résultat de leur transformation lors de l’étape 4 – qui figure dans la colonne « Score du bin (TRI) » de sa fiche individuelle – est correct.

349    Enfin, la requérante considère que, dans le cadre de l’étape 4, le CRU n’a pas motivé sa décision quant à la pondération de l’indicateur de risque SPI. Le CRU n’aurait pas, notamment, précisé de quelle manière il avait pris en compte, conformément à l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63, la pondération relative de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » aux fins de l’application de l’indicateur de risque SPI. De même, il n’aurait pas expliqué les raisons de la répartition des établissements en trois bins, l’attribution des facteurs d’ajustement de 7/9 et 5/9 à deux de ces bins, les critères selon lesquels les établissements avaient été assignés auxdits bins et les raisons pour lesquelles la requérante avait été affectée à l’un de ces bins donnés.

350    Sur ce point, il y a lieu de relever, d’une part, que le CRU a expliqué au considérant 127 de la décision attaquée que, même si l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 l’obligeait à pondérer l’indicateur de risque SPI selon les indicateurs de risque qui y étaient énoncés, il devait s’assurer que même des établissements avec le profil le plus risqué puissent encore bénéficier de leur appartenance à un SPI dans le cadre du calcul des contributions ex ante. Dans cette optique, le CRU a indiqué, aux considérants 127 et 128 de la décision attaquée ainsi qu’au point 30 de l’annexe III de cette décision que, afin d’atteindre cet objectif, il avait établi trois bins pour pondérer l’indicateur de risque SPI et avait assigné les établissements qui présentaient le profil de risque le plus faible au troisième bin, pour lequel aucun ajustement de cet indicateur n’était prévu. Il découle également desdites explications que le CRU a assigné, dans cette même logique, les établissements qui présentaient un profil de risque moyen et ceux qui présentaient le profil de risque le plus élevé, respectivement, au deuxième et au premier bins en leur appliquant un facteur d’ajustement de 7/9 et de 5/9 pour ledit indicateur de risque.

351    À ce dernier égard, le CRU a ajouté au point 30 de l’annexe III de la décision attaquée que, en appliquant les facteurs d’ajustement mentionnés au point 350 ci-dessus, même les établissements avec un profil de risque modéré ou élevé profitaient encore de leur appartenance à un SPI en ce qui concernait le calcul des contributions ex ante, ne serait-ce qu’à un moindre degré que les établissements présentant un faible profil de risque.

352    De telles explications permettent à la requérante de comprendre les raisons qui ont guidé le CRU lors de la pondération de l’indicateur de risque SPI et au Tribunal d’exercer son contrôle juridictionnel.

353    S’agissant, d’autre part, des raisons pour lesquelles la requérante a été affectée à un bin donné pour l’indicateur de risque SPI, il suffit de constater que, au considérant 128 de la décision attaquée, le CRU a expliqué qu’il avait classé les établissements concernés en fonction de la moyenne arithmétique équitablement pondérée des indicateurs rééchelonnés transformés des neuf sous-indicateurs de risque du pilier de risque IV.

354    Une telle motivation est suffisante, de sorte que l’argumentation de la requérante ne saurait prospérer.

iv)    Étape 5

355    Lors de l’étape 5, le CRU effectue les opérations suivantes.

356    Dans un premier temps, le CRU agrège les indicateurs de risque i au sein de chaque pilier de risque j selon une moyenne arithmétique pondérée, en appliquant la formule prévue à cet effet à l’annexe I, sous le titre « Étape 5 », point 1, du règlement délégué 2015/63.

357    Cette formule est résolue sur la base, d’une part, de la pondération de l’indicateur de risque concerné au sein du pilier de risque donné, dénommée , et, d’autre part, de l’indicateur rééchelonné transformé. Or, de telles pondérations figurent non seulement à l’article 7, paragraphes 2 à 4, du règlement délégué 2015/63, mais aussi dans la fiche individuelle de la requérante et à la page 5 de l’annexe II de la décision attaquée. En outre, l’indicateur rééchelonné transformé a été obtenu au cours de l’étape 4.

358    Dans ces conditions, la requérante ne saurait prétendre qu’elle n’avait pas accès aux données nécessaires pour résoudre ladite formule.

359    Dans un deuxième temps, le CRU agrège les piliers de risque j pour obtenir l’« indicateur composite », dénommé , selon une moyenne géométrique pondérée, en appliquant la formule prévue à cet effet à l’annexe I, sous le titre « Étape 5 », point 2, du règlement délégué 2015/63.

360    Cette formule est résolue sur la base de la pondération des piliers de risque, dénommée , prévue à l’article 7, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63 et des valeurs obtenues à la suite de l’agrégation des indicateurs de risque au sein de chaque pilier de risque, dans le cadre de l’opération décrite aux points 356 et 357 ci-dessus. Ces dernières valeurs sont communiquées à la requérante dans sa fiche individuelle.

361    Dans un troisième temps, le CRU adapte l’indicateur composite en appliquant la formule prévue à cet effet à l’annexe I, sous le titre « Étape 5 », point 3, du règlement délégué 2015/63, à savoir 1 000 , pour obtenir l’« indicateur composite final », dénommé . Par conséquent, les établissements ayant un profil de risque plus élevé obtiennent un indicateur composite final plus élevé.

362    Dans ce contexte, la requérante soutient que, dans le cadre de l’étape 5, le CRU aurait dû expliquer, d’une part, la procédure d’agrégation des indicateurs de risque au sein de chaque pilier de risque, en tenant compte, notamment, des pondérations relatives des indicateurs prescrites à l’article 7 du règlement délégué 2015/63 et en exposant comment il avait abouti à l’agrégation desdits indicateurs et, d’autre part, la manière dont l’indicateur composite avait été obtenu. Il en irait d’autant plus ainsi que, lors de la période de contribution 2017, certains de ces mêmes indicateurs n’ont pas été appliqués par le CRU et que leur pondération a, par conséquent, dû être répartie.

363    À cet égard, il convient tout d’abord de relever que, ainsi qu’il ressort des points 356 à 361 ci-dessus, le processus d’agrégation des indicateurs de risque est fondé sur les formules prévues à l’annexe I, sous le titre « Étape 5 », points 1 à 3, du règlement délégué 2015/63.

364    Ensuite, il découle de ces mêmes points que la requérante disposait de tous les éléments nécessaires pour résoudre lesdites formules.

365    Enfin, le CRU a expliqué au considérant 107 de la décision attaquée que, comme certains indicateurs de risque n’avaient pas été appliqués lors de la période de contribution 2017, les pondérations des indicateurs de risque disponibles avaient été proportionnellement rééchelonnées, de sorte que la somme de leurs pondérations atteigne 100 %, étant entendu qu’un tel redimensionnement était prévu à l’article 20, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63.

366    Eu égard à ce qui précède, la requérante disposait d’informations suffisantes pour comprendre les opérations prévues lors de l’étape 5 et mises en œuvre par le CRU.

v)      Étape 6

367    Lors de l’étape 6, le CRU effectue les deux opérations suivantes.

368    Dans un premier temps, le CRU calcule le multiplicateur d’ajustement, dénommé , en rééchelonnant l’indicateur composite final résultant de l’étape 5 sur une échelle allant de 0,8 à 1,5, conformément à la formule prévue à l’annexe I, sous le titre « Étape 6 », point 1, du règlement délégué 2015/63.

369    Pour résoudre cette formule, le CRU s’appuie sur trois types de données, à savoir :

–        l’indicateur composite final de l’établissement concerné ;

–        l’argument de fonction minimum de l’indicateur composite final, dénommée , qui correspond à la valeur minimale de cet indicateur pour tous les établissements contribuant au FRU pour lesquels un tel indicateur est calculé ;

–        l’argument de fonction maximum de l’indicateur composite final, dénommée , qui correspond à la valeur maximale de ce même indicateur pour lesdits établissements.

370    L’indicateur composite final de l’établissement concerné résulte de l’étape 5. En outre, les fonctions minimum et maximum, mentionnées au point 369 ci-dessus, sont des données qui sont identiques pour tous les établissements dont la contribution annuelle de base est ajustée selon leur profil de risque. Ces données figurent dans la fiche individuelle de chaque établissement ainsi qu’à la page 4 de l’annexe II de la décision attaquée, dans la quatrième et la cinquième colonne du tableau qui y figure, intitulées respectivement « k » et « l ». Par conséquent, la requérante avait accès aux données nécessaires pour résoudre la formule prévue à l’annexe I, sous le titre « Étape 6 », point 1, du règlement délégué 2015/63.

371    Dans un second temps, le CRU calcule la contribution finale de l’établissement concerné, dénommée , selon la formule exposée à l’annexe I, sous le titre « Étape 6 », point 2, du règlement délégué 2015/63.

372    Ce calcul est effectué sur la base de cinq données, à savoir :

–        le niveau cible annuel ajusté conformément à l’annexe I, sous le titre « Étape 6 », point 2, du règlement délégué 2015/63, dénommé « Target » ;

–        le passif net de l’établissement donné ajusté selon l’article 5 du règlement délégué 2015/63, qui constitue le numérateur de la contribution annuelle de base, dénommé ;

–        la somme des contributions annuelles de base ajustées au risque de tous les établissements concernés, dénommée ;

–        le passif net cumulé de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants, qui constitue le dénominateur de la contribution annuelle de base, dénommé ;

–        le multiplicateur d’ajustement de l’établissement donné.

373    Le passif net de la requérante, ajusté selon l’article 5 du règlement délégué 2015/63, et son multiplicateur d’ajustement ainsi que le passif net cumulé de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants ont été communiqués à la requérante dans sa fiche individuelle. Par ailleurs, l’annexe II de la décision attaquée a indiqué, à la page 4, le niveau cible annuel ajusté – dans la première colonne, intitulée « h », du tableau y figurant – ainsi que la somme des contributions annuelles de base ajustées au risque de tous les établissements concernés, cette somme étant reproduite dans la troisième colonne, intitulée « j », du même tableau.

374    Enfin, des explications supplémentaires concernant l’étape 6 ont été fournies par le CRU aux considérants 132 à 135 de la décision attaquée.

375    Dans ces conditions, la requérante disposait d’informations suffisantes pour comprendre les calculs de l’étape 6.

376    Cette conclusion n’est pas infirmée par l’argumentation de la requérante.

377    S’agissant du calcul du multiplicateur d’ajustement, lors de l’étape 6, mentionné aux points 368 et 369 ci-dessus, la requérante a tort de soutenir que, en l’absence de communication des indicateurs composites finals de tous les établissements, elle ne serait pas en mesure de savoir si les valeurs des arguments des fonctions minimum et maximum des indicateurs composites finals, mentionnées au point 369 ci-dessus, ne constituent pas des exceptions conduisant à une déformation des multiplicateurs d’ajustement.

378    Sur ce point, il ressort de la jurisprudence citée au point 212 ci‑dessus que l’obligation de motivation n’exige pas que la requérante ait accès à tous les éléments lui permettant de vérifier l’exactitude du calcul de sa contribution ex ante. Parmi les éléments que le CRU n’est ainsi pas tenu de communiquer à la requérante figurent également les indicateurs composites finals de tous les établissements. Leurs valeurs sont en effet susceptibles de constituer des informations sur la situation économique des établissements concernés et, notamment, sur le niveau de risque encouru par eux sur les marchés, étant entendu que les établissements ayant un profil de risque plus élevé obtiennent un indicateur composite final plus élevé. Dans ces conditions, le CRU a pu légitimement considérer que la divulgation des indicateurs composites finals de tous les établissements porterait atteinte à son obligation de protéger le secret des affaires des établissements concernés. Par conséquent, à la lumière de la jurisprudence citée au point 214 ci‑dessus, les explications fournies par le CRU au considérant 132 de la décision attaquée et les données communiquées par le biais de la fiche individuelle et de la page 4 de l’annexe II de cette décision peuvent être considérées comme étant suffisantes.

379    De même, la requérante ne saurait soutenir, s’agissant du calcul de la contribution finale lors de l’étape 6 mentionné aux points 371 et 372 ci-dessus, que, malgré la reproduction de la formule utilisée pour ce calcul et l’explication de ses différentes composantes dans la décision attaquée, le CRU n’expliquerait pas comment il est parvenu, en ce qui la concerne, au résultat du calcul indiqué dans la fiche individuelle.

380    D’une part, ainsi qu’il ressort des considérants 133 à 135 de la décision attaquée, la contribution finale de la requérante a été calculée selon la formule exposée à l’annexe I, sous le titre « Étape 6 », point 2, du règlement délégué 2015/63. D’autre part, comme il a été relevé au point 373 ci-dessus, la requérante pouvait retrouver les données nécessaires pour résoudre cette formule dans sa fiche individuelle ainsi que dans les colonnes h et j du tableau figurant à la page 4 de l’annexe II de la décision attaquée.

381    Il résulte de ce qui précède qu’en utilisant, d’une part, les formules prévues par l’annexe I du règlement délégué 2015/63 et, d’autre part, les données figurant aux annexes I et II de la décision attaquée, la requérante est effectivement en mesure de vérifier, étape par étape, le calcul de sa contribution ex ante par le CRU.

382    En conséquence, le troisième grief de la cinquième branche du deuxième moyen doit être rejeté.

h)      Sur la sixième branche, portant sur l’existence des décisions intermédiaires non publiées

383    La requérante soutient que, en dépit des affirmations contraires du CRU, les décisions internes qui ont précisé la méthode du calcul des contributions ex ante (ci-après les « décisions intermédiaires ») adoptées au moment de l’édiction de la décision initiale sont également pertinentes dans le cadre de l’adoption de la décision attaquée.

384    Or, dans la mesure où ces décisions intermédiaires ne seraient pas reprises dans le contenu de la décision attaquée et n’ont pas été publiées ou communiquées à la requérante, cette dernière décision serait insuffisamment motivée. Il en irait d’autant plus ainsi qu’il n’est pas exclu que d’autres décisions intermédiaires aient été prises en 2021 en vue de l’adoption de la décision attaquée.

385    Le CRU conteste cette argumentation.

386    Il ressort de la jurisprudence que la motivation figurant dans la décision fixant des contributions ex ante doit être considérée comme étant insuffisante lorsque cette motivation repose, s’agissant de certains éléments pour lesquels le CRU doit fournir une motivation, uniquement sur d’autres actes juridiques, tels que les décisions intermédiaires, que le CRU a adoptées aux fins de préciser et, dans certains cas, compléter certains aspects de la fixation desdites contributions, mais qu’il n’a pas publiées ou autrement communiquées aux établissements (voir arrêts du 28 novembre 2019, Hypo Vorarlberg Bank/CRU, T377/16, T645/16 et T809/16, EU:T:2019:823, points 194 et 199, et du 28 novembre 2019, Portigon/CRU, T365/16, EU:T:2019:824Hypo Vorarlberg Bank/CRU, points 171 et 176).

387    En l’espèce, le CRU a produit, en réponse à une mesure d’instruction du Tribunal du 12 décembre 2022, les décisions intermédiaires se rapportant au calcul des contributions ex ante pour la période de contribution 2017, tout en précisant que, ainsi qu’il ressort également du point 13 de l’annexe III de la décision attaquée, ces décisions intermédiaires avaient été prises au moment de l’adoption de la décision initiale. Lesdites décisions intermédiaires, qui ont été ensuite signifiées à la requérante dans leur version non confidentielle, comportent, notamment, des positions internes qui étaient adressées au personnel du CRU en vue de le guider dans le processus de calcul des contributions ex ante.

388    Toutefois, ainsi qu’il ressort du résumé de la décision attaquée aux points 6 à 19 ci-dessus, celle-ci comporte une motivation concernant la fixation des contributions ex ante pour la période de contribution 2017.

389    En outre, la requérante n’a identifié aucun élément figurant dans les décisions intermédiaires qui n’a pas été repris dans la décision attaquée elle-même et qui aurait été pris en compte aux fins de la détermination des contributions ex ante pour la période de contribution 2017.

390    Par conséquent, rien n’indique que l’existence des décisions intermédiaires ait eu une incidence quelconque sur l’étendue des informations dont la requérante disposait afin de pouvoir vérifier la légalité de la fixation de sa contribution ex ante et de la contester devant le juge de l’Union. En particulier, ainsi qu’il ressort de l’examen des première à cinquième branches ainsi que de la septième branche du deuxième moyen, la requérante a pu comprendre tous les éléments du calcul de la contribution ex ante, à l’exception de la détermination du niveau cible annuel, sur la seule base de la décision attaquée.

391    Partant, la décision attaquée se distingue de la décision du CRU fixant les contributions ex ante qui faisait l’objet des affaires ayant donné lieu aux arrêts du 28 novembre 2019, Hypo Vorarlberg Bank/CRU (T‑377/16, T‑645/16 et T‑809/16, EU:T:2019:823), et du 28 novembre 2019, Portigon/CRU (T‑365/16, EU:T:2019:824). En effet, cette dernière décision ne comportait pas, notamment, d’indications concernant la détermination par le CRU du pilier de risque IV, de telles indications ne figurant que dans les décisions intermédiaires en cause dans ces affaires (arrêts du 28 novembre 2019, Hypo Vorarlberg Bank/CRU, T‑377/16, T‑645/16 et T‑809/16, EU:T:2019:823, point 195, et du 28 novembre 2019, Portigon/CRU, T‑365/16, EU:T:2019:824, point 172).

392    Enfin, la requérante n’a pas expliqué comment – compte tenu des considérations figurant aux points 388 à 390 ci-dessus – la publication des décisions intermédiaires lui aurait permis d’exercer, dans de meilleures conditions, ses droits devant les juridictions de l’Union ni comment une telle publication aurait permis à ces dernières d’exercer plus efficacement leur contrôle.

393    Dans ces conditions, la seule absence de publication ou de communication des décisions intermédiaires ne saurait, en elle-même, entraîner un défaut de motivation de la décision attaquée.

394    Eu égard à ce qui précède, la sixième branche du deuxième moyen doit être rejetée.

i)      Conclusion sur le deuxième moyen

395    Eu égard à ce qui précède, la troisième branche du deuxième moyen doit être accueillie. Les autres branches de ce moyen doivent être rejetées.

3.      Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du droit à une protection juridictionnelle effective en raison du caractère invérifiable de la décision attaquée

396    La requérante fait valoir que le CRU a violé le principe de protection juridictionnelle effective, puisque, d’une part, elle n’est pas en mesure de s’exprimer utilement sur les éléments qui sous-tendent la décision attaquée et d’orienter ses moyens en conséquence et, d’autre part, le contrôle juridictionnel de la décision attaquée est en pratique impossible. En effet, ni le Tribunal ni la requérante ne disposeraient de données afférentes aux établissements autres que cette dernière, bien que ces données soient nécessaires pour la vérification du calcul de la contribution ex ante versée par cette dernière et qu’elles ne soient plus couvertes par le secret des affaires en raison de l’écoulement du temps. Le CRU n’aurait pas non plus divulgué, à tout le moins de manière complète, transparente et compréhensible, d’autres informations nécessaires à l’examen et à l’évaluation de la décision attaquée.

397    En outre, le pouvoir d’appréciation dont le CRU disposerait n’impliquerait pas que le juge de l’Union renonce à exercer un contrôle juridictionnel approfondi tant en droit qu’en fait.

398    Le CRU conteste cette argumentation.

399    L’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte exige que l’intéressé puisse connaître les motifs sur lesquels est fondée la décision prise à son égard, soit par la lecture de la décision elle-même, soit par une communication de ces motifs faite sur sa demande, sans préjudice du pouvoir du juge compétent d’exiger de l’autorité en cause qu’elle communique lesdits motifs, afin de lui permettre de défendre ses droits dans les meilleures conditions possibles et de décider en pleine connaissance de cause s’il est utile de saisir le juge compétent, ainsi que pour mettre ce dernier pleinement en mesure d’exercer le contrôle de la légalité de la décision en cause (voir arrêts du 26 avril 2018, Donnellan, C‑34/17, EU:C:2018:282, point 55, et du 24 novembre 2020, Minister van Buitenlandse Zaken, C‑225/19 et C‑226/19, EU:C:2020:951, point 43).

400    En outre, eu égard au principe du contradictoire, lequel fait partie des droits de la défense mentionnés à l’article 47 de la Charte, les parties à un procès doivent avoir le droit de prendre connaissance de toutes les pièces ou observations présentées au juge en vue d’influer sur sa décision et de les discuter. En effet, le droit fondamental à un recours juridictionnel effectif ne permet pas de fonder une décision juridictionnelle sur des faits et des documents dont les parties elles-mêmes, ou l’une d’entre elles, n’ont pas pu prendre connaissance et sur lesquels elles n’ont donc pas été en mesure de prendre position (voir arrêts du 4 juin 2013, ZZ, C‑300/11, EU:C:2013:363, points 55 et 56, et du 23 octobre 2014, Unitrading, C‑437/13, EU:C:2014:2318, point 21).

401    Cependant, dans certains cas exceptionnels, une autorité de l’Union peut s’opposer à la communication à l’intéressé des motifs précis et complets qui constituent le fondement d’une décision prise à l’encontre de celui-ci, en invoquant des raisons relevant de la protection des données confidentielles. Dans un tel cas, il est nécessaire de mettre en œuvre des techniques et des règles de droit permettant de concilier, d’une part, les considérations légitimes relatives à la protection de données confidentielles ayant été prises en considération pour l’adoption d’une telle décision et, d’autre part, la nécessité de garantir à suffisance au justiciable le respect de ses droits procéduraux, tels que le droit d’être entendu ainsi que le principe du contradictoire (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, points 115 à 120 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 125).

402    Au regard de la nature spécifique des contributions ex ante, une telle conciliation doit être également effectuée dans le cas du calcul de ces contributions. En effet, ainsi qu’il ressort des considérants 105 à 107 de la directive 2014/59 et du considérant 41 du règlement no 806/2014, lesdites contributions visent à garantir, dans une logique d’ordre assurantiel, que le secteur financier procure des ressources financières suffisantes au MRU pour qu’il puisse remplir ses fonctions, tout en encourageant l’adoption, par les établissements concernés, de modes de fonctionnement moins risqués. Ainsi, le calcul des contributions ex ante repose, non sur l’application d’un taux à une assiette, mais, en application des articles 102 et 103 de la directive 2014/59 ainsi que des articles 69 et 70 du règlement no 806/2014, sur la définition d’un niveau cible final devant être atteint par la somme de ces contributions prélevées avant le 31 décembre 2023, puis d’un niveau cible annuel devant être réparti entre les établissements agréés sur le territoire des États membres participants (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 113).

403    Dès lors que le niveau cible final est défini comme devant s’élever à au moins 1 % du montant des dépôts couverts de l’ensemble de ces établissements et que la contribution annuelle de base de chaque établissement est calculée proportionnellement au montant de son passif net, rapporté au passif net cumulé de l’ensemble des établissements agréés sur le territoire de tous les États membres participants, il apparaît que le principe même de la méthode de calcul des contributions ex ante, tel qu’il ressort de la directive 2014/59 et du règlement no 806/2014, implique l’utilisation, par le CRU, de données couvertes par le secret des affaires (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 114).

404    Or, les institutions et organismes de l’Union sont, en principe, tenus, en application du principe de protection du secret des affaires, qui constitue un principe général du droit de l’Union, lequel est, notamment, concrétisé à l’article 339 TFUE, de ne pas révéler aux concurrents d’un opérateur privé des informations confidentielles fournies par celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, points 109 et 114 et jurisprudence citée).

405    Dans ces conditions, il appartenait à la Commission, lors de la mise en place du système de calcul des contributions ex ante par le règlement délégué 2015/63, de concilier le respect du secret des affaires avec le principe de protection juridictionnelle effective, de sorte que les données couvertes par ce secret ne puissent pas être communiquées aux intéressés et qu’elles ne puissent pas, notamment, être incluses dans la motivation des décisions fixant le montant des contributions ex ante.

406    Par ailleurs, en vertu de l’article 339 TFUE et de l’article 88 du règlement no 806/2014, le CRU était également tenu, lors de la communication de la décision attaquée, de veiller à ce ne pas divulguer de données couvertes par le secret des affaires aux établissements.

407    Cette caractéristique du système de calcul des contributions ex ante n’empêche pas pour autant l’exercice d’un contrôle juridictionnel effectif par le juge de l’Union.

408    En effet, d’une part, rien ne s’oppose à ce que, conformément à l’article 88, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 806/2014, le CRU divulgue, lors de l’adoption de sa décision fixant les contributions ex ante, des informations confidentielles obtenues dans le cadre de son activité sous une forme résumée ou agrégée, de telle sorte que les établissements concernés ne puissent être identifiés (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 136).

409    D’autre part, lorsque la motivation d’une telle décision doit être limitée en vue d’assurer la protection des données confidentielles, il appartient à l’auteur de cette décision, en cas de recours devant les juridictions de l’Union mettant en cause ces données, de se justifier devant ces dernières dans le cadre de l’instruction contentieuse (voir, en ce sens, arrêts du 1er juillet 2008, Chronopost et La Poste/UFEX e.a., C‑341/06 P et C‑342/06 P, EU:C:2008:375, point 110, et du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 145).

410    Le cas échéant, afin d’exercer un contrôle juridictionnel effectif conforme aux exigences de l’article 47 de la Charte, les juridictions de l’Union peuvent solliciter du CRU la production de données susceptibles de justifier les calculs dont l’exactitude est contestée devant elles, en assurant, en tant que de besoin, la confidentialité de ces données (arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 146).

411    En outre, en procédant à un examen de l’ensemble des éléments de droit et de fait fournis par le CRU, il incombe au juge de l’Union de vérifier le bien-fondé des raisons invoquées par celui-ci pour s’opposer à la communication des données utilisées aux fins du calcul de la contribution ex ante (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 126).

412    S’il s’avère que les raisons invoquées par le CRU s’opposent effectivement à la communication d’informations ou d’éléments de preuve produits devant le juge de l’Union, il est nécessaire de mettre en balance de manière appropriée les exigences liées au droit à une protection juridictionnelle effective, en particulier au respect du principe du contradictoire, et celles découlant de la protection du secret des affaires (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, EU:C:2013:518, point 128).

413    En l’espèce, il résulte de ce qui a été relevé aux points 241 à 252 ci-dessus que le CRU était fondé à s’opposer à la communication à la requérante des données individuelles afférentes aux autres établissements.

414    Par ailleurs, la requérante n’explique pas quelles informations, autres que celles couvertes par le secret des affaires des établissements, lui auraient été nécessaires en vue de comprendre, en substance, de quelle façon sa situation individuelle avait été prise en compte, aux fins du calcul de sa contribution ex ante, au regard de la situation de l’ensemble des autres établissements concernés.

415    En ce qui concerne, enfin, l’argument de la requérante tiré du pouvoir d’appréciation dont disposerait le CRU, il résulte de la jurisprudence que, si, dans les domaines donnant lieu à des appréciations économiques complexes, une institution ou un organisme de l’Union dispose d’un pouvoir d’appréciation en matière économique, cela n’implique pas que le juge de l’Union doit s’abstenir de contrôler l’interprétation, par cette institution ou cet organisme, de données de nature économique. Le juge de l’Union doit, notamment, non seulement vérifier l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (voir arrêt du 10 décembre 2020, Comune di Milano/Commission, C‑160/19 P, EU:C:2020:1012, point 115 et jurisprudence citée).

416    Dans ces conditions, la seule existence d’un pouvoir d’appréciation du CRU ne saurait impliquer que le Tribunal est empêché d’exercer un contrôle juridictionnel effectif de la décision attaquée.

417    Dans ces conditions, le troisième moyen doit être rejeté.

4.      Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation de plusieurs dispositions du droit primaire et du droit dérivé du fait de l’application d’un multiplicateur pour l’indicateur de risque SPI à la requérante

418    Le cinquième moyen s’articule autour de quatre branches.

a)      Sur la première branche, tirée d’une violation de l’article 113, paragraphe 7, du règlement no 575/2013 et de l’article 103, paragraphe 7, sous h), de la directive 2014/59

419    La requérante rappelle que, s’agissant de l’indicateur de risque SPI, la décision attaquée lui a appliqué un facteur d’ajustement de [confidentiel]. Or, l’application d’un tel facteur ne satisferait pas aux exigences de l’article 113, paragraphe 7, du règlement no 575/2013 ni de l’article 103, paragraphe 7, sous h), de la directive 2014/59. En effet, le SPI dont la requérante est membre protégerait tous les établissements qui en font partie de la même manière, de sorte qu’une différenciation entre ces établissements en ce qui concerne l’indicateur de risque SPI serait contraire au libellé et à l’esprit de ces dispositions.

420    Le CRU conteste cette argumentation.

421    D’une part, ainsi qu’il ressort des points 33 et 47 ci-dessus, rien dans le libellé de l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 ou de l’article 113, paragraphe 7, du règlement no 575/2013 n’interdisait à la Commission de prévoir à l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 que le CRU, lorsqu’il applique l’indicateur de risque SPI, doit tenir compte de la pondération relative de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité ».

422    D’autre part, il découle des considérants 127 et 128 de la décision attaquée et du point 30 de l’annexe III de cette décision que le CRU s’est conformé aux obligations qui lui incombaient en vertu de l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63, dont l’illégalité n’a d’ailleurs pas été établie.

423    Partant, la première branche du cinquième moyen doit être rejetée.

b)      Sur la deuxième branche, portant sur la violation de l’article 16 de la Charte et du principe de proportionnalité

424    La requérante soutient que, s’agissant de l’indicateur de risque SPI, son classement dans [confidentiel] et, partant, l’attribution qui lui a été faite du facteur d’ajustement [confidentiel] – qui a eu pour effet [confidentiel] – sont disproportionnés et violent sa liberté d’entreprise, consacrée à l’article 16 de la Charte, ainsi que le principe de proportionnalité, consacré à l’article 52, paragraphe 1, de celle-ci.

425    L’attribution d’un tel facteur d’ajustement pour l’indicateur de risque SPI serait manifestement injustifiée et arbitraire, car la requérante disposerait d’une bonne capitalisation et d’un profil de risque positif, de sorte que la probabilité de sa résolution serait faible. Cela apparaîtrait, notamment, à la lecture des résultats de la propre analyse de la requérante des indicateurs de risque ainsi que des statistiques de la BCE sur la base des informations disponibles en 2015.

426    Le CRU conteste cette argumentation.  

427    À titre liminaire, il y a lieu de constater que la requérante se borne à invoquer une violation de la liberté d’entreprise consacrée à l’article 16 de la Charte et du principe de proportionnalité, sans développer d’argumentation ciblée concernant ces principes.

428    Au regard de la jurisprudence citée au point 154 ci-dessus, les griefs de la requérante doivent ainsi être rejetés dans la mesure où ils visent la violation de tels principes.

429    Par ailleurs, si l’argumentation de la requérante doit être comprise en ce sens qu’elle soutient, en réalité, que le CRU a commis une erreur manifeste d’appréciation quand il lui a attribué le facteur d’ajustement [confidentiel] pour l’indicateur de risque SPI, il convient de relever ce qui suit.

430    En ce qui concerne l’indicateur de risque SPI, le CRU a précisé que la défaillance d’un établissement avec un bilan large et complexe, tel que la requérante, pourrait entièrement épuiser les fonds d’un SPI, à la différence de la défaillance d’un établissement avec un bilan plus réduit et simple. En conséquence, le risque que la requérante doive recourir au FRU n’est pas nécessairement couvert par son appartenance à un SPI. Or, la requérante n’a pas apporté d’éléments pour contester cette allégation.

431    En outre, la requérante ne saurait s’appuyer sur sa propre analyse des indicateurs de risque ou sur les statistiques de la BCE pour contester l’appréciation du CRU de l’indicateur de risque SPI.

432    D’une part, cette analyse et ces statistiques ne portent pas sur l’ensemble des établissements dont les données ont été prises en compte pour le calcul de l’indicateur de risque SPI de la requérante. En effet, dans sa propre analyse, la requérante ne se compare qu’avec six autres établissements allemands. En revanche, ainsi qu’il ressort de l’annexe II de la décision attaquée, le CRU a tenu compte des données de 1 643 établissements pour constituer les bins relatifs à l’indicateur de risque SPI sur la base de l’union et des données de 723 établissements pour constituer les bins relatifs à l’indicateur de risque SPI sur la base nationale.

433    Il en va de même pour les statistiques de la BCE. Ces dernières ne concernent qu’une fraction des établissements dont les données ont été prises en compte par le CRU pour la formation des bins relatifs à l’indicateur de risque SPI.

434    D’autre part, la propre analyse de la requérante et les statistiques de la BCE portent sur des facteurs qui ne sont pas pertinents pour la pondération de l’indicateur de risque SPI.

435    En effet, aux termes de l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63, lorsque le CRU pondère l’indicateur de risque SPI, il doit tenir compte de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » applicable à l’établissement concerné au sens de l’article 6, paragraphe 5, sous a), de ce règlement délégué.

436    Or, ni les différents facteurs dans la propre analyse de la requérante des indicateurs de risque, à savoir le ratio de fonds propres de base de catégorie 1, le ratio de fonds propres total, le ratio de capital TIER 1, le ratio de prêts non performants [non-performing loan quote (NPL)], le ratio de couverture, le ratio de délai de grâce (forbearance ) et le ratio d’expositions non performantes [non-performing exposures (NPE)], ni les facteurs dans les statistiques de la BCE, à savoir le ratio de fonds propres total, le ratio de fonds propres de catégorie 1 et le ratio de levier, ne sont inclus dans l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 ni dans l’article 6, paragraphe 5, sous a), de ce règlement délégué.

437    Partant, la deuxième branche du cinquième moyen doit être rejetée.

c)      Sur la troisième branche, portant sur la violation de l’article 20 de la Charte et du principe d’égalité de traitement

438    La requérante fait valoir que l’application qui lui a été faite du facteur d’ajustement [confidentiel] pour l’indicateur de risque SPI entraîne une différence de traitement injustifiée à l’égard d’établissements qui reçoivent [confidentiel] pour l’indicateur de risque SPI, de sorte que la décision attaquée viole l’article 20 de la Charte et le principe d’égalité de traitement.

439    En particulier, l’appartenance à un SPI serait une circonstance qui rend tous les établissements concernés comparables et il n’y aurait pas de critère objectif à même de justifier une différence de traitement entre les différents établissements appartenant à un SPI. L’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » ne serait pas un critère approprié, comme cela est exposé dans le cadre du quatrième moyen.

440    En outre, l’attribution du facteur d’ajustement [confidentiel] à la requérante constituerait une différenciation manifestement inappropriée, eu égard aux probabilités d’une défaillance de sa part, de sa résolution et de son recours au FRU.

441    Le CRU conteste cette argumentation.

442    D’une part, ainsi qu’il a été relevé aux points 68 à 71 ci-dessus, la requérante ne saurait soutenir que tous les établissements appartenant à un SPI se trouvent dans une situation comparable.

443    D’autre part, comme il a été constaté au point 73 ci-dessus, les éléments relatifs à l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » utilisés pour pondérer l’indicateur de risque SPI entre les différents établissements appartenant à un SPI constituent des critères objectifs qui sont, en outre, cohérents avec l’un des objectifs du MRU, à savoir l’encouragement des établissements à adopter des modes de fonctionnement moins risqués.

444    Au regard de la jurisprudence citée au point 67 ci-dessus, la troisième branche du cinquième moyen doit ainsi être rejetée.

d)      Sur la quatrième branche, portant sur la violation du principe de bonne administration

445    La quatrième branche s’articule autour de deux griefs.

1)      Sur le premier grief, en ce que le CRU n’aurait pas dûment motivé la décision attaquée

446    La requérante soutient que, dans la décision attaquée, le CRU n’explique pas à suffisance de droit, d’une part, les raisons pour lesquelles il est approprié de créer trois bins pour la pondération de l’indicateur de risque SPI au lieu de, par exemple, deux ou cinq bins et, d’autre part, pourquoi le facteur d’ajustement du premier bin doit être de 5/9 et celui du deuxième bin de 7/9 afin de « diversifier les effets de la participation à un [SPI] en fonction des facteurs additionnels liés au degré de risque des établissements ».

447    Le CRU conteste cette argumentation.

448    Il convient de relever que la requérante répète, en substance, une partie des arguments qu’elle a invoqués en ce qui concernait l’étape 4 à l’appui du troisième grief de la cinquième branche du deuxième moyen.

449    Partant, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 350 à 352 ci-dessus, le premier grief de la quatrième branche du cinquième moyen doit être rejeté.

2)      Sur le second grief, en ce que le CRU aurait violé son obligation d’instruction

450    La requérante soutient que, en l’assignant au bin [confidentiel] pour l’indicateur de risque SPI, le CRU n’a pas pris en compte tous les faits pertinents de manière complète, scrupuleuse et impartiale. En effet, il n’aurait pas examiné comment la protection accordée par le SPI dont la requérante est membre profite à ses membres. De même, il n’aurait pas vérifié si, et dans quelle mesure, l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63 pouvait justifier la formation d’un bin et une différenciation fondée sur le risque par rapport aux autres membres du SPI auquel appartient la requérante. Il en irait de même pour l’examen de la question de savoir si, et dans quelle mesure, le profil de risque de la requérante et d’autres circonstances de l’espèce ne justifieraient pas une assignation qui lui serait plus favorable.

451    Dans ce contexte, le CRU aurait également commis des erreurs d’appréciation. En effet, le processus d’assignation aux bins aboutirait à des résultats erronés, notamment en cas de fusion de deux établissements appartenant à un SPI. Dans un tel cas, l’assignation des autres établissements aux bins serait modifiée, parce qu’il y aurait moins d’établissements à répartir dans les différents bins, tandis que les critères déterminants pour la reconnaissance de l’indicateur de risque SPI mentionnés à l’article 6, paragraphe 7, du règlement délégué 2015/63 resteraient inchangés.

452    Le CRU conteste cette argumentation.

453    Le principe de bonne administration, tel que consacré à l’article 41 de la Charte, impose aux institutions et aux organes de l’Union l’obligation d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents du cas d’espèce (voir, en ce sens, arrêts du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, EU:C:1991:438, point 14, et du 23 septembre 2009, Estonie/Commission, T‑263/07, EU:T:2009:351, point 99 et jurisprudence citée).

454    En l’espèce, il y a lieu de relever, premièrement, que le CRU peut uniquement tenir compte, pour la pondération de l’indicateur de risque SPI, des éléments énoncés à l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63, à savoir l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » au sens de l’article 6, paragraphe 5, sous a), de ce règlement délégué.

455    Deuxièmement, le CRU est tenu de calculer l’indicateur de risque SPI sur la base des données transmises par les établissements conformément à l’article 14 du règlement délégué 2015/63.

456    Dans ces conditions, il ne saurait être reproché au CRU de ne pas avoir pris en considération, pour le calcul de la contribution ex ante de la requérante, des éléments invoqués par cette dernière, tels que ceux mentionnés au point 450 ci-dessus, qui ne sont pas prévus à l’article 7, paragraphe 4, ni à l’article 14 du règlement délégué 2015/63.

457    Troisièmement, il convient d’écarter le grief tiré de ce que le CRU aurait commis une erreur manifeste d’appréciation lorsqu’il a établi les bins pour la pondération de l’indicateur de risque SPI.

458    Tout d’abord, il découle des points 67 à 73 ci-dessus qu’il est loisible au CRU d’opérer des distinctions entre les membres d’un SPI pour apprécier le profil de risque des différents établissements aux fins du calcul de leur contribution ex ante.

459    Ensuite, ainsi qu’il ressort de l’examen du quatrième moyen ci-dessus, le CRU pouvait opérer ces distinctions sur le fondement du critère énoncé à l’article 7, paragraphe 4, du règlement délégué 2015/63, selon lequel il pondère l’indicateur de risque SPI sur la base de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité ».

460    Enfin, la requérante n’a soumis au Tribunal aucun élément concret qui viserait à contester l’application de ce critère.

461    Quatrièmement, comme le CRU l’a, en substance, expliqué, sans que la requérante l’ait contesté, si deux établissements appartenant à un SPI fusionnent, cette circonstance entraîne une réduction du nombre d’établissements qui doivent être assignés aux bins établis pour pondérer l’indicateur de risque SPI et cet élément sera automatiquement pris en compte dans le calcul final de ce dernier indicateur de risque, à condition que cette fusion ait eu lieu avant la fin de l’année de référence mentionnée à l’article 14 du règlement délégué 2015/63.

462    Partant, la quatrième branche du cinquième moyen doit être rejetée.

e)      Conclusion sur le cinquième moyen

463    Eu égard à ce qui précède, le cinquième moyen doit être rejeté.

5.      Sur le septième moyen, tiré de la violation des articles 16 et 52 de la Charte, en raison du caractère inapproprié du multiplicateur d’ajustement 

464    La requérante soutient que les multiplicateurs d’ajustement qui lui ont été appliqués – à savoir le multiplicateur qui lui a été appliqué pour le calcul de sa contribution ex ante sur la base de l’union et celui qui lui a été appliqué pour le calcul de cette contribution sur la base nationale – ne sont pas conformes à son profil de risque, de sorte que la décision attaquée viole l’article 16 de la Charte ainsi que le principe de proportionnalité, consacré à l’article 52, paragraphe 1, de celle-ci.

465    La requérante fait valoir, en particulier, qu’elle dispose d’une bonne capitalisation et d’un profil de risque positif. Ainsi, la probabilité de sa résolution serait faible. Cela apparaîtrait, notamment, à la lecture des résultats de sa propre analyse ainsi que des statistiques de la BCE sur la base des informations disponibles en 2015.

466    De plus, en ce qui concerne l’indicateur de risque SPI, le CRU n’aurait donné aucune raison objective à la requérante pour justifier l’assignation de cette dernière au bin [confidentiel], malgré la protection totale conférée par le SPI auquel elle appartient. Cela entraînerait une contribution ex ante [confidentiel], de sorte que la décision attaquée violerait l’article 16 de la Charte, le principe de proportionnalité et l’article 20 de la Charte.

467    Le CRU  conteste cette argumentation.

468    À titre liminaire, il y a lieu de constater que la requérante se borne à invoquer des violations des principes consacrés aux articles 16 et 20 de la Charte et du principe de proportionnalité, sans développer une quelconque argumentation ciblée concernant ces principes.

469    Au regard de la jurisprudence citée au point 154 ci-dessus, l’argumentation de la requérante doit ainsi être rejetée dans la mesure où elle vise la violation desdits principes.

470    Par ailleurs, et en tout état de cause, si cette argumentation doit être comprise en ce sens que la requérante soutient, en réalité, que le CRU a commis une erreur manifeste d’appréciation quand il a calculé ses multiplicateurs d’ajustement, il convient de relever ce qui suit.

471    En premier lieu, en ce qui concerne le grief tiré de ce que le CRU aurait assigné la requérante à un bin incorrect pour l’indicateur de risque SPI, il y a lieu de le rejeter pour les mêmes raisons que celles exposées aux points 458 à 460 ci-dessus.

472    En second lieu, la requérante ne saurait s’appuyer sur sa propre analyse des indicateurs de risque pour contester le calcul de ses multiplicateurs d’ajustement. D’une part, il ressort des considérants 108 à 114 de la décision attaquée que le CRU a tenu compte de quatorze indicateurs de risque pour le calcul des contributions ex ante. Or, l’analyse de la requérante ne porte que sur l’un de ces quatorze indicateurs, à savoir le ratio de fonds propres de base de catégorie 1. D’autre part, dans cette analyse, la requérante se compare avec six autres établissements allemands. En revanche, ainsi qu’il découle de l’annexe II de la décision attaquée, le CRU a tenu compte des données de 1 643 établissements pour calculer sa contribution ex ante sur la base de l’union et des données de 723 établissements pour calculer cette contribution sur la base nationale.

473    De même, la requérante ne peut se fonder sur les statistiques de la BCE pour contester le calcul de ses multiplicateurs d’ajustement. D’une part, ces statistiques ne portent que sur deux des quatorze indicateurs de risque qui ont été pris en compte par le CRU pour le calcul des contributions ex ante, à savoir le « ratio de fonds propres de base de catégorie 1 » et le ratio de levier. D’autre part, lesdites statistiques concernent uniquement 128 établissements, c’est-à-dire une fraction des établissements dont les données ont été prises en compte par le CRU pour ce calcul.

474    Eu égard à ce qui précède, le septième moyen doit être rejeté.

6.      Sur le huitième moyen, tiré de la violation des articles 16, 20, 41 et 52 de la Charte en raison d’erreurs manifestes d’appréciation

475    La requérante fait valoir que le CRU a méconnu son pouvoir d’appréciation et a, dès lors, violé les articles 16, 20 et 41 de la Charte ainsi que le principe de proportionnalité consacré à l’article 52 de celle-ci, en raison des multiples erreurs manifestes d’appréciation qu’il a commises lors du calcul de sa contribution ex ante.

476    En premier lieu, en adoptant la décision attaquée, le CRU n’aurait pas reconnu ni exercé le pouvoir d’appréciation qui lui est conféré par la réglementation applicable.

477    En deuxième lieu, le CRU n’aurait pas dûment déterminé :

–        le niveau cible annuel ;

–        l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité » ;

–        l’indicateur de risque SPI ;

–        le rééchelonnement des pondérations des indicateurs de risque au sein d’un pilier de risque en cas de non-application de certains indicateurs de risque.

478    En troisième lieu, les indicateurs de risque ainsi que les pondérations en application du règlement délégué 2015/63 autoriseraient une formation de bins et un regroupement dans les bins qui conduisent à une charge pour la requérante qui est manifestement injustifiée au fond, disproportionnée et discriminatoire. Ainsi qu’il a été exposé dans le cadre du sixième moyen, l’annexe I de ce règlement délégué conduirait à une situation où la fourchette de valeurs maximums et minimums est disproportionnellement large pour les premier et dernier bins, où plusieurs bins sont vides et où d’autres bins ont un nombre manifestement trop élevé d’établissements. À cet égard, le CRU aurait méconnu son pouvoir d’appréciation et aurait omis de procéder aux adaptations des contributions ex ante imposées par les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité.

479    Le CRU  conteste cette argumentation.

480    Tout d’abord, il y a lieu de constater que la requérante se borne à invoquer des violations des principes consacrés aux articles 16, 20 et 41 de la Charte ainsi que du principe de proportionnalité consacré à l’article 52 de celle-ci, sans développer d’argumentation autonome et ciblée concernant ces principes.

481    Au regard de la jurisprudence citée au point 154 ci-dessus, l’argumentation de la requérante doit ainsi être rejetée dans la mesure où elle vise la violation desdits principes.

482    Par ailleurs, bien que la requérante fasse grief au CRU de ne pas avoir reconnu ni exercé le pouvoir d’appréciation qui lui est conféré par la réglementation applicable, elle ne précise ni les règles qui lui reconnaîtraient un tel pouvoir d’appréciation ni le stade du processus de détermination des contributions ex ante auquel ce pouvoir d’appréciation se rapporterait.

483    En outre, dans la mesure où la requérante soutient que le CRU a commis des erreurs manifestes d’appréciation lors de la constitution des bins et de l’assignation des établissements à ces bins, ce grief n’est pas appuyé par des arguments spécifiques. En particulier, la requérante ne précise pas comment le pouvoir d’appréciation octroyé au CRU est lié aux facteurs indiqués au point 477 ci-dessus ni de quelle manière précise le CRU aurait dû tenir compte de ces facteurs.

484    De même, bien que la requérante reproche au CRU d’avoir omis de procéder aux « adaptations individuelles nécessaires » des résultats de l’application de la formule mathématique figurant à l’annexe I, sous le titre « Étape 2 », point 2, du règlement délégué 2015/63 répondant au principe d’égalité de traitement et de proportionnalité, elle ne précise pas la nature de telles adaptations.

485    Enfin, la requérante a présenté une argumentation ambiguë concernant la méthode de binning. D’une part, en renvoyant à ses arguments présentés dans le cadre du sixième moyen, elle reproche au CRU de ne pas avoir reconnu que l’application de l’étape 2 conduisait à une fourchette de valeurs disproportionnellement large pour les premier et dernier bins, que divers bins étaient vides et que les premiers bins comportaient un nombre manifestement trop élevé d’établissements. Par son grief, la requérante laisse ainsi sous-entendre qu’elle considère que la méthode de binning n’est pas conforme aux règles de droit supérieur, sans pourtant invoquer d’exception d’illégalité dans le cadre du présent moyen. Or, une telle exception doit être invoquée de manière claire, pour permettre à l’auteur de l’acte de défendre la légalité de celui-ci (voir, en ce sens, ordonnance du 20 janvier 2009, Sack/Commission, C‑38/08 P, EU:C:2009:21, points 21 et 22). D’autre part, la requérante reproche au CRU d’avoir, pour les mêmes motifs, violé les prescriptions de l’annexe I du règlement délégué 2015/63. Dans ces circonstances, il est impossible pour le Tribunal d’identifier précisément la portée des arguments de la requérante à cet égard et d’en juger le bien-fondé.

486    Eu égard à ce qui précède, le huitième moyen doit ainsi être rejeté.

7.      Sur le dixième moyen, tiré de la violation de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 et d’une incompatibilité des articles 69 et 70 du règlement no 806/2014 avec les normes de rang supérieur

487    Il est constant que la requérante a invoqué le dixième moyen pour la première fois dans la réplique. Malgré cela, elle considère que ce moyen est recevable en ce qu’il est fondé sur des éléments de fait et de droit qui seraient apparus au cours de la procédure juridictionnelle. En effet, l’élément nécessaire pour comprendre si le niveau cible annuel dépasse le plafond de 12,5 % du niveau cible final, qui est prévu par l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014, aurait été porté à sa connaissance par le biais de la décision SRB/ES/2022/18 du CRU, du 11 avril 2022, sur le calcul des contributions ex ante pour 2022 au FRU.

488    Le CRU conclut, d’une part, à l’irrecevabilité du présent moyen pour cause de tardiveté et, d’autre part, à son rejet sur le fond.

489    Conformément à l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite, à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure ou qu’ils ne constituent l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et qui présente un lien étroit avec celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 5 octobre 2020, HeidelbergCement et Schwenk Zement/Commission, T‑380/17, EU:T:2020:471, point 87 et jurisprudence citée).

490    En l’espèce, d’une part, la requérante n’a soulevé le présent moyen que dans son mémoire en réplique. En outre, l’argumentation présentée à l’appui de ce moyen ne constitue pas une ampliation des motifs déjà invoqués dans la requête, ce que la requérante ne soutient d’ailleurs pas.

491    D’autre part, la requérante ne peut soutenir qu’elle n’a pu présumer que le plafond de 12,5 % n’avait pas été respecté pour la période de contribution 2017 qu’une fois qu’elle a pris connaissance de la décision SRB/ES/2022/18, par laquelle le montant du niveau cible final a été révélé pour la première fois.

492    Il suffit de relever à cet égard que, sur son site Internet, le CRU publie, à chaque période de contribution, des données générales sur les divers éléments du calcul des contributions ex ante ainsi que les différents documents relatifs à la procédure de calcul de ces contributions. Dans ce contexte, le CRU a précisé lors de l’audience, sans être contredit sur ce point, qu’il avait publié sur ce site, avant l’introduction du présent recours, une fiche descriptive dénommée « Fact Sheet 2021 » qui indiquait que le montant du niveau cible final à atteindre à la fin de la période initiale avait été estimé, pendant la période de contribution 2021, à une somme se situant entre 70 et 75 milliards d’euros.

493    Or, la requérante, en tant qu’opérateur avisé assujetti au versement des contributions ex ante depuis 2016, était censée connaître, au moment de l’introduction du recours, la publication de la fiche descriptive mentionnée au point 492 sur le site Internet du CRU ainsi que la fourchette du niveau cible final estimé qui y était mentionnée. Elle pouvait ainsi s’appuyer sur cette fiche, avant même qu’elle ne prenne connaissance de la décision SRB/ES/2022/18, au soutien de son moyen tiré de la prétendue méconnaissance du plafond de 12,5 % prévu à l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 par la décision attaquée.

494    Ainsi, tout comme dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 22 janvier 2015, Teva Pharma et Teva Pharmaceuticals Europe/EMA (T‑140/12, EU:T:2015:41, points 38 à 48), et du 21 mai 2015, Rubinum/Commission (T‑201/13, non publié, EU:T:2015:311, points 23 à 26), la requérante était en mesure, au moment de l’introduction du recours, à savoir le 15 mars 2022, de connaître les éléments de fait sur lesquels se fonde l’argumentation soulevée dans le cadre du présent moyen.

495    Il en résulte que le dixième moyen doit être rejeté comme étant irrecevable.

496    Par ailleurs, à supposer que le dixième moyen soit recevable, le Tribunal ne serait pas en mesure d’en apprécier le bien-fondé. En effet, ainsi qu’il ressort des points 258 à 287 ci-dessus, la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation concernant la détermination du niveau cible annuel pour la période de contribution 2017 et doit être annulée pour ce motif. Or, un tel défaut de motivation empêche le Tribunal d’examiner le bien-fondé du dixième moyen.

C.      Conclusion

497    Il résulte de tout ce qui précède que la troisième branche du deuxième moyen est fondée, tandis que les autres branches de ce moyen, ainsi que tous les autres moyens invoqués, doivent être rejetés. La troisième branche du deuxième moyen étant, à elle seule, de nature à fonder l’annulation de la décision attaquée, il y a lieu d’annuler cette dernière.

V.      Sur la limitation dans le temps des effets de l’arrêt

498    Le CRU demande au Tribunal de maintenir, en cas d’annulation de la décision attaquée, les effets de celle-ci jusqu’à son remplacement ou, à tout le moins, pendant une période de six mois à compter de la date à laquelle l’arrêt est devenu définitif.

499    La requérante a indiqué à l’audience, en substance, qu’elle ne s’opposait pas à cette demande dans la mesure où la décision attaquée serait annulée sur la base de la violation d’une forme substantielle.

500    Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 264, second alinéa, TFUE, le juge de l’Union peut, s’il l’estime nécessaire, indiquer ceux des effets d’un acte annulé qui doivent être considérés comme étant définitifs.

501    À cet égard, il ressort de la jurisprudence que, eu égard à des motifs ayant trait à la sécurité juridique, les effets d’un tel acte peuvent être maintenus, notamment lorsque les effets immédiats de son annulation entraîneraient des conséquences négatives graves et que la légalité de l’acte attaqué est contestée non pas en raison de sa finalité ou de son contenu, mais pour des motifs de violation des formes substantielles (voir arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 175 et jurisprudence citée).

502    En l’espèce, la décision attaquée a été prise en violation des formes substantielles. En revanche, le Tribunal n’a pas constaté, dans la présente procédure, d’erreur affectant la légalité au fond de cette décision.

503    En outre, à l’instar de ce que la Cour a jugé dans l’arrêt du 15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU (C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 177), il convient de constater que prononcer l’annulation de la décision attaquée sans prévoir le maintien de ses effets jusqu’à ce qu’elle soit remplacée par un nouvel acte serait de nature à porter atteinte à la mise en œuvre de la directive 2014/59, du règlement no 806/2014 et du règlement délégué 2015/63, qui constituent une partie essentielle de l’union bancaire, laquelle contribue à la stabilité de la zone euro.

504    Dans ces circonstances, il y a lieu de maintenir les effets de la décision attaquée jusqu’à l’entrée en vigueur, dans un délai raisonnable qui ne saurait dépasser six mois à compter de la date du prononcé du présent arrêt, d’une nouvelle décision du CRU fixant la contribution ex ante au FRU de la requérante pour la période de contribution 2017.

VI.    Sur les dépens

505    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le CRU ayant succombé, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      La décision SRB/ES/2021/82 du Conseil de résolution unique (CRU), du 15 décembre 2021, sur le calcul des contributions ex ante pour 2017 au Fonds de résolution unique concernant Landesbank Baden-Württemberg est annulée.

2)      Les effets de la décision SRB/ES/2021/82 sont maintenus jusqu’à l’entrée en vigueur, dans un délai raisonnable qui ne saurait dépasser six mois à compter de la date du prononcé du présent arrêt, d’une nouvelle décision du CRU fixant la contribution ex ante au Fonds de résolution unique de Landesbank Baden-Württemberg pour la période de contribution 2017.

3)      Le CRU supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par Landesbank BadenWürttemberg.

Kornezov

De Baere

Petrlík

Kecsmár

 

      Kingston

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 juillet 2024.

Signatures


Table des matières


I. Antécédents du litige

II. Décision attaquée

III. Conclusions des parties

IV. En droit

A. Sur les exceptions d’illégalité des articles 6, 7, 9 et 20 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63

1. Sur le quatrième moyen, tiré d’une exception d’illégalité de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63, en ce qu’il violerait plusieurs normes supérieures

a) Sur la première branche, portant sur l’incompatibilité de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 avec l’article 103, paragraphe 7, sous h), de la directive 2014/59 et l’article 113, paragraphe 7, du règlement no 575/2013

b) Sur la deuxième branche, portant sur l’incompatibilité de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 avec « le principe du calcul des contributions adapté au risque » et le principe d’égalité de traitement

1) Sur le premier grief, tiré d’une violation du « principe du calcul des contributions adapté au risque »

2) Sur le second grief, portant sur une méconnaissance du principe d’égalité de traitement

c) Sur la troisième branche, portant sur l’incompatibilité de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 avec le principe de sécurité juridique

d) Sur la quatrième branche, portant sur l’incompatibilité de l’article 7, paragraphe 4, second alinéa, du règlement délégué 2015/63 avec le principe de prise en compte intégrale des faits

e) Conclusion sur le quatrième moyen

2. Sur le sixième moyen, tiré d’une exception d’illégalité des articles 6, 7 et 9 ainsi que de l’annexe I du règlement délégué 2015/63, en ce qu’ils violeraient plusieurs normes supérieures

3. Sur le neuvième moyen, tiré d’une exception d’illégalité de l’article 20, paragraphe 1, première et deuxième phrases, du règlement délégué 2015/63, en ce qu’il violerait l’article 103, paragraphe 7, de la directive 2014/59 et le « principe du calcul des contributions adapté au risque »

B. Sur les moyens portant sur la légalité de la décision attaquée

1. Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 81, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, lu conjointement avec l’article 3 du règlement no 1, et du principe général d’égalité de traitement

a) Sur la première branche, portant sur la violation de l’article 81, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, lu conjointement avec l’article 3 du règlement no 1/58

b) Sur la deuxième branche, portant sur la violation du principe d’égalité

c) Conclusion sur le premier moyen

2. Sur le deuxième moyen, tiré de défauts de motivation

a) Observations préliminaires

b) Sur la première branche, portant sur la langue de la version de la décision attaquée faisant foi

c) Sur la deuxième branche, portant sur la complexité de la motivation du calcul de la contribution ex ante

d) Sur la septième branche, portant sur la rétention des données des autres établissements

e) Sur la troisième branche, portant sur la motivation du niveau cible annuel

f) Sur la quatrième branche, portant sur la motivation insuffisante de la contribution annuelle de base

g) Sur la cinquième branche, portant sur la motivation insuffisante de l’ajustement de la contribution annuelle de base au risque

1) Sur le premier grief, portant sur l’impossibilité de vérifier l’assujettissement de l’ensemble des établissements concernés à une contribution ajustée en fonction du profil de risque

2) Sur le deuxième grief, portant sur la prise en compte de l’indicateur de risque « activités de négociation et expositions hors bilan, instruments dérivés, complexité et résolvabilité »

3) Sur le troisième grief, portant sur la motivation des étapes 2 à 6 de l’adaptation de la contribution annuelle de base au profil de risque de la requérante

i) Étape 2

ii) Étape 3

iii) Étape 4

iv) Étape 5

v) Étape 6

h) Sur la sixième branche, portant sur l’existence des décisions intermédiaires non publiées

i) Conclusion sur le deuxième moyen

3. Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du droit à une protection juridictionnelle effective en raison du caractère invérifiable de la décision attaquée

4. Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation de plusieurs dispositions du droit primaire et du droit dérivé du fait de l’application d’un multiplicateur pour l’indicateur de risque SPI à la requérante

a) Sur la première branche, tirée d’une violation de l’article 113, paragraphe 7, du règlement no 575/2013 et de l’article 103, paragraphe 7, sous h), de la directive 2014/59

b) Sur la deuxième branche, portant sur la violation de l’article 16 de la Charte et du principe de proportionnalité

c) Sur la troisième branche, portant sur la violation de l’article 20 de la Charte et du principe d’égalité de traitement

d) Sur la quatrième branche, portant sur la violation du principe de bonne administration

1) Sur le premier grief, en ce que le CRU n’aurait pas dûment motivé la décision attaquée

2) Sur le second grief, en ce que le CRU aurait violé son obligation d’instruction

e) Conclusion sur le cinquième moyen

5. Sur le septième moyen, tiré de la violation des articles 16 et 52 de la Charte, en raison du caractère inapproprié du multiplicateur d’ajustement

6. Sur le huitième moyen, tiré de la violation des articles 16, 20, 41 et 52 de la Charte en raison d’erreurs manifestes d’appréciation

7. Sur le dixième moyen, tiré de la violation de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014 et d’une incompatibilité des articles 69 et 70 du règlement no 806/2014 avec les normes de rang supérieur

C. Conclusion

V. Sur la limitation dans le temps des effets de l’arrêt

VI. Sur les dépens


*      Langue de procédure : l’allemand.


1      Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.


2 Données confidentielles occultées.

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